33 Angela Maria X.

Émilie Carlen

Angela a quitté sa Colombie natale pour le Québec afin de poursuivre ses études au 2e cycle universitaire. Aujourd’hui, après trois ans au Québec, Angela est diplômée et en pleine procédure pour obtenir sa résidence permanente.

De Zipaquira à Québec

Angela est née à Zipaquira, village colombien se situant à 30 minutes de la capitale, Bogotá. Elle quitta sa ville natale pour poursuivre, d’abord, son baccalauréat en génie agricole à Bogotá et, par la suite, à Medellín. Ce fut sa première séparation avec ses parents; elle prit son envol en tant que jeune adulte. Mais ceci n’a pas suffit à nourrir son envie d’aventure.

À la fin de son baccalauréat, son professeur lui proposa de postuler pour une bourse afin de poursuivre ses études au 2e cycle à l’Université Laval. Angela hésita, mais décida de se jeter à l’eau et de relever ce nouveau défi en continuant d’étudier dans un domaine qui la passionne encore aujourd’hui.

Je me suis dit : bon, je ne parle pas français, mais pourquoi pas? J’ai suivi un cours intensif durant deux mois, en même temps que je remplissais tous mes papiers d’immigration et me voilà!

La jeune étudiante avait 23 ans lorsqu’elle arriva au Québec, en plein hiver. Premier arrêt : Montréal. Elle confie avoir été chanceuse d’avoir une sœur installée à Montréal et disposant de la nationalité canadienne pour l’aider dans ses premiers pas au pays. Cette sœur constitua, par ailleurs, une source de motivation à son expatriation parce qu’elle l’avait beaucoup encouragée à s’orienter dans cette voie, et ce, malgré ses craintes linguistiques. Angela resta deux jours à Montréal pour faire les achats essentiels de survie au grand froid québécois : manteau, gants et bottes d’hiver. Sa sœur et son beau-frère, lui aussi colombien, tenaient profondément à l’accompagner durant ses premiers jours en terre québécoise. Deux jours plus tard, Angela entama la deuxième étape de son périple : Québec et l’Université Laval!

Les résidences de l’Université furent sa nouvelle maison. Dès lors que toutes les formalités administratives furent complétées, Angela était prête pour cette nouvelle aventure universitaire.

Elle se souvient encore de sa première rencontre avec son directeur et son codirecteur de maîtrise. Elle ne parlait que peu français et ne comprenait pas grand-chose à leur conversation. Les premiers cours ont, eux aussi, été compliqués à suivre. Angela enregistrait tout avec son dictaphone pour réécouter le tout à la maison et tenter de mieux comprendre à tête reposée.

Au début, quand tu arrives, c’est un changement de langue. Il faut que tu réfléchisses, que tu traduises et, à la fin de la journée, tu es tellement fatiguée… Au début, je me disais que je ne voulais pas aller aux activités puisque j’étais déjà assez fatiguée comme ça. Je préférais rester dans ma chambre, pour relaxer. Mais ma maman m’encourageait à aller aux soirées et aux activités. Elle me disait « vas-y, tu peux le faire » et elle a vraiment eu raison de me dire ça.

Pour cause, Angela fit des rencontres déterminantes durant ces événements, dont elle se souvient encore aujourd’hui, le sourire aux lèvres. Aujourd’hui, elle souhaite demander sa résidence permanente pour s’installer à Québec à long terme. Cette expérience d’expatriation a rendu Angela plus forte psychologiquement et elle estime mieux se connaître, en plus de tout le bagage de connaissances scientifiques qu’elle a accumulé lors de sa maîtrise. Elle est très fière d’avoir réussi sa maîtrise, ses stages et son mémoire en français. Elle conçoit que ce ne fut pas toujours facile, mais se sent très satisfaite d’avoir terminé son cursus. En juin 2018, elle ira à sa collation des grades aux côtés de sa famille qui se déplacera à Québec pour l’occasion.

Une intégration pas-à-pas, avec les communautés étrangères

Lors d’une soirée d’intégration au sein de sa faculté, Angela rencontra des étudiant-e-s haïtien-ne-s en stage. Ils l’ont aidée à améliorer son français, pour le pratiquer à l’oral ou encore pour corriger ses travaux universitaires. Elle s’estime chanceuse de les avoir rencontré-e-s et apprécie, encore aujourd’hui, toute l’aide qu’ils et elles lui ont apportée. Ces souvenirs joyeux ont été marquants pour Angela et ont permis à la jeune étudiante de surmonter ses premières peurs.

Par la suite, c’est aux résidences qu’elle fit la rencontre d’un jeune québécois qui cherchait des répondant-e-s, au sein de la communauté étudiante, pour son sondage. Angela ne comprenait pas les questions de ce fameux sondage… Ceci n’arrêta pas le jeune étudiant en sciences politiques qui mit son espagnol à l’épreuve pour communiquer avec elle. Ce jour-là, Angela fit la connaissance de son conjoint actuel.

Toutefois, Angela reconnaît avoir eu des relations plus intimes et faciles avec les étudiant-e-s internationaux qu’avec ses camarades québécois-es. Leur expérience commune de l’immigration les rapprochait. De plus, elle confie que son cercle d’ami-e-s le plus proche est majoritairement composé de Latino-Américain-e-s ou d’étrangers et d’étrangères.

C’est plus difficile qu’un-e Québécois-e intègre un-e latino. Ce sont principalement des ami-e-s d’école : pour faire un travail, manger une fois ensemble. En Colombie, par exemple, ce n’était pas comme ça. On se retrouvait tous ensemble lorsqu’on avait un creux en commun, pour prendre un café, manger ou jouer ensemble. Ici, je le fais surtout avec des étudiant-e-s étrangers.

La jeune colombienne admet que, aujourd’hui, elle a des relations plus fortes avec les Québécois-es, notamment avec ceux et celles avec qui elle travaille au centre de recherche.

Une motivation sans faille

Pour moi, c’est stimulant de faire des études, d’essayer d’améliorer la qualité de vie des gens. Tu fais des choses pratiques en même temps. Alors si quelqu’un me donne une bourse pour faire ce que j’aime, je trouve ça cool, en plus d’avoir l’expérience de vie dans un autre pays.

C’est à travers sa motivation et son épanouissement universitaire qu’Angela est parvenue à s’approprier Québec. Cependant, la distance familiale et le choc culturel et climatique restent des réalités difficiles à ses yeux. À ses débuts, certains aspects alimentaires, vestimentaires et sociaux lui ont demandé un temps d’adaptation. Par exemple, en Colombie, la jeune étudiante était habituée de manger plus de produits frais à l’année. Dans ses relations interpersonnelles, Angela a appris à respecter l’espace de l’autre et à être « moins tactile » avec les Québécois-es, même si au début, ceci s’est avéré être une réelle transition. Elle reconnaît que cette attitude de « retrait » la surprend toujours, car elle l’interprète comme une froideur, mais elle réalise son importance pour les Québécois-es.

Le secret pour vivre une intégration réussie, selon Angela, c’est de ne pas oublier la motivation de départ.

J’ai des amies qui n’ont pas aimé leur expérience ici, mais elles restaient enfermées au lieu de profiter des avantages d’ici. Même si l’hiver est long, il faut essayer plein d’activités, comme le patinage et les raquettes. Il faut essayer de s’intégrer. Il faut s’ouvrir à des choses différentes. C’est vrai qu’on n’aura pas le même type de relations que dans notre pays, mais ce n’est pas forcément mauvais. Il faut juste s’y préparer.

Les Québécois-es qu’Angela a connu-e-s sont tous passionné-e-s de danse, de salsa et ont toujours été aimables et respectueux, respectueuses à son égard. Elle confie ne jamais avoir été confrontée à une situation de racisme ou de discrimination durant son séjour au Québec. Toutefois, elle estime que certains clichés restent collés à la peau de la communauté latino-américaine : fête, soleil, salsa et Pablo Escobar.

Il faut peut-être réaliser que la culture de l’Amérique latine, ce n’est pas forcément la culture mexicaine. J’ai l’impression que notre image y est trop rattachée alors que c’est bien plus riche et complexe que ça.

Par ailleurs, Angela a observé que sa relation avec sa mère s’est renforcée, elle sait toujours quoi lui dire lorsqu’elle ne se sent pas très bien, et ce, avant même que la jeune Colombienne ne parvienne à mettre des mots sur ses maux. Elle ne s’était jamais rendu compte de la force de son lien maternel jusqu’à son départ à l’étranger.

Concocerte fue muy chevre, querida Angela!

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