12 L’approche par compétences en classe d’histoire et l’enseignement de l’intégration nationale au Cameroun : une approche novatrice

Christian Georges Nkoumou Melingui

Depuis l’année scolaire 2012, le Ministère des Enseignements Secondaires du Cameroun (MINESEC) a introduit un nouveau paradigme pédagogique dans les programmes d’études à l’école camerounaise : l’approche par les compétences (APC) avec une entrée par les situations de vie (APC/ESV) (MINESEC 2014).

Parmi les compétences retenues dans les nouveaux programmes de formation, celle de l’intégration nationale, c’est-à-dire du vivre ensemble harmonieux entre les différentes identités ethniques et culturelles du Cameroun, est centrale. La cohabitation des populations dans l’unité et la diversité est, pour le gouvernement et la société camerounaise dans son ensemble, une réalité à maintenir pour faire droit à la richesse humaine et culturelle qui s’exprime ici de multiples façons. La cohabitation pacifique des différents groupes ethniques, que le président Paul Biya appelle l’intégration nationale, se présente dans ce pays comme un « trésor » à préserver et à alimenter, figure comme objectif dans tous les programmes de formation des disciplines des sciences humaines (histoire, géographie, éducation à la citoyenneté et la morale[1], philosophie) et y occupe une place de choix. Ces disciplines éclairent d’ailleurs, chacune à sa façon, une facette de cette réalité sociale. Celle-ci se laisse rarement cerner selon des logiques disciplinaires tranchées. C’est en reliant les divers champs de connaissance qu’on peut saisir ses multiples facettes.

On sait aujourd’hui que l’intégration nationale n’est pas donnée d’avance (Mouellé 2013)[2], qu’elle se construit à partir des éléments rassembleurs de nos cultures, d’un ensemble de valeurs et de représentations et à l’intérieur d’interactions sociales. Il faut dire qu’avec le nouveau paradigme pédagogique, il s’agira désormais, dans le processus d’enseignement-apprentissage, d’accorder une place particulière aux savoirs d’action et aux conditions de leur appropriation par les élèves; de mettre en œuvre une pédagogie ou mieux, un dispositif didactique basé sur le développement de compétences chez les élèves, lesquelles leur permettraient de résoudre des situations complexes de la vie quotidienne, notamment le déficit de patriotisme, le repli identitaire, le tribalisme, le népotisme, le vandalisme, la corruption, l’incivisme, etc., constatés dans ce pays (MINESEC 2014).

À l’intérieur des sciences humaines, l’histoire et l’éducation à la citoyenneté en tant que disciplines entretiennent des relations privilégiées, quoique non exclusives, avec le vivre ensemble et la citoyenneté. Dans les nouveaux programmes, ces deux disciplines traitent de manière plus marquée de l’intégration nationale, dont la gestion a des conséquences sur l’avenir de la société camerounaise. C’est la raison pour laquelle les élèves sont amenés à s’intéresser à cet enjeu qui interpelle la nation et, par le fait même, leur propre avenir.

En histoire, cette compétence est la finalité et le but curriculaire du module intitulé « Peuplement et organisation politique du Cameroun ». À travers ce module, l’élève de cinquième secondaire, c’est-à-dire entre 11 et 12 ans, découvre les différentes civilisations traditionnelles présentes dans l’espace camerounais. D’après le MINESEC, ce module permet une meilleure compréhension de certains des aspects sociopolitiques et économiques de chacune de ces civilisations. Les savoirs et les savoir-faire acquis par les apprenants et apprenantes dans ce module sont présentés comme des « ressources » au service de la compétence terminale recherchée, qui est d’asseoir l’intégration nationale et de développer la conscience citoyenne.

Données générales sur les groupes linguistiques, les civilisations et les cultures

Le Cameroun est un pays d’Afrique centrale, situé au fond du Golfe de Guinée. Il s’étire sur plus de 1200 km. C’est un pays ayant la forme d’un triangle, avec 475 442 km2 de superficie.

Aujourd’hui, la population camerounaise est estimée à plus de 20 millions de personnes, avec une densité moyenne de 33,7 habitants au km2. Elle regroupe les ethnies qui se retrouvent dans les États environnants. Bwele et al. (1981) affirment que les langues camerounaises sont issues de quatre grandes familles africaines : Nigéro-congolaise, Nilo sahélienne, Bantoue et Chamito-sémitique. Les principaux groupes ethniques au Cameroun sont : les Panhouin (19,6 %), les Bamiléké et Bamoun (18,5 %), les Douala, Louembou et Bassa (14,7 %), les Peulh (9,6 %), les Tikar (7,4 %), les Mandara (5,7 %), les Maka (4,9 %), les Chamba (2,4 %) et les Haoussa (1,2 %) (Tchindjang et al. 2008).

Le Cameroun est donc le point de jonction de plusieurs foyers culturels puisque les grandes aires culturelles considérées pour tout le continent y entrent en contact : celle du Soudan oriental, celle du Soudan occidental, celle de la côte guinéenne et celle de l’aire congolaise, qui présentent toutes des spécificités religieuses et politiques.

Registres du religieux et du politique

En ce qui concerne les religions révélées, l’islam et le christianisme se sont installés au XIXe siècle dans ce pays de manière presque simultanée, l’une par le Nord et l’autre par le Sud (Mveng 1985). Ces religions ont trouvé des populations qui pratiquaient déjà les religions traditionnelles africaines. Les religions révélées seront amenées à cohabiter, d’abord avec les religions traditionnelles et ensuite entre elles. Cette réalité rend la situation sur le terrain complexe et particulière. La partie Nord est dominée par les Foulbés d’obédience musulmane. Ils représentent un peu plus du quart de la population de cette région du pays. Cette localité est également peuplée par des populations autochtones qui se sont converties au Christianisme (catholique ou protestant) et par celles qui sont restées attachées aux religions traditionnelles.

Dans la partie Sud du pays, près de la moitié de la population a embrassé le christianisme (catholicisme, diverses branches du Protestantisme évangélique et pentecôtiste ainsi que de nouvelles églises chrétiennes connues sous le nom d’Églises de « réveil »[3], etc.) et le reste est toujours attaché aux religions traditionnelles, tandis qu’une infime minorité s’est consacrée à d’autres mouvements religieux (les Témoins de Jéhovah par exemple) et philosophiques (Rose croix et Franc maçonnerie, parmi d’autres). En effet, par la loi N° 053 du 19 décembre 1990, les religions et l’État sont séparés et toute religion pratiquée au Cameroun doit bénéficier de la reconnaissance légale de l’État. Ce dernier garantit ainsi la liberté religieuse tout en restant neutre vis-à-vis des religions. Le Cameroun est donc une terre de diversité et de pluralité religieuses.

Multipartisme et pluralisme politique au Cameroun

Dans l’univers du politique, après le départ des premiers colonisateurs allemands, le territoire fut divisé en deux parties d’inégale importance : le Cameroun britannique (environ 1/4 du territoire) et le Cameroun français (environ 3/4 du territoire). En 1919, à la Conférence de Versailles, le Cameroun fut placé sous le mandat de la Société des Nations (SDN), mais restait toujours administré séparément par la France et la Grande-Bretagne. Après la dissolution de la SDN en 1945, c’est l’Organisation des Nations Unies (ONU) qui reçut la mission de la tutelle du Cameroun. Le 1er janvier 1960, la partie francophone accède à l’indépendance et le 1er octobre 1961, c’est au tour de la partie britannique. Cet instant fut le point de départ de la République fédérale du Cameroun qui s’acheva avec l’avènement de l’État unitaire le 20 mai 1972 (Mveng 1985).

En janvier 1991, le multipartisme est réintroduit avec la reconnaissance légale des premières formations politiques. Certaines associations sont également autorisées à exercer leurs activités conformément aux lois de la République (Aletum 2004; Mouellé 2013).

Il faut souligner que depuis 1960, avec l’avènement des indépendances, les premières autorités politiques avaient retenu comme programme politique « l’Unité nationale ». Le premier chef de l’État, Ahmadou Ahidjo, qui avait proclamé l’indépendance de la partie francophone le 1er janvier 1960 et la réunification des deux Cameroun le 1er octobre 1961, prônait une cohabitation harmonieuse entre les différentes identités culturelles du Cameroun. Le second chef de l’État, le président Paul Biya, va plus loin en parlant de l’intégration nationale. Il demande à chaque Camerounais et Camerounaise de se sentir chez lui ou elle dans n’importe quelle région du territoire (Biya 1987).

Dans le but d’amener les élèves à s’intéresser à l’intégration nationale, notamment aux enjeux linguistiques, religieux et démocratiques qui la traversent, le MINESEC prescrit désormais aux enseignantes et enseignants de développer et construire des compétences chez leurs élèves. Elles leur permettront, d’une part, de mieux comprendre cette réalité à la lumière du passé et, d’autre part, d’agir en citoyens capables de jugement critique, de nuance et d’analyse. Pour ce faire, les enseignantes et enseignants sont appelés à opérer des changements inéluctables dans leur intervention éducative, aussi bien dans sa conception que dans sa mise en œuvre. Dans ce texte, nous nous appesantirons uniquement sur l’aspect linguistique.

Le dispositif didactique prescrit par le nouveau programme de formation

Au cœur du dispositif didactique prescrit par le nouveau programme de formation en classe d’histoire, la situation-problème est présentée comme étant la plus susceptible de stimuler l’intérêt des élèves. Le MINESEC considère que les problèmes à étudier en classe d’histoire doivent être présentés à partir des situations de la vie quotidienne pour signifier quelque chose pour les élèves. Les situations de vie proposées par les enseignantes et les enseignants devraient, par leur complexité, favoriser le développement des compétences disciplinaires et transversales (MINESEC 2014).

Parmi les compétences transversales à développer chez les élèves, on peut recenser celles qui sont centrales en histoire et en éducation civique, à savoir apprendre à chercher, à sélectionner et à exploiter de façon systématique et critique l’information dans des documents. D’autres sont incontournables en géographie telles qu’interpréter un enjeu territorial, examiner les compromis possibles, rechercher la place de l’intérêt collectif, reconnaitre les motivations des groupes en présence, préciser le rôle de certains facteurs naturels et humains, passés et présents. Ensuite, certaines s’appuient sur des savoirs de base, par exemple : utiliser les langues officielles, en l’occurrence la langue de l’enseignement et de l’écriture, pour s’approprier le vocabulaire utilisé dans ces disciplines, et recourir aux technologies de l’information et de la communication comme vecteur de transmission des résultats. D’autres, enfin, sont indispensables pour l’exercice de la citoyenneté et correspondent à des aptitudes comportementales citoyennes ou cognitives ou encore à des savoirs généraux communs dans une situation d’intégration. Pensons par exemple à l’aptitude à gérer la relation avec autrui, à participer à la vie collective et à coopérer avec d’autres personnes, à faire preuve de tolérance et d’empathie envers les acteurs et actrices témoins de l’époque; bref, à agir dans un contexte déterminé qui fait appel à la fois à des attitudes, à des actions en situation, à la confrontation des valeurs, etc.

Le déroulement de l’activité en classe d’histoire

En classe, le déroulement de l’activité débute par la mise en situation d’apprentissage. C’est une phase de préparation qui se fait avant de lancer les élèves dans la recherche. Pendant cette phase, l’enseignant ou l’enseignante cherche à susciter l’intérêt des élèves.

Il ou elle expose sur le tableau, avant l’arrivée des élèves, des photos représentant les modes vestimentaires propres à chaque aire culturelle, l’architecture des chefferies traditionnelles de chaque grand groupe ethnique, les emblèmes ou les signes ostentatoires des grandes familles de religions présentes au Cameroun, des textes de légende sur le parcours migratoire des grands groupes ethniques, des images de nourriture, etc. Il ou elle demande aux élèves de regrouper et d’expliquer les liens qu’ils et elles font entre ces différents éléments, puis les invite à expliquer les différences perçues entre ces éléments. Il leur est ensuite demandé : « qu’est-ce que tout cela nous dit à propos de l’identité? ». Par la suite, l’enseignante ou l’enseignant propose aux élèves de nommer des sous-catégories (par exemple : identité ethnique, identité culturelle, etc.) à partir des regroupements préalablement effectués. Finalement, il ou elle demande aux élèves de découvrir l’objet d’étude à partir de tous ces éléments.

Ensuite, l’enseignante ou l’enseignant introduit l’objet d’apprentissage, à savoir la découverte des civilisations traditionnelles du Cameroun[4], et le situe par rapport à la finalité et aux buts curriculaires qui sont d’asseoir l’intégration nationale et de développer la conscience citoyenne. Il ou elle présente également le sujet (c’est-à-dire le titre de la leçon, les vagues successives de migration au Cameroun) et situe le contexte historique dans lequel il se déroule afin de permettre une meilleure compréhension de certains aspects sociopolitiques et économiques du Cameroun. Il est alors expliqué aux élèves que l’objectif est de découvrir les civilisations traditionnelles de ce pays. Ainsi, à l’aide d’une situation de vie portant sur le processus de l’intégration nationale, l’enseignante ou l’enseignant indique aux élèves que, dans cet objectif, il faudra d’abord faire un retour sur la situation sociopolitique du Cameroun précolonial et colonial, puis déterminer les motifs qui poussent à œuvrer pour l’intégration nationale et enfin les décrire.

L’enseignant ou l’enseignante procède ensuite à l’activation des connaissances antérieures (faire ressortir les schèmes, les éléments de connaissance que les élèves possèdent déjà en lien avec l’objet d’apprentissage, c’est-à-dire les origines du peuplement du Cameroun), en opérant un retour sur les objectifs et en amenant les élèves à donner les principales caractéristiques des différentes aires culturelles présentes au Cameroun, à décrire les modes de vie de chaque groupe et à présenter les divers éléments culturels de la société camerounaise depuis 1961. Il ou elle pose ensuite une question aux élèves, par exemple : « l’intégration nationale est-elle menacée au Cameroun comme le révèle l’actuelle crise anglophone? ». En effet, la crise sociopolitique actuelle qui a violemment paralysé les régions anglophones du pays est l’une des pires crises que le Cameroun ait eu à affronter depuis son indépendance en 1960 et sa réunification en 1961. Elle semble être d’essence régionaliste et séparatiste avec pour finalité explicite la contestation et le chaos, entendu ici comme le démantèlement, la fragmentation de l’entité établie depuis l’indépendance et la réunification du Cameroun. Les pages Facebook des fédéralistes et des séparatistes (« South-Westerns », Mark Bareta [BaretaNews], AmbazoniaGoverning, Ambazonia State, Ambazonia Independence, Martin Ekelenge, etc.) détaillent les objectifs politiques et culturels visés. Le moins qu’on puisse dire est que cette crise expose la problématique et la complexité du vivre ensemble dans une terre multiethnique, pluraliste et démocratique.

La phase suivante, celle de la réalisation de l’apprentissage qui prend la forme d’une recherche, propose un exemple en ce sens. Les élèves, guidés par l’enseignant ou l’enseignante, sont amenés à une prise en compte des incohérences ou des insuffisances de leurs réponses initiales, c’est-à-dire celles qu’ils ont formulées avant de connaître réellement le sujet, et ce, à partir de la présentation d’un conflit cognitif. Il s’agit de leur présenter une situation-problème tirée de leur vécu quotidien et en lien avec l’intégration nationale. Voici un exemple de situation-problème. Vingt-cinq Camerounais de la partie anglophone du pays sont actuellement jugés pour les motifs suivants : hostilité contre la patrie, outrage aux corps constitués et aux fonctionnaires, rébellion, dégradation des biens publics, pillage en bande, coaction des actes de terrorisme et défaut de la carte nationale d’identité. La situation problématique est de savoir si la question anglophone au Cameroun pendant la période s’étendant de 1961 à 2017 est une lutte sociale ou une lutte nationale. Cette présentation a pour fonction de les déstabiliser pour ainsi les encourager à approfondir, à partir des tâches, leur connaissance de la question à l’étude. Ensuite, l’enseignante ou l’enseignant les invite à étudier, à l’aide d’une recherche documentaire variée, les enjeux et les évènements controversés du passé camerounais en lien avec l’unification, le vivre ensemble et l’intégration nationale dans une société multi-ethnique, pluraliste et démocratique. Elle ou il précise les consignes du travail à réaliser : recherche de l’information, produit attendu, matériel, temps, etc. Au besoin, il faudra préciser le vocabulaire et fait ressortir quelques stratégies utiles au traitement de l’information et à maîtriser par les élèves (stratégies de lecture, d’organisation, de recherche, d’utilisation du matériel, etc.). Il faudra faire de même en ce qui concerne les habiletés à décrire, à analyser et à synthétiser; à chercher et à trouver des informations dans des documents authentiques et dans divers types de documents; à organiser les informations sous la forme de texte, de dessin, de schéma, etc.; à établir des liens entre différents éléments; à poser des questions et à émettre des hypothèses; à utiliser les connaissances antérieures; à lire des cartes, des tableaux, des graphiques pour en retirer des informations, ainsi qu’à utiliser diverses stratégies de lecture.

En réalité, les ressources manipulées pour répondre à la question proposée ont pour but de faire connaître tout le contenu de l’objectif terminal qui est, ici, la volonté d’asseoir l’intégration nationale dans la société camerounaise. En ce sens, l’élève sera amené tout au long de l’activité à découvrir les différentes organisations des sociétés traditionnelles au Cameroun, à travailler sur des problèmes ou des questions qui se posent ou qui risquent de se poser dans le processus de consolidation de l’intégration nationale et du vivre ensemble, à l’aide d’une série de documents authentiques fournis par l’enseignant ou l’enseignante, et du manuel de référence en classe (Roegiers 2008).

Ensuite, l’enseignante ou l’enseignant mettra les élèves en équipe de quatre et leur demandera de réaliser le travail. Tout au long de cette phase, l’élève doit construire lui-même ses connaissances. Pour ce faire, il ou elle devra effectuer une recherche active qui l’amènera à collecter les informations pertinentes pour ensuite les organiser en vue de les consigner dans ses notes et d’en discuter avec ses camarades. Le rôle de l’enseignant ou de l’enseignante est alors de guider l’élève dans sa recherche, de l’éveiller à l’utilisation de diverses stratégies, de l’encourager, de soutenir son effort et de l’aider à montrer les progrès réalisés.

La dernière phase est celle de l’intégration des apprentissages. Elle a lieu après la recherche. Durant cette phase, l’enseignante ou l’enseignant amène l’élève à objectiver et à réinvestir les connaissances acquises durant le déroulement de l’activité afin de se rendre compte que sa mise en mouvement ne s’est pas faite gratuitement, c’est-à-dire sans utilité immédiate, mais dans un but bien précis (en particulier pour produire du sens) (Roegiers 2008). Elle ou lui amène également l’élève à faire un retour sur l’activité réalisée, pour lui faire prendre conscience des connaissances nouvelles qui ont été apprises et pour réfléchir au sujet de la démarche utilisée pour faire le travail (difficultés rencontrées, procédures suivies, stratégies utilisées). L’enseignant ou l’enseignante met à jour les points forts et les points faibles de l’activité. Il ou elle montre l’utilité de la tâche réalisée, en amenant les élèves à comparer l’unité nationale du début des années 1961, au moment des indépendances, avec l’intégration nationale actuelle. Pour ce faire, l’enseignante ou l’enseignant amène les élèves à interroger et à interpréter le vivre ensemble dans une perspective historique; à mettre en exergue, à partir du contenu de formation, ce qui rapproche les différents groupes de population; à mettre en évidence leurs points communs et à visiter les différences tout en montrant que ces différences ne sont pas nécessairement objet de tension. À travers cette démarche, il y a donc toute une dynamique dans laquelle tous les éléments interdépendants sont mis en mouvement, sont coordonnés entre eux dans un fonctionnement harmonieux, afin de conduire l’élève à développer des compétences et à acquérir et comprendre de nouveaux savoirs.

Conclusion

En définitive, compte tenu de tout ce qui a été présenté précédemment, nous pensons que les gains que pourra apporter la mise en œuvre de l’approche par compétences permettront de favoriser la consolidation de l’intégration nationale, étant donné que l’APC est le fait de mobiliser un ensemble de ressources cognitives relatives aux savoirs, aux capacités et aux informations permettant de faire face avec pertinence et efficacité à une famille de situations (Perrenoud 2000). En d’autres termes, avec cette approche, il est question de mobiliser des ressources multiformes : connaissances, savoirs, expériences, schèmes, automatismes, capacités et savoir-faire de différents types (Rogiers 1999). Notre objectif est de militer en faveur d’un enseignement de l’histoire et de l’éducation à la citoyenneté plus ouvert, visant moins la mémorisation des faits et des récits déjà construits que la compréhension du processus par lequel ceux-ci sont produits (Nkoumou 2015). Il s’agit d’un enseignement de l’histoire aux visées de formation plus courtes[5], qui mène l’élève vers l’autonomie de la pensée et développe le sens critique afin qu’il ou elle soit à même d’agir dans une société démocratique et pluraliste en toute responsabilité.

Références

Aletum Tabuwe, M. 2004. Sociologie politique (2e éd.). Yaoundé : Patoh Publishers.

Biya, P. 1987. Pour le libéralisme communautaire. Paris : ABC/Favres.

Bwele, G. et Ahmadou, A. 1981. L’Encyclopédie de la république unie du Cameroun. Abidjan : Nouvelles Éditions africaines.

Gouvernement du Cameroun. 2014. Programmes d’études des écoles secondaires. Yaoundé : Ministère des Enseignements Secondaires.

Loi N° 053 du 19 décembre 1990, Journal Officiel de la République du Cameroun.

Mouelle Kombi, N. 2013. La Démocratie dans la réalité camerounaise. Libertés, légitimité et modernité politique sous Paul Biya. Paris : Dianoïa.

Mveng, E. 1985. Histoire du Cameroun (tome 2). Yaoundé : CEPER.

Nkoumou Melingui, C.-G. 2015. L’approche par compétences. L’enseignement de l’histoire au Cameroun. Paris : L’Harmattan.

Perrenoud, P. 2000. L’approche par compétences, une réponse à l’échec scolaire? Actes présentés au colloque de l’association québécoise de pédagogie collégiale. Montréal.

Roegiers, X. 2008. L’approche par compétences en Afrique francophone : quelques tendances. UNESCO.
Consulté à l’adresse : http://www.ibe.unesco.org/fileadmin/user_upload/Publications/Working_Papers/currcompet_africa_ibewpci_7.pdf

Rogiers, X. 2008. « L’approche par les compétences dans le monde: entre uniformisation et différenciation, entre équité et iniquité ». In Direct, 10 : 61-77.

Tchindjang, M., Ngamngne, L.A. et Bopda, A. 2008. La cartographie linguistique, traceuse de l’histoire, des civilisations et des cultures : une application au Cameroun [document inédit]. Institut National de Cartographie.
Consulté à l’adresse : https://ich.unesco.org/doc/src/00280-FR.pdf


  1. L’éducation à la citoyenneté et à la morale est le nom donné à l’enseignement se faisant dans les écoles primaires, les collèges et les lycées concernant la citoyenneté et les valeurs que le système éducatif veut diffuser. Au Cameroun, l’enseignement de cette discipline est dispensé au niveau des enseignements secondaires par les professeures et professeurs d’histoire-géographie et par celles et ceux de philosophie.
  2. Au Cameroun, on a pu assister, bien que très rarement, à quelques affrontements entre communautés tribales. Ce fut le cas des conflits entre Arabes Choa et Kotoko dans la zone de Kousseri (région de l’extrême nord du pays) en janvier 1994 et entre les Bali Nyonga et les Bawock dans la Mezam (région du nord-ouest) en 2009. Selon Mouellé (2013, 282-84), les pouvoirs publics ont chaque fois pris les mesures adéquates pour éviter l’envenimement ou l’escalade, restaurer la confiance et asseoir les conditions d’une cohabitation pacifique.
  3. Au Cameroun, les nouvelles églises chrétiennes se font appeler sous le nom d’Églises de « réveil » parce qu’elles considèrent que les églises anciennes (catholique, protestante, évangélique et pentecôtiste) sont des églises dont la foi n’est plus vivante, « agissante », du fait de leur ancienneté et par conséquent se meurt. Elles se singularisent pour ainsi dire par une expression de solidarité forte entre leurs membres, une liturgie animée, dansante, et par le ministère de la guérison.
  4. Il faut souligner que cette visée de formation a déjà été étudiée de manière sommaire par les élèves à l’école primaire.
  5. Les nouveaux programmes d’histoire ont été substantiellement allégés par rapport aux précédents de 1998.

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