15 Margaret Blakers (1951-), Australie

Marie-Pier Grenier

Margaret Blakers

Margaret Blakers est l’une des environnementalistes les plus illustres d’Australie. Elle est connue comme l’organisatrice du premier Atlas of Australian Birds, ainsi que comme l’une des activistes et conseillères politiques les plus influentes du parti Australian Greens. Elle est d’ailleurs la fondatrice et la directrice du think tank Green Institute.

Il existe plus d’une façon d’influencer un changement positif et se battre pour ce dont on croit. Pour Margaret Blakers, cette façon fut de devenir conseillère politique et activiste environnementale.

Une vocation précoce

Blakers est née à Melbourne en Australie en 1951 dans une famille quelque peu engagée politiquement. Lors de son parcours scolaire, elle déménagea avec sa famille à Canberra, où sa mère jugeait la qualité du système scolaire assez pauvre. Cette dernière a donc fait campagne avec d’autres acteurs politiques pour qu’une réforme indépendante soit mise sur pied. Bien que cette réforme fut instaurée après le passage de Margaret au secondaire, il va sans dire que le cran de sa mère a contribué à former le caractère revendicateur de l’environnementaliste en devenir.

Comme plusieurs autres jeunes femmes intéressées par l’environnement, elle fut inspirée par la lecture du livre Silent Spring de Rachel Carson lors de son adolescence. Blakers explique que c’est à ce moment qu’elle est devenue environnementaliste sans trop le savoir. Elle s’est d’ailleurs inscrite à tous les cours possibles et disponibles en écologie à l’Autralian National University lors de son parcours de 1969-1972.

Déjà, à sa sortie de l’université, tout ce que Margaret Walkers désirait faire était de travailler à améliorer le sort de l’environnement. Toutefois, les emplois de cette sorte n’étaient pas communs ni abondants en Australie dans les années 70. Elle fit ses débuts professionnels en 1973 au sein du Ministère australien de l’Agriculture, dans le département des pesticides.

Des insectes aux oiseaux

Heureusement pour elle, son souhait de travailler plus sérieusement sur des enjeux environnementaux fut exaucé rapidement; la même année, elle fut recrutée par le secrétariat du Committee of Inquiry into the National Estate. Ce comité faisait partie de l’Australian Heritage Commission, qui avait pour but de vérifier l’état de santé des environnements naturels australiens faisant partie du patrimoine.

Après un an de travail acharné, elle retourna à son poste au département des pesticides. Insatisfaite du travail qu’elle y accomplissait, elle déménagea en Allemagne pendant un an. Là-bas, elle devint assistante d’un laboratoire où elle menait des recherches sur la vision des insectes.

De retour à Melbourne en Australie vers 1975, Blakers s’engagea encore une fois au ministère de l’Agriculture, mais cette fois dans le département du blé. N’y trouvant pas véritablement son compte non plus, elle passait tout son temps libre à s’impliquer dans des causes écologiques diverses.

C’est en 1976 que la carrière de Blakers s’est mise à prendre un chemin plus satisfaisant. Elle a été engagée en tant qu’organisatrice pour L’Atlas des oiseaux australiens. Elle y est restée pendant sept ans. Ce sont ces sept années qui ont été cruciales dans la carrière de Margaret Blakers puisque ce poste lui a permis de rencontrer d’autres environnementalistes et de se créer un réseau professionnel étendu. Elle a aussi voulu s’impliquer dans la bataille contre la construction du barrage hydroélectrique Franklin en Tasmanie, mais son travail avec l’Atlas lui grugeait trop de temps pour lui permettre d’y jouer un rôle significatif.

Activisme

Margaret fit ses premiers pas d’activiste de carrière en 1984, lorsqu’elle devint la coordonnatrice du mouvement environnemental dans l’enquête contre la Victorian Timber Industry. Les groupes environnementaux voulaient créer un front commun contre la compagnie. Ils devaient donc harmoniser leurs discours pour avoir plus d’impact. C’est Blakers qui avait la mission de coordonner les négociations entre ces groupes et permettre une prise de position commune à tous. Cette première expérience en tant que coordonnatrice et activiste lui donna le désir de poursuivre dans cette voie. Il va sans dire que ce ne fut pas la dernière ni la plus petite des initiatives auxquelles elle a participé!

Melbourne étant la capitale de l’État de Victoria, cette ville fut le théâtre de plusieurs campagnes environnementales menées par Margaret Blakers, notamment des campagnes de protection de lieux naturels, comme les forêts de Gippsland, véritable réserve naturelle avec une biodiversité très importante. Blakers s’est aussi impliquée dans la conservation des cours d’eau victoriens (European Greens). En 1992, elle a contribué aux efforts de ses collègues Peter Christoff et Janet Rice pour mettre sur pied un parti vert dans la province de Victoria.

Carrière politique

La carrière politique de Margaret Blakers prit son envol en 1996, lorsqu’elle est devenue une des conseillères du sénateur Bob Brown, membre du parti des Verts australiens (Australian Greens). Elle est restée à ses côtés pendant dix ans; son travail consistait à organiser les activités quotidiennes du parti et du sénateur. Elle joua aussi un rôle de support pour les politiciens nouvellement élus du même parti à Canberra.

Par la suite, de 2000 à 2001, elle s’est mise à la tâche d’organiser le premier congrès des partis verts de toutes les provinces australiennes (Global Greens Congress), en partenariat avec d’autres environnementalistes australiens illustres, comme Louise Crossley, Bob Brown et Christine Milne. L’année suivante, elle est retournée en politique pour les Australian Greens afin de faire une revue stratégique du parti, ce qui l’a amenée à faire le tour de l’Australie en voiture en six semaines.

C’est cette même année, au mois de novembre 2002, que le diagnostic tomba : Margaret Blakers était atteinte du cancer du sein. Cette femme travaillante dut arrêter de travailler plus de six mois pendant ses traitements, mais cela ne lui convenait pas. Malgré son état, elle a tout de même complété un dossier dans lequel elle exposait la conduite insouciante du Scientifique en Chef (Chief Scientist) de l’époque, Robin Batterham. La crédibilité de ce dernier était remise en cause puisqu’il assumait ce poste en même temps qu’il travaillait pour le géant de l’énergie Rio Tinto (Fowler, 2003).

Une fois rétablie, Blakers fit un retour en politique en compagnie de Bob Brown, tout en continuant son travail avec les Global Greens. Robert James Brown, de son nom complet, était à l’époque un sénateur australien représentant les Australian Greens.

C’est en 2008 que Margaret Blakers a mis sur pied l’organisme pour lequel elle est le plus connue: le Green Institute. Ce think tank  produit des rapports et des études sur des enjeux environnementaux qui sont très utilisés par les Australian Greens. Elle en est d’ailleurs toujours la directrice générale à ce jour. La mission de cet organisme est décrite ainsi sur leur site Internet:

The Green Institute’s mission is to support green politics through education, action, research and debate. Green politics means broad community-wide change grounded in the principles of ecology, social justice, democracy, non-violence, sustainability and respect for diversity. (The Green Institute)

Margaret Blakers est une femme d’exception qui travaille dans un domaine qui n’est pas facile à gérer. Les fonds et les subventions pour les organismes environnementaux ne sont pas les plus fréquents ni les plus élevés. Elle a expliqué en entrevue que cette situation la rend impatiente. Pour elle, il est évident que des actions doivent être prises immédiatement, si bien qu’elle reste bouche bée devant ceux qui ne croient pas que l’environnement soit une priorité.

Féministe elle-même, Margaret Blakers reconnaît que le rôle des hommes et des femmes dans la lutte pour l’environnement est tout de même empreint de sexisme. Durant la même entrevue, elle a dit ceci:

I think women are prepared to put up with a lot more. It’s quite extraordinary watching key male leaders who never have to wash up, put away chairs and so on after a meeting. I find it really hard just to walk out without doing it. Men are more prepared to demand their rights – pay and conditions for example – than women, particularly women of my generation. I tend to put up with things rather than demand.

Men are more prepared to put themselves in the front row of representing the group or being recognized. And that’s society’s expectation too, I think it’s very deeply embedded – still. (Jane, 2011)

Toujours en tant que féministe, elle explique qu’elle n’a jamais ressenti le besoin urgent de se caser et de fonder une famille. Elle se dit chanceuse en ce sens, puisqu’aujourd’hui elle est libre d’aller où elle le désire et de faire ce qu’elle veut sans contraintes familiales. Ce type de discours n’est pas commun chez les femmes de son âge, qui ont souvent vécu avec la pression sociale de créer une famille.

Enfin, Margaret Blakers encourage les jeunes femmes environnementalistes à entrer dans la bataille, mais de ne pa s’attendre à ce que ce soit facile. Elle dit d’ailleurs:

It’s bloody hard work. To get anywhere you’ve just got to keep pushing, pushing, pushing.   There’s not a lot of support. There’s no money. You can’t underestimate those practical things of having a computer of one’s own and a place to put it. […] You just need to have a lot of determination. (Jane, 2011)

Il ne fait aucun doute que le courage et la détermination dont fait preuve Margaret Blakers sauront inspirer les autres jeunes femmes. Elle est une femme d’exception.

Références

Castles, Ian (1988), Yearbook Australia, Australian Bureau of Statistics : Canberra, 980 p.
http://pandora.nla.gov.au/pan/134287/20120604-0915/ (consulté le 27/10/15)

Elix, Jane (2011), « Margaret Blakers », blog WordPress, 27 juillet.
janeelix.wordpress.com/2011/07/27/margaret-blakers/index.html (consulté le 27/10/15)

Fowler, Andrew (2003), « Transcription d’une entrevue avec Dr Peter Cook », ABC Australia.
http://www.abc.net.au/7.30/content/2003/s1006343.htm (consulté le 27/10/15)

Ray, Michael (2015), « Bob Brown », Encyclopaedia Britannica.
http://www.britannica.com/biography/Bob-Brown (consulté le 27/10/15)

Fiche biographique de Margaret Blakers sur le site internet officiel du Parti vert européen (2015) :
http://europeangreens.eu/content/profile-margaret-blakers (consulté le 27/10/15)

Site internet officiel du Green Institute (2015) :
https://www.greeninstitute.org.au/about-green-institute (consulté le 27/10/15)

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