Au-delà de la neutralité
14 Neutralisation et engagement dans des controverses publiques
Approche comparative d’expertises scientifiques
Robin Birgé et Grégoire Molinatti
Note
Malgré les consignes du comité éditorial, nous n’avons pas adopté l’écriture épicène. Nous pensons pourtant partager une entente commune concernant le constat d’une société hétéropatriarcale, dont la visibilité dominante est attribuée au genre, ou plutôt au sexe, masculin. Nous n’avons malheureusement pas trouvé une nouvelle écriture qui nous convient et nous ne sommes pas convaincus par l’écriture qui viserait à rendre visibles équitablement les hommes et les femmes, car notre aspiration consiste à l’indifférenciation du genre dans un texte. Par « le chercheur », nous entendons la fonction de chercheur, et non un individu de sexe masculin. La forme neutre nous semble appauvrir la langue (remplacer « le chercheur » par « les chercheurs » ne signifie pas tout à fait la même généralité et ces nuances nous paraissent importantes à garder pour ne pas simplifier la langue), tandis que l’utilisation du doublet (« le chercheur et la chercheuse ») nous rappelle à chaque usage l’existence de genres/sexes différents alors que nous souhaitons l’indifférenciation.
Nous proposons dans ce chapitre une réflexion sur l’heuristique ouverte par le dépassement du modèle de neutralité des sciences en société. Trois enquêtes d’anthropologie de la connaissance dans un contexte français nous permettent d’interroger la responsabilité sociale de chercheurs en situation de controverse qui se sont engagés dans la construction collective d’une expertise publicisée. Nous commençons par préciser nos partis pris épistémologiques. Nous proposons ensuite de mettre en perspective trois exemples récents d’expertises scientifiques collectives : la première concerne l’écotoxicologie d’organismes génétiquement modifiés agroalimentaires et se revendique comme neutre. La seconde, relative à l’exploration/exploitation par hydrofracturation des gaz de schistes, propose une forme de dépassement de la neutralité par un processus de neutralisation. Enfin la dernière, qui s’inscrit dans le cadre de la réforme du droit de la famille en France est revendiquée comme une expertise dite engagée.
L’affirmation d’une science ancrée dans un monde qu’elle participe à construire
Dans ce chapitre, nous assumons le parti pris épistémologique selon lequel la neutralité en sciences n’est pas tenable, dans le sens où même si nous pouvons voir une cohérence dans un modèle objectiviste de la science, il ne nous est pas enviable si nous défendons une discussion publique sans arguments d’autorité. Le dictionnaire du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL) indique comme définition de la neutralité le « caractère, attitude d’une personne, d’une organisation, qui s’abstient de prendre parti dans un débat, une discussion, un conflit opposant des personnes, des thèses ou des positions divergentes » (CNRTL, 2017a). La neutralité en recherche est étroitement intriquée à la notion d’objectivité, entendue tantôt dans sa dimension ontologique, quand le monde extérieur, celui des « faits », est en dehors du sujet qui l’étudie; tantôt dans sa dimension épistémique, à savoir qu’une méthodologie scientifique permet de rendre ce réel accessible par la mise à distance, en dehors de soi, afin de l’étudier. L’objectivité du monde, ou son objectivation, permettrait au chercheur de ne juger qu’à l’aune de critères dits strictement « cognitifs ». Or, nous abordons nos travaux de recherche avec le postulat que cette neutralité du jugement, qui écarterait les valeurs dites « morales », est illusoire. Nous entendons ainsi qu’une recherche est finalisée, selon les intérêts singuliers des chercheurs. En un certain sens, toute recherche est construite, car elle élabore des connaissances selon un point de vue situé. Les défenseurs de la neutralité axiologique font la chasse aux biais cognitifs qui déformeraient l’objet de recherche; mais nous défendons que le biais forme l’objet, d’après sa définition « point de vue sous lequel une chose se présente » (CNRTL, 2017b). Ce relativisme postule une chose : qu’il n’y a pas de monde tout fait, qu’il n’existe aucune vérité essentielle, universelle, extérieure au langage et aux croyances. La conséquence de l’absence de fondements absolus induit la difficulté de hiérarchiser les connaissances, sauf en fonction de nos besoins et de nos préférences. L’inverse du relativisme est bien l’absolutisme, la recherche de vérité absolue, universelle et fondée objectivement. Nous reprenons ainsi à notre compte un postulat pragmatiste qui considère qu’il n’y a pas de différence de « nature » ou fondamentale entre les discussions portant sur les faits et les discussions portant sur les valeurs. Ce sont bien les discussions argumentées sur les faits comme sur les valeurs qui fondent le débat public.
Dans nos sociétés contemporaines, les relations entre savoirs scientifiques et pouvoirs économiques et politiques sont marquées, depuis les années 1970-80, par des transformations majeures. Dominique Pestre (2003) caractérise ce régime de sciences en sociétés par les nouvelles pratiques de sciences qui, sur le modèle des bio-techno-nano-sciences, engagent les universités dans des logiques essentiellement marchandes en phase avec le nouvel ordre économique libéral. Les savoirs sont produits dans des logiques de court terme.
Ils sont aussi produits au sein de sociétés où s’affirme une omniprésence du risque. Dans une « société du risque » (Beck, 2001), la production et la distribution des risques (incertains, globaux et cumulatifs), hérités de la modernité, occupent une place centrale. En effet, nos sociétés en forte croissance font face à un développement technologique porteur de risques nucléaires, biotechnologiques, de dégradation de l’environnement, etc. La science étant à l’origine de ces maux, il ne peut plus s’agir de gérer un monde extérieur menaçant et incertain, déléguant cette mission à une élite savante, les « experts », supposément les seuls capables d’évaluer et de gérer ces risques; ce qui revient à reconnaître une « dissolution du monopole social de la science sur la vérité » (Beck, 2001: 366).
Face d’une part à la demande massive de sécurité et d’autre part à la crainte de perte de légitimité des États et des institutions, l’appel à l’expertise reste très important, autant que la contestation de celle-ci; ce mouvement paradoxal est en quelque sorte un fil conducteur des études de sciences qui travaillent à comprendre les liens entre recherche scientifique et décision politique.
En Occident, l’émergence d’une méfiance généralisée envers les sciences date des années 1960-70. Cette méfiance est impulsée d’une part par le mouvement critique de la raison instrumentale formulée par l’École de Francfort, mais également par le mouvement (d’auto)critique des sciences et de contestation des choix, des pratiques scientifiques et du progrès technique (Quet, 2009). Le mouvement critique des sciences s’accompagne d’une critique de l’expertise en tant qu’instrumentalisation politique du discours scientifique par le pouvoir : les experts faisant partie intégrante des pouvoirs en place, on dénonce une forme d’autoritarisme de l’expertise, voire de confiscation du pouvoir.
Le contexte global de l’expertise en démocratie étant posé, il s’agit désormais d’aborder un paradoxe ancien, mais qui demeure pertinent à travailler dans le contexte renouvelé des controverses socioscientifiques publiques. La position épistémique dominante au sein de la communauté scientifique peut être qualifiée de réaliste, à savoir qu’il existe en soi un monde extérieur à la pensée, qu’une connaissance objective et neutre de ce monde est possible, ce qui permettrait un progrès social. Par ailleurs, les exigences de la démocratie, comme organisation de gouvernance en vue de construire un monde commun par l’accord du peuple, présupposent que chaque voix individuelle, chaque point de vue singulier est à considérer selon une éthique égalitaire. C’est ainsi que le statut de l’expert scientifique en démocratie est paradoxal. En effet, si nous définissons l’expert dans un sens strict, comme un scientifique qui doit répondre à une question définie par le politique pour laquelle, en contexte de controverse, les données scientifiques accessibles ne permettent pas de conclure, alors il lui faut proposer une réponse à la question qui lui est posée. C’est ainsi qu’il est choisi sur la base de sa présupposée compétence, car on présuppose qu’il a un accès privilégié au réel. Ce choix suggère que la parole de l’expert est plus intéressante, plus pertinente qu’une parole non experte, ce qui va à l’encontre du postulat démocratique.
Face à la critique de l’expertise, il y a généralement deux craintes, deux spectres (dans le sens « d’apparition effrayante ») de réponses envisageables. D’un côté le renforcement de la légitimité traditionnelle de l’expertise est sous-tendu par une épistémologie réaliste, et donc la peur de la confiscation du pouvoir qui en découle (par exemple, le fait de privilégier l’avis d’un spécialiste plutôt que celui d’un non-spécialiste). De l’autre côté altérer les frontières entre science et non-science, relativiser le pouvoir de la « grande science » pourrait conduire à une forme de nihilisme, à savoir la perte de la hiérarchie des valeurs (notamment de la distinction entre connaissance et croyance) et la perte de la potentialité de fonder une connaissance pertinente nécessaire à une transformation sociale du monde (par exemple, une société « ultralibérale » où tous les avis seraient équivalents, où chaque communauté de pensée vivrait selon ses propres règles, les unes à côté des autres).
Mais comment les scientifiques en situation d’expertise autour de controverses publiques envisagent-ils ces paradoxes? Dans quelle mesure proposent-ils un dépassement du statut paradoxal de l’expert en démocratie? Pour préciser ce que nous pensons du rapport qu’entretiennent les chercheurs à l’expertise, leurs manières d’appréhender leur responsabilité sociale, nous nous appuyons sur trois enquêtes d’anthropologie de la connaissance. Plus précisément, nous empruntons notre approche à l’anthropologie de la communication, qui articule des objets hétérogènes tels que des discours médiatiques de chercheurs ou à leurs propos, des discours issus d’entretiens que nous avons menés, des pratiques de communication, et des discours circulants dans des sphères supposément cloisonnées (« scientifiques », « médiatiques », « sociales »). Il s’agit dans les trois cas de sujets d’expertise vivement controversés dans l’espace social en France. Ces expertises sont collectives, c’est-à-dire construites à plusieurs chercheurs, rendues publiques (ce que nous appelons « publicisation »), et leur communication a été prise en charge directement par les chercheurs ou par leurs institutions. À chaque fois, les chercheurs se positionnent, dans leur mode de fonctionnement, sur la neutralité, soit en l’acceptant comme telle sans réellement la réinterroger, soit en se « débarrassant » en quelque sorte de la « neutralité axiologique » du chercheur individuel. Dans ce dernier cas, nous verrons que deux options différentes permettent aux chercheurs de dépasser l’horizon inatteignable, ou plutôt non-enviable, bien que souvent prôné, de la neutralité.
Avant de proposer une compréhension des postures d’expertise, nous pensons nécessaire, en cohérence avec les partis pris épistémologiques exposés ci-dessus, d’expliciter nos positions relatives aux controverses envisagées.
Déclarations d’intérêts
Notre intérêt n’est pas, en premier lieu, d’être partie prenante dans les controverses étudiées. Cela dit, notre positionnement est un « biais » tel que nous l’avons défini, c’est-à-dire dans notre façon de construire notre objet de recherche et non pas dans l’accès fantasmé à des faits bruts d’observation. Les deux auteurs sont contre la légalisation des organismes transgéniques à des finalités directes ou indirectes d’alimentation, mais également opposés à l’exploitation des gaz de schiste. Mais nous considérons surtout que la focalisation sur ces techniques et leurs risques environnementaux et sanitaires permet l’illusion de pouvoir faire l’économie d’une discussion politique sur des questions vis-à-vis desquelles nous nous exprimons pour des réductions globales des consommations, un développement de techniques agroécologiques et des énergies renouvelables. Nous sommes par ailleurs tous les deux favorables à la légalisation de la procréation médicalement assistée pour tous. Le premier auteur est favorable à la gestation pour autrui (sa position ayant changé avec l’enquête) alors que le second y est plutôt opposé, du fait des risques d’instrumentalisation/marchandisation du corps qui peuvent se poser. Mais ne nous méprenons pas sur les accords ou désaccords « de surface ». Une position technique, voir technicienne (pour ou contre quelque chose), ne suffit pas selon nous à « faire société », et c’est en cela que nous nous entendons : sur l’intérêt d’un débat public argumenté orienté sur le sens à donner aux choix. L’intérêt porté sur la discussion « dit » peut-être plus sur notre « biais » que notre position réciproque sur les objets de la controverse. Les déclarations d’intérêts ne prenant en compte que des liens financiers ne nous semblent pas forcément apporter quelque chose à la compréhension de notre propos, telle que nous aurions pu le formuler trop simplement ainsi : « Nous déclarons n’avoir reçu aucun financement privé pour mener à bien nos recherches. Au moment de l’enquête, l’un des directeurs de thèse[1] de l’un de nous est partie prenante de l’expertise collective étudiée concernant l’exploration/exploitation des gaz de schiste. »
Une expertise neutre… dans la tradition du Grand Partage
« Oui, les OGM sont des poisons! », titre là une de l’hebdomadaire généraliste du Nouvel Observateur du 20 septembre 2012 (Malaurie, 2012). Grosses lettres capitales noires bordées de blanc, sur fond d’un gros plan d’épis de maïs jaune, introduit par une phrase qui précise le sujet, en lettres capitales blanches sur bandeau rouge : « les révélations d’une étude de scientifiques français ». On apprend dans cet article de presse que la revue américaine de renommée internationale Food and Chemical Toxicology a publié, la veille, une étude coordonnée par le professeur Séralini. Le laboratoire qui a mené l’étude est une institution singulière, dans le sens où elle est fondée en 1999 par un politique écologiste, Corinne Lepage, le médiatique et écologiste pharmacien Jean-Marie Pelt, ainsi que le biologiste moléculaire Gilles-Éric Séralini. L’écotoxicologie est la discipline qui allie écologie scientifique et toxicologie, notamment par l’étude des effets d’agents polluants sur les écosystèmes. Il s’agit ici de mettre en doute l’innocuité de la consommation d’un maïs transgénique produit par la firme Monsanto, interdit à la culture en Europe, mais importé comme nourriture notamment pour le bétail. L’étude se base sur un protocole mené sur 200 rats, dont une partie ont ingéré pendant deux ans des croquettes à base de semences dudit maïs, traités ou non avec du Roundup, ou alimentés avec de l’eau contenant de faibles doses de cet herbicide produit également par Monsanto. Au bout d’un an d’expérimentation, les résultats concluent à l’apparition significativement plus importante de pathologies et de tumeurs chez les rats nourris avec maïs transgénique comparés à des rats témoins.
Le dossier du Nouvel Observateur, notamment à l’aide de l’évocation de l’imaginaire du scientifique incarné sur des photos de chercheurs en blouses blanches et de rats avec des tumeurs, a été produit dans le cadre d’un embargo médiatique, à notre connaissance sans précédent, réservé à quelques journalistes seulement. Deux éléments de communication sont d’ailleurs concomitants à cette médiatisation de l’étude scientifique. Lepage (2012) publie un livre deux jours après la publication de Séralini, intitulé La vérité sur les OGM, c’est notre affaire, qui s’appuie sur ladite étude pour faire pression sur les politiques afin de demander des études de longue durée sur les organismes génétiquement modifiés. Mais ce n’est pas tout, puisque Séralini (2012) lui-même publie un livre le 26 septembre intitulé Tous Cobayes!, associé à un documentaire du même nom réalisé par Jean-Paul Jaud (2012) sorti la même semaine, et relatant l’histoire de l’expérimentation. Dans les pages du même magazine, on apprend également un paradoxe assumé par les auteurs de l’étude. Le but politique de cette étude est de pousser les politiques à financer des études à long terme d’écotoxicologie en changeant les normes européennes de contrôle d’autorisation de mise sur le marché. Séralini critique notamment les études à court terme, de surcroît quand elles sont sujettes à des conflits d’intérêts, à savoir quand elles sont menées ou financées par des groupes de l’industrie agroalimentaire ayant des intérêts économiques à l’autorisation de mise sur le marché des produits transgéniques.
Les auteurs de l’étude se sont donc tournés vers un acteur un peu inattendu : la grande distribution. Selon Séralini, suite aux scandales sanitaires des années 1990 comme la vache folle, les mesures gouvernementales rendant responsables de la qualité des produits les distributeurs autant que les producteurs, ont poussé la grande distribution à se pencher sur la sécurité sanitaire de leurs produits, dont Gérard Mulliez, le fondateur d’un des plus gros distributeurs au monde, Auchan. D’où le financement à hauteur de plus de trois millions d’euros, et dans le secret, de l’étude de Séralini via le Comité de Recherche et d’Information Indépendantes sur le Génie gÉNétique (CRIIGEN) par plusieurs acteurs de la grande distribution, via l’association CERES et la Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme (et dans une moindre mesure des fonds publics). Si Séralini se défend de tout conflit d’intérêts, à l’instar de ceux qu’il dénonce dans l’industrie agroalimentaire, pour la raison que c’est le CRIIGEN qui a reçu l’argent, une interface autonome qui a pu rendre possible cette étude, il s’avère que l’argent reste celui de la grande distribution. La rhétorique de Séralini insistera par la suite sur le besoin de financement massif d’études écotoxicologiques à long terme, instrumentalisant ainsi son étude scientifique pour une visée politique. On apprend également sur le site de L’Obs (Cousseau, 2012) que la (ultra) médiatisation de l’étude, orchestrée par Séralini lui-même, est « aussi une obligation demandée par les financeurs de l’étude ».
Dans la foulée de la médiatisation de la publication scientifique, la controverse est réactivée de manière explosive dans l’espace public. De nombreux chercheurs font rapidement part de leur expertise dans les médias, adoptant une temporalité argumentative médiatique sans commune mesure avec la temporalité des études scientifiques (Piron et Varin, 2014). Il s’agit pour eux de se positionner dans la presse généraliste sur des arguments scientifiques, sur la médiatisation de l’étude, ou encore sur d’éventuels conflits d’intérêts en jeu. Concernant le débat scientifique, les critiques principales portent sur la faiblesse statistique de l’échantillon, la pertinence du choix de la souche de rats, le manque de données sur certains points, la longueur de l’étude, l’échantillonnage trop petit. Mais comme l’argumentent Piron et Varin (2014), c’est certainement la pratique anormale d’un jeu se positionnant sur plusieurs champs, médiatico-politique et scientifique, perturbant ainsi le « cadre normatif dominant », qui serait à l’origine de la virulence de la controverse. Et en effet, Séralini et son équipe ont bien publié dans une revue à comité de relecture, et ainsi acquis un gain de scientificité correspondant au cadre normatif de la science, mais ils ont également orchestré leur stratégie de communication dans la sphère sociale extrascientifique à visée explicitement politique[2], court-circuitant le temps de la relecture et des réponses au sein de la communauté scientifique, brouillant ainsi les frontières sciences-sociétés et jouant de ce Grand Partage sans pour autant remettre en cause le postulat de neutralité.
Dans ce contexte, les ministres de la Santé, de l’Environnement et de l’Agriculture saisissent l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation et du Haut Conseil aux Biotechnologies (HCB), pour une expertise de la publication. Les deux expertises concluent à un manque de scientificité de la publication et au rejet de ses conclusions. La mission du HCB (s.d.a) est d’« éclairer de manière indépendante le gouvernement sur toutes questions intéressant les OGM ou toute autre biotechnologie ». Cet éclairage s’opère par le biais de deux structures : le comité scientifique, qui « évalue les risques des biotechnologies pour l’environnement et la santé publique » (HCB, s.d.b), et le comité économique, éthique et social qui « se prononce sur les aspects économiques, sociaux et éthiques des biotechnologies et de leurs applications ». Ce partage en deux domaines de compétence traduit en soit une épistémologie du Grand Partage avec d’un côté l’éthique et de l’autre l’expertise scientifique. La signification que nous accordons à cette organisation correspond à une volonté de « protéger », de « sanctuariser » l’expertise scientifique dans sa « tour de neutralité ».
Parmi les expertises collectives spontanées, nous nous sommes intéressés à celle publiée par six académies scientifiques. Le texte discrédite la publication de Séralini, et disqualifie sa communication publique :
deux responsabilités apparaissent clairement. D’une part celle de la revue qui, nous l’avons dit, n’aurait jamais dû accepter cet article, ce qui est grave, car l’expertise de l’article par les revues tient lieu d’évaluation initiale par les pairs. La seconde responsabilité est celle de G. E. Séralini d’avoir orchestré à l’avance une surmédiatisation à partir de résultats contestables n’apportant aucun commencement de preuve.
Le communiqué se poursuit ainsi par des recommandations, des « premières leçons » à tirer pour une éthique de l’encadrement institutionnel de la communication de résultats scientifiques. La neutralité comme norme de bonne conduite scientifique est prônée, mais également incarnée dans la forme du communiqué, dans ce choix de ne pas signer nommément. Les académies des sciences donnent à voir non seulement une volonté d’absence de jugement moral sur les objets normaux des sciences expérimentales (ici, l’écotoxicologie d’un maïs transgénique), mais aussi que cette amoralité s’applique également au sujet de la production de normes éthiques sur la circulation des discours du savoir produit (cette amoralité est relayée par certains sous la dénomination « jugements cognitifs »). Cette expertise communique ainsi un savoir unique, totalement désincarné de tout sujet, tout en bénéficiant de l’aura qu’apporte la construction collective et l’institution à laquelle elle appartient, les Académies. La légitimité du rapport communiqué semble maximale, d’autant plus que le processus de construction, le nom des auteurs et leur accès semblent verrouillés. Nous retenons de cette enquête avant tout la difficulté de rencontrer des membres des Académies. De nombreuses prises de contact sont restées sans suite, d’autres refusèrent des entretiens, certains acceptèrent, mais sans possibilité d’enregistrement, tandis que d’autres se sont rétractés, car le sujet était trop « brûlant ». Cette déresponsabilisation des auteurs, prise dans une idéologie de Grand Partage, nous semble cohérente mais autoritaire dans l’édiction de règles universelles, non pas au nom des rédacteurs de l’expertise, ni même au nom des institutions, mais au nom de « La Science ». Dans la mesure où les conditions de production du discours ne sont pas discutables, il nous semble que la portée pour le débat social est faible. Notons que cette expertise a donné lieu à une pétition signée par 140 scientifiques en forme de réponse à l’académie des sciences. Les signataires y critiquent le processus de communication de l’expertise des académies qui parlent au nom d’une communauté sans pour autant en avoir la légitimité représentative. Les méthodes sont critiquées, mais ce qui semble commun à la majorité des protagonistes – dont ces signataires, les académiciens de l’expertise, les membres du HCB impliqués dans l’expertise et Séralini lui-même – réside dans l’affirmation d’une science neutre et indépendante.
L’invocation explicite ou implicite de la neutralité, convoquée à tour de rôle par les acteurs de la controverse, porte en elle l’autorité critiquée par les études de sciences dites constructivistes, et place le débat (ou la lutte) sur le terrain de la légitimité : qui est le plus neutre de tous? Nous ne rentrerons pas dans les détails, mais toute la controverse va porter sur cette querelle de légitimité. Les institutions n’auront de cesse de délégitimer l’étude de Séralini, notamment par son caractère « engagé ». L’article sera même retiré en novembre 2013 en prétextant non pas fraude ou erreur, mais que les données de l’étude ne permettaient pas de conclure, pour finalement être publié à nouveau dans le journal Environmental Sciences Europe (Séralini et al., 2014). Plus généralement, les efforts de Séralini et des cosignataires de son étude vont avoir une portée politique certaine puisque des fonds publics seront débloqués pour des recherches écotoxicologiques à long terme.
La neutralisation collective des points de vue individuels
La seconde enquête concerne la controverse née de l’octroi de permis d’exploration/exploitation des gaz de schistes par hydrofracturation dans le sud de la France. Courant 2010, une opposition sociale explosive s’est exprimée, de nombreux collectifs s’étant alors constitués de manière à faire entendre leur opposition à une technique jugée polluante pour l’environnement. Dans ce cadre, des membres de deux laboratoires de géosciences du sud de la France s’autosaisissent pour faire valoir leur expertise dans l’espace public (Molinatti et Simmoneau, 2015). Initialement, ce sont les chercheurs favorables à cette exploitation, la plupart spécialistes de la géologie des réserves d’hydrocarbures, dont certains même ont des projets de recherche avec des entreprises d’exploitation des ressources, qui ont décidé de communiquer publiquement leur expertise face à ce qu’ils considèrent être une opposition publique irrationnelle. La motivation de ces chercheurs à communiquer leur expertise relève de ce qui a pu être qualifié par ailleurs de deficit model (Irwin et Wynne, 1996), au sens où la contestation publique est mise sur le compte d’un déficit de connaissances des citoyens critiques quant aux risques réels d’une innovation technoscientifique. Cependant, des chercheurs plus sensibles aux risques environnementaux décident ensuite de rentrer dans le processus d’expertise communiquée publiquement : conscients, pour certains d’entre eux, au niveau individuel, de potentiels conflits d’intérêt et du mirage de neutralité dans l’expertise d’une controverse environnementale. Ce faisant, les chercheurs ont collectivement procédé à l’effacement des points de vue individuels. Pour autant, ils n’ont ni discuté collectivement de leur parti pris méthodologiques ni d’ailleurs publicisé ce choix. Nous qualifions ces choix individuels de neutralisation. Finalement, aucun acteur de ce terrain n’est neutre, chaque acteur possède un point de vue, un biais, et ce sont ces avis divergents qu’ils vont collectivement neutraliser. Dès lors, il s’agit moins de confronter que de contre-balancer les avis des uns et des autres. Neutraliser, c’est bien selon le CNRTL (2017c) tenir quelque chose « en dehors d’un conflit », « s’empêcher réciproquement d’agir ». Les chercheurs se sont donc mis en conflit en interne, pendant la construction de leur expertise collective, afin d’effacer ce conflit dans l’expertise rendue et dans sa communication publique. Ces points de vue divergents, ces « biais », sont au minimum les suivants : les biais liés à la spécialisation du chercheur, à son domaine de recherche (ainsi certains chercheurs avancent que faire le choix de travailler sur le risque environnemental constitue déjà une forme d’engagement politique); les points de vue sur la controverse (et on retrouve au niveau individuel la posture du désengagement réaliste, jusqu’à la figure du militant qui s’assume comme tel); et finalement les biais liés aux potentiels conflits d’intérêts sous-jacents au sein du laboratoire.
Le principe collectif de neutralisation, sa méthode et son éthique ne sont par ailleurs pas explicités dans la communication publique. En effet, les divergences sont évacuées du principal support de communication issu de discussions collectives qui, dans son esthétique, c’est-à-dire le rapport du fond et de la forme, donne à voir une posture de neutralité à l’image de son titre : « Gaz de schiste » : les questions qui se posent. Contribution au débat sur l’exploration pétrolière dans le sud de la France. Il s’agit de véhiculer un imaginaire scientifique : donner des informations, certifiées selon des normes scientifiques, validées par les pairs, avec, dans les communications, des supports et des temps de paroles équilibrés (sur les contextes économiques/ressources/risques; géologie/technique/risques). Pour autant, tel qu’ils l’expriment en entretiens, certains chercheurs sont tout à fait conscients de la non-neutralité de leur participation au processus d’expertise.
Des porte-paroles sont désignés pour porter le rapport d’expertise. Le porte-parole est à entendre dans le sens représentation/représentativité (la représentation symbolique d’une parole dans une autre/et la représentativité au sens statistique, voire de la délégation politique), concepts qui, par les chaînes de traduction qu’ils supposent d’un acteur à l’autre, véhiculent déjà en eux leur limite ou leur critique, à savoir la trahison : « traduire, c’est trahir »! Interrogé à ce sujet, l’un des porte-paroles fait part de son malaise : il a peur de trahir la pensée de ses collègues, notamment en ce qui concerne les discours sur les risques. Plus généralement, les experts sont en grande majorité déçus de la construction finale, l’expertise se voulant collectivement « sans point de vue », la neutralisation fait qu’aucun expert ne se retrouve vraiment dans l’expertise finale.
Pour conclure quant aux apports de cette enquête vis-à-vis de la problématique des paradoxes vécus de l’expertise, nous pensons qu’en l’absence de points de vue explicitement présentés comme tels, l’instrumentalisation par le pouvoir politique de l’expertise est potentiellement maximale. Nous pensons également que l’heuristique ouverte par le processus de neutralisation pour le débat public est faible, pour deux raisons. Premièrement, la légitimation de l’expertise par le collectif (ce qui est issu d’une confrontation commune fait toujours plus « scientifique ») se dissout dans la neutralisation en effaçant les points de vue singuliers. Deuxièmement, nous pensons qu’une controverse socioscientifique est par définition un débat mélangeant des points de vue singuliers autour d’une question, et l’absence de réflexivité communiquée et partagée publiquement ne permet pas l’enrichissement d’une « discussion », dans la mesure où la discussion publique a besoin de confronter des discours situés, tant individuellement que collectivement. En revanche, pour les chercheurs eux-mêmes cette expérience d’expertise collective constitue à l’évidence un espace de réflexivité important quant au paradoxe de leur statut.
L’heuristique de l’engagement
La troisième enquête concerne une proposition de réforme du droit de la famille en 2013. En France, les débats précédant l’adoption du « mariage pour tous » – la loi qui a permis l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe – ont donné lieu à de vives contestations sociales. Dans un premier temps, le président français François Hollande ainsi que son gouvernement avaient pour objectif d’étendre notamment la procréation médicalement assistée aux couples de lesbiennes. Pour ce faire, la ministre de la Famille commandite un rapport d’expertise à un sociologue de la famille. La particularité du positionnement épistémique de ce sociologue, de renommé scientifique, médiatique et politique, réside dans la défense d’une « expertise engagée ». Selon lui, un spécialiste est mandaté à la fois pour proposer une analyse scientifique, établir un diagnostic et s’engager sur des propositions pour l’action. Il est donc question « d’argumenter clairement une option possible parmi d’autres. C’est pourquoi ce modèle suppose la pluralité des expertises » (Théry, 2005). Cette définition de l’expertise engagée implique un statut particulier pour l’expert : il n’est pas neutre, mais il n’existe pas non plus de point de vue unique, vrai, car il s’agit d’un point de vue particulier, d’une option argumentée parmi d’autres. Le propos de l’expert n’est pas à entendre comme une directive, mais comme un conseil produit avec une lecture du monde particulière, un horizon politique. Dans le cas de l’expertise sur la loi famille, l’horizon politique est, par exemple, la défense de l’ouverture de la procréation médicalement assistée aux couples de lesbiennes.
Le premier niveau d’engagement de cette expertise se situe au niveau de la composition d’un groupe d’experts que le sociologue président du groupe met en place. C’est lui seul qui définit les personnes compétentes pour répondre à une question donnée. Il va, entre autres, sélectionner une vingtaine d’experts en fonction de leur légitimité scientifique et de leurs opinions politiques (les représentations des chercheurs sont diversifiées, mais ils partagent un socle de valeurs communes).
Le deuxième niveau d’engagement se situe au niveau de la communication publique du rapport d’expertise. Cette publicisation va être utilisée à des fins d’efficacité politique. En effet, durant le processus d’expertise, devant la pression sociale hostile au mariage pour tous et à la loi famille, le politique change d’avis et d’intentions, et déprogramme des priorités politiques l’ouverture de la procréation médicalement assistée pour les couples du même sexe. Le gouvernement recule, mais le processus d’expertise ayant été lancé, le ministère de la Famille souhaite que cette expertise ne soit plus rendue publique. La situation ressemble alors à une négociation entre deux parties, avec d’un côté le gouvernement qui, par peur d’être décrédibilisé, conçoit le rapport d’expertise comme une directive, et ne souhaite plus que le rapport qui prône l’ouverture de la procréation médicalement assistée soit rendu public; de l’autre côté, le président du groupe d’expertise, qui souhaite une évolution de la loi et veut donc que le rapport soit rendu public pour ne pas perdre la face dans les négociations avec le gouvernement. La stratégie mise en place est celle du secret, à savoir préserver le contenu du rapport de toute fuite dans la presse, car toute fuite signifierait l’arrêt des négociations avec le gouvernement, qui le prendrait comme une trahison (une sortie publique du rapport sans son autorisation). N’ayant aucune confiance en la possibilité que le rapport ne fuite pas au sein d’un groupe de vingt chercheurs, le président centralise tous les éléments produits par l’expertise, toute la connaissance produite collectivement en petits groupes, sans faire part de la totalité à l’ensemble de ses collègues. On est alors dans une situation où les membres d’un collectif d’experts construisent une connaissance, apportent leur contribution sur un document auquel ils n’ont pas accès dans son intégralité.
Finalement, le président du groupe d’expertise arrive à ses fins : il optimise sa situation dans un rapport de force, dans un bras de fer avec le gouvernement, et décide de publier le rapport et d’en faire sa promotion. Ainsi, la centralisation de la communication permet une maximisation de la légitimité de l’expertise dans un but d’efficacité de l’action, dans une optique d’action pratique – dans ce cas, le changement de la loi. Mais le corollaire de la maximisation de la légitimité est une dose d’autoritarisme vis-à-vis du collectif (un autoritarisme à relativiser, car la responsabilité du rapport et de son contenu est avant tout endossé par le président et son rapporteur).
Ainsi, l’expertise s’est affranchie d’une instrumentalisation politique et, en assumant un point de vue engagé et argumenté, contribue selon nous à enrichir le débat public, au sens où cette expertise, parce qu’elle explicite les valeurs et les faits qu’elle mobilise, voire les relations entre constructions de savoirs et revendication d’opinions, ouvre l’espace de la discussion publique.
Perspectives
Dans le cas d’une expertise collective, ce sont les tensions entre les individus au sein du collectif qui peuvent, par le processus même d’exposition publique, ébranler la légitimité de l’expertise. Et c’est bien l’intérêt d’enquêter sur des expertises collectives que de donner à voir des processus de légitimation de l’expertise.
Lors d’expertises institutionnelles, comme c’est le cas de l’Académie des sciences américaine par exemple, laquelle verrouille entièrement la communication (Hilgartner, 2009), ou encore du Haut Conseil des Biotechnologies ou des Académies des sciences, la neutralité et la légitimité de la construction collective sont préservées par une publicisation sans divergences (même si la neutralité effective et les processus d’expertises sont sources de controverses publiques). Dans le cas de l’expertise par les Académies, la logique est poussée jusqu’à son paroxysme. En ne nommant pas les signataires de l’expertise collective, leur propos concernent en partie la défense de la neutralité, les rédacteurs de l’avis l’esthétisent de manière cohérente dans leur publicisation en effaçant les sujets, livrant — montrant — une réflexion objective sans biais. Pour reprendre les termes de Bruno Latour, ce n’est même plus l’institution qui parle de la nature (ou, dans notre cas, d’épistémologie), mais c’est la nature qui parle d’elle-même, et cette autorité communicationnelle permet sans aucun doute une action politique efficace.
D’un autre côté, le processus de neutralisation des points de vue, visant à faire disparaître les points de désaccord, nivelle le propos; on enlève les aspérités, on égalise par effacement des désaccords. Pour autant, nous pensons que cette posture d’expertise érode l’heuristique d’enrichissement du débat public, et que les tensions internes ébranlent la légitimité de l’expertise une fois communiquée.
Nous argumentons dans le dernier cas d’étude comment les contraintes d’efficacité pragmatique (l’horizon prescriptif du changement de la loi) amènent un groupe d’experts à centraliser la publicisation. Nous ne cachons pas la sympathie que nous avons pour une recherche engagée. Mais notre enquête nous invite à poser la question suivante : l’expertise collective engagée n’est-elle pas vouée à ce que la responsabilité de l’expertise et de sa communication soit endossée par un petit nombre de personnes ? Il semble en effet probable, ou du moins pertinent, de postuler que la dispersion de la publicisation fragiliserait la légitimité de l’expertise, montrant en effet une pluralité de points de vue sur une expertise sensée être unique. Notre posture constructiviste, brièvement exposée en introduction, nous amène à penser que la construction collective de connaissances rendues publiques, ici une expertise, ne doit pas cacher cette idée que l’interprétation de la connaissance diffère d’un individu-chercheur à l’autre. C’est aussi ce à quoi renvoient les interrogations de certains porte-paroles des expertises collectives. Loin d’abandonner une visée critique de l’autoritarisme de l’expertise scientifique, nous soutenons une perspective constructiviste revendiquée qui postule l’indissociabilité de la fin et des moyens, afin que l’horizon politique de la recherche scientifique réside avant tout dans la stimulation du débat public.
Par conséquent, nous pensons que, par souci de cohérence, abandonner la neutralité et la neutralisation devrait peut-être amener à abandonner l’optique d’efficacité politique, et faire le choix d’assumer que le savoir est bien construit collectivement dans la discussion, mais qu’il s’incarne en même temps dans une multitude de cosmologies de chercheurs-individus communiquant de manière singulière l’expertise collective.
Références
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Séralini, Gilles-Éric, Emilie Clair, Robin Mesnage, Steeve Gress, Nicolas Defarge, Manuela Malatesta, Didier Hennequin et Joël Spiroux de Vendômois. 2014.« Republished study: long-term toxicity of a Roundup herbicide and a Roundup-tolerant genetically modified maize ». Environmental Sciences Europe 26 : 14
Séralini, Gilles-Éric. 2012. Tous cobayes!: OGM, pesticides, produits chimiques. Paris : Flammarion.
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https://www.cairn.info/revue-droit-et-societe1-2005-2-page-311.htm
Tous cobayes! 2012. Réalisé par Jean-Paul Jaud. France : Productions J+B Séquences, DVD.
Pour citer :
Birgé, Robin et Grégoire Molinatti. 2019. « Neutralisation et engagement dans des controverses publiques. Approche comparative d’expertises scientifiques ». In Et si la recherche scientifique ne pouvait pas être neutre? Sous la direction de Laurence Brière, Mélissa Lieutenant-Gosselin et Florence Piron, chapitre 14, pp. 295-314. Québec : Éditions science et bien commun.
- Cette enquête fait partie de la thèse de l’un des auteurs, Robin Birgé, soutenue en janvier 2018, dont le travail consiste à travailler ce paradoxe de l’expertise en démocratie (« la tragédie de l’expert »), en prenant ses distances avec une « anthropologie de la connaissance » transformée en « sociologie dramaturgique ». ↵
- Nous n'entendons pas ici qu'une visée scientifique n'est pas politique, mais que les stratégies de communications mises en œuvre sont au service d'une efficacité politique ↵