25 Enjeux théoriques et pratiques de la numérisation en contexte africain de périphérie
Antonin Benoît Diouf
L’Afrique, à quelques exceptions près, a été largement sujette à la colonisation européenne qui a duré deux siècles. Son patrimoine documentaire, consigné dans des matériaux imprimés en est fortement imprégné. Il est en effet difficile de trouver, dans ce type de mémoire écrite, une histoire authentiquement africaine non parasitée, que celle-ci soit d’ordre scientifique ou administratif. Un demi-siècle maintenant que ses territoires jadis colonisés sont devenus des États indépendants et qu’une histoire administrative et scientifique s’y est forgée. Il est devenu nécessaire, pour la plupart de ces États, de revisiter leur patrimoine ainsi hérité et surtout créé en vue de le rendre plus accessible tout en le préservant d’éventuelles pertes et dégradations. L’idée est de profiter de la technologie numérique aujourd’hui disponible à foison, mais qui est porteuse d’enjeux pluriels qu’il est important d’identifier, d’autant plus que l’Afrique, en général, reste largement sous-développée accusant un retard considérable par rapport aux autres continents dont les indices de développement sont plus élevés. Tous les indicateurs du développement placent le continent africain dans une zone de paupérisation abstraite (périphérie) gravitant autour d’une autre zone plus nantie qui est le point de repère vers lequel toutes ses politiques et entreprises, y compris la numérisation, trouvent leur référentiel d’évaluation. Un cadrage conceptuel des deux termes les plus saillants de l’intitulé proposé, à savoir, numérisation et périphérie, est nécessaire pour bien situer l’axe d’argumentation qui est proposé ici. Il s’agit de bien faire comprendre la numérisation telle qu’elle est appréhendée ici et la périphérie telle qu’elle est signifiée.
La numérisation est l’action de convertir une ressource analogique (document, produit de connaissance) en ressource numérique. Cela implique obligatoirement que cette ressource soit accessible par un tiers-outil qu’est un appareil informatique comme l’ordinateur et toutes ses déclinaisons actuelles (liseuses, tablettes, etc.). C’est ce sens du numérique issu d’une transformation qui est traité dans ce document, étant entendu que, de plus en plus, les documents naissent sous un format numérique et sont donc moins assujettis aux enjeux qui font ici l’objet de la réflexion. Les ressources numériques sont toutes constitutives de patrimoine (UNESCO 2003). Toutefois, il est ici nécessaire de faire une dichotomie de type sémantique entre le patrimoine numérisé, issu de la transformation et le patrimoine nativement numérique (Schafer 2017).
Le concept de périphérie est une métaphore géométrique adoptée de la dialectique centre/périphérie (Amin 1973) pour matérialiser respectivement l’opposition monde développé/monde sous-développé ou celle plus cardinale Nord/Sud (Brandt 1980). Il s’agit d’une vision socioéconomique bipolaire du monde avec un centre au développement hypertrophié où tout semble acquis d’avance, en face d’une périphérie au développement hypotrophié où tout semble stagner en termes de progrès évalué à l’aune d’échelles de mesure élaborées au Centre. En effet, la numérisation a été inventée dans ce Centre et toute application y ayant cours est automatiquement répliquée dans la périphérie suiviste. La périphérie africaine a depuis pris le train en marche avec en bandoulière ce mimétisme invariant. Cet engouffrement dans la dématérialisation documentaire est porteur d’enjeux théoriques et pratiques qui, à mon avis, doivent être nécessairement contextualisés, surtout concernant les premiers, en essayant de proposer une perception quasi philosophique de la numérisation qui explique mieux les enjeux théoriques qui la concernent. Il s’agit de décrire une vision de la numérisation qui essaie de sortir des sentiers battus, c’est-à-dire des objets, des hypothèses et des pratiques en cours, et de regarder la numérisation telle que nous sommes en périphérie et non telle qu’elle est conçue autre part dans le Centre. C’est à cette seule condition qu’un esprit de créativité pourra y prendre racine, créativité mieux à même de rimer avec « optimalité », parce qu’étant issue d’un environnement qu’elle a l’ambition de servir.
Ces aspects théoriques de la numérisation applicables à l’Afrique seront donc le premier maillon d’une chaîne d’argumentation comprenant, par la suite, tous les aspects pratiques qui sont subordonnés à ces enjeux théoriques et qui gravitent autour de la problématique du développement de ce continent périphérique en termes de progrès. La pratique de la numérisation visera ainsi à être un renfort de plus aux initiatives étatiques en matière de développement et devra être comprise comme telle. Il s’agira en ce qui concerne les enjeux de pouvoir mettre en place des dispositifs performants aussi bien du point de vue du matériel que des procédures, mais aussi en identifiant clairement quels contenus et savoirs sont dignes d’intérêt quant à leur numérisation.
Enjeux théoriques
Les enjeux théoriques sont importants dans ce contexte d’espace périphérique, souvent présenté comme devant rattraper un retard, parce qu’il est notamment hors d’une « Histoire-Écriture » qui est elle-même à la base de fixation et de légitimation des mémoires centriques. Ils font référence, en plus d’une propension à l’existence née de ce déni d’Histoire, au souci d’accessibilité, à la manifestation de la pluralité culturelle et à l’exigence de vaincre le sous-développement qui se manifeste lui-même par un archaïsme qu’il faut extirper de la marche administrative des États africains.
Affirmation d’existence en le faisant savoir
La numérisation peut donc être prise comme un raccourci, afin de fixer, par des images d’aujourd’hui, des mots du passé qui s’est déjà construit et d’un futur qui se construit avec le présent. Dans un contexte africain, les mots ont été majoritairement et plus souvent volatiles, c’est-à-dire oralement suspendus dans l’air, bien que fixés de façon plus ou moins longue dans les mémoires personnelles, donc sujettes à l’extinction biologique irréversible. Ils ont été moins souvent fixés dans les mémoires écrites ou encore dans des mémoires technologiques analogiques, notamment audiovisuelles qui sont très vulnérables si elles sont mal conservées. La numérisation devient ainsi un moyen de se construire une Histoire qui satisfait aux normes édictées par un Centre à l’autoréférence proclamée, tout en préservant une authenticité de fait. L’enjeu est donc de susciter une dynamique de la périphérie africaine dans un mouvement de numérisation qui se particulariserait en fonction des sociétés qui la composent et des activités humaines qui y ont cours. De plus en plus, notre être se numérise si l’on prend en compte le temps passé à se connecter à des outils numériques et à s’interconnecter virtuellement entre humains par le biais de ces outils. L’Afrique n’échappe pas à ce constat, bien au contraire. Il devient alors évident que, pour exister, il faut investir cet espace virtuel expansif, qui a fini de transformer en profondeur notre façon d’appréhender le monde. Il faut que l’Afrique enrichisse sa posture d’écriture déjà existante, bien que jugée faible, par une posture numérique pour fixer le message oral ou artistique, non pas par l’habileté manuelle, mais par la graphie et la copie numérique dont les formats émulateurs pourront pérenniser son accès.
Visibilité partout et pour tous
L’accès est un deuxième point de l’enjeu théorique de la numérisation. Sans cette conversion, pas de volatilité ni d’ubiquité de l’information et de la connaissance, donc un accès restreint au plus petit nombre, voire un non-accès du tout. Imaginons que nous puissions mettre sur la place publique tous les savoirs enfouis dans les armoires et tiroirs de bureau, les cases-bibliothèques et les valises, nous verrions sans doute que la préhistoire supposée congénitale de cette périphérie africaine n’est que pure fiction. Ces savoirs seront plus visibles lorsqu’ils seront codifiés en mode binaire et accessibles sur des disques portables ou en ligne, leur forgeant ainsi une armure d’ubiquité numérique contre un éventuel déni d’existence. La simultanéité d’accès aux connaissances numérisées vient renforcer le mode de délivrance des messages tel que conçu en Afrique. Jadis, des tambours ou des tamtams et des crieurs publics permettaient d’atteindre plusieurs personnes à la fois. Le numérique multiplie les possibilités. Ce ne sont plus des dizaines d’individus, mais des millions d’individus simultanément atteignables dès que la ressource numérique est mise en réseau, notamment avec sa version la plus achevée qui est actuellement le web et sa déclinaison plus socialement marquée qu’est le web dit 2.0. La numérisation doit se comprendre ainsi comme un outil de transformation de matières premières permettant de se doter d’une caisse de résonnance de ces ressources locales naturellement méconnues et quelques fois artificiellement ghettoïsées par l’inaction humaine.
Affirmation de la diversité culturelle
La numérisation des savoirs de cette périphérie véhiculés dans des langues locales ou vernaculaires promeut ces éléments de civilisation en leur offrant un outil d’expression. La manœuvre ne sera pas d’essayer de suppléer les langues impérialistes qui dominent dans le monde et qui sont issues du Centre, mais de revendiquer le droit d’exister et de se rendre visible au-delà des cercles restreints qui les ont vus naître. Ce faisant, elles se donnent aussi le moyen de se pérenniser dans des mémoires virtuelles et d’être potentiellement des objets d’étude scientifique qui participeront à cette pérennisation. Il en est de même de tout l’art localement constitué et qui véhicule toute une architecture cognitive qu’il est important d’appréhender pour mesurer à sa juste valeur le poids culturel de tels objets. La numérisation en 3D permet, par exemple, de redonner vigueur au message « ésotérique » véhiculé par ces objets qui pourront être visionnés simultanément partout dans le monde par une galerie accessible en ligne. La numérisation se trouve être ainsi un maillon premier d’une chaîne d’ouverture vers le monde et ses particularismes sociétaux de diverses origines.
Levier de développement économique et social
Les sociétés de cette périphérie ont une relation particulière avec la nature qui est source de vie et de survie. Pour s’alimenter, se soigner ou encore s’abriter, il a fallu développer un corpus de savoirs et de connaissances pour tirer profit de cette nature tout en la préservant, autrement le cercle vertueux se romprait au grand dam de ces sociétés. Ces connaissances, si elles sont maintenues et transmises sans altération, sont des leviers certains pour asseoir un progrès à caractère économique, parce que cette nature doit être comprise comme une bibliothèque à découvrir, où chaque espèce est un livre avec plusieurs chapitres (Aberkane 2015). La numérisation de ces savoirs, fixés ou non fixés sur support tangible, permet donc de constituer une bibliothèque palliative à la nature, tout en les rendant accessibles au plus grand nombre, et devient ainsi un maillon essentiel de la construction d’une économie de la connaissance. Cela est d’autant plus intéressant que des industries lourdes localement transformatrices sont inexistantes ou faiblement développées en Afrique, ce qui fait que les populations développent des systèmes de transformation à petite échelle et artisanale qui impactent un tant soit peu sur leur vécu. Une ingéniosité qui reste toutefois confinée dans les cercles culturels de terroirs et de groupes ethniques d’où il leur est difficile d’avoir une incidence sur des espaces nationaux plus vastes. Si la numérisation de ces savoirs se fait avec une vulgarisation des produits en aval, cela pourrait inspirer des opérateurs et opératrices économiques ou des investisseurs et investisseuses locaux appuyés par des scientifiques et des techniciens et techniciennes hautement qualifiés (biologistes, nutritionnistes, etc.), avec lesquels une collaboration pourrait produire de tels dispositifs de transformation grandeur nature, tout en favorisant le développement de compétences mutualisées, qui pourraient elles-mêmes alimenter des curricula éducatifs.
Modernisation des États et gestion de la documentation administrative
Héritiers d’un passif colonial depuis une soixantaine d’années en moyenne, la plupart des États africains sont confrontés à un problème de modernisation de leur administration publique bien que des initiatives programmatiques pour réaliser ce vœu de modernisation aient été prises. Le cas du Sénégal est très illustratif de ces générations successives de réformes. En atteste, un décret officiel portant sur la création d’un comité de modernisation de l’administration publique (2017), lui-même subdivisé en sous-comités thématiques. De pareilles initiatives sont très louables et même nécessaires, parce que, quoi qu’on en dise, la modernisation d’un État est un processus continu « pour adapter ses valeurs, ses principes, son organisation, ses méthodes et ses pratiques aux mutations sociales, technologiques, économiques et politiques, de même qu’à des exigences citoyennes de plus en plus fortes » (République du Sénégal 2017). Cependant, cette modernisation ne peut se réaliser pleinement sans une gestion réglementaire et technique de la documentation administrative sous toutes ses formes en impliquant les professionnels et professionnelles de la documentation. La bonne gouvernance érigée en leitmotiv passe forcément par cela et doit faire la part belle à la satisfaction du citoyen qui est la raison d’être d’un État. Ce dernier ne doit pas rencontrer d’obstacles de type documentaire dans ses rapports avec l’administration publique en cas de besoin. Beaucoup de citoyens et de citoyennes croupissent en prison faute de procès, lesquels souffrent aussi d’une gestion documentaire défectueuse dans les établissements judiciaires. D’autres sont confrontés au problème d’acquisition de pièces d’État civil du fait d’un éloignement géographique entre leur lieu de naissance et celui de résidence. Certains meurent dans des hôpitaux à cause d’un défaut de suivi d’affections précédentes traitées dans ces mêmes hôpitaux. La liste est longue d’exemples de ce type, où la démocratie citoyenne est agressée, sans compter la difficulté d’accéder à certaines informations publiques utiles aux activités civiles. La numérisation de cette documentation contribuerait à rendre possible la prise en compte du besoin citoyen et à faire admettre que « les notions de démocratisation du patrimoine, de diffusion collective et de mise à disposition au plus grand nombre caractérisent une définition de bien commun, entendu comme un bien public dont chaque citoyen peut disposer » (Boutet et Roudaut 2012, 5).
Cette vision quelque peu philosophique de la numérisation va influer forcément sur les postures à adopter quant à l’utilisation d’un bagage numérique (processus et outils) en contexte de périphérie. Il ne faut pas faire simplement comme tout le monde, mais donner un sens concret à tout projet de ce type. Du moment que la périphérie doit elle aussi exister sur le plan des connaissances à faire valoir, il ne suffit plus de se cantonner à l’usage classique du produit numérisé (préservation, substitution progressive au produit imprimé et diffusion souvent restreinte et sélective). Il faut également veiller à le faire « exploser » par une vulgarisation réelle pouvant générer de plus grandes possibilités d’utilisation profitables au plus grand nombre. Cela passe par une bonne identification et compréhension des enjeux pratiques qui font d’une numérisation à grande échelle un projet à succès, plus particulièrement dans un contexte périphérique.
Enjeux pratiques
La réflexion sur ces enjeux peut se nourrir de l’application ou de l’adaptation de la méthode QQOQCP[1] qui, à la base, est un outil d’analyse et de résolution de problèmes. Elle est utilisée ici pour avoir une vision d’ensemble périscopique de la réalité pratique de la numérisation dans un environnement de marasme multiforme. En effet, la pratique de la numérisation en contexte périphérique africain est souvent sujette à problèmes, dus au degré de technicité que cela nécessite, aux moyens matériels et financiers à mobiliser, aux procédures à définir en fonction des objectifs identifiés, à l’accès et à la conservation des fichiers numérisés, etc. Il ne s’agit pas ici d’utiliser toutes les questions de la méthode, mais celles qui permettent de donner un poids réel à l’argumentation proposée.
Identification des parties prenantes
Qui seraient les acteurs et actrices concernés pour la prise en charge de cette activité stratégique pour un continent en mal de présence notable dans l’environnement global des échanges numériques? Cette identification est d’une extrême importance, tant ceux qui sont potentiellement intéressés peuvent provenir de tous les secteurs d’activités publics ou privés. Les formes d’actions sont aussi tributaires des rôles à assigner à chaque catégorie de personnes qui intervient, étant entendu qu’une opération de numérisation, comme tout autre projet, est une conjonction d’intelligences allant de la sphère décisionnelle à la réalisation matérielle en passant par l’étape conceptuelle. Elles sont aussi tributaires du caractère des connaissances à numériser, que celles-ci soient sensibles ou non et à l’échelle individuelle, collective, corporative, etc. Il s’agit de mettre en place des modes opératoires qui ne laissent rien au hasard et qui prennent donc en compte toutes les dimensions inhérentes à une opération de ce type.
De la part des décideurs et décideuses
Les autorités africaines au plus haut niveau de responsabilité[2] seront celles qui donnent le blanc-seing après avoir été convaincues de la pertinence de convertir des documents analogiques en documents numériques. Sans cette caution hiérarchique, tout projet de ce type ne peut se faire et c’est là où peuvent se manifester les plus grosses difficultés de mise en œuvre, parce qu’en Afrique ce réflexe d’adoption et d’adaptation du numérique n’est pas acquis d’avance, et ce, depuis l’avènement des technologies de l’information et de la communication (TIC). En effet, dans ces sphères de décision, il est toujours difficile d’apprécier à sa juste mesure le poids économique et social des TIC dans le développement (Loukou 2012). Étant la plupart du temps des ordonnateurs de dépenses, il va s’en dire que la mobilisation et la mise à disposition des ressources financières sont de leur ressort, ressources sans lesquelles il est illusoire de réaliser des projets coûteux comme la numérisation de masse, même si le contexte paupérisé de périphérie doit amener à trouver des solutions peu coûteuses. Dans le secteur public, ces décideurs et décideuses seront identifiables au plus haut niveau des cabinets ministériels, des administrations locales (provinciales ou communales), des directions de sociétés nationales ou encore des directions d’universités ou établissements de recherche de même rang, etc. Dans le secteur privé, ils seront identifiables au plus haut niveau des directions des établissements à vocation lucrative, des organisations interafricaines, y compris les organisations non gouvernementales (ONG), etc.
De la part des opérateurs et opératrices
Au cœur du dispositif d’action se trouvent toutes les ressources humaines compétentes pour concevoir et réaliser techniquement un projet de numérisation. Une fois les autorisations nécessaires acquises, après un plaidoyer quelquefois nécessaire en direction des responsables, il faut qu’une synergie réflexive et active se mette en place entre ceux qui peuvent être considérés comme les gardiens de l’orthodoxie patrimoniale (bibliothécaires, archivistes, muséographes, historiens et historiennes, etc.), les gardiens de l’orthodoxie logicielle (informaticiens et informaticiennes, et praticiens et praticiennes connexes) et les gardiens de l’orthodoxie réglementaire (spécialistes de droit d’auteur, éditeurs et éditrices). Cette synergie d’actions et d’acteurs et d’actrices se fait en fonction de la nature, de la provenance et de la forme des produits à numériser. Ces parties prenantes travaillent ensemble sans hiérarchie stricte. L’accent est mis sur des discussions et des résolutions consensuelles en fonction des compétences des uns et des autres (Lahlou, Nosulenko et Samoylenko 2012). En effet, quoi de plus pertinent, par exemple, que l’élaboration d’un cahier des charges impliquant tous ces acteurs aux caractéristiques propres, dont les énergies fusionnées en synergies ne peuvent que produire un document d’orientation techniquement consensuel, gage de réalisation optimale.
Identification et localisation de la matière et des espaces d’action
Que doit-on numériser?
Pour répondre à cette question qui est relative à l’objet de la numérisation, il convient de reprendre la Charte sur la conservation du patrimoine numérique mentionnant que ce dernier :
[…] se compose de ressources uniques dans les domaines de la connaissance et de l’expression humaine, qu’elles soient d’ordre culturel, éducatif, scientifique et administratif ou qu’elles contiennent des informations techniques, juridiques, médicales ou d’autres sortes, créées numériquement ou converties sous forme numérique à partir de ressources analogiques existantes (UNESCO 2003).
Cette citation donne un aperçu général de ce dont il est question même si certaines épithètes peuvent avoir un caractère ambigu dans le contexte-ci concerné. Si on prend l’exemple des ressources d’ordre scientifique, il est clair que ces dernières existent en Afrique, avec une « science africaine qui se déploie essentiellement dans les mémoires, les thèses et les rapports de recherche » (Piron et al. 2017), et qu’elles se définissent en conformité avec la normalisation universellement admise. Cette documentation scientifique constitue d’ailleurs celle qui est la plus numérisée en Afrique, avec certains exemples comme les projets Bibliothèques électroniques en partenariat (BEEP), un projet de l’IRD français, Système d’information scientifique et technique (SIST) en Afrique francophone exclusivement et Database of African Theses and Dissertations (DATAD), une plateforme maintenue par l’Association des universités africaines (AAU). Malheureusement, aucun de ces trois exemples n’a de collections accessibles en ligne actuellement. On peut mentionner également le dépôt institutionnel de la Commission économique pour l’Afrique des Nations Unies qui propose des milliers de titres accessibles en ligne et en texte intégral[3]. Un autre volet non moins important concerne les articles et livres scientifiques avec des exemples tels que le projet Africain e-Journals (AEJP), basé à Michigan State University et qui dès le début des années 2000 visait à améliorer l’accessibilité, la visibilité et la viabilité des revues africaines en aidant ces dernières à développer des versions numériques de leurs numéros courants sous format imprimé[4]. Actuellement, le projet de revues africaines en ligne African Journals Online (AJOL) propose 521 revues provenant de 32 pays et permet un accès à la recherche publiée en Afrique.
Outre cette documentation imprimée, la science africaine se déploie aussi dans les documents iconographiques constitués de cartes postales anciennes, de photos, de plans architecturaux, etc. À cela, peut s’ajouter une documentation sur la flore locale faite d’herbiers, ou sur la faune constituée d’éléments de tissus biologiques (peaux, os épars, squelettes), d’objets archéologiques terrestres, voire marins, conservés tant bien que mal et qui sont d’un intérêt certain pour la recherche scientifique. Ces ressources à caractère scientifique sont primordiales à prendre en compte dans tout projet de numérisation. En dehors de ce cadre normatif universel, certaines ressources – à priori considérées d’ordre culturel – peuvent et doivent être considérées comme d’ordre « scientifique » parce qu’elles procèdent de connaissances éprouvées, tout au long de leur histoire, par des sociétés africaines et qui ont pour finalité de régler bien des problèmes à caractère individuel ou collectif. Cette incursion dans le champ de ce qui est considéré comme un pan de la science ouverte est capitale pour ne pas exclure des savoirs locaux liés à la santé (pharmacopée et médecine traditionnelle), aux cérémonies rituelles (mariages, funérailles, initiations, scarifications, etc.), aux expressions artistiques plus ou moins chargées d’ésotérisme (danses, musiques et instruments de musique, jouets, jeux de société, arts picturaux, sculptures, etc.) ou encore aux littératures écrites ou orales à vocation éducative (contes, légendes, histoires de vie, etc.). Ceci est d’autant plus important que la frontière entre ces différents savoirs est souvent ténue tant les interactions fonctionnelles y sont présentes, car, faut-il le rappeler, la « culture n’existe que parce qu’elle se réalise dans la personnalité et dans le réseau d’interactions du système social » (Rocher 1972).
À côté de ce patrimoine traditionnel par essence, d’autres types de ressources sont concernés par la numérisation : les ressources d’ordre administratif et gouvernemental (état civil, documents de politique, plans de développement, documents statistiques, résultats électoraux, journaux officiels, registres de commerce, actes notariaux, etc.), d’ordre industriel (brevets, produits manufacturés, etc.), d’ordre communicationnel (archives audiovisuelles, philatéliques, publicitaires, journaux et magazines), d’ordre éducationnel (épreuves d’examen, syllabus), etc. L’Afrique est ainsi un champ en friche sur le plan des trésors documentaires à trouver et à vulgariser. Le travail est déjà entamé notamment, avec les bibliothèques universitaires qui s’inscrivent depuis une dizaine d’années dans la mise en place de bibliothèques numériques axées sur les thèses et les mémoires pour satisfaire la « perspicacité inventive du chercheur » (Ki-Zerbo 1979, 8).
Dans la foulée des indépendances acquises, « la plupart des États ont réussi le pari de la production intellectuelle pour soutenir leurs projets de gouvernements. Cette documentation constitue leur mémoire politique, un patrimoine qui doit être la source d’inspiration des projets actuels et futurs » (Diouf 2017, 19). Le défi est aussi de repérer et d’identifier toute cette manne documentaire de type administratif, commercial, industriel éparse et dispersée, donc « souterraine » et qualifiée de littérature grise, afin d’en sélectionner celle qui est digne d’intérêt et de la transformer numériquement. Ce travail capital de préparation et de sélection ne peut se faire que par une mise à contribution d’une expertise incarnée par les spécialistes de l’information documentaire au sein même de ces espaces, où ils ne jouissent pas toujours d’un regard attentionné de la part des décideurs et décideuses publics comme privés. La gestion documentaire est au cœur du développement et il est temps de mettre fin au chômage massif de cette catégorie socioprofessionnelle en charge d’administrer les connaissances de tous âges. Il s’agit bien de connaissances qui peuvent aussi se vêtir d’informel, car empruntant des canaux de production et de diffusion différents de la documentation formelle précédemment citée.
En plus du patrimoine documentaire, le deuxième sillon du champ en friche concerne le patrimoine oral. Ce dernier est composé de trésors enfouis dans les mémoires individuelles et dans les silos culturels régis pas des codes de transmission cognitive spécifiques, avec une grande part due à l’oralité, une tradition orale qui « est de loin la source historique la plus intime, la plus succulente, la mieux nourrie de la sève d’authenticité » (Ki-Zerbo 1979, 8). C’est dans ce sillon sans doute que se rencontre la part la plus importante du réservoir documentaire africain, celui non reconnu comme scientifiquement valable, mais qui pourtant régit la vie sociale depuis des lustres. Si l’acupuncture chinoise et le bouddhisme himalayen ont pu s’universaliser, et donc, se légitimer, c’est grâce à une attitude de fixation dans le temps et de recours continus à cette mémoire que rien, au départ, ne prédisposait à la mondialisation. Il s’agit d’adopter la même posture en Afrique et de construire tout un vade-mecum de procédures et d’actions pour réaliser cet impératif de fixation et de recours continu. En d’autres termes, il faut arrimer au numérique, la substance des concepts de « tradition vivante » (Ba 1979), de « littérature écrite d’expression endophone » (Maalu-Bungi 2006, 240) et surtout de « parole écrite » ou non écrite, tant la « tradition orale apparaît comme le conservatoire et le vecteur du capital de créations socio-culturelles accumulé par les peuples réputés sans écriture » (Ki-Zerbo 1979, 8). Les espaces d’exercices de recueil pour la fixation seront donc forcément les zones rurales géographiquement identifiables, mais aussi les zones urbaines où les regroupements corporatistes, artistiques, ethniques mettent en interaction les vieux et les personnes moins âgées. À cela viennent s’ajouter toutes les mémoires technologiques analogiques qui « peuplent » les espaces de presse radiophonique et audiovisuelle et qui peuvent jouer le rôle de raccourci pour accéder à des ressources jadis intangibles et dont les auteurs et auteures ont disparu. L’Afrique regorge de tels trésors audiovisuels qu’il urge de numériser pour pérenniser leur accès. Cela permettra de contourner l’obstacle de l’obsolescence des appareils de consultation de ces contenus majoritairement sur bande magnétique, mais aussi en anticipant la dégradation de ces supports.
Il est enfin un sillon encore plus urgent à prendre en charge, celui des vestiges immobiles. Sujets aux œuvres érosives de la nature et dégradations humainement provoquées, des pans de l’histoire et de la préhistoire africaine disparaissent petit à petit de l’horizon pour les générations futures.Il s’agit pêle-mêle d’une sorte d’architecture qu’on peut qualifier de résidentielle (habitats), de religieuse (autels animistes) ou encore de funéraire (tumulus) comme en pays serer (Dupire 1985), qu’il faut impérativement capturer avec les outils technologiques dédiés qui sont disponibles maintenant. Il n’est même pas besoin de faire référence aux monuments colossaux de la vallée du Nil ou encore aux ruines de Zimbabwe pour montrer l’importance qu’ont ces vestiges immobiles dans la construction d’une mentalité décomplexée en Afrique. Les numériser actuellement avec des technologies de plus en plus avancées comme la 3D permettrait de mieux les examiner pour, sans doute, en faire ressortir des éléments encore cachés. Il en découlerait peut-être une fin de l’ignorance du problème de nombreuses civilisations africaines se matérialisant par un « scandaleux oubli » dont elles furent longtemps victimes (Wagret 1955).
Tout cela nécessitera, encore une fois, une convergence de vue et d’action entre décideurs et décideuses, et opérateurs et opératrices tels qu’identifiés précédemment, qui permettra de mobiliser des ressources matérielles et par ricochet d’élaborer des schémas d’exécution normativement cadrés.
Moyens et procédures
Traitement matériel
Comme pour l’ère industrielle, l’ère numérique s’accompagne aussi de sa « mécanisation » sans laquelle sa révolution et son évolution productive ne seraient pas en perpétuel renouvellement. Du point de vue physique comme logiciel, cet environnement foisonne de gadgets sophistiqués, fruits d’une sagesse créatrice et inventive plus prolifique que celle qui fut au cours des siècles antérieurs, plus précisément au XXe siècle. L’état de l’outillage numérique actuellement disponible annihile toute utopie d’accomplir un dessein de numérisation de ressources tangibles et intangibles pour l’Afrique. Il faut juste être bien imprégné du fonctionnement de ces outils, des adaptations pour lesquelles ils ont été confectionnés et des procédés de maintenance à respecter, pour qu’ils jouent pleinement leur rôle dans la durée. L’objectif ici n’est pas de faire un étalage exhaustif et détaillé de tous les appareils pouvant être déployés pour un projet de numérisation. Il est cependant important de faire savoir que les outils de choix pour pareil projet, avec toutes les matières identifiées, seront sans doute de nature patrimoniale.
Pour les ressources tangibles
L’utilisation de scanners de documents patrimoniaux est préconisée pour les documents plus ou moins anciens ou assemblés de façon particulière, un assemblage qui empêche tout désir de « déreliure » des pages pouvant porter atteinte à l’intégrité de la forme, car « toutes les étapes du processus de numérisation, incluant les appareils de numérisation, doivent préserver l’intégrité physique du document » (Anctil et al. 2014), mais aussi des contenus qui y sont véhiculés. Ce sont des documents généralement fragilisés par les effets du temps et qui nécessitent une précaution de manipulation que n’offre pas un scanner automatique ou de défilement qui agit comme une imprimante classique, alimentée feuille par feuille à partir de bacs. Ce dernier type de numériseur siérait plus à des documents d’un jeune âge et dont les écritures contrastent bien avec la teinte du support, assurant un confort de capture et donc de rendu après.
Les artefacts et autres structures immobiles à grand volume, telles que des monuments et autres sites, feraient l’objet d’une numérisation en trois dimensions qui permet de capturer leur forme sous tous les angles. Pour les artefacts, l’idéal serait d’utiliser des numériseurs portables pour éviter de déplacer les objets. Certains, même s’ils sont déplaçables, peuvent être d’un poids assez lourd, et en évitant de les manipuler durant l’opération, on évite de les dégrader ou de les détruire. Pour les structures à grand volume, telles que des monuments historiques, l’utilisation de numériseur laser 3D est à conseiller. La génération d’une documentation 3D, issue d’une numérisation par cette technologie, permet à d’éventuels chercheurs et chercheuses d’avoir des mesures sans avoir à investir physiquement leur terrain d’étude au risque de le détériorer.
Diverses technologies ont été utilisées pour enregistrer et reproduire du son et de l’image, et donner naissance à des documents audiovisuels, donc nativement analogiques. Fixés sur des supports jugés fragiles, ils n’offrent aucune garantie de pérennité d’accès au contenu tenant compte de la forte probabilité de dégradation des supports et de l’obsolescence des matériels utilisés pour les consulter. Les convertisseurs analogiques/numériques existent depuis plus d’une décennie et sont disponibles pour ce genre d’opération. Cet exercice concernant ce type précis de documents est très complexe et nécessite de prendre exemple sur des institutions reconnues pour leurs pratiques efficaces en la matière (la Bibliothèque nationale de France, par exemple), mais aussi de privilégier une coopération interafricaine, voire de type Nord/Sud à dimension bipartite ou multipartite comme le Réseau francophone numérique (RFN).
Pour les ressources intangibles
Il est question ici des dispositifs à utiliser pour capturer les savoirs individuels de la mémoire humaine et les savoirs collectifs que sont les représentations sociales. Les savoirs des individus sont difficiles d’accès parce qu’ils sont dans les lieux de stockage les plus intimes qui soient. L’enjeu ici est d’arriver à capturer ce qui n’est accessible que par la volonté du détenteur ou à son insu. Il faut se rappeler qu’en Afrique le savoir a eu souvent une connotation ésotérique étant transmis de manière initiatique entre maître et disciple, ou de manière filiale dans un cadre purement familial, voire tribal ou clanique, comme l’explique en profondeur Julien Bonhomme (2006) à propos de la transmission du savoir initiatique en Afrique centrale. Éthiquement, il va sans dire que la première option est la seule qu’il faille adopter, c’est-à-dire la pleine collaboration des cibles impliquant que ces dernières soient tout aussi sincères dans leur acte de dévoilement personnel. En conséquence, faudra-t-il mener une sensibilisation de ces parties prenantes à tous les niveaux, avec séances d’explication, dispositifs incitatifs, etc., pour éviter des goulots d’étranglement qui se manifesteraient le plus souvent par leur non-coopération (refus de se faire interviewer, de fournir des documents primaires, etc.)? La fixation de ces connaissances est moins une question d’outils à déployer (n’importe quel téléphone de dernière génération peut jouer le rôle de caméra et d’enregistreur) que d’accès aux personnes ou aux groupes qu’on veut soumettre à l’exercice de « mémorisation numérique ». Il faut donc un contact direct avec les sources orales émettrices et l’un des moyens pour y arriver est aussi de susciter l’organisation de manifestations formelles collectives (conférences thématiques, festivals culturels, foires artisanales, émissions ou reportages télévisuels et radiophoniques, etc.). En définitive, il faut déployer tout un arsenal d’idées pour rendre aisée et efficace la capture de ces savoirs sur support intangible.
Normes et standards
La numérisation pratique obéit à une normalisation conventionnelle et à des lignes directrices généralement admises en fonction des structures qui s’y adonnent, des besoins spécifiques et des ressources dont elles disposent. Cependant, aucun document de normalisation de processus de numérisation ne peut prétendre à l’exhaustivité ni à la finitude, car devant évoluer avec la technologie et le développement des connaissances dans le domaine (Brosseau, Choquette et Renaud 2006). Il s’agira ainsi, pour un projet de ce type, de bien veiller à se doter d’un cahier des charges mettant en évidence toutes les exigences souhaitées en ce qui concerne le choix de matériel et de consignes de numérisation. L’essentiel sera d’adopter les normes existantes en les adaptant au mieux à la nature des ressources à numériser et aux conditions particulières de leur création et de leur délivrance.
Pour les documents imprimés, il faut veiller à ce que ces derniers soient numérisés en respectant les minima en termes de résolution d’image (nombres de points par pouce), de colorimétrie en trouvant des compromis entre la couleur, le niveau de gris et le binaire, et de formats de sortie des fichiers (TIFF, JPEG, PDF) en fonction du but de la numérisation qui peut être orientée vers l’archivage à long terme ou la consultation.
Pour les ressources non imprimées, il est important de veiller au respect des formats de consultation que cette dernière soit sous forme d’écoute ou de visionnage. Un soin particulier sera donc donné aux formats courants en la matière (MP4, AVI, MOV, AIF, MP3, WAV, etc.), mais aussi au choix de métadonnées de structure qui permettent la traçabilité des éléments techniques utilisés pour ces fichiers numériques et faciliter les processus de migrations futures. Ces « métadonnées doivent être intégrées au document, qui doit comprendre toutes les informations techniques nécessaires : niveau de compression, taille des fichiers, nombre de pixels, format, etc. » (IFLA 2004, 11). Un soin particulier sera apporté au nommage des fichiers numériques générés avec des règles précises pour repérer et identifier plus facilement des documents recherchés avant même qu’ils ne soient ouverts, éviter les problèmes lors de transfert et de partage, et permettre leur conservation à moyen et long terme (Dunant Gonzenbach 2013). Il faudra s’inspirer des spécifications normatives en la matière, plus spécifiquement la norme ISO 9660.
Enfin dans un souci d’interopérabilité, il est important de privilégier des formats ouverts comme le XML, pour que les documents numériques ainsi produits puissent s’échanger avec d’autres systèmes de même nature, et favoriser ainsi la visibilité des savoirs africains partout dans le monde.
Traitement documentaire
Indexation
Les éléments de savoir identifiés pour faire objet de numérisation, outre les canaux écrits conventionnels, sont généralement transmis par des canaux locaux faisant la part belle aux langues vernaculaires. Il se posera sûrement, pour des enregistrements numérisés directement au contact des cibles, la question de la compréhension du message, car les codes de déchiffrement ne seront pas partagés par les récepteurs finaux. Il faudra dans ce cas penser à des alternatives sous forme de traduction avec transcription textuelle pour les enregistrements sonores et avec sous-titrage pour les images animées. Ceci est aussi important dans l’optique de description bibliographique et d’indexation manuelle de ces ressources en langues locales, dont la terminologie ne figure pas dans les thésaurus et autres listes de vedettes-matières normalisées courantes. C’est le lieu de penser à construire de pareils systèmes d’organisation de connaissances basés sur des réalités propres au contexte africain, si on veut prendre en compte tous les types de savoirs et leur moyen d’expression. Autrement dit, il s’agit de prendre en compte les termes spécifiques tels qu’ils sont déclinés dans les langues concernées et non pas seulement leur traduction dans des langues plus communément conventionnelles. Une telle initiative demande un travail à la base impliquant différents spécialistes en bibliothéconomie, archivistique, histoire, linguistique et informatique pour mettre en place des thésaurus et autres ontologies visant à décrire et à accéder aux ressources ainsi numérisées. Un défi sera la pluralité linguistique et dialectique immense qui caractérise l’Afrique. En effet, il est utopique de prétendre utiliser toutes les langues, une solution sera alors d’identifier certaines langues transnationales de certaines régions, pour en faire des éléments de base des thésaurus à construire. Ces derniers ne seront pas seulement en format écrit, mais se combineront aussi avec un mode oral pouvant permettre la recherche vocale avec l’utilisation de la technique informatique de « reconnaissance automatique de la parole » déjà disponible, par exemple, avec la recherche Google. Cette disposition permettrait aux personnes non alphabétisées de pouvoir rechercher et accéder à des contenus audiovisuels spécifiques dans des langues qu’ils comprennent. Enfin, l’adoption d’un modèle d’organisation en « cercles concentriques », idée empruntée au président Senghor[5] et cité par Lecoutre (2007), permettra de construire ces thésaurus d’abord au niveau local (niveau sous-régional) et de les fondre ensuite dans un ensemble fédérateur plus vaste et à perspective continentale.
Cette étape de l’indexation est extrêmement importante, car « la gestion efficace de ces documents numérisés implique le développement de techniques d’indexation et d’annotation sémantique » (Coustaty et al. 2012, 94) et l’enjeu est d’enrichir ce secteur de l’organisation scientifique des connaissances par une spécificité purement africaine, car cela participe aussi de la légitimation de tous les savoirs produits sur le continent. Cette thésaurisation aura pour principal effet de simplifier les choix de termes de l’élément « sujet » d’un format comme le Dublin Core qui est devenu, par la force de l’usage, l’un des jeux de métadonnées les plus courants. Ce format, le Dublin Core, permet de définir un ensemble de métadonnées assez simples pour que des non-spécialistes puissent les créer à n’importe quel point du cycle de vie d’une ressource (créateur, propriétaire, gestionnaire, éditeur, utilisateur, etc.), mais suffisamment structurées pour qu’elles puissent être moissonnées sur le web par des outils dédiés (Diouf 2009). Ce format a l’avantage de pouvoir être utilisé pour décrire aussi bien des ressources bibliothéconomiques, archivistiques et muséographiques, et de permettre une interopérabilité (échange de données et repérage de ressources) au niveau de ces trois grandes disciplines de la gestion des savoirs (Bibliothèque nationale de France 2016). Cela est d’autant plus pertinent quand il s’agit, comme imaginé et souhaité ici, de projets conjoints ou de partage des données de ces différentes disciplines (Réseau canadien d’information sur le patrimoine 2017, 24) qui couvrent le champ de friches des savoirs africains. L’utilisation du Dublin Core peut aussi être combinée avec d’autres formats et normes plus spécifiques aux disciplines concernées et cela serait même nécessaire d’un point de vue pratique.
Pour ce qui est de l’indexation automatique obtenue par reconnaissance optique de caractères (OCR) et qui permet la recherche de mots en plein-texte, elle concerne plus les documents nativement imprimés. Pour garantir une « océrisation » optimale, l’accent doit être mis sur le choix des meilleurs outils disponibles actuellement pour diminuer au maximum la marge d’erreur après traitement. Un seuil de 98 % de reconnaissance de caractères est un minimum à exiger vu la qualité des logiciels actuels et qui reconnaissent aisément les caractères imprimés. Cependant, pour certains documents en langue locale ou nationale, il arrivera que des mots ne soient pas bien restitués parce qu’issus d’une transcription phonétique censée représenter les sons de cette langue et que les logiciels d’OCR ne connaissent pas, car ces derniers ne sont pas toujours capables de reconnaître des caractères « exotiques » (André 2003). Il demeure constant que certains sons des langues africaines n’aient pas d’équivalent dans les langues latines ou anglo-saxonnes et des caractères spéciaux ont été créés pour les symboliser, notamment au Sénégal, quand il a fallu dans les années 70, codifier six langues nationales qui n’ont été cependant reconnues officiellement comme telles que plus tard par la constitution de 2001 (Cissé 2011). Cette opération de codification s’est d’ailleurs poursuivie au cours de ces années 2000 avec, par exemple, la langue Menik du Sénégal oriental[6]. Il est donc temps que les développeurs et développeuses de logiciels d’OCR se rapprochent de l’Afrique pour intégrer ce genre de réalité diacritique dans leur produit, ou que les spécialistes africains en informatique et en conception de logiciels s’investissent dans ce créneau de création de logiciel d’OCR pour un marché africain qui sera forcément porteur, vu l’irréversibilité du besoin numérisant. Ils pourront alors profiter d’une de ces opportunités d’affaires que peut offrir l’économie de la connaissance.
Buts et finalités
Les objectifs d’une numérisation peuvent aller de soi pour un professionnel ou une professionnelle de la gestion du savoir à même d’évaluer à sa juste mesure la valeur multidimensionnelle d’un produit de connaissance. On peut mentionner deux objectifs fondamentaux, à savoir : numériser pour conserver et préserver, et numériser pour diffuser à grande échelle.
Préservation
Une des finalités est donc de conserver une ressource numérique en guise de mémoire pour les générations futures. Il s’agit tout d’abord d’une préservation du support numérique qui est généralement un fichier informatique et donc, par ricochet, de son contenu qui est l’information fixée sur ce fichier. Il peut s’agir aussi de préserver l’accès au contenu quand il s’agit d’un fichier informatique disponible en ligne. Dans ce cas précis, il faut veiller à ce que le chemin qui mène au fichier soit toujours ouvert, ce qui implique que la ressource soit sur un serveur en bon état et que le protocole utilisé pour y accéder soit correct. Ces deux dimensions de la préservation sont capitales, étant entendu qu’elles ont un seul effet commun qui est de permettre à ces ressources d’être vues, consultées, exploitées, quelles que soient les temporalités qui entrent en jeu. En effet, pour qu’il y ait démocratisation de l’accès à l’information et aux connaissances en Afrique, il faut que les contenus soient sauvegardés et surtout accessibles de manière pérenne.
C’est le lieu de revoir sans doute les rôles et missions des établissements nationaux à caractère patrimonial que sont les archives, bibliothèques et musées nationaux africains qui, pour la plupart, n’ont pas fait de mue significative dans l’appropriation de la réalité numérique. Il leur faut mettre en place des dispositifs de transposition des caractères du dépôt légal analogique aux documents numérisés et d’archivage de ces derniers, en veillant au respect de leur intégrité, authenticité et disponibilité et en les gardant intelligibles et exploitables sans limitation de durée (Archives nationales de France 2018). Cela permettra de remplir cet objectif de préservation pour le long terme, qui participe de la fabrique continue des identités nationales prises séparément et d’une identité africaine dépassant ces clivages de type national.
Dans une perspective privée, il est à envisager pour les structures concernées de mettre en place des systèmes d’archivage électronique et plus précisément des coffres-forts numériques, pour préserver ces ressources et l’accès aux informations sensibles qu’elles peuvent renfermer.
Diffusion
Comme deuxième face d’une même pièce de monnaie, la diffusion des ressources numérisées a autant de poids que leur préservation. Elle a même quelque part une importance plus reconnue, car elle vulgarise des savoirs méconnus, accroissant ainsi leur visibilité à des niveaux d’audience insoupçonnés, tant les réseaux numériques ont pris les attributs d’autoroutes de l’information et de la connaissance. La combinaison des protocoles de l’Internet (IP) et du web hypertextuel (HTTP), qui constituent l’épine dorsale de l’échange de documents (Diouf 2016), a fini de mailler le monde des connaissances, construisant un vaste cerveau mondial de neurones numériques et de hubs synaptiques. L’Afrique n’est pas en reste, même si sa part de ce réseau demeure relativement faible en termes de quantité. La mesure de cette quantité, en utilisant les outils d’analyse du trafic web et de métré des dispositifs de fourniture de connaissances scientifiques tels que OpenDoar et OpenRoar, peut en attester. Ces deux derniers dispositifs se donnent le but de répertorier tous les dépôts institutionnels et autres bibliothèques numériques en libre accès du monde scientifique et académique à un échelon global.
Bibliothèque numérique et dépôt institutionnel
Les bibliothèques et les dépôts institutionnels sont les outils privilégiés de diffusion. Ils sont soutenus par un écosystème logiciel riche et varié et de plus en plus sophistiqué tout en étant libre d’utilisation (Dspace, Invenio, Omeka, etc.). Ils sont présents en Afrique, mais généralement dans le monde académique, mais trop peu sont encore visibles dans le trafic web mondial, alors qu’ils sont un moyen de diffusion et de vulgarisation de la ressource numérisée tout en remplissant aussi une mission de conservation. L’enjeu est de démocratiser la pratique de la vulgarisation numérique par ce biais, en sortant du sentier académique et scientifique pour prendre en compte les ressources numériques issues des savoirs traditionnels. Il ne s’agira ni plus, ni moins de bâtir des bibliothèques numériques à fort contenu d’ordre culturel et traditionnel, à l’image du projet Manioc qui a pour objet la Caraïbe, l’Amazonie, le Plateau des Guyanes et les régions ou centres d’intérêt liés à ces territoires. Avec des milliers de documents, Manioc contribue à la valorisation du patrimoine et à la constitution de la mémoire de demain, en s’inscrivant dans une démarche de libre accès et en mettant en avant une attitude partenariale susceptible d’assurer sa pérennité (ROAR 2010). Pour réussir ce genre d’initiatives, l’Afrique doit aussi s’inscrire dans la dynamique de partenariat en ce sens, en favorisant la diffusion de ses savoirs sur des plateformes fédératives plutôt que sur des plateformes locales dont la maintenance est souvent éphémère et dont la pérennité est très fragile (Andro et Tröger 2013). En guise d’exemple de bibliothèques numériques, on peut mentionner le projet MATRIX et ses composantes que sont African Language Materials Archive (ALMA), qui propose des documents numériques en langues africaines, et African Online Digital Library(AODL) qui donne accès à des contenus multimédias africains, dont des manuscrits. D’autres exemples sont accessibles dans le guide de ressources en ligne sur l’Afrique élaboré par l’Université Standford[7]. L’Afrique a une opportunité de développer encore plus ce qu’on pourrait appeler des « logosthèques » numériques construits à partir des termes grecs « Lógos » et « Thêkê », pour signifier des lieux de conservation et de prêt/consultation de la parole fixée sur support au-delà des bibliothèques sonores actuelles. Une autre opportunité également est de développer des artothèques, terme déjà utilisé par ailleurs dès 1961, avec l’inauguration de la première du genre en France par André Malraux (ENSSIB 2013), pour manifester les lieux d’expression documentaire de tous les arts intrinsèquement africains, mais sous format numérique. Cela contribuerait à faire de ce continent le lieu de « création » d’une bibliothèque du XXIe siècle qui détiendrait, en quantité, un des composants particuliers sous forme de contenus non conventionnels et qui se chargerait de construire tout l’environnement de normalisation et de pratique documentaire professionnelle, en adaptant également les outils logiciels déjà disponibles.
Droit d’auteur
La diffusion des ressources dans le monde numérique a une autre implication et pas des moindres. En effet, s’y appliquent comme dans le monde analogique les dispositions ayant trait au droit d’auteur. Il est à préciser une bonne fois pour toutes que la numérisation elle-même ne pose pas problème dans ce cas, mais c’est la diffusion et la dissémination qui en découlent qui sont sujettes à la prise en compte des réalités de la propriété intellectuelle. L’enjeu pour l’Afrique est de se doter de politiques cohérentes à ce niveau, en trouvant un juste équilibre entre la nécessité d’un mutuel enrichissement par l’échange ouvert interne de savoirs endogènes et la nécessité de protéger les auteurs et auteures de ces savoirs contre le piratage culturel et la spoliation savante. C’est le lieu de mettre à contribution les instruments internationaux en matière d’encadrement du droit d’auteur, en les adaptant à un contexte continental pas si vierge que ça en la matière. Des entités comme l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) de nature francophone, ou encore l’African Regional Intellectual Property Organization (ARIPO) d’obédience anglophone, ont entre autres pour mission, depuis les années 1970, de mettre en œuvre et d’appliquer les procédures administratives communes de protection de la propriété industrielle, littéraire et artistique africaine.
En ce qui concerne plus spécifiquement le savoir traditionnel, certains pays africains ont des législations qui couvrent ce type de savoir et l’idéal serait une uniformisation au niveau du continent africain. Ce serait formidable que dans la majorité des États africains, par exemple, une loi identique sur les droits d’auteurs serve de bouclier au savoir traditionnel, en incluant le folklore et toutes ces déclinaisons dans la liste des œuvres littéraires et artistiques admissibles à la protection du droit d’auteur normal (EIFL 2011). Cela permettrait de protéger ces représentations sociales, en générant même des revenus pour les individus et communautés qui en ont l’apanage, grâce à de potentielles redevances. Toutefois, il faut éviter que ce droit d’auteur ne soit une chape de plomb. Il importe, pour ce faire, de garder à l’esprit que l’articulation des savoirs locaux et autres savoirs africains, plus reconnus comme formels, avec le numérique doit s’inscrire dans la mouvance des communs, avec une multi-manifestation axée sur la philosophie du « libre ». Une philosophie qui se caractérise comme étant :
[u]n mouvement actuel d’ouverture des ressources numériques : les logiciels libres, le libre accès à l’information, le partage des données, l’écriture collaborative, le Copyleft et les licences Creative Commons. Cette ouverture des « communs de la connaissance » porte la promesse de briser des barrières qui semblaient infranchissables, de mettre en lumière ce qui semblait voilé (Mboa Nkoudou 2015, 7).
Un état d’esprit et axe d’action indispensables à l’Afrique, outre la facilitation de sa visibilité cognitive, pour résorber quantitativement l’écart sur le plan des contenus partagés sur les réseaux numériques, dont elle est créditée de la portion la plus faible actuellement.
Conclusion
Au terme de cette présente réflexion, il apparaît clairement que les enjeux de la numérisation en Afrique sont nombreux et varient selon les objets concernés par cette numérisation. L’un des enjeux importants – et qui a été volontairement occulté dans l’argumentation – concerne les coûts financiers induits par une activité de ce type. En effet, des équipements à mobiliser à la rémunération de différentes ressources humaines, en passant par les coûts de consommation énergétique, des budgets conséquents sont nécessaires. Cependant, cela ne doit pas être un frein à s’investir dans de pareils projets, vu les retombées positives induites. Des retombées que ce chapitre a mises en évidence. La préservation et la valorisation du patrimoine valent toutes les dépenses possibles, d’autant plus que c’est une opération qui n’est généralement pas récurrente et les coûts y afférents sont budgétisés en une seule fois. À cela, il faut ajouter tout un arsenal de technologies libres et de protocoles ouverts qui peuvent être mis à contribution, diminuant ainsi considérablement les coûts de production. C’est le lieu de faire appel sans doute à la coopération Nord-Sud et profiter de l’expérience prodigieuse de la bibliothèque Les Classiques des sciences sociales qui rend accessible une multitude d’œuvres éditées du champ social. Ce sera l’occasion pour ce projet de se réinventer en investissant le champ des connaissances issues d’Afrique qui n’a pas l’occasion de toujours profiter de l’environnement numérique. Nouer des partenariats avec des universités africaines francophones pour numériser leurs produits scientifiques permettrait aux responsables des Classiques des sciences sociales d’élargir leur champ d’action et de viser un autre universalisme pratique en la matière.
La numérisation du patrimoine africain est à inscrire dans une volonté d’inventer et de construire des horizons collectifs pour des millions d’Africains. Ceux-ci sont actuellement grandement spoliés d’un référentiel historique indispensable à leur projection dans un futur, qui est espéré meilleur que leur présent. Le continent est à la croisée des chemins entre la maturité de ses États, indépendants depuis une soixantaine d’années, et une ère numérique à investir, du moment que ces États n’ont pas été contemporains de l’ère industrielle qui a accéléré le développement des pays dits du Centre. L’enjeu est aussi là : prendre l’ère numérique comme une ère d’opportunité, d’autant plus qu’elle cadre bien avec le substrat culturel africain fortement ancré dans la nature. En effet, le numérique induit une autre forme de croissance économique, non basée sur la transformation agressive des matières premières qui est le lot de l’industrialisation classique, mais fondée sur la connaissance démocratisée et étendue de l’écosystème naturel et la manière de l’utiliser à des fins avantageuses tout en le préservant. Une posture adoptée depuis longtemps et depuis toujours par l’Homo africanus dans sa diversité ethnogéographique.
Enfin, c’est le moment de profiter des opportunités technologiques actuelles, tant physiques que logicielles, qui font que le continent est de plus en plus connecté grâce à la fibre optique. Une situation qui permet d’accroitre considérablement sa connectivité. Les logiciels libres sont accessibles pour les utilisateurs et utilisatrices tout comme pour les responsables du développement et de la maintenance permettant la gestion quotidienne de tels dispositifs d’accès et de conservation. À ces forces existantes, il faut ajouter des postures managériales affirmées au niveau continental. Ces dernières se matérialisent par une discussion régulière de la destinée numérique de l’Afrique, avec les Fora sur la gouvernance d’Internet, la vigueur active des chapitres nationaux de l’Internet Society[8] et de l’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN)[9], dont la manifestation la plus palpable et la plus récente est la mise à disponibilité du nom de domaine « .africa », qui donnera une identité géographique univoque à toute ressource numérique d’origine africaine partagée sur le web. Tous les prérequis sont déjà là pour ancrer encore plus l’Afrique dans le train de la numérisation. Le reste est une question de conscience de devoir faire et de volonté d’agir.
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- Pour lire l’explication résumée de cette méthode, voir : https://www.pedagogie.ac-aix-marseille.fr/upload/docs/application/pdf/2014-06/aix-marseille_outils_methodo-_qqoqcp.pdf. ↵
- Lors d’un conseil des ministres tenu en juin 2017, le président sénégalais interpellait les ministres en leur demandant de veiller à l’intensification de la numérisation des archives et documents administratifs (http://www.cndst.gouv.sn/index.php/une/1038-macky-sall-veut-accelerer-la-numerisation-des-archives). ↵
- Voir : https://repository.uneca.org ↵
- Voir https://web.archive.org/web/20060210122814/http://digital.lib.msu.edu:80/projects/africanjournals/index.cfm ↵
- Léopold Sédar Senghor est le premier président de la République du Sénégal et un partisan de la théorie des cercles concentriques lors de la création de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en 1963. ↵
- Voir le Décret n° 2005-985 du 21 octobre 2005 relatif à l’orthographe et la séparation des mots en ménik (http://www.jo.gouv.sn/spip.php?article4795). Actuellement une vingtaine de langues ont été codifiées dans le pays. ↵
- Voir : http://library.stanford.edu/africa-south-sahara. ↵
- Internet Society est une organisation mondiale qui veille à ce que l’Internet reste ouvert, transparent et défini par tous (Internetsociety.org). ↵
- L’ICANN gère le système de noms de domaine ou DNS(Domain Name System) qui a été conçu pour rendre Internet accessible à tout un chacun et pour que les ordinateurs puissent s’identifier entre eux et s’interconnecter grâce à des identifiants uniques (icann.org). ↵