Guinée
35 Labico Diallo
Sophie Michaud-Bélanger
Labico Diallo est né en Guinée. Médecin, il partit au Québec en 2002 afin de poursuivre ses études de doctorat en épidémiologie du VIH/Sida à l’Université Laval. Il s’y est installé par la suite, avec sa femme et ses enfants.
Sa vie en Guinée
Labico Diallo est né dans la ville de Labé, la plus importante ville de la région du Fouta-Djalon en Guinée. Labé est la ville phare de la région naturelle de la Moyenne-Guinée et de l’ethnie peule dont il fait partie. C’est dans son pays natal qu’il rencontra sa femme. Ils eurent quatre garçons; tous naquirent en Guinée.
De 1990 à 1992, Labico Diallo dirigea un centre de santé rural du Ministère de la santé. Puis il alla faire l’internat de santé publique en France où il obtint un Diplôme d’études approfondies en épidémiologie en 1996.
De 1997 à 2000, Dr Diallo travailla comme directeur du Centre régional de formation en santé au Ministère de la santé, en Guinée. Son travail consistait à planifier, mettre en œuvre et évaluer la formation donnée au personnel de cinq hôpitaux et de 35 centres de santé. Il travailla sur plusieurs programmes tels que le programme de protection de la mère et de l’enfant (surveillance de la grossesse et planification familiale), le programme élargi de vaccination (PEV) contre la tuberculose, rougeole, poliomyélite, diphtérie, tétanos et coqueluche, en soins de santé primaires et médicaments essentiels (SSP/ME), en prise en charge des cas de paludisme graves de l’enfant et de la femme enceinte, ainsi qu’en gestion hospitalière, recouvrement des coûts et recherche quantitative en santé.
C’est en 2001 qu’il devint épidémiologiste au sein du programme national de lutte contre le VIH/Sida au Ministère de la santé de Guinée. Il coordonnait la recherche et la surveillance épidémiologique des ITS, du VIH et du Sida.
Après 5 ans de services, il décida de de se perfectionner davantage. Un collègue au Ministère de l’éducation et de l’enseignement supérieur lui parla d’une bourse financée par l’Agence canadienne de développement international (ACDI). C’était pour lui une belle occasion. Il se présenta donc au bureau d’appui de l’Ambassade du Canada pour y déposer son sujet de doctorat et sa demande de bourse. Ayant obtenu une Bourse de la francophonie, il partit pour l’Université Laval à Québec, avec l’appui de sa femme et de ses enfants. C’est quelques années plus tard que ces derniers vinrent rejoindre Labico Diallo dans son pays d’accueil.
Une intégration graduelle au Québec
Arriver dans un pays étranger, c’est difficile pour tout le monde. Ce n’est pas facile. Si un immigrant ou un accueillant dit que c’est facile, ce n’est pas sincère. Chacun fait face à l’inconnu, c’est une frayeur humaine.
En arrivant ici, Labico savait ce qui l’attendait sur le plan climatique et sur le plan de la rigueur requise pour poursuivre ses études supérieures, car il avait déjà vécu en France. Par contre, lors de son arrivée en 2002, beaucoup de neige était tombée, sans aucune comparaison avec les hivers en France : « J’étais au pavillon Alphonse-Marie-Parent en résidence. Je me souviens que je me suis cagoulé pour aller en cours afin de ne pas saigner du nez. » Malgré ces quelques obstacles, il garda le moral.
Au début, il dit ne pas avoir vécu dans la société québécoise, car ses études et son logement étaient directement situés sur le campus, de sorte qu’il se retrouvait surtout entouré de ses compatriotes guinéens. Il n’entretenait donc pas de relations sociales ou amicales avec des Québécois.
Ce n’est pas facile, parce que je suis de nature solitaire, introvertie, en raison de mon éducation. Je ne parle pas beaucoup. Je suis en même temps une personne ouverte et gentille. J’aime les gens, mais je fais rarement les premiers pas.
C’est avec le temps et par le biais de son milieu de travail qu’il s’est progressivement rapproché de la société québécoise. Il a alors noué des amitiés sincères avec des Québécois et des Québécoises. À son grand étonnement, il entendit un jour son directeur de thèse dire : « Pour Labico, je n’ai pas d’inquiétude, il est bien intégré! ». C’est ainsi, grâce aux amitiés développées depuis son arrivée à Québec, qu’il réussit à s’intégrer graduellement dans la société.
Selon lui, le Canada est l’un des meilleurs pays d’accueil au monde.
Il me semble que le Québec souhaite avoir une ouverture extérieure. Ils sont ouverts à l’immigrant, à l’étranger et cela est très important. C’est une des valeurs importantes de la société québécoise.
Après son doctorat, il travailla de 2011 à 2016 au Centre d’Excellence sur le Vieillissement de Québec en tant que professionnel de la santé. Il faisait de la recherche sur les meilleurs programmes qui permettent de maintenir actives et durablement les personnes âgées. Il participait à la mise en œuvre et évaluation des outils d’aide à la prise de décision partagée clinicien-patient.
Je suis maintenant à la recherche de nouveaux défis dans la recherche en santé publique. Je comprends qu’il sera difficile de m’employer à cause de mon expertise et de mon niveau d’étude. Pour la majorité des offres d’emplois, je ne serai même pas appelé en entrevue. Maintenant que les enfants sont assez grands et responsables, je peux envisager la possibilité d’aller vers d’autres provinces pour trouver un emploi, explique-t-il.
Il y a quelques années, Labico Diallo a fondé, avec d’autres, le Conseil panafricain de Québec (COPAQ) qui réunit les associations africaines de la région de Québec. Il en est maintenant vice-président chargé des finances et de la trésorerie. En plus de gérer les comptes, il assure le développement des ressources du COPAQ en planifiant, coordonnant et réalisant des activités de financement.
Quelques pensées sur l’immigration
En tant qu’immigrant ou en tant que Québécois, il faut avoir de la tolérance. Il ne faut pas faire d’amalgame. Dans une société, il y a des brebis galeuses, mais il ne faut pas indexer les Africains. Il faut indexer l’individu qui a commis l’erreur. Il a des gens bien et des gens moins bien dans le monde. L’avenir des étrangers est en gestation dans la population d’accueil.
L’immigration, c’est une valeur ajoutée à une société. Comme je le dis souvent, le Québec est un jardin! Je suis venu donc en tant que jardinier, avec des outils que j’ai améliorés ici. J’entends participer au jardinage. Sans emploi, le salaire va me manquer, c’est sûr! Toutefois mes paroles, mon attitude et mes conseils resteront toujours ceux d’un médecin de santé publique.
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