13 Khadija X.

Kim Fournier

Khadija X. a immigré au Canada en aout 2001, à l’âge de six ans, accompagnée de ses deux parents. Elle provenait d’une grande famille, puisque ses parents avaient de nombreux frères et sœurs. En effet, bien qu’elle soit enfant unique, elle avait une dizaine d’oncles et de tantes, ainsi que plusieurs cousins et cousines, ce qui l’empêchait de se sentir seule. Il a donc été difficile pour elle et ses parents d’abandonner toute leur famille ainsi que leurs repères.

Le choix de partir

Les parents de Khadija étaient déterminés à lui offrir une bonne éducation. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils ont fait le choix d’immigrer au Québec. Ils avaient fait des recherches au sujet de l’éducation fournie au Canada et, pour eux, le meilleur choix pour assurer un avenir prometteur à leur fille était de quitter leur pays afin de venir s’établir ici. Les conditions d’études étaient très difficiles au Maroc. Les gens devaient se battre et faire d’énormes sacrifices pour donner une éducation acceptable à leurs enfants, contrairement au Canada où les conditions étaient idéales. Le taux de chômage était, de surcroît, très élevé au Maroc et, malgré leurs efforts, plusieurs diplômés n’arrivaient pas à se trouver un emploi. L’incertitude qui entourait l’avenir de leur enfant inquiétait les parents de Khadija et il était clair pour eux qu’elle devait étudier au Québec. Un oncle de Khadija était établi au Québec depuis quelques années et appréciait la région, ce qui confortait ses parents dans leur choix.

L’arrivée au Québec

Après plusieurs heures de vol, ils arrivèrent à Montréal, avant de déménager à Sherbrooke et de s’établir définitivement à Québec quelques années plus tard. Malgré le peu de souvenirs que Khadija conserve de son arrivée au Canada, ce qui l’a le plus marquée est la barrière linguistique. Effectivement, puisque le français et le marocain étaient deux langues couramment utilisées au Maroc, il n’a pas été difficile pour la famille d’utiliser le français. Par contre, le principal défi a été de comprendre l’accent québécois. Avec le temps, ils se sont habitués au français québécois et Khadija s’exprime avec l’accent québécois.

Étant très jeune et naïve, Khadija n’a pas vécu un très grand choc culturel en arrivant ici. Par contre, pour ses parents, se trouver un emploi a été un défi à leur arrivée. Au Maroc, ses parents avaient fait de nombreuses études et avaient un très haut niveau d’éducation. Sa mère avait un poste en gestion dans le domaine de l’informatique pour une compagnie prestigieuse et son père, quant à lui, était cuisinier. Par contre, bien qu’à son arrivée sa mère ait réussi à trouver un emploi convenable dans le domaine de l’informatique, cela n’a pas été le cas pour son père. En effet, sa mère a eu un coup de main grâce au programme offert par le gouvernement qui favorisait l’embauche des femmes et des gens ayant une autre nationalité, mais ce n’était pas le cas pour plusieurs entreprises. Bien que son père ait un curriculum vitae et un niveau d’éducation remarquable, les entreprises auxquelles il envoyait sa candidature refusaient d’embaucher des étrangers. Son nom trahissait ses origines étrangères. Aujourd’hui, l’ouverture à la diversité en milieu de travail permet aux immigrants de trouver un travail digne de leur niveau d’éducation.

Le 11 septembre 2001

La journée du 11 septembre 2001 bouleversa la vie des immigrants d’origine arabe. Effectivement, avant l’attentat terroriste commis aux États-Unis ce jour-là, la petite famille se sentait accueillie et acceptée par les citoyens québécois. Après le drame, la famille a rapidement remarqué que des préjugés envers les Arabes commençaient à se développer chez les Québécois.

De nombreuses personnes moins informées sur la diversité culturelle associaient d’emblée les arabes et les musulmans au terrorisme. Pourtant, « le terrorisme n’a aucun lien avec la religion ». Au contraire, Khadija considère sa religion comme l’une des plus ouvertes. En effet, la religion musulmane lui a toujours permis de vivre en harmonie avec toutes les communautés.

Khadija tient à dire aux Québécois qu’ils n’ont pas à craindre les immigrants d’origine arabe. Au contraire, leur culture leur a appris à être ouverts aux autres et il faut avoir le courage de les approcher et de les questionner. Les Québécois ont tendance à former des « cliques » et à ne pas aller vers les gens différents. Pourtant, les immigrants arabes ont plusieurs choses à offrir à leur nouveau pays et ne veulent que s’intégrer à la société québécoise.

Ne fais pas à l’autre ce que tu ne veux pas que les autres te fassent. Ne vole pas une entreprise si tu ne veux pas que quelqu’un vole ton entreprise. Ne sois pas raciste envers quelqu’un si tu ne veux pas être victime de racisme.

S’adapter à son pays

Khadija se sent comme une Québécoise, puisqu’elle a pratiquement passé toute son enfance à Québec. Pourtant, plusieurs éléments de la culture marocaine font partie de ses racines et continuent de faire partie intégrante de sa vie. C’est le cas de la religion musulmane que sa famille et elle ont fait le choix de pratiquer en privé. La pratique de leur religion ne les empêche pas de respecter les valeurs et la culture d’ici. Effectivement, le respect est une valeur importante pour eux et c’est pour cette raison qu’ils ont toujours été ouverts aux gens pratiquant une religion différente de la leur.

Grâce aux efforts qu’elle a fait pour s’intégrer à la société québécoise, elle se sent acceptée des autres. Les gens ont accepté le fait qu’elle ne boive pas d’alcool et qu’elle ne mange pas de porc. Aussi, elle a fait le choix de ne pas aller à son bal des finissants du secondaire puisqu’il y avait une grande quantité d’alcool et elle ne s’est pas sentie mal jugée par les autres. Malgré tout, s’adapter restera toujours un défi. En effet, bien qu’elle ait plusieurs amis québécois, elle a tendance à fréquenter des gens provenant d’ailleurs, car ils semblent plus ouverts à la différence.

Bref, afin que les immigrants se sentent mieux accueillis dans la société québécoise, je crois qu’il serait important que les citoyens s’ouvrent aux autres et qu’ils cessent de s’isoler en formant des « cliques ».

Khadija est une amie que j’ai eu la chance de côtoyer au secondaire. Elle est inspirante et remplie d’ambitions. C’est aussi une personne extrêmement généreuse qui a sauté à pieds joints dans le projet afin de faire taire les tabous reliés aux immigrants arabes. Nous sommes tous humains et la diversité est ce qui fait la beauté de notre société. Acceptons la différence pour avancer.

Maroc. Source : https://pixabay.com/fr/chameau-kamelliebe-amour-tourisme-2465551. Crédit : Digitalwunder

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