21 Ricardo X.

Anne-Sophie Maltais

L’hiver québécois n’a pas donné froid aux yeux de Ricardo X. Entre les cours de français, les lectures sur la culture québécoise et l’écoute de la radio, l’étudiant qui habite au Québec depuis maintenant trois ans s’était bien préparé pour cette nouvelle étape de sa vie.

Je voulais expérimenter ça, vivre dans un autre pays, dans une autre culture.

C’est par un ami que Ricardo entendit parler du processus d’immigration. Ce dernier lui fit alors part des moindres détails en ce qui concerne la longue démarche. Il décida donc de suivre à la lettre ce que son ami avait fait. Pendant trois ans, Ricardo se prépara à son arrivée en terre canadienne. « J’ai regardé beaucoup d’informations du Québec », affirme-t-il. Des émissions québécoises aux journaux en passant par la radio, le Colombien connaissait déjà une grande partie de la culture québécoise. Il se tenait informé grâce à Internet et à une application qui lui permettait d’écouter Radio-Canada.

Au tout début

Avant son arrivée au Canada, Ricardo habitait Chìa, une petite ville en périphérie de Bogotá, la capitale de la Colombie. Plus tard, il loua un appartement, seul, mais toute sa famille demeurait à proximité. Il travaillait à temps partiel et étudiait à Bogotá pour devenir technologue.

Ce fut par une journée d’automne que Ricardo fit son arrivée au pays. Un homme avec qui il avait pris contact sur Internet pour faire du couchsurfing chez lui quelques jours vint même le chercher à l’aéroport. L’homme lui offrit ensuite d’occuper une chambre de sa résidence pendant une semaine, laissant du temps à Ricardo pour qu’il se trouve un nouveau chez-soi. Mais, comme ce dernier apprécia la gentillesse de l’homme ainsi que la chambre, il décida de s’y installer pour sa première année à Montréal. Cet homme est d’ailleurs devenu un de ses meilleur-e-s ami-e-s au Canada.

L’amoureux des langues

Après avoir passé une année dans la métropole, Ricardo prit la décision de quitter Montréal pour un autre défi : retourner sur les bancs d’école. Il troqua donc Montréal pour Québec. Ricardo s’inscrit au baccalauréat intégré en études internationales et langues modernes. Grâce à cette formation, il eut l’occasion de se familiariser avec de nouvelles langues, lui qui est amoureux de celles-ci.

D’abord, Ricardo apprit le français avec grand bonheur, tout au long de son processus d’immigration.

Ça a été vraiment un plaisir pour moi d’apprendre le français.

Mais pour cet amoureux des langues, trois, ce n’était pas assez. C’est pourquoi il décida d’apprendre deux langues supplémentaires dans le cadre de son programme scolaire : l’arabe et le chinois. Étant donné qu’il considérait ces deux langues comme étant « très importantes », Ricardo se fit un plaisir d’en apprendre les rudiments, malgré leur niveau de difficulté.

En avril 2018, il sera diplômé et pourra donc parler complètement et partiellement ces cinq langues.

Les différences

Dès son arrivée au Québec, Ricardo remarqua quelques différences notables entre son pays d’origine et son pays d’adoption.

Le climat constitua la différence la plus importante entre les deux pays, selon lui. En Colombie, chaque ville a une température différente, mais qui ne varie pas beaucoup durant l’année, car il n’y a pas de saisons comme au Canada.

De plus, il n’y avait pas de saison dans son pays natal, ce qui contrastait complètement avec le climat québécois, qui est quotidiennement en mouvance. Cette différence de température ne l’a toutefois pas surpris. Encore une fois, il était préparé. Comme il arriva au Canada en automne, il eut quelques semaines pour s’habituer à la température de plus en plus fraîche.

Il remarqua aussi que le réseau de transport en commun était mieux organisé que dans son pays d’origine. La ponctualité des autobus, les multiples arrêts et les listes détaillées des heures de passage firent son bonheur.

D’un point de vue plus personnel, Ricardo observa aussi que certaines valeurs étaient plus ou moins présentes comparativement à celles chères aux Colombien-ne-s. Au fil des mois, il se rendit compte que les gens étaient plus individualistes au Québec que dans son pays natal. Même s’il trouva son accueil chaleureux en général, il fut refroidi par le comportement de certains individus.

De plus, pour lui qui venait d’un endroit où la plupart des gens ont les valeurs familiales bien ancrées, il fut secoué par le sort réservé aux personnes âgées au Québec. Ayant accompagné une connaissance québécoise qui visitait sa grand-mère en résidence, il fut troublé par le fait que les personnes seules et âgées sont placées dans des maisons de retraite. Cette manière de faire ne concordait pas avec ses valeurs familiales ni avec celles de son pays. « Il y a beaucoup de résidences pour personnes âgées, je trouve ça triste de voir qu’on laisse les aîné-e-s seuls dans des bâtiments », explique-t-il.

Par ailleurs, il trouve que la religion est beaucoup plus présente au Québec que ce qu’il avait imaginé. Comme la religion est partie prenante de la vie de nombreux et nombreuses Colombien-ne-s, il a constaté qu’elle n’était pas inexistante au Québec, malgré la popularité décroissante de cette pratique.

Les conseils de Ricardo

Même si Ricardo constate qu’il n’a jamais vraiment été la cible de discrimination, il avoue avoir trouvé les gens de Montréal plus ouverts que ceux de Québec. Il croit que les Québécois-es entretiennent encore certains stéréotypes envers les pays d’Amérique latine. Non, les Colombien-ne-s ne vivent pas tous près de la mer ou dans la jungle, et les grandes villes sont pour la plupart semblables en grande partie à celles en Amérique du Nord. Ricardo affirme avoir été marqué par un Québécois lui demandant si les maisons en Colombie avaient des murs.

Que dirait Ricardo aux personnes qui souhaitent faire comme lui? Il leur répondrait qu’il est essentiel de bien se renseigner. Selon lui, c’est important de bien se préparer et de « s’informer des options disponibles pour les immigrant-e-s ici ». C’est d’ailleurs ce qu’il a fait et qui lui a permis de mieux comprendre la culture et la vie québécoises.

Questionné à savoir s’il avait un conseil à donner aux Québécois-es concernant l’arrivée des immigrant-e-s, Ricardo y va d’un conseil simple, mais sage : « On a laissé beaucoup de choses dans notre pays d’origine pour venir ici. […] La plupart des gens viennent avec l’intention de vivre dans un meilleur endroit », confesse-t-il. Pour lui, il importe que les Québécois-es fassent davantage confiance à la bienveillance de ceux et de celles qui choisissent de venir habiter ici.

Même s’il avoue que la décision de partir a été une « grosse décision », Ricardo X. ne regrette rien. D’ailleurs, il aimerait vivre ici encore plusieurs années, que ce soit au Québec ou ailleurs au Canada.

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