3 Laura Maria Catarina Bassi, physicienne (1711–1778)
Marie-Claude Viano
Première physicienne diplômée de l’Université de Bologne, Laura Bassi introduisit en Italie les théories de Newton. Elle fut la première femme à faire partie de l’Académie des sciences de Bologne.
Une instruction complète et soignée
Laura Bassi est née en 1711 dans une famille de juristes. Elle était une enfant vive et précoce. Son père confia à un professeur du Collège de Médecine de l’Université de Bologne la mission de lui donner une instruction solide et diversifiée. Jusqu’à l’âge de 20 ans, elle étudia ainsi l’anatomie, l’histoire naturelle, la chimie, l’algèbre, la géométrie, la mécanique, la philosophie, le grec ancien, le latin et le français. Pendant les sept années de sa formation, la réputation de Laura se répandit parmi les étudiants et les professeurs de l’Université et, en avril 1732, elle se présenta à l’épreuve de disputatio, au cours de laquelle elle soutint 49 thèses philosophiques. L’élite intellectuelle s’était déplacée en nombre et, dans le public, on ne comptait rien moins que le légat du pape, l’archevêque Lambertini (futur pape Benoît XIV) et les sénateurs.
Reconnaissance universitaire
Quelques jours après la disputatio, Laura fut officiellement déclarée docteur en philosophie. Elle fut nommée lectrice en physique et mathématiques et le sénat lui alloua une pension. Elle devint ainsi la deuxième femme (après Dorotea Bocchi, titulaire d’une chaire de médecine de 1390 à 1430) à occuper un poste universitaire. Ses cours attirèrent des élèves de l’Europe entière. Parmi eux, on peut citer notamment le physicien Volta.
Et ensuite?
Laura épousa en 1738 Giovanni Guiseppe Veratti, lecteur dans la même université. Ce mariage semble avoir quelque peu semé le trouble parmi ses collègues qui s’attendaient à ce qu’elle consacre sa vie à l’étude. Mais ni son mariage, ni les enfants qui en naîtront (6, 8 ou 12, selon les sources) ne l’empêchèrent de poursuivre ses travaux. L’institution l’aida à monter un laboratoire chez elle et lui permit d’y donner ses cours. En 1745, elle devient le 25ème membre de l’Académie des Benedettini et, en 1776, l’Institut des sciences lui offrit une chaire de physique expérimentale.
Rôle scientifique, influence
Les manuscrits des cours de Laura ont été conservés. Elle y expose les théories de Newton dans tous les domaines qu’il a abordés. Elle joua ainsi un grand rôle dans la popularisation des idées Newtoniennes en Italie. Parmi ses 28 articles déposés à l’Académie des sciences de Bologne, treize traitent de physique, onze d’hydraulique, deux de mathématiques, deux de mécanique et un de chimie. Dans son laboratoire, elle se consacra, avec son mari, à de nombreuses expériences d’électricité orientées vers les applications médicales.
Le rayonnement et l’influence de Laura Bassi dépassèrent la frontière. Avec son appui, Voltaire et Emilie du Châtelet furent élus membres de l’Académie de Bologne en 1746.
Un mot sur l’Italie et les femmes à l’heure des Lumières
Laura Bassi et Emilie du Châtelet furent contemporaines. Elles ont toutes deux acquis, grâce aux meilleurs précepteurs, une vaste culture. Mais, tandis qu’Emilie a dû se battre pour se faire accepter en tant que femme de science, Laura a quant à elle bénéficié des encouragements et des honneurs que la société italienne, hiérarchie catholique comprise, réservait à ses filles les plus brillantes.
Références
O’Connor, J. J. et E. F. Robertson. 2008. « Laura Maria Catarina Bassi ». Fonds d’archives MacTutor History of Mathematics. http://www-history.mcs.st-and.ac.uk/Biographies/Bassi.html
Sartori, Eric. 2006. Histoire des femmes scientifiques de l’antiquité au XXème siècle. Paris : Plon.