21 Aniqa X.
Marie-Ève Caron
Aniqa X. est une jeune femme de 20 ans originaire de Tanger, au Maroc. Elle a immigré au Québec avec ses parents et ses sœurs en 2009.
Le départ du Maroc
Ses parents désiraient quitter le Maroc dans l’espoir d’offrir une meilleure scolarité et une meilleure vie en général à leurs enfants. « Au Maroc, il est très difficile de trouver un bon emploi, même lorsqu’on a fait des études », explique-t-elle. Ils n’abordèrent pas cette question avec leurs enfants au tout début, puisqu’ils n’étaient pas encore certains de pouvoir immigrer. Après l’obtention des visas, ils discutèrent avec Aniqa et ses sœurs, et leur réaction fut positive. Même si les jeunes filles étaient tristes et quelque peu apeurées de quitter leur famille, leurs amis et leur pays natal, elles étaient enthousiastes à l’idée de découvrir un nouveau monde.
Ses parents ont choisi le Canada, car ce pays leur semblait plus tranquille et sécuritaire que le Maroc. Le Québec était une destination de choix car on y parle le français. « Au Maroc, même si la langue couramment parlée est l’arabe, nous avons des cours de français et d’anglais à l’école », précise-t-elle. Ses parents croyaient que l’intégration serait facilitée sans cette barrière linguistique.
La vie au Québec
À leur arrivée au Canada, ils furent accueillis par une amie de sa mère, qui avait immigré au pays quelque temps auparavant. Elle prit la famille sous son aile et l’hébergea dans son appartement, pour faciliter leur recherche d’appartement, d’emplois et d’écoles pour les enfants. « Cette femme a été incroyablement généreuse d’héberger une famille de cinq personnes pendant quelques mois, surtout qu’elle avait elle-même une grande famille », se rappelle-t-elle.
Pour Aniqa, la plus grande difficulté qu’elle dut affronter pendant les premiers mois de sa vie à Québec fut la langue. Malgré ses cours de français au Maroc, elle trouvait que les expressions québécoises et l’accent du Québec rendaient la langue très difficile à comprendre pour les immigrants. La jeune femme trouva également très ardue l’intégration parmi les autres enfants. « Je n’ai pas eu d’amis au primaire ici. J’ai dû attendre au secondaire pour entretenir des affinités avec certaines personnes », précise-t-elle. Elle croit que les Québécois ont des préjugés envers les Arabes et qu’ils sont donc moins enclins à aller les aborder.
Aujourd’hui, Aniqa et sa famille gardent contact avec leurs proches au Maroc et vont même les visiter sur une base régulière. La jeune femme est aux études au cégep et sa mère a pu continuer de travailler en comptabilité après l’immigration. Son père, par contre, a dû renoncer à sa carrière de médecin pour devenir chauffeur de taxi. Elle s’identifie comme étant une Arabe marocaine, mais elle s’est bien intégrée au Québec et à sa culture. Elle ne s’attend pas à ce que les Québécois qu’elle fréquente se conforment à sa culture, elle s’est plutôt adaptée à la leur sans toutefois délaisser la sienne.
Les Québécois et le Maroc
Aniqa trouve que les gens au Québec sont moins agressifs qu’au Maroc. « Dans mon pays, être témoin d’actes de violence arrive fréquemment, comme voir un garçon sortir un couteau à la suite d’une bagarre dans une cour d’école », mentionne-t-elle. Elle trouve toutefois que les gens au Québec sont plus hypocrites que dans son pays. Elle a été choquée de constater que les gens ne se saluent pas dans la rue, qu’ils ne se font parfois même pas un sourire et qu’il y a moins d’entraide en général entre voisins et amis, par exemple.
Elle croit toutefois que son immigration lui apporte une plus grande ouverture, en même temps qu’elle renforce sa culture générale. Elle est plus portée à découvrir le monde, elle est plus attentive aux cultures étrangères à la sienne et, surtout, elle réfléchit plus longuement avant de porter un jugement sur quelqu’un ou sur une situation.
Selon la jeune femme, les Québécois entretiennent beaucoup de préjugés envers le Maroc.
Les préjugés sont surtout orientés contre les femmes. Elles sont encore perçues comme étant voilées et soumises à leur mari, alors que ce n’est plus le cas.
En réalité, les femmes peuvent s’habiller comme elles le désirent, comme au Québec. Certaines limites éthiques doivent tout de même être respectées dans l’habillement, mais le voile n’est aucunement obligatoire. Aniqa croit fortement que la situation au Maroc a évolué, mais que les Québécois ne sont pas informés sur ce qui s’y passe présentement, alors leurs préjugés n’ont pas évolué.
Des messages à transmettre
Elle aimerait dire aux nouveaux immigrants qu’il n’est pas nécessaire de forcer les choses quand on voit que rien ne fonctionne. Il est parfois mieux de les laisser aller, puisque les problèmes s’arrangent souvent par eux-mêmes. Elle aimerait également que ces personnes sachent que connaître une personne, de près ou de loin, dans son pays d’accueil peut représenter un avantage considérable pour une intégration réussie.
Elle aimerait également dire aux Québécois qu’il vaut mieux s’informer avant de parler, pour ne pas propager de fausses idées à propos du monde arabe.