39 Sergio X.

Caroline Laflamme

Sergio X. est un homme charismatique, courageux et plein d’ambitions. Durant les années de la guerre civile, il décida de quitter le Salvador en raison des conditions de vie difficiles. Le temps d’une entrevue, ses confidences m’ont permis de voir une autre facette de la vie en Amérique Centrale et de celle au Québec. Soyez prêts à plonger dans 25 ans d’aventures, de changements, de défis et de bonheur.

Un départ inattendu

Tout d’abord, Sergio X. est natif du Salvador, le plus petit pays en Amérique centrale. Il est actuellement âgé de 53 ans et sa langue maternelle est l’espagnol. Sa famille et lui pratiquent la religion catholique, comme la majorité des Salvadorien-ne-s. Sergio croit aux valeurs familiales, à la bonté des gens et au respect des autres. Bien qu’il était heureux avec ses proches au Salvador, les conditions de vie l’amenèrent à se déplacer hors du pays. La guerre civile est la cause première de son départ. Cette guerre apporta aux habitant-e-s du Salvador des conditions de vie très difficiles, presque invivables. À l’âge de 17 ans, le service militaire vint le chercher de force, ainsi que ses amis, pendant qu’ils jouaient au soccer. Sergio ne put même pas dire au revoir à ses parents, qui apprirent la cause de son départ qu’après un mois. Ce service militaire dura deux ans.

En 1986, le frère de Sergio, déjà établi au Québec, lui laissa entendre que le Canada était un pays accueillant et que les Canadien-ne-s valorisaient la diversité et la liberté. Aussi, il l’encouragea en lui disant que les conditions de vie et de travail étaient très bien au Québec. Son frère le convainquit donc qu’il devait venir le rejoindre et résider en Amérique du Nord. C’est ainsi qu’à l’âge de 19 ans, Sergio prit la décision de quitter ses proches et son pays avec l’objectif de venir s’installer au Canada. Ce choix fut un changement radical dans sa vie.

Toutefois, cette décision ne fut malheureusement pas sans épreuves. Sergio dut traverser le Rio Grande à la nage. Cette méthode pour passer la rivière à la frontière des États-Unis et du Mexique était souvent utilisée afin de contourner les autorités et les douanes mexicaines pour atteindre les États-Unis, qu’il traversa en voiture. Avant de venir s’installer au Québec, Sergio vécut quelques années aux États-Unis.

Un accueil chaleureux

Dans les années 1990, Sergio arriva finalement au Canada. Il décida d’habiter et d’étudier à Montréal.

Je remercie le Québec de m’avoir bien accueilli. Québec est vraiment un bel endroit où il fait bon vivre et je m’y sens à la maison. Les gens sont sympathiques et très aimables.

Lors de son arrivée, Sergio ne connaissait rien du Québec. Il n’était pas informé du mode de vie, de la culture pratiquée et de la langue parlée. Il parlait seulement sa langue maternelle, soit l’espagnol. Cependant, grâce à l’accueil amical des Québécois-es, Sergio put facilement s’intégrer à la population. Ne voulant pas être dépendant du gouvernement trop longtemps, il abandonna les études après peu de temps et se lança sur le marché du travail pour subvenir à ses besoins. Aujourd’hui, il aime et est satisfait de son travail de laveur de vitres de bâtiments.

Sergio rencontra la femme de sa vie en 1993, une charmante Française qu’il épousa en 2005. Ils sont maintenant parents de trois enfants âgés respectivement de 23, 18 et 16 ans. D’ailleurs, il affirme qu’il est très fier de ce qu’ils accomplissent.

Je suis content que mes enfants et leurs générations puissent continuer de contribuer à la société québécoise tout en représentant une part de ma culture et de mes racines.

Toutefois, Sergio n’eut pas toujours un parcours facile au Québec. Bien qu’il ait eu un accueil chaleureux parmi les Québécois-es, certaines personnes se sont moquées de lui à cause de ses différences.

Ce n’était pas nécessairement au travail, mais plutôt au quotidien. Je n’ai pas toujours parlé le français et j’ai encore de la difficulté à prononcer quelques mots. Particulièrement au début, certains riaient de moi lorsqu’ils ne comprenaient pas complètement ce que je disais.

Sergio explique que ces gestes moqueurs sont seulement causés par l’ignorance et non par méchanceté. Selon lui, les Québécois-es ne sont toutefois pas assez conscientisé-e-s de ce qui se passe à l’extérieur de leur pays. Par exemple, lors de son arrivée, plusieurs personnes croyaient que Sergio arrivait directement d’un pays de vacances et non en guerre.

La chance ici et l’inégalité là-bas

Sergio ne regrette aucunement son choix d’être venu s’installer au Canada. Il croit aux valeurs d’égalité entre l’homme et la femme, comme prônée par le pays. Sergio décrit la politique du Salvador comme malhonnête et corrompue. Il qualifie également la presse et les médias du Salvador de socialistes.

D’ailleurs, définissant le Canada comme un pays très ouvert d’esprit comparativement au sien, Sergio conseille aux autres immigrant-e-s comme lui de s’adapter, de respecter le pays et de vivre le plus possible comme les Canadien-ne-s. Aussi, il leur conseille, même s’ils viennent d’un pays qui connaît des problèmes, de ne pas imposer leurs règles et de ne pas profiter du système d’immigration.

Je trouve cela dommage que des immigrant-e-s abusent du système.

Conséquemment, Sergio a peur que les portes se referment pour les prochain-e-s immigrant-e-s en raison de l’abus de certaines personnes déjà établies au Canada.

Ensuite, Sergio décrit sa nouvelle vie au Québec comme une expérience très positive et enrichissante. Il se considère chanceux de vivre au sein d’une société démocratique où la liberté est valorisée. Il remercie Dieu de l’avoir guidé jusqu’ici et de lui avoir permis de fonder sa famille dans un endroit sécuritaire et convivial. De plus, il est très fier d’avoir appris une seconde langue, d’avoir fondé une famille et de contribuer quotidiennement à la société.

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