3 Sara Mostefa Kara

Elisabeth Boulay

Sara Mostefa Kara est une femme de 36 ans originaire d’Aïn El Turk, un village au bord de la mer dans la région d’Oran en Algérie. Oran est la deuxième plus grande ville d’Algérie, après Alger qui en est la capitale. Sara a quitté son pays le 23 septembre 2003 à l’âge de 23 ans pour aller étudier à Paris, après avoir complété un diplôme d’ingénieure en informatique à l’Université d’Oran (IGMO). Cela fait aujourd’hui près de 15 ans qu’elle a quitté son pays d’origine.

La France avant le Québec

Sara a résidé un peu plus d’un an à Paris. Comme elle était proche de sa famille, partir loin de celle-ci ne fut pas facile. De plus, elle a vécu un choc culturel important dès son arrivée dans ce nouveau pays. En effet, les Français ne sont pas très chaleureux, ce que, à ce moment, Sara ne le savait pas. Dans la Ville Lumière, elle était inscrite à l’Université Pierre-et-Marie-Curie. Au cours de ses études dans cette ville, elle a fait du tutorat en français et en mathématiques, ce qui a marqué le début de sa carrière d’enseignement. Après son passage à Paris, Sara est allée rejoindre ses deux sœurs à Nancy, une commune française. Sara s’est ensuite inscrite à l’Université de Nancy II où elle a obtenu un diplôme en langue anglaise en situation professionnelle. Elle est restée à Nancy environ deux ans pour ensuite se rendre à Marseille. Les études n’étaient toujours pas terminées pour Sara. Elle a complété une maîtrise en mathématiques et en informatique des nouvelles technologies.

La décision de partir pour le Québec

Pendant ses études, elle rencontra une délégation québécoise qui lui donna l’idée de partir pour le Canada. Un autre facteur facilita cette décision : Sara avait de la difficulté à trouver un emploi, en partie à cause du racisme présent en France. Elle avait en outre le désir d’accomplir quelque chose, de développer des compétences ailleurs et avait l’impression qu’elle ne pourrait pas évoluer en France en raison de ses origines. Sara connaissait la bonne réputation du Canada au plan international, ce qui ne fit que l’encourager dans ce choix. Elle fit alors un premier pas vers le Québec en remplissant le dossier d’immigration. Le 11 septembre 2008,  elle reçut son visa. Deux jours plus tard, elle quittait la France. Après cinq années passées dans ce pays, elle s’envolait vers une autre aventure, au Québec.

L’arrivée à Montréal

En 2008, à l’aube de ses 28 ans, Sara atterrit à l’aéroport de Montréal. Sur place, elle fut très bien accueillie par le personnel et le tout se déroula sans anicroche.

Sara passa les six premiers mois à Saint-Bruno chez sa tante qui lui fit visiter Montréal et qui l’aida à trouver un premier emploi dans une boutique pour améliorer sa compréhension du « français québécois ». Sara travailla dans cette boutique jusqu’en mars 2009. Ensuite, elle s’installa dans un appartement à Longueuil. Peu après, en avril 2009, elle fit son premier remplacement en informatique à la Commission scolaire des Trois-Lacs dans une école secondaire francophone. L’année d’après, elle fut approchée pour un contrat avec des classes de 4e et de 5e secondaire pour enseigner les mathématiques. À Montréal, en février 2010, Sara rencontra son conjoint, avec qui elle déménagea dans la ville de Québec en juin de la même année, se maria et eut un fils. Cet homme, lui aussi originaire d’Algérie, était déjà établi depuis quelques années dans la ville de Québec. Titulaire d’un doctorat en médecine vétérinaire, il avait effectué un changement de carrière vers les sciences infirmières. Un choix judicieux, puisqu’il s’épanouit aujourd’hui dans le domaine de la santé. Il lui fit découvrir sa ville, dont l’architecture lui rappelait celle d’Europe. Sara eut un coup de cœur pour Québec. Ce changement de ville était aussi l’occasion de mettre à jour sa formation en enseignement. Elle s’inscrivit donc à la maîtrise en enseignement à l’Université de Sherbrooke afin d’obtenir une qualification québécoise, une étape qu’elle jugeait essentielle à son évolution professionnelle.

Après avoir quitté Montréal, Sara dut recommencer son processus de recherche d’emploi dans le domaine de l’enseignement. En avril 2012, Sara obtint un remplacement à la Commission scolaire de la Capitale pour enseigner les mathématiques aux adultes. Aujourd’hui, elle fait partie d’une belle équipe d’enseignants aux centres Louis-Jolliet et Saint-Louis.

Différences de pays en pays

Ayant côtoyé des gens de plusieurs nationalités, Sara a remarqué quelques différences entre les cultures.  Elle remarque que les femmes québécoises affichent davantage leur caractère, à la différence de ce qui se passe dans d’autres pays, et ont davantage de pouvoir. Elle trouve aussi que les Québécois sont très sociables. On lui dit régulièrement bonjour et on lui demande comment elle va, ce qu’elle ne trouvait pas naturel au début. Mais elle a fini par comprendre que les Québécois sont comme cela et que dire bonjour à une personne qu’on ne connait pas personnellement est chose courante. En France, c’était différent, le contact était plus difficile avec les gens. Sara trouve aussi que la valeur du travail est beaucoup plus ancrée au Québec. Les gens commencent à travailler à un âge beaucoup plus jeune qu’en France ou en Algérie.

Je me sens chez moi à Québec!

Sara n’a pas eu de difficulté d’adaptation dans la ville de Québec. Les Québécois l’ont bien accueillie. Ils étaient curieux, lui posaient beaucoup de questions sur ses origines et le font toujours d’ailleurs. Elle a été bien reçue et a de la facilité à discuter avec les gens. Elle ne s’est jamais sentie jugée en raison de ses origines et s’est toujours sentie à sa place. Sara le dit elle-même, elle est Algérienne d’origine, mais elle se sent chez elle à Québec.

Dominer la peur

Certaines personnes s’inquiètent de l’arrivée d’immigrants à Québec, mais Sara croit que personne ne devrait avoir peur. Elle veut que les Québécois comprennent que l’immigration est bien gérée, que les immigrants sont bien pris en charge, contrairement à certains autres pays. Elle affirme que beaucoup de personnes instruites immigrent au Québec. Les immigrants et les réfugiés ont le désir de participer aux activités de la ville, de s’intégrer, d’apprendre et de réussir leur nouveau départ. Il y a une raison derrière leur arrivée au Québec. Certains fuient la guerre pour un pays plus sécuritaire et ils méritent d’être accueillis sans crainte ni arrière-pensée : « Il ne faut pas avoir peur ».

Voulez-vous venir au Québec?

Ayant elle-même immigré au Québec, Sara a quelques conseils pour les personnes qui voudraient s’y installer. Pour que la recherche d’un emploi soit simplifiée, il est important de savoir parler français. Selon Sara, ces personnes devraient aussi savoir que tous les employeurs de Québec ne sont pas « ouverts à la diversité culturelle qui est une belle richesse », surtout quand les immigrants n’ont pas d’expérience québécoise au travail, même s’ils arrivent avec un grand bagage de compétences et de connaissances.

Le processus d’immigration peut être très long et onéreux, alors il faut prendre conscience que la réussite d’une immigration dépend du vouloir de l’immigrant et des efforts constants qu’il y met. On doit être prêt à changer de carrière et à faire des sacrifices pour réussir.

De cette façon, l’adaptation se fera plus facilement et aidera à se sentir chez soi. Pour terminer le portrait de Sara comme il se doit, voici un mot de celle-ci qui résume son aventure à Québec :

J’ai traversé deux océans pour arriver chez moi. Québec, ma belle ville, m’a offert l’opportunité de recommencer, de faire mes preuves, de rencontrer l’amour, de devenir maman et d’entretenir des amitiés précieuses.

Sara dans une de ses classes.

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