15 Hommage à Jean-Marie Tremblay
Marcel J. Mélançon
L’invention de l’imprimerie au XVIe siècle révolutionna le monde de l’information et de la communication. L’avènement de l’informatique au XXe siècle est venu planétariser l’information et diffuser la science dans le « village global ».
Il y a 25 ans, monsieur Jean-Marie Tremblay s’est inscrit dans ce mouvement de mondialisation en développant le projet d’une bibliothèque numérique qui compte maintenant des millions d’utilisateurs de par le monde (36 932 755 téléchargements de 2003 à 2017). La collaboration d’une équipe de bénévoles, notamment la contribution de sa conjointe, a été déterminante dans l’élaboration et la réalisation du projet Les Classiques des sciences sociales qui est maintenant l’œuvre de sa vie.
La numérisation des écrits mondialise la diffusion et la possibilité de consultation pour des lecteurs, étudiants, ou chercheurs partout sur la planète. Un volume peut être téléchargé gratuitement, en tout ou en partie, à partir d’un simple portable. Cette bibliothèque numérique constitue une source d’information et de culture disponible dans n’importe quel pays, université ou école.
Pour un auteur, c’est une occasion inespérée de prolonger la durée de vie d’un ouvrage. En effet, la vie « active » des volumes est, dit-on, d’environ cinq ans. Leur diffusion demeure toujours restreinte et relative au nombre d’exemplaires du tirage d’imprimerie. De plus, ils sont peu ou pas disponibles mondialement. Avec leur numérisation et leur disponibilité sur Internet, ils prolongent indéfiniment cette durée de vie et donnent accès à des milliers d’utilisateurs; ainsi mon ouvrage sur la philosophie de Camus (édition suisse, 1976) avait été tiré à 1 800 exemplaires, tandis qu’il a fait l’objet de 107 156 téléchargements dans la bibliothèque numérique des Classiques des sciences sociales de 2006 à 2017.
En tant qu’auteur, ma spécialité professionnelle était cependant la bioéthique; celle-ci étudie la conduite à tenir face aux bouleversements techno-scientifiques survenus dans les sciences de la vie (biologie, génétique, génomique, etc.) et de la santé (milieu médical, infirmier et clinique). Elle a marqué le passage entre une morale religieuse et une éthique laïque dans un monde civil et multiculturel pour l’élaboration de nouvelles normes de conduite en biomédecine.
Mes écrits (plus de dix volumes, articles, etc.) ont porté principalement, depuis 1978, sur les questions qui préoccupaient la société en éthique, en droit, en sciences humaines et biomédicales : l’apparition des nouvelles techniques de reproduction assistée (insémination artificielle, fécondation in vitro, clonage, etc.) le dépistage génétique, la génomique humaine, l’aide médicale à mourir, etc. Le questionnement éthique, juridique et social qui était posé durant ces années est différent du regard qu’on porte trente ou quarante ans plus tard sur ces problématiques, car des normes et des lois ont été élaborées à la suite du consensus social qui s’est établi à leur sujet. Mais la disponibilité de ces écrits dans la bibliothèque numérique des Classiques des sciences sociales témoigne du questionnement qui a prévalu à partir des années 1960. Ils ont fait l’objet de 187 113 téléchargements (2006 à 2017). En ce sens, ils ont une valeur et une importance historiques et ils sont disponibles aux chercheurs en éthique, en droit et en sciences humaines en général.
Le Congrès de l’ACFAS 2018 s’avère le contexte le plus opportun pour reconnaître le travail gigantesque de monsieur Jean-Marie Tremblay, de son équipe de collaborateurs, notamment sa conjointe, qui ont apporté une imposante contribution à la recherche et à la culture internationales. Je me joins à tous les autres auteurs que monsieur Tremblay a diffusés dans les Classiques des Sciences sociales pour lui témoigner ma reconnaissance et mon appréciation.