29 Georges X., Centre multiethnique de Québec

Gabrielle De Rico

Georges, originaire de Québec, a grandi dans une famille traditionnelle québécoise et a vécu une enfance des plus normales, sans difficulté particulière. Dès son plus jeune âge, Georges ne démontrait pas beaucoup de timidité et aimait parler avec tout le monde. Au primaire, il avait beaucoup d’amis; quand un nouvel élève arrivait en classe au milieu de l’année scolaire, il était le premier à l’approcher. Pour tous ses proches, Georges était une personne très ouverte.

Le déclic

Une expérience a marqué Georges et lui a donné l’envie de travailler avec des personnes immigrantes et réfugiées :  l’arrivée d’un nouvel élève dans sa classe de secondaire 4. L’élève en question arrivait d’Algérie avec ses parents. Georges a tenté de lui souhaiter la bienvenue, mais son comportement envers le nouveau n’était pas approuvé par ses camarades qui ne désiraient pas faire sa connaissance et qui désiraient même qu’il retourne dans son pays. Georges a été déchiré entre le désir de garder l’approbation de ses amis de longue date, qui intimidaient le nouvel élève, et celui de faire ce qu’il voulait vraiment, c’est-à-dire l’aider à s’intégrer et peut-être même devenir son ami. « C’est là que j’ai commencé à faire de la recherche sur le processus d’immigration au Canada et sur les communautés d’immigrés au Québec. » Il a alors appris à faire la distinction entre un immigrant et un réfugié et il a commencé à s’intéresser à l’actualité internationale et aux conflits entre pays et groupes de réfugiés.

En grandissant et en apprenant à mieux se connaître lui-même, Georges a déterminé les valeurs importantes pour lui : l’acceptation et la générosité. Il savait que dans le cadre de son travail, il voulait aider directement les gens et faire une différence dans leur vie, notamment les nouveaux arrivants au Québec. En finissant le secondaire, Georges n’avait pas encore fait son choix de carrière, mais il allait découvrir qu’il n’y a pas de meilleur moyen de pratiquer l’acceptation qu’en travaillant avec des personnes immigrantes et réfugiées qui arrivent de partout dans le monde.

Il s’est aussi découvert une passion pour le voyage. Il aimait rencontrer des personnes venant de pays étrangers à Québec, mais trouvait aussi très intéressant d’aller à la rencontre des personnes dans leur pays d’origine et de s’imprégner de leur culture le plus possible. À ses 18 ans, Georges a pris l’avion pour la première fois pour se rendre en Bolivie et en Argentine avec un groupe d’amis. Il a ensuite voyagé en Inde et en Thaïlande. « J’ai adoré l’expérience ! »

Relations entre humains

Georges a décidé de s’inscrire à l’Université Laval pour y faire un baccalauréat en sociologie afin d’en apprendre plus sur les relations entre humains et les formes de culture et d’ethnicité. Un été, il a fait un voyage humanitaire au Burkina Faso pour travailler à la construction d’écoles et au développement du système d’éducation. En discutant avec les Burkinabés là-bas, il a découvert que plusieurs d’entre eux souhaitaient pouvoir déménager au Canada un jour, parce qu’ils avaient l’impression que les Canadiens étaient très accueillants. Georges était un peu étonné, car son expérience avec l’élève de l’Algérie lui avait plutôt indiqué le contraire.

Dans le cadre de ses études, Georges dut effectuer un stage dans une école secondaire accueillant beaucoup d’élèves immigrants ou réfugiés chaque année. Il a travaillé pendant trois mois auprès d’eux et a écouté l’histoire de ces jeunes afin de mieux comprendre ce que ressent une personne qui vit l’exil et qui doit quitter son pays, sa maison. Il a aussi beaucoup parlé avec les jeunes Québécois et Québécoises pour connaître leur opinion sur leurs camarades venant d’autres pays. Il voulait comprendre à la fois la perception des personnes réfugiées et celle des Québécois, dans l’espoir de les amener à accepter les nouveaux arrivés et à accepter la différence.

Intervenant auprès des réfugiés

Georges travaille au Centre multiethnique de Québec en tant qu’intervenant depuis quatre ans. Après son voyage humanitaire et son stage auprès de jeunes immigrant-e-s et réfugié-e-s, un organisme dédié à ces personnes lui a semblé l’endroit idéal pour travailler. Depuis les deux dernières années, Georges s’intéresse particulièrement à la cause des réfugié-e-s. Il a eu la chance de travailler avec plusieurs d’entre eux, la majorité venant surtout de pays du monde arabe, en guerre depuis plusieurs années. En ayant le privilège d’entendre l’histoire de nombreux réfugiés, il a été très touché et parfois traumatisé.

On ne peut pas s’imaginer ce qu’un réfugié peut vivre ni ce qu’est l’exil si on ne vit pas cette expérience nous-mêmes.

Georges traite chaque personne réfugiée qu’il rencontre différemment, parce qu’elles n’ont pas toute la même attitude face à leur nouvelle vie : c’est un travail à la fois psychologique, émotif et personnel. Quelques personnes sont soulagées et heureuses d’arriver au Québec et ont hâte d’apprendre le français et de se trouver un travail, mais d’autres vivent un grand deuil et ne veulent presque pas communiquer avec les intervenants. Il faut donc qu’il adapte son approche. Georges trouve que les rencontres en groupe sont importantes pour les réfugié-e-s, cela leur permet de se sentir moins déstabilisés : « Ils ont ainsi l’occasion de partager leur expérience avec des gens qui ont vécu sensiblement la même chose qu’eux. »

Georges adore son travail parce qu’il sait qu’il fait une différence positive auprès des personnes réfugiées ou immigrantes. Aider des réfugié-e-s à se construire une nouvelle vie, à s’intégrer à la société québécoise, à se trouver un logement et éventuellement un travail est très gratifiant. Il constate que l’aide qu’il leur apporte a des répercussions positives et c’est ce qui lui donne envie de continuer.

Accueil des réfugiés à Québec

Selon Georges, la ville de Québec a des points forts et des points faibles en matière d’accueil de personnes réfugiées. Le principal point fort est la diversité des ressources offertes et la qualité des services offerts. « Les réfugiés sont bien encadrés. Les gens qui travaillent dans les différents organismes le font parce que c’est une cause qui leur tient à cœur et ça paraît. » L’implication du gouvernement dans l’accueil des réfugiés est aussi un point fort selon Georges. C’est certain qu’il est impossible de tous les accueillir dans des hôtels cinq étoiles, mais au moins ils ne sont pas laissés à la rue et ont de meilleures conditions de vie que dans leur pays d’origine. Également, Georges croit que les programmes mis en place pour les aider à s’intégrer, la francisation par exemple, sont réellement utiles.

Un point faible est l’attitude des Québécois et Québécoises en général. Georges essaie de ne pas généraliser, car il est conscient que ce ne sont pas tous les gens de Québec qui ne veulent pas accueillir les réfugié-e-s. Mais dans les derniers mois, avec l’arrivée des réfugiés syriens, « beaucoup de Québécois ont protesté et exprimé leur désaccord, et ce, pas toujours de manière respectueuse. » Georges pense que les réseaux sociaux constituent un outil très pratique, mais que parfois des gens s’en servent de la mauvaise façon, comme pour insulter d’autres personnes, dont les réfugié-e-s de Syrie.

Georges est conscient des actes terroristes de groupes extrémistes qui se produisent partout à travers le monde et il comprend que ça peut être inquiétant, puisque les Syriens sont à 90% de confession musulmane. Mais selon lui, il est impensable de laisser mourir des milliers de gens dans leur pays en guerre au risque qu’un de ceux-ci soit un terroriste. Il rappelle que des mesures de sécurité sont prises par le gouvernement, ce qu’il trouve très important. Mais « il y a toutefois moyen d’assurer notre sécurité sans bloquer l’entrée aux réfugiés qui ont besoin d’une nouvelle maison. Ils ont besoin de notre aide. »

Les recommandations de Georges aux Québécois et Québécoises sont de garder l’esprit ouvert, de s’éduquer sur le sujet correctement et de ne pas insulter les personnes réfugiées, immigrantes ou celles qui veulent les aider. Ses recommandations pour les réfugié-e-s sont de ne pas avoir peur de demander de l’aide ni d’utiliser toutes les ressources qui sont offertes.

Grâce aux réfugiés, Québec deviendra une ville plus diversifiée qui aura encore plus à offrir qu’avant. Québec deviendra meilleure.

Désert en Algérie. Source : https://pixabay.com/fr/alg%C3%A9rie-d%C3%A9sert-dromadaire-2284278. Crédit : coccolo

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