31 Khalil X.

Stéphanie Fournier

Originaire de Tunisie, Khalil est arrivé au Québec en 2016 comme professeur invité et retournera en Tunisie par la suite.

Deux valeurs primordiales : la famille et le respect

Il ne pratique aucune religion, se décrivant comme athée. « La majorité des gens de mon entourage sont musulmans. Certains sont pratiquants et d’autres non ». Il préfère ne pas juger les autres sur la religion qu’ils pratiquent.

Mon avis? Je trouve que c’est bon, chacun fait ses propres choix. La religion, c’est quelque chose d’individuel.

Il a vécu en France pendant plusieurs années, endroit où il a fait ses études de doctorat et où il a enseigné pendant trois ans. Son séjour en France fut interrompu par des problèmes familiaux. En effet, il explique : « Mes parents sont tombés malades, donc j’étais obligé d’être à leurs côtés. Mon père avait la maladie de Parkinson, ma mère avait l’Alzheimer, et en plus les deux à la fois. J’ai dû tout abandonner et rentrer pour mes parents ».

Voyage de raison

Le choix de venir enseigner l’économie au Québec s’est fait à la suite de l’invitation d’une université du Québec.

Je suis bien établi en Tunisie, je suis professeur titulaire depuis plus de 20 ans. Mais, cette année, ils ont fait appel à moi, m’ont proposé de venir enseigner et j’ai dit : pourquoi pas? Je vais venir ici voir une autre culture et découvrir d’autres gens. C’était ça. Prendre un peu d’air, voilà!

Les procédures furent très laborieuses pour venir au Québec.

C’était très dur, plus que ce à quoi je m’attendais. Il a fallu quatre mois. En plus, il y a eu des délais. L’année dernière, ils m’ont refusé le visa.

Cette longue attente n’a pas entaché la qualité de l’accueil qu’il reçut au Québec et pour lequel il exprime toute sa satisfaction.

C’était très agréable. J’ai été pris en charge par le directeur du département. Je n’ai pas eu de problème particulier, au contraire. C’était au-delà de mes espérances.

Pendant l’année, il a pu rester en contact constant avec ses proches.

C’était un choix. C’est comme si je prenais une année sabbatique. C’est pour me reposer, voir autre chose. Et heureusement, avec les nouvelles technologies, Skype et autres, c’est facile de rester en contact tous les jours. Et puis, comme j’ai passé dix ans en France, j’ai l’habitude d’être éloigné. J’avais envie de revivre une autre expérience.

Ses premiers mois au Québec

Khalil s’est rapidement adapté à la vie québécoise.

Au départ, le système était un peu étrange pour moi parce que je ne le connaissais pas. Mais, je me suis vite adapté. Je trouve que la vie est très paisible ici.

Il n’a pas vécu de choc culturel à son arrivée puisqu’il avait déjà habité en France auparavant. Il trouve que les Québécois sont très plaisants. Jusqu’à maintenant, il ne se rappelle d’aucun problème particulier. En ce qui concerne l’hiver québécois, il n’a vraiment pas subi les affres de ce temps.

J’étais bien préparé, j’ai regardé beaucoup de vidéos. Mais, je trouve que ce n’était pas aussi terrible qu’on le prétendait. Ça dure un peu longtemps, c’est vrai, vers la fin on en a marre.

Le Québec passionne Khalil

Khalil me parla beaucoup du calme des Québécois, du fait qu’ils sont très pacifiques.

On se promène dans la rue et on n’entend pas les gens crier. Les gens ne sont pas trop stressés.

Il trouve également que ce sont des travailleurs acharnés. Ils sont très attachés au respect de leurs lois. Parallèlement, il les trouve très carrés et fait le même constat quant à ses étudiants. Il préfère ne pas trop critiquer les autres. C’est pourquoi il ne voit pas vraiment de côté négatif aux valeurs québécoises. « Vous savez, ce n’est pas dans ma nature de juger les gens. J’essaie toujours de voir le côté positif plus que le côté négatif ».

Valeurs personnelles

Ses valeurs personnelles qui lui tiennent à cœur dans sa vie sont celles liées à l’ouverture. La loyauté et l’empathie sont importantes pour lui. Il pense que les êtres vulnérables devaient être au centre de nos priorités, comme les enfants et les personnes âgées, et même les animaux. Il n’aime pas qu’on fasse du mal aux autres. L’amour devait guider nos projets et nos actions. En tant qu’êtres humains, nous avons tous des sentiments, des vulnérabilités. Il se présente comme un « cosmopolite », « un citoyen du monde ».

Son avis sur l’ouverture au Québec et au Canada

Je trouve que la politique ici est très simple. Je trouve même qu’au Canada, c’est plus une politique de tolérance et d’inclusion. D’ailleurs, il y a présentement une fête en Tunisie et, hier, l’ambassadrice canadienne en Tunisie a mis un habit traditionnel tunisien et s’est rendue dans une radio. Je trouve que c’est bien.

Il ne voit pas là un problème d’appropriation culturelle. Au contraire, il apprécie cette ouverture et trouve que c’est sympa de sa part.

Dangers de l’autarcie chez les Québécois

Selon lui, les Québécois ne sont pas vraiment informés de ce qui se passe à l’extérieur du pays. Il se souvient d’ailleurs que certains de ses étudiants avaient une vision très stéréotypée des musulmans, qu’ils les assimilaient à des extrémistes, selon ce qui était véhiculé par les médias sociaux notamment.

Je leur ai expliqué la réalité des choses. J’ai éclairé leur lanterne sur la différence entre un islamiste et un musulman, parce que l’islamiste n’est pas un musulman. En effet, les islamistes, ce sont les gens qui veulent mêler la politique à la religion. Par contre, l’islam est comme le christianisme, c’est-à-dire une religion, une spiritualité. Les islamistes nous font beaucoup de mal.

Un peu de philosophie

Il y a deux phrases qui représentent bien sa façon de penser. La première est une citation de François Mitterrand : « Il faut laisser le temps au temps » et la deuxième est un adage qui dit : « Il ne faut jamais dire : fontaine, je ne boirai jamais de ton eau ».

On ne sait pas ce qui peut nous arriver demain.

Kerkennah, archipel tunisien. Crédit :  Khalil X.

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