12 Déterminants socioéconomiques de la réussite scolaire des adolescents/jeunes de l’arrondissement de Tchaourou

Bill-Lucas Kintomonho

Résumé

La réussite scolaire est déterminée par l’ensemble des connaissances et compétences de chaque apprenant. Plusieurs conditions favorisent une bonne assimilation des connaissances et le développement des compétences chez chaque apprenant. Des études comme celles menées par Sauvy (1970) et Entwistle (1978) ont montré que l’origine sociale des apprenants détermine leur réussite scolaire.

Notre étude a pour objectif de mettre en évidence l’existence d’une relation entre certains facteurs socioéconomiques et la Réussite Scolaire des Adolescents/Jeunes de l’Arrondissement Central de Tchaourou.

Les analyses issues de cette étude révèlent que dans l’arrondissement de Tchaourou :

  • les Adolescents/Jeunes issus de familles polygames ont une propension de réussite à l’école plus élevée que ceux issus de familles monogames;
  • les Adolescents/Jeunes dont le niveau d’étude des parents est primaire ou plus réussissent moins que ceux ayant des parents d’aucun niveau;
  • les Adolescents/Jeunes issus de familles aisées ont plus de chance de réussir que ceux issus de familles moins aisées.

Mots-clés : Facteurs socioéconomiques, Réussite scolaire, Adolescents/Jeunes

 

Introduction

L’éducation est un puissant levier de l’épanouissement humain car elle a une forte incidence sur le développement des capacités humaines et institutionnelles. Elle est perçue comme une priorité et l’école comme le lieu privilégié pour acquérir des connaissances et vivre des expériences éducatives utiles. Elle est devenue primordiale pour tous les individus du monde et le droit à l’éducation est de nos jours impératif. La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH), adoptée à l’Organisation des Nations Unies (ONU) en 1948, affirme que « toute personne a droit à l’éducation ». Pour toutes ces raisons, elle occupe une place prépondérante dans les projets de développement de tous les pays du monde. Face aux nombreux défis posés au monde, l’Afrique doit elle aussi compter sur l’éducation car celle-ci joue un rôle de plus en plus central dans la réussite des nations, dans leur développement économique, social et culturel en particulier et des personnes en général (Kalamo, 2012, p. 1). Ainsi, les gouvernements du monde ont fait de l’éducation une composante importante de leur développement économique et social à travers la mise en place de stratégies de renforcement et d’amélioration des systèmes éducatifs. Cependant, un système éducatif efficace ne garantit pas forcément un meilleur rendement scolaire des apprenants. Un système éducatif efficace est celui dans lequel on ne retrouve ni abandon, ni redoublement. « Durant ces dernières années, l’opinion que la réussite à l’école constitue un objectif essentiel, voire un enjeu économique et social pour le développement, est une des idées promues par l’ensemble des États africains » (Sorgho, 2008, p. 4). Malgré leurs efforts, les résultats scolaires, notamment ceux des examens nationaux, sont peu concluants. Ainsi, selon les statistiques du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique sénégalais, les taux de réussite au baccalauréat dégringolent d’année en année. De 2013 à 2016, ces taux sont respectivement de 39 %, 31,3 %, 31,3 % et 36,6 %. Ces taux permettent de conclure que seul environ un tiers des candidats réussissent chaque année à cet examen depuis 2013. Ces taux relativement bas révèlent un taux d’échec assez élevé.

Selon le plan décennal de développement du secteur de l’éducation (2013, p. 36), on a connu au Bénin en 2010, un taux de réussite au CEP, au BEPC et au BAC respectivement d’environ 65 %, 45 % et 35 %. Six ans plus tard, ces taux sont passés respectivement à 39,26 %, 16 % et 30,13 %. Nous observons également dans ce pays une chute assez considérable des taux de réussite aux examens nationaux. À travers ces faibles taux, l’école n’atteint pas son objectif principal, celui de faire assimiler les connaissances aux apprenants. Ces faibles taux reflètent sans doute le niveau général des apprenants. Pour expliquer ce phénomène, on doit d’abord en déterminer quels sont les facteurs qui expliquent la réussite scolaire des apprenants. Les résultats scolaires varient d’un apprenant à l’autre. Plusieurs facteurs expliquent les différences de résultats entre des apprenants ayant acquis les mêmes connaissances. Notons que la réussite scolaire est  corrélée avec les résultats scolaires. C’est-à-dire que lorsque les résultats scolaires sont meilleurs, la réussite est au bout. La réussite scolaire peut être appréhendée en fonction des résultats cognitifs et des résultats non-cognitifs des apprenants. Cette étude vise à analyser la réussite scolaire en termes de résultats non-cognitifs des adolescents/jeunes de l’arrondissement central de Tchaourou. Elle a pour objectif d’appréhender les déterminants socioéconomiques de la réussite scolaire de ces adolescents/jeunes. Ainsi la question de recherche est la suivante : quels sont les déterminants socioéconomiques de la réussite scolaire des adolescents/jeunes de l’arrondissement central de Tchaourou?

1. Revue de littérature

Cette partie vise à faire le point sur les connaissances aussi bien théoriques qu’empiriques relativement à notre sujet. Nous allons d’abord procéder à la définition de quelques concepts et faire ensuite une synthèse des résultats de recherche de différents travaux et théories sur le sujet.

1.1. Clarification conceptuelle

a) Réussite scolaire

Le Grand Robert définit la réussite comme étant « un bon résultat, un heureux succès ».

La réussite est également définie comme la « poursuite d’un but couronnée de succès » (Landsheere, 1992, p. 2; cité par Walet et al., p. 12) et comme « les compétences, attitudes, valeurs et connaissances effectivement acquises par l’intéressé » (Legendre, 1993, p. 126; cité par Walet et al., p. 12). Le terme « scolaire » renvoie à l’école, à l’enseignement qu’on y reçoit. Ainsi, la réussite scolaire peut se définir comme un bon résultat, un succès, au terme d’une année scolaire, dans l’acquisition de connaissances par un apprenant.

D’autres auteurs relativisent la notion de réussite de différentes manières. « On peut considérer qu’il y a réussite par rapport aux mesures purement scolaires de passage de classes et d’examens » (Pasquier, 1992; cité par Sorgho, p. 13). C’est donc une définition uniquement centrée sur les aspects évaluatifs et leurs corolaires d’avance ou de retard. « La réussite scolaire indiquée en général, par les notes, représente le principal critère de passage des élèves d’un niveau à l’autre ou d’une filière à l’autre du système d’enseignement » (Assogba, 1984; cité par Sorgho, p. 13). Réussir à l’école, c’est donc avoir de bonnes notes. Dans le cadre de la présente étude, nous adoptons les concepts de Pasquier et d’Assogba. Ainsi, la réussite scolaire est le passage en année supérieure à la fin d’une année académique.

b) Adolescents/jeunes

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), est adolescent tout individu dont l’âge est compris entre 10 et 19 ans. La catégorie « adolescent » chevauche celle des jeunes (15-24 ans) et la « population jeune » englobe les individus de 10 à 24 ans.

Pour notre étude, nous nous sommes intéressés à la « population jeune » au sens large, en accordant une attention particulière à la tranche d’âge 12-24 ans que nous avons considérée comme le groupe d’âge représentant les adolescents/jeunes.

1.2. Résultats obtenus par les auteurs

La réussite scolaire peut se diviser en deux composantes. On distingue la réussite scolaire en fonction des résultats cognitifs (académiques) des élèves et la réussite scolaire en fonction des résultats non-cognitifs des élèves (Basque, 2014, p. 28). Pour la réussite scolaire en fonction des résultats non-cognitifs, on traite des résultats reliés aux aspects comportementaux, sociaux, moraux, éthiques, esthétiques, affectifs et à l’éducation physique (Basque, 2014, p. 28). « Lorsqu’on traite des résultats cognitifs des élèves, on fait référence aux connaissances et aux compétences acquises dans les matières scolaires et ceci est mesuré par les résultats des élèves aux épreuves normalisées » (Basque, 2014, p. 28).

Pour certains auteurs, l’origine sociale est le facteur essentiel qui explique la réussite ou l’échec à l’école mais pour d’autres par contre, les facteurs scolaires ou encore individuels seraient les mieux indiqués pour rendre compte d’un tel phénomène (Sorgho, 2008, p. 1). Selon Cherkaoui (1999, p. 41), « les théories explicatives de la réussite scolaire peuvent être brièvement classées en deux groupes. Les théories déterministes qui privilégient les facteurs relatifs au passé de l’individu et soulignent les différences qualitatives entre les sous-cultures de classe dans lesquelles les individus sont socialisés et les théories actionnistes ou individualistes développées par des économistes néoclassiques et certaines écoles sociologiques dont celle de Boudon » (cité par Sorgho, 2008, p. 1). Ces derniers s’appuient plutôt sur les variables liées à l’avenir, aux projets sociaux et scolaires ainsi qu’au pouvoir de décision rationnelle des individus. Mais, s’il existe plus qu’un débat controversé autour de ce qui pourrait expliquer mieux ou pas la réussite ou l’échec scolaire, l’origine sociale est cependant une conclusion à laquelle aboutissent la plupart des études empiriques sur les questions de réussite ou d’échec scolaire. En effet, les résultats de nombreuses recherches établissent des relations entre les performances scolaires et les variables de l’origine sociale. Parmi ces recherches, on peut retenir entre autres les écrits de sociologues, de sociolinguistes et de psychologues aussi bien aux États-Unis, en Europe qu’en Afrique.

C’est ainsi qu’en Europe, Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron soutiennent l’idée d’une liaison entre la culture des étudiants et leur origine sociale (Sorgho, 2008, p. 2).

De même, Alain Gras rejoint Bourdieu en affirmant que chez l’enfant, « les variables de la réussite dans l’enseignement post primaire sont la profession de son père, le niveau d’instruction de ses parents, l’habitat, la motivation de la famille vers les savoirs et l’instruction » (Gras, 1974; cité par Sorgho, 2008, p. 2). Pour Gras tout comme Sylvain Coster et Ferdinand Hotyat, ces facteurs influencent les succès à venir autant que les dispositions intellectuelles et le caractère de l’enfant. Mais bien avant, Sauvy (1970) « avait prouvé que les enfants de classes favorisées réussissent plus à l’école que ceux issus de classes sociales défavorisées » (cité par Sorgho, 2008, p. 2). Entwistle (1978) va dans le même sens. « Il estime que la classe sociale est un déterminant incontestable de l’éducation car la distribution des étudiants au niveau de l’enseignement secondaire et supérieur est corrélée avec le niveau de revenus et d’occupation des parents » (cité par Sorgho, 2008, p. 2). Aussi, selon une étude du Ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle ivoirien (p. 11), « d’aucuns considèrent que la réussite scolaire est influencée par l’origine sociale tandis que d’autres stipulent que certaines variables scolaires et caractéristiques inhérentes à l’enseignant ne suffisent pas pour rendre compte du niveau de réussite scolaire ».

 

Ndoye (2008, p. 3) affirme que « plusieurs conclusions de recherche font état de multiples facteurs socioéconomiques (profession des parents, scolarité des parents, travail de la mère, nombre d’enfants dans la famille, pratiques éducatives, etc.) interagissant les uns avec les autres et pouvant avoir un effet sur la réussite scolaire ».

Selon Basque (2014, p. iii), « la réussite scolaire est expliquée par les résultats antérieurs des élèves, la qualité de l’enseignement et le statut socioéconomique des élèves ». Aussi, la réussite scolaire est déterminée par la qualité de l’enseignement ainsi que la motivation et l’engagement des élèves (Basque, 2014, p. iii).

Ndoye (2008, p. 1) à travers son article estime que deux facteurs socioéconomiques ont un lien statistiquement significatif avec la réussite académique des filles à la fin de l’école élémentaire au Sénégal. Ces deux facteurs sont les sources de revenus de leur mère et la disponibilité de matériels pédagogiques.

Mais bien avant le développement des liens entre origine sociale et réussite scolaire des apprenants, l’éducation est davantage une nécessité individuelle. Ainsi, Gary Becker à partir de 1964 développe la théorie du capital humain, théorie de la « demande individuelle d’éducation ». L’idée principale de cette théorie est que des individus ont des salaires plus importants parce qu’ils ont une plus grande « productivité marginale » due à un plus grand niveau d’instruction (cité par Mano, 2013, p. 8).

Mincer (1974) enrichit la théorie de Becker et établit les bases économétriques du lien existant entre le salaire et le nombre d’années d’études. Ancré dans la théorie du capital humain, Mincer considère qu’il existe deux moyens d’en acquérir : l’éducation et l’expérience professionnelle. Selon lui, le cycle de vie est divisé en deux temps : une période durant laquelle l’individu s’éduque et une période durant laquelle il travaille qui commence à la fin de la précédente et finit à l’âge de la retraite. Concernant la période d’éducation, Mincer pose certaines hypothèses : elle est homogène c’est-à-dire que toutes les années d’études apportent le même niveau de connaissances (en qualité et en quantité). De plus, il n’existe pas de dépréciation du capital humain. Ce modèle implique que les individus acquièrent un savoir négociable sur le marché du travail quand ils terminent leurs études. Conscient de cette incohérence, Mincer introduit une nouvelle variable pour prendre en compte le fait que les individus continuent d’investir dans leur capital humain pendant qu’ils travaillent : il s’agit de l’expérience professionnelle. Alors qu’avec l’unique variable “éducation”, le salaire est constant dans le temps, l’ajout de la notion d’expérience professionnelle donne un salaire concave (cité par Mano, 2013, p. 11-12).

En somme, les auteurs convergent vers la même conclusion, celle stipulant que l’inégalité sociale entre les apprenants est un facteur déterminant dans leur réussite scolaire.

2. Démarche méthodologique

2.1. Milieu et population d’étude

a) Milieu

La commune de Tchaourou est située dans le département du Borgou et s’étend sur une superficie de 7 256 km2 soit 28 % de la superficie totale de ce département et environ 6,5 % du territoire national (Afrique Conseil, 2006, p. 10). Elle est la plus vaste commune du Bénin en matière de superficie. Elle est délimitée au nord par les communes de Parakou, Pèrèrè et N’Dali, au sud par la commune de Ouèssè, à l’est par la République fédérale du Nigeria et à l’ouest par les communes de Bassila et Djougou. Cette commune est subdivisée en sept arrondissements (Tchaourou, Tchatchou, Sanson, Goro, Bétérou, Kika et Alafiaou) organisés en 36 villages et quartiers de ville comprenant plusieurs localités.

La collecte des données dans le cadre de ce travail s’est déroulée dans l’arrondissement central de Tchaourou.

  b) Population d’étude

La population statistique étudiée ici est l’ensemble des adolescents/jeunes de l’arrondissement central de Tchaourou ayant entre 12 et 24 ans et fréquentant l’école au moment de l’enquête.

2.2. Source des données

La démarche méthodologique adoptée dans le cadre de cette étude est l’approche de recherche quantitative. Nous avons procédé à l’administration des questionnaires « Foyer familial » et « Adolescents/jeunes ».

Le questionnaire « Foyer familial » nous a permis d’enquêter auprès de 2 000 foyers familiaux de l’arrondissement central de Tchaourou après en avoir répertorié 4 000.

Le questionnaire « Adolescents/jeunes » a été administré aux adolescents/jeunes (individus ayant un âge compris entre 12 et 24 ans) situés dans les foyers familiaux constituant notre échantillon. Nous avons à cet effet un échantillon de 2 191 adolescents/jeunes.

2.3. Méthodes statistiques

a) Analyse descriptive

Pour cerner les variables indépendantes corrélées à la variable d’intérêt (réussite scolaire), nous allons procéder à une analyse bivariée qui consiste à croiser chaque variable explicative à la variable d’intérêt. L’existence de liaison entre la variable dépendante et les variables explicatives est appréhendée grâce au test de Chi-2 au seuil de 5 % (respectivement 10 %).

b) Analyse économétrique

Les variables indépendantes les mieux corrélées seront celles qui figureront dans le modèle économétrique. Ici, la variable d’intérêt « réussite scolaire » prend la valeur 1 si l’adolescent/jeune est admis et 2 sinon. Elle est binaire, ainsi le modèle logit s’avère le mieux approprié pour une telle étude.

Le modèle logit consiste à calculer le logarithme népérien (ln) des odds et à les régresser sur les variables explicatives. La quantité  est appelée logit.

3. Résultats et discussions

3.1. Analyse bivariée de la réussite scolaire

a) Niveau d’instruction des parents/tuteurs et réussite scolaire

Le niveau d’instruction des parents/tuteurs influe sur la réussite scolaire des adolescents/jeunes scolarisés à un seuil de 5 %. Les adolescents/jeunes dont les parents/tuteurs ont un niveau d’étude secondaire/supérieur (82,41 %) réussissent plus que ceux dont les parents/tuteurs ont un niveau d’étude primaire (70,65 %) ou n’ont aucun niveau d’étude (76,79 %).

 

 

 

 

Graphique 1 : Répartition du taux de réussite selon le niveau d’instruction des parents

Pearson chi2(2) = 6.7690 Pr = 0.034

Source : Nos travaux à partir des données de l’enquête ENSPD 2016

 

b) Situation familiale des apprenants et réussite scolaire

Le taux de réussite des adolescents/jeunes scolarisés vivant dans un foyer polygame est de 79,44 % (respectivement 71,59 %). Les adolescents/jeunes vivant dans les foyers polygames réussissent plus que ceux qui vivent dans les foyers non polygames. La situation familiale des adolescents/jeunes influe sur leur réussite scolaire à un risque d’erreur de 5 % car la p-value du test de Chi-2 est inférieure à ce seuil.

Graphique 2 : Répartition du taux de réussite scolaire selon la situation familiale de l’adolescent/jeune

Pearson chi2(1) = 7.7460 Pr = 0.005

Source : Nos travaux à partir des données de l’enquête ENSPD 2016

 

c) Statut dans l’activité des chefs de foyer et réussite scolaire

Le statut dans l’activité du chef de foyer détermine la réussite scolaire des adolescents/jeunes scolarisés à un seuil de 10 %. Le taux de réussite des adolescents/jeunes dont les chefs de foyer sont cadres supérieurs/cadres moyens (85,06 %) est plus élevé que ceux dont les chefs de foyer sont employés de bureau/ouvriers (69,86 %) ou travailleurs à leur propre compte/employeurs (74,67 %).

Graphique 3 : Répartition du taux de réussite scolaire selon le statut dans l’activité du chef de foyer

Pearson chi2(2) = 5.7628 Pr = 0.056

Source : Nos travaux à partir des données de l’enquête ENSPD 2016

 

d) Principal mode d’éclairage et réussite scolaire

La réussite scolaire chez les adolescents/jeunes scolarisés est influencée par le mode d’éclairage. Il existe une liaison entre la réussite scolaire et le mode d’éclairage à un seuil de 10 %. Les adolescents/jeunes qui réussissent les plus sont ceux utilisant l’énergie électrique (fournie par la SBEE ou celle fournie par un groupe électrogène), la lampe à pétrole et la lampe à pile chargeable. Cependant, nous ne pouvons pas affirmer avec exactitude que les adolescents/jeunes utilisant les lianes et feuilles d’arbres échouent les plus car ils ne représentent que 0,11 % des adolescents/jeunes scolarisés.

Graphique 4 : Répartition du taux de réussite scolaire selon le principal mode d’éclairage

Pearson chi2(5) = 9.2942 Pr = 0.098

Source : Nos travaux à partir des données de l’enquête ENSPD 2016

 

3.2. Analyse explicative de la réussite scolaire

a) Interprétation des résultats

Le modèle logistique effectué est globalement significatif car sa probabilité critique (Prob > Chi-2 = 0,00) est inférieure au seuil du test qui est fixé à 5 %. La courbe ROC qui permet de mesurer la sensibilité du modèle précise le degré d’acceptation d’une régression logistique. Pour cette régression, la courbe ROC affiche un coefficient de discrimination ayant pour valeur 0,7470 soit 74,70 %, ce qui signifie que la discrimination faite est bonne. Les outils d’interprétation que nous utiliserons ici sont les « odds ratios » et les effets marginaux. Ils sont récapitulés dans le tableau ci-dessous.

Tableau 1 : Listes des variables explicatives en fonction de leurs coefficients, odds ratios et effets marginaux

Variables explicatives Coefficient Odds ratios Effets marginaux P > |z|
Situation familiale de l’adolescent/jeune (ref = foyer non polygame)
Foyer polygame 0,8081039 2,24 0,1198 0,048
Niveau d’instruction du parent/tuteur (ref = aucun)
Primaire -1,278619 0,28 -0,2105 0,000
Secondaire/supérieur -0,2854844 0,75 -0,0441 0,560
Statut dans l’activité du chef de foyer (ref = employé de bureau/ouvrier)
Cadre supérieur/cadre moyen et assimilé 1,376855 3,96 0,1378 0,019
Principal mode d’éclairage (ref = lampe à pile/chargeable)
Electricité (SBEE) 1,078522 2,94 0,1653 0,000

Source : Nos travaux à partir des données de l’enquête ENSPD 2016

 

– Les odds ratios

Un adolescent/jeune vivant dans un foyer polygame a 2,24 fois plus de chance d’être admis (de passer d’une classe à une autre) que celui vivant dans un foyer non polygame.

Un adolescent/jeune ayant un parent/tuteur avec un niveau d’étude primaire a 3,57 fois moins de chance d’être admis que celui ayant un parent/tuteur qui n’a aucun niveau d’étude. Cette chance passe à 1,33 fois si le parent/tuteur de l’adolescent/jeune a un niveau d’étude secondaire/supérieur.

Un adolescent/jeune dont le chef de foyer est un cadre supérieur ou un cadre moyen a 3,96 fois plus de chance d’être admis que celui dont le chef de foyer est un employé de bureau ou un ouvrier.

L’adolescent/jeune qui utilise l’énergie électrique fournie par la SBEE a 2,94 fois plus de chance d’être admis que son homologue qui utilise une lampe à pile/chargeable comme principal mode d’éclairage.

– Les effets marginaux

En passant d’un adolescent/jeune vivant dans un foyer polygame à celui vivant dans un foyer non polygame, la probabilité de réussite scolaire augmente de 0,1198.

La probabilité pour qu’un adolescent/jeune soit admis en ayant un parent/tuteur de niveau d’étude primaire diminue de 0,2105 comparativement à celui ayant un parent/tuteur qui n’a aucun niveau d’étude. Cette probabilité diminue de 0,0441 lorsqu’on passe d’un adolescent/jeune dont le parent/tuteur n’a aucun niveau d’étude à son homologue dont le parent/tuteur a un niveau d’étude secondaire/supérieur.

En passant d’un adolescent/jeune dont le chef de foyer est un employé de bureau ou un ouvrier à celui dont le chef de foyer est un cadre supérieur ou un cadre moyen, la probabilité de réussite scolaire augmente de 0,1378.

La probabilité de réussite scolaire augmente de 0,1653, lorsqu’on passe d’un adolescent/jeune utilisant une lampe à pile/chargeable comme principal mode d’éclairage à son homologue utilisant de l’énergie électrique fournie par la SBEE.

b) Synthèse des résultats et commentaires

Le but de cette étude étant d’appréhender les caractéristiques socioéconomiques de la réussite scolaire des adolescents/jeunes de l’arrondissement central de Tchaourou, nous avons à cet effet ciblé certaines caractéristiques susceptibles d’influer sur la réussite scolaire dans cet arrondissement. Ces caractéristiques non cognitives sont notamment sociales (niveau d’instruction du parent/tuteur, situation familiale de l’adolescent/jeune) et économiques (statut dans l’activité du chef de foyer, principal mode d’éclairage) avec une caractéristique du logement (principal mode d’éclairage) considérée comme économique.

Les adolescents/jeunes dont le chef de foyer est un cadre supérieur ou un cadre moyen réussissent plus que ceux dont le chef de foyer est employé de bureau ou ouvrier. Plus le niveau d’étude d’une personne est élevé, plus elle a de chance d’occuper une grande fonction et donc d’avoir une activité plus rémunérée (théorie du capital humain de Becker). Une personne ayant une activité bien rémunérée aura forcément un niveau de vie élevé. Tout cela explique le fait que les adolescents/jeunes dont le chef de foyer est un cadre supérieur ou un cadre moyen vivent dans un milieu plus favorable aux études (la possibilité d’avoir des encadreurs de maison, de disposer de matériel didactique comme les livres d’exercice, etc.). Ceux-ci disposent probablement de l’énergie électrique fournie par la SBEE et donc sont plus enclins à réussir à l’école que ceux dont le chef de foyer est un employé de bureau ou un ouvrier et qui utilisent une lampe à pile/chargeable. Certaines études ont en effet montré que les caractéristiques du logement influencent les résultats scolaires des apprenants.

Dans l’arrondissement central de Tchaourou, les familles les plus aisées sont polygames, ce qui explique pourquoi un adolescent/jeune vivant dans un foyer polygame peut mieux réussir que celui vivant dans un foyer non polygame.

Les adolescents/jeunes ayant un parent/tuteur de niveau d’étude primaire ou plus réussissent moins que ceux ayant un parent/tuteur qui n’a aucun niveau d’étude. Ce constat contredit les résultats d’autres études. Toutefois, remarquons que les facteurs cognitifs de l’adolescent/jeune influent positivement sur sa réussite scolaire. Ainsi, dans l’arrondissement central de Tchaourou, le niveau d’instruction des parents/tuteurs n’a pas d’effet sur la réussite scolaire de leurs enfants. Un adolescent/jeune disposant de capacités intellectuelles plus élevées réussit mieux que celui qui en a moins et ce, quel que soit le niveau d’instruction de ses parents/tuteurs.

Conclusion

L’éducation est primordiale pour l’ensemble des individus car elle a une forte incidence sur le développement des capacités intellectuelles, humaines et institutionnelles. Ainsi, tous les pays du monde investissent dans l’éducation, afin de rendre performant leur système éducatif. Certains pays du monde y sont déjà parvenus. Pour d’autres comme les pays d’Afrique en général et ceux d’Afrique de l’Ouest en particulier, de nombreux efforts restent encore à fournir dans ce sens.

Au Bénin, les taux de réussite aux examens nationaux depuis quelques années sont assez déplorables. Le taux d’échec à ces examens est de plus en plus grand. Il convient donc d’appréhender les déterminants de la réussite scolaire chez les apprenants. C’est dans cette perspective que notre étude s’est intéressé à l’arrondissement central de Tchaourou avec pour objectif d’appréhender les déterminants socioéconomiques de la réussite scolaire des apprenants de cet arrondissement.

L’analyse de l’ensemble des résultats de cette étude révèle essentiellement que les adolescents/jeunes issus de familles polygames réussissent à l’école mieux que ceux issus de familles monogames; les adolescents/jeunes dont le niveau d’étude des parents est primaire ou plus réussissent moins que ceux ayant des parents d’aucun niveau; les adolescents/jeunes issus de familles aisées ont plus de chance de réussir que ceux issus de familles moins aisées.

Références bibliographiques

Afrique conseil (2006). Monographie de la commune de Tchaourou. Cotonou : Afrique Conseil.

Basque, M. (2014). Les déterminants de la réussite scolaire dans les écoles efficaces. Thèse de doctorat (Administration et évaluation en éducation), Université Laval, Québec, Canada. En ligne : www.theses.ulaval.ca/2014/30976/30976.pdf

Kalamo, A. (2012). Des déterminants des performances scolaires à la fin de l’enseignement élémentaire au Sénégal : Cas de l’Inspection Départementale de l’Education de Vélingara, dans la région de Kolda. Mémoire de master en éducation et formation (Science de l’éducation), Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal.

Mano, M. (2013). De l’utilité de s’éduquer : remise en question de la linéarité du rendement de l’éducation sur le salaire en France. Mémoire de Master (Economie Théorique et Empirique), Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne, Paris, France.

Ministère en charge de l’éducation (2013). Plan décennal de développement du secteur de l’éducation actualisé phase 3 / 2013-2015. Cotonou, Bénin.

Ndoye, A. K. (2008). Des déterminants socioéconomiques de la réussite scolaire des filles à la fin de l’école élémentaire au Sénégal. Université Cheikh Anta Diop, Département de Psychopédagogie, Sénégal. En ligne : http://fastef.ucad.sn/Lien11/abdoukarimndoye.pdf

Portail officiel du gouvernement béninois (2006). Tchaourou, récupéré le [13 juin 2017] de http://gouv.bi/departemants/le-departemant-du-borgou/tchaourou.

Sorgho, R. (2008). Origine sociale et performances scolaires : analyse de l’influence des facteurs socioéconomiques sur les résultats scolaires. Etude de cas du lycée Rialé et du collège Naaba Zoungrana de Tenkodoro. Mémoire de maîtrise (Sociologie), Université de Ouagadougou, Ouagadougou, Burkina Faso.

Walet, A. et al. (2010). Les déterminants pédagogiques de la réussite scolaire : le cas des écoles du Centre d’Animation Pédagogique de Torokorobougou dans le District de Bamako. Bamako : Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Éducation.

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