2 L’enseignement dans l’Afrique noire pré-coloniale

Dans la mesure où l’aspect coutumier et rituel a plus que tout autre été envisagé jusqu’ici, il est nécessaire de chercher à dégager plus nettement, après les méthodes et les techniques d’éducation, celles de l’enseignement dans la société africaine pré-coloniale. Dans ce domaine, l’analyse des faits (sans entrer dans le détail de leur conditionnement économique, politique et historique) conduit à distinguer le cas des populations africaines non islamisées de celles des populations islamisées; et ensuite l’enseignement général de l’enseignement professionnel.

1. Enseignement général

Chez les populations africaines non islamisées, l’enfant au cours de son évolution acquiert généralement toutes ses connaissances à travers la vie familiale et sociale : sur le plan pratique en observant et imitant les actes des adultes et au cours des nombreux et différents jeux collectifs; sur le plan théorique en écoutant les aînés et les « anciens », en les interrogeant dans le cadre de l’activité quotidienne ou lors des veillées à travers les causeries, les contes, légendes, devinettes et proverbes. Plus tard, ce bagage est complété par le jeune homme en assistant aux palabres, aux différentes cérémonies et manifestations publiques. Enfin lors de l’initiation, les aspects déjà décrits s’accompagnent aussi de l’acquisition de connaissances générales concernant des domaines aussi variés que les plantes, la vie sexuelle ou la vie religieuse, et qui viennent compléter là encore celles acquises au jour le jour dans les périodes précédentes de l’évolution de l’enfant.

A ces aspects que l’on retrouve également chez les populations africaines islamisées, vient s’ajouter l’enseignement coranique. Ce dernier est donné par les marabouts aux enfants dès l’âge de 6 à 7 ans et consiste essentiellement à apprendre tout d’abord par cœur le Coran, puis des éléments d’arabe permettant de lire, d’écrire, et quelquefois de parler la langue; en tout cas d’être capable d’expliquer et de commenter le Coran. L’enseignement qui dure trois à cinq ou six ans selon les méthodes utilisées est complété par des connaissances profanes puisées dans différents traités de droit, histoire, géographie, etc. et correspond à un niveau élémentaire. A la fin de ce cycle couronné par une cérémonie grandiose, l’adolescent acquiert le titre de « Malam » ou « Alfa » et est habilité à enseigner à son tour. En cas d’interruption, il saura dire correctement ses prières. Le nouveau « diplômé » peut poursuivre ce qui correspond à un enseignement supérieur auprès de son marabout ou de marabouts réputés pour leur savoir qui groupent aussi autour d’eux de nombreux disciples. Dans certain nombre de villes renommées existaient des universités : Tombouctou dont la fameuse Université de Sankoré avait une renommée très grande dans le monde musulman, Dinguiraye au Fouta, Sokoto en pays haoussa, Djenné dans la boucle du Niger et bien d’autres. Certains maîtres de ces établissements sont restés célèbres par leur réputation et leur production : Ahmed Baba, Mohamed Koti El Tombouctou, le Cheick Ousman dan Fodio de Sokoto, etc.

2. L’enseignement professionnel

L’apprentissage d’un métier revêt pratiquement la même forme dans toutes les régions d’Afrique Noire.

En ce qui concerne le métier de cultivateur ou d’éleveur, l’enfant apprend très jeune à cultiver en accompagnant le père au champ, ou dans son propre petit lopin de terre, à garder moutons et chèvres et plus tard les troupeaux de boeufs comme auxiliaire d’un adulte ou de façon indépendante. Quant à la plupart des autres métiers, leur apprentissage se fait au sein des corporations professionnelles correspondantes : forge, travail du bois, cordonnerie, tissage. etc. Dans le cas de métiers héréditaires, la famille transmet à l’enfant et à l’adolescent les techniques et recettes empiriques gardées, qu’il devra à son tour transmettre plus tard. Les secrets importants ne sont transmis en général qu’à l’aîné des enfants mâles ou quelquefois à celui des enfants jugé le plus digne pour les recevoir, s’en servir, les garder dans la famille.

Le jeune homme poursuit cet apprentissage pendant longtemps et il n’est pas rare de voir des jeunes gens mariés travailler encore sous l’aile de leurs aînés et continuer ainsi à se perfectionner.

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