50 À la découverte de l’autre : réflexions et apprentissages

Comment les étudiantes et étudiants en communication publique qui ont réalisé ces portraits au cours du printemps 2017 ont-ils vécu cette expérience? Qu’ont-ils appris de leur participation au projet « Québec ville ouverte » dans le cadre de leur parcours universitaire? Ces rencontres ont-elles transformé leur perception des personnes immigrantes, du Québec, d’eux-mêmes et d’elles-mêmes? Voici quelques réponses, d’abord recueillies en équipe, puis individuellement, dans le journal de bord tenu par les étudiantes et les étudiants. Ces paroles sincères et directes prouvent hors de tout doute l’immense potentiel de la rencontre, de l’écoute et du dialogue pour lutter contre les préjugés et le racisme, ainsi que pour renforcer le désir de vivre ensemble.

Réflexions collectives

En conclusion, ces entrevues nous ont permis de réfléchir sur la culture québécoise à travers les yeux d’immigrants. Nous avons relevé certaines différences entre les valeurs québécoises et arabes qui nous ont fait remettre en question notre société. Concernant l’intégration des immigrants, on nous a fait la remarque que les Québécois, en théorie, sont très ouverts aux immigrants alors qu’en réalité, ils le sont moins. Certaines personnes rencontrées ont soulevé que les Québécois ne font pas beaucoup d’efforts pour aller à la rencontre des immigrants et d’autres, au contraire, considèrent que certains immigrants ne font pas assez d’efforts pour comprendre les Québécois. Nous croyons qu’il y a des efforts à faire des deux côtés afin de trouver un terrain d’entente. Par ailleurs, toutes les personnes rencontrées nous ont fortement encouragés à leur poser des questions sur la culture arabe afin d’en savoir plus.

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Nous sommes choyés et privilégiés de vivre au Canada. Lors de nos entrevues, nous avons écouté des personnes qui ne se sentaient pas en sécurité sur leurs propres terres.

Aussi, cette expérience nous a permis de connaître de nouvelles cultures, d’ouvrir nos horizons et de laisser tomber nos œillères. Cela vient renforcer l’idée que la diversité est un atout dans une société et non un inconvénient.

Nous sommes tous l’étranger de quelqu’un. Le racisme est nourri par la peur de l’inconnu. Dans ce cas, aller à la rencontre d’autrui ne peut que nous amener à construire une société plus tolérante.

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Ces entrevues que nous avons réalisées nous ont apporté une nouvelle vision de la culture arabe. En effet, nous avons pu nous rendre compte que, parfois, l’image véhiculée par les médias ou notre entourage pouvait encourager la fabrication de certains stéréotypes. Nous comprenons désormais qu’il faut s’intéresser au contenu plus qu’au contenant. Plus on creuse et plus on se rend compte qu’on est tous semblables, peu importe nos origines.

Par ailleurs, certaines de ces rencontres pleines d’émotions nous ont ouvert les yeux sur le fait que les immigrants se sentent bien accueillis par les habitants de la Ville de Québec. Pourtant, l’immigration reste un long chemin semé d’embûches pour ces personnes. En effet, la bureaucratie est complexe, le marché du travail n’est pas très ouvert et souvent les diplômes des immigrants et immigrantes ne sont pas reconnus à leur juste valeur, ce qui nous semble assez aberrant. Nous avons également remarqué que même après leur venue à Québec et subissant la pression de se conformer à la culture nord-américaine, ils réussissent à conserver leur culture et leurs valeurs.

Pour finir, l’apport de ces immigrants à la Ville de Québec est primordial afin d’entretenir une ouverture envers les autres nationalités.

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Le projet spécial nous a permis d’en apprendre davantage sur une culture différente de la nôtre et d’éliminer certains préjugés. Nous avons été marqués par le lien familial : en effet, au Québec, la famille et les valeurs qui y sont associées sont très importantes. Toutefois, nos entrevues ont démontré qu’il y avait parfois des liens encore plus forts entre les immigrés d’origine arabe et leur famille restée au pays.

Nous avons aussi été heureux d’entendre que les Québécois sont gentils et accueillants face aux immigrants. En effet, aucun immigrant questionné n’a été victime de racisme et ils ont toujours été respectés. Cependant, les personnes interrogées trouvent décevant le manque d’ouverture des Québécois et la difficulté à créer des liens d’amitié forts. Nous pensons qu’il serait intéressant de développer des liens plus profonds, afin de permettre le vivre-ensemble sans peur ni rejet.

Enfin, il est important de comprendre que les immigrants viennent au Québec dans le but d’avoir une vie meilleure. Il est donc de notre devoir de les intégrer à notre société. Ces rencontres nous ont permis de comprendre que nous pouvons multiplier les différentes cultures afin d’en créer une seule. Les différences ne nous éloignent pas, mais elles nous rassemblent.

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Certains traits de caractères semblent être communs à tous les individus que nous avons interviewés, notamment l’humanisme, la modestie, la rigueur et le courage. Écouter le récit d’une histoire qui n’est pas la nôtre nous a fait ressentir une certaine empathie envers ces personnes que nous ne connaissions pas. Elles n’ont pas hésité à nous livrer une partie de leur vie. L’initiative de partager un moment aussi fort avec un inconnu devrait être répété plus souvent : les histoires des gens qui nous entourent sont si différentes et si riches.

Ce qui nous a aussi beaucoup marqué est le fait d’avoir recueilli des témoignages tellement positifs. Cette expérience nous a fait réaliser à quel point il est facile de se tromper sur ce qu’on ne sait pas. En effet, nous avions tendance à imaginer que les récits auraient été davantage en demi-teinte. S’il fallait retenir un message global de ces belles rencontres, ce serait qu’il faut toujours aller de l’avant, ne pas hésiter à aller vers les autres, à poser des questions, à interagir peu importe la couleur de leur peau, leur culture ou leur religion. La beauté du monde réside dans son ouverture. Avec des œillères, le paysage est beaucoup moins prenant que lorsqu’on a la possibilité de l’admirer dans son entièreté.

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Nous avons ressenti un plaisir mutuel lors de nos entrevues. Les personnes interrogées n’ont pas hésité à se confier, à nous allouer du temps pour répondre à nos questions. Finalement, l’exercice ne ressemblait plus à un travail scolaire, mais à un simple échange entre deux inconnus, entre deux êtres humains.

Nous avons été marqués par ces récits. Les personnes rencontrées ont toutes exprimé le manque de leur famille et du pays d’origine. Nous avons réalisé que ça ne devait pas être facile de tout quitter comme elles l’ont fait. D’où, selon nous, l’importance de réserver à ces personnes un accueil chaleureux et dénué de tout jugement. Ces personnes sont venues ici en quête des meilleures conditions de vie ou de travail. Elles ne cherchent pas à imposer leurs valeurs au détriment de celles du pays d’accueil. Au contraire, elles ne demandent qu’à s’adapter et à partager. Et nous pensons que ce partage culturel est la meilleure arme face à l’ignorance. Il ne faut pas avoir peur de « l’autre » sous prétexte qu’il est étranger.

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Cette expérience nous a permis de grandir émotionnellement et intellectuellement. Les personnes rencontrées nous ont permis de nous éloigner de la crainte créée et transmise par les médias dans notre société afin de faire notre propre réflexion critique. Elles nous ont permis d’évoluer en tant que communicateurs publics et de prendre conscience du rôle que nous avons à jouer dans la création du vivre ensemble.

Grâce à ces récits de vie, nous avons compris qu’il y a une énorme différence entre la façon dont la religion est décrite en théorie et comment les gens l’adaptent à leur vie. C’est d’ailleurs quelque chose qui ressort de nos rencontres et qui montre bien l’absurdité des stéréotypes véhiculés dans notre société.

Cette expérience démontre qu’un être humain est loin de se définir que par sa culture, et que l’ignorance et la peur nous font passer à côté d’expériences extraordinaires avec des personnes qui, au final, sont bien plus près de nos valeurs que nous le pensions.

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Tous les membres de l’équipe sont en accord pour affirmer que ce projet a complètement changé notre perception des immigrants arabes. Nous avons retenu que, malgré leurs différentes cultures et religions, les Québécois et les Arabes sont des personnes semblables qui ne veulent que faire partie d’une société libre et ouverte aux autres. Effectivement, les préjugés envers les Arabes sont faux et, malgré tout ce que les gens peuvent penser, leur but n’est pas d’imposer leurs croyances aux autres. Ils respectent les Québécois dans leurs choix et veulent faire partie intégrante de notre société. Les gens doivent aussi comprendre qu’il ne faut pas associer automatiquement la culture arabe avec la religion musulmane. En effet, plusieurs immigrants sont catholiques, tout comme plusieurs Québécois.

Les Québécois ne doivent pas s’inquiéter de la venue d’immigrants arabes. Au contraire, les immigrants ont un haut niveau d’éducation et leurs expériences et connaissances peuvent contribuer au développement de notre société. Au lieu d’avoir peur de l’inconnu, nous recommandons aux gens d’aller de l’avant et de sociabiliser avec les immigrants arabes. Cette simple action leur permettra de constater qu’ils sont comme nous. Ils ont plusieurs histoires sur leur famille, leurs amis, leurs emplois, leur immigration et leur passé qui valent la peine d’être écoutées. Apprenons à vivre ensemble et à accueillir ces personnes qui, tout comme nous, ont de l’amour à donner et à recevoir.

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C’est souvent la méconnaissance qui entraîne des gestes de racisme ou de discrimination. C’est pourquoi nous pensons que cette expérience est enrichissante autant pour nous, puisque nous avons fait de belles rencontres, que pour ceux qui pourront lire les portraits réalisés. Souvent, les gens ont tendance à s’arrêter à leurs préjugés et à ne pas être ouverts à la culture arabe. Or, on souhaite que les lecteurs puissent voir transparaître la bonté des musulmans interrogés, comme nous l’avons vue. Il est important de sensibiliser les individus à l’histoire de ces personnes, afin qu’ils puissent comprendre toutes les étapes qu’ils ont dû vivre, loin de leur pays natal. Des gestes comme ceux-ci contribuent grandement à l’intégration des immigrants et permettent aux Québécois de mieux les accueillir en les comprenant davantage.

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La désinformation véhiculée dans la société alimente la peur à l’égard des étrangers. Avec ces rencontres, on se rend compte que chaque personne ou famille ayant décidé de venir s’installer ici possède une histoire d’amour pour sa terre d’accueil.

Quitter son pays natal pour s’établir dans un nouveau pays doit être une étape difficile à franchir. La plupart d’entre eux ont quitté dans l’espoir d’un avenir meilleur ou pour poursuivre un rêve. Nous croyons que les inquiets de notre région doivent se souvenir de ceci et comprendre que l’intégration des immigrants est l’affaire de tous. En les accueillant chaleureusement, avec compassion, ouverture d’esprit et respect, nous facilitons grandement leur intégration.

Grâce à ce projet, nous constatons aussi qu’il est faux de penser que  poser des questions à une personne sur ses coutumes ou sa religion crée un malaise, au contraire. Le fait de nous intéresser à des gens qui ont une culture différente de nous nous fait nous rendre compte qu’au fond, nous ne sommes pas différents.

Par ailleurs, dans tous les cas, ils ont mentionné leur reconnaissance face aux Québécois qui leur avaient tendu la main. Ces rencontres sont par la suite devenues des motivateurs dans la progression de leur intégration.

Finalement, l’échange entre les deux cultures est la clé d’une bonne intégration. Il faut connaître leur histoire et eux aussi doivent connaître la nôtre. C’est ainsi qu’on peut se comprendre et grandir ensemble.

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Nous avons pu voir qu’ils font preuve de tant de courage et ont dû faire tant de sacrifices. Ces rencontres nous ont fait réaliser qu’il y a beaucoup de choses que nous ignorons ou, au contraire, que nous croyons savoir. Avoir des discussions sur des sujets sensibles nous a tous permis de comprendre que les problèmes d’identité sont réels et peuvent découler sur plusieurs générations. Bien que plusieurs immigrants n’aient pas eu l’accueil dont ils avaient besoin, d’autres ont bénéficié d’une entrée au pays très encadrée. Malgré tout, ce facteur ne vient pas effacer les craintes et les problèmes d’identité que certaines familles ont pu avoir, et ce, dès leur arrivée.

La plus grande leçon que nous retenons est que tout le monde traverse des épreuves, qu’aucune n’est à négliger et que, pour des personnes arrivant d’un autre pays, chaque action banale peut être un défi. Il ne faut surtout pas oublier que ces gens ont fait d’énormes efforts pour s’intégrer à notre société et offrir une meilleure vie aux membres de leur famille. Il est important que nous leur offrions l’accueil nécessaire, mais également l’inclusion qu’ils méritent.

Témoignages individuels

Les préjugés

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Québec arabe Droit d'auteur © 2018 par Florence Piron est sous licence License Creative Commons Attribution - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, sauf indication contraire.

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