1 Les prémisses : l’homo loquens
[L’humain se caractérise par une] aptitude obstinée au dialogue avec son semblable, vocation à pratiquer l’échange. À commencer par celui qui fonde tous les autres et les rend possibles, à savoir l’échange des mots. S’il est homo sapiens, c’est d’abord en tant qu’homo loquens, homme de paroles.
Claude Hagège, L’Homme de paroles, 1985.
Ici les données sont intuitivement assez parlantes, mais complexes à théoriser.
Laurent Danon-Boileau & Mary-Annick Morel, dans Jean-Marie Merle, Le sujet, 2003.
La langue comme fait social
La langue est un fait social : voici une affirmation que partagent aussi bien Meillet que Saussure et dont on pourrait d’ailleurs se demander avec Chiss et Puech s’il ne s’agit pas là aujourd’hui d’un truisme massivement partagé par les linguistes[1]. Les néogrammairiens avaient en effet eu le mérite de rompre avec une conception du langage qui en faisait un organisme naturel : elle devenait désormais, selon l’expression de Saussure, un « produit de l’esprit collectif des groupes linguistiques » (Saussure, 1979, p. 19). On assiste ainsi dans le dernier tiers du 19e siècle, à une révolution scientifique dans ce que l’on ne nomme pas encore les sciences du langage : il y a substitution d’un paradigme historique au paradigme organiciste, même si l’on constate, au-delà de la valeur polémique de l’argument, que Saussure et Meillet ne donnent pas le même contenu positif à l’affirmation selon laquelle « la langue est un fait social ». Toutefois, si Chiss et Puech ont pu faire remarquer qu’aucun chapitre n’est consacré à la thématisation du statut social de la langue comme tel, à une exception près, je prendrai le contre-pied de cette affirmation en argumentant plutôt que Saussure a consacré tout le cinquième chapitre du Cours de linguistique générale – Type linguistique et mentalité du groupe social – à la dimension sociale du langage. En tout état de cause, si la thèse de la tiédeur de Saussure vis-à-vis de la dimension sociale de la langue était retenue, nous pourrions volontiers l’interpréter, à l’instar de Martinet, comme une posture stratégique. En effet,
l’analyse d’une langue supposée uniforme est chose assez délicate pour qu’on ait intérêt à simplifier au maximum les données du problème. Cependant, une fois réalisée cette analyse, il est indispensable de faire intervenir dans l’examen celles des données qui avaient été provisoirement écartées (Martinet, 1969, p. 45).
En somme, les contradictions ne sont que superficielles puisque Meillet et Saussure, Martinet et quelques autres s’accordent sur l’essentiel, c’est-à-dire la « socialité », l’institutionnalité de la langue : la langue est une institution, c’est un fait social. Mais quelle signification donnent-ils à cette assertion? L’analyse des textes de Saussure et de Meillet montre une différence, voire des divergences notables dans l’interprétation de ce postulat. Chez Saussure, en effet, l’affirmation de la langue comme une institution sociale veut marquer une rupture épistémologique par rapport à l’ancien paradigme qui présentait la langue comme une faculté naturelle. Cela étant dit, la rupture d’avec l’ancienne conception « naturaliste » étant consommée, la nécessité se fait jour de prendre comme objet de la linguistique quelque chose qui lui soit propre, sans appartenir à un champ autre comme celui du social, par exemple.
Arbitraire et stabilité
Saussure a le désir de systématiser, d’affirmer l’autonomie d’une nouvelle science. Car l’établissement de cette linguistique générale, et même d’une sémiologie générale, passe par son ancrage dans une certaine stabilité. C’est ainsi que, dans le couple « langue/parole » qu’il pose comme étant constitutif du langage humain, Saussure semble accorder une fois pour toutes la primauté à la langue, fait social, sur le discours, fait individuel, la langue ayant vocation à être actualisée par l’acte individuel de parole. Non actualisée, la langue se définit comme un système stable, cette stabilité étant précieuse au moins à deux titres : elle apparaît comme une condition pré-requise à l’établissement d’une science positive. De plus, elle apparaît, étant donné le caractère arbitraire du signe linguistique, comme le seul garant de la communicabilité de l’expérience.
Pourtant, cette stabilité – immutabilité dans le texte de Saussure – loin d’être définitive, s’inscrit plutôt dans une véritable relation dialectique avec la mutabilité. Ainsi, bien qu’elle se caractérise par l’affirmation exacerbée de la primauté de la langue sur la parole, la pensée saussurienne a su poser le principe de l’interdépendance étroite entre les deux ordres de faits. Bien plus, elle reconnaît le rôle de la parole dans le processus de changement linguistique puisque « c’est la parole qui fait évoluer la langue » (Saussure, 1979, p. 37). Essentiellement stable, mais nécessairement changeant, le signe linguistique porte en lui-même les conditions profondes de sa mutabilité ainsi que de son immutabilité. Le caractère immotivé de la relation signifiant/signifié, l’arbitraire du signe, constitue le garant de la stabilité de la fonction référentielle. En effet, le lien Signifiant/Signifié, arbitraire et contingent dans l’absolu, devient nécessaire et contraignant parce que « institutionnalisé », tributaire des conventions en vigueur dans une communauté donnée. Le signe ne dépend pas du libre choix du locuteur, de l’individu. Il ne souffre pas non plus de la remise en question. Il est loisible de constater que, sortant des faits de langues, c’est dans les faits sociaux que Saussure va tirer un exemple pour illustrer sa démonstration. En effet,
pour qu’une chose soit mise en question, il faut qu’elle repose sur une norme raisonnable. On peut, par exemple, débattre si la forme monogame du mariage est plus raisonnable que la forme polygame et faire valoir les raisons pour l’une et l’autre. […], mais pour la langue, système de signes arbitraires, cette base fait défaut, et avec elle se dérobe tout terrain solide de discussion (Saussure, 1979, p. 106-107).
C’est dire qu’aucun rapport de nécessité n’existant entre signifié et signifiant, la communication ne peut faire fi de ce lien et fonctionner en marge des conventions du système : la stabilité conférée au signe linguistique par la mise en œuvre du principe de l’arbitraire permet l’exercice de la fonction référentielle. À l’inverse, le fonctionnement régulier de cette dernière, parce qu’elle s’inscrit dans le temps, autorise la pérennité du signe. Contradiction apparente et complexité de l’objet langue fondent, paradoxalement, sa mutabilité. Ainsi, les initiatives d’aménagement terminologique, dont il sera question plus tard au chapitre cinq notamment, ne contredisent en rien ce principe, puisqu’elles se mettent en œuvre du fait d’un consensus implicite avec la « masse parlante » porteuse de besoins sociétaux.
Et pourtant, elle change…
Autant Saussure développe longuement la question de l’immutabilité du signe linguistique et de sa nécessité, autant il se montre peu prolixe à propos de sa mutabilité. Pourquoi le signe linguistique change-t-il? Sur l’immanence du changement, il commence par une boutade aux allures de sophisme (Saussure, 1979, p. 111) : le temps altérant toute chose, pourquoi la langue échapperait-elle à cette loi universelle? Mais rapidement, la démonstration s’oriente, comme de mauvaise grâce, vers une explication plus rationnelle, en relation avec la dimension historique et sociale de la langue. En effet, de même que la langue ne se conçoit pas en dehors de la masse parlante, c’est-à-dire en dehors de sa dimension sociale, de même, « en dehors de la durée, la réalité linguistique n’est pas complète » (ibid., p. 113). La « langue s’altère, ou plutôt évolue, sous l’influence de tous les agents qui peuvent atteindre soit les sons soit le sens » (ibid., p. 111). Ce que Saussure appelle « les agents », sera nommé quelques pages plus loin avec moins de pusillanimité les « forces sociales » (ibid., p. 113). Chez Martinet (1969), il sera question plus clairement d’une évolution qui touche plusieurs domaines (intellectuel, social et économique). C’est précisément cette mutation que prend en charge la linguistique du développement.
Nous savons que l’évolution intellectuelle, sociale et économique d’un groupe donné entraîne nécessairement l’émergence des nouveaux besoins communicatifs pour ce même groupe. Il est vrai que
Tout peut changer dans une langue : la forme et la valeur des monèmes, c’est-à-dire la morphologie et le lexique; l’ordre des monèmes dans l’énoncé, autrement dit la syntaxe; la nature et les conditions d’emploi des unités distinctives, c’est-à-dire la phonologie (Martinet, 1969, p. 173).
Mais il reste que le lien avec l’évolution sociale est plus manifeste sur le plan de la composante lexicale : l’apparition de nouveaux modes de vie fait apparaître, naturellement, de nouvelles désignations. Ces dernières peuvent ou non être assorties de nouveaux signifiants.
Nous savons comment un changement dans les habitudes cybernétiques a entraîné une resémantisation du lexème voler : l’apparition de la fauconnerie et l’utilisation d’oiseaux de proie dans la chasse a en effet provoqué l’évolution de ce lexème. Venant de l’étymon latin volare « se déplacer dans les airs grâce à des ailes », le verbe voler a acquis le sens nouveau de « dérober » par désignation métaphorique de l’action des oiseaux de proie qui, en plein vol, enlevaient le gibier pendant la course de celui-ci, comme s’ils le volaient (Arrivé, Gadet et Galmiche, 1986, p. 223-224).
Forme et fonction : le laboratoire créole
Concernant ce qu’il appelle les nouveaux agencements entre monèmes, Martinet aura eu l’immense mérite de tenter une explication de l’apparition de nouvelles fonctions syntaxiques. Il admet tout de même qu’il est « très difficile de marquer exactement la causalité du changement linguistique à partir des réorganisations de la structure sociale et des modifications des besoins communicatifs qui en résultent » (Martinet, 1969, p. 176). Mais s’il faut reconnaître l’influence décisive de la structure sociale sur celle de la langue et pas seulement au niveau le plus immédiatement appréhendable qu’est le niveau lexico-notionnel, sur le plan syntaxique, par contre, la recherche des facteurs extralinguistiques ne s’effectue pas aisément. À ce propos, Martinet émet une hypothèse hardie selon laquelle un accroissement de la complexité des relations humaines entraînerait une perception plus aiguë de la complexité des rapports entre les différents éléments de l’expérience, ceci déterminant de nouveaux agencements linguistiques destinés à marquer ces rapports. C’est ainsi que la forte corrélation entre la langue et ses fonctions déterminerait des changements structurels profonds dans celle-ci, lorsque ces fonctions évoluent. Les changements profonds des statuts des langues – de langue plénière à langue véhiculaire notamment – déterminent une transformation du corpus : restructuration de l’idiome concerné dans le sens d’une plus grande régularité des paradigmes. Je l’ai montré dans le cas de la restructuration du fulfulde en une koinè véhiculaire (Métangmo-Tatou, 1988). Ceci intéresse au plus haut point la présente problématique à cause de l’enjeu que représentent les langues véhiculaires dans la dissémination de l’information ainsi que de la gestion de la communication.
Rappelons qu’en sociolinguistique, le concept de corpus se distingue de l’acception ordinaire – ensemble fini d’énoncés recueillis pour constituer une base d’informations permettant d’entreprendre la description et l’analyse de la langue. En marge de cette acception déjà classique, il faut noter celle d’« inventaire des règles et formes que constitue un système linguistique, et permettant son fonctionnement comme système sémiotique » (Robillard, 1997a, p. 102). Il s’oppose au statut, qui désigne la « position relative d’une langue dans la hiérarchie sociolinguistique d’une communauté linguistique, cette position étant étroitement liée aux fonctions (fonctions pédagogiques, économiques, scientifiques, etc.) assumées par cette langue » (Robillard, 1997b, p. 262). C’est, du reste, ce lien étroit entre statut et fonction qui explique les pesanteurs observées au Cameroun depuis que les langues nationales ont été explicitement valorisées dans la Constitution de 1996 : ces langues ne sont pas encore investies de fonctions effectives. Il est à noter en outre que, loin de constituer un attribut intrinsèque établi et acquis une fois pour toutes, le statut est investi d’une valeur sociale relative. La même langue peut avoir un statut différent d’un espace géographique à un autre, ou dans le même espace géographique, d’une époque à une autre. Pour ne citer qu’un exemple, rappelons que le français n’accède au statut de langue officielle en France qu’après l’Edit de Villers Cotterêts de 1539. Il existe une profonde solidarité entre corpus et statut d’une langue.
Dans une étude toujours d’actualité, Hymes affirme que pidgins et créoles présentent des constantes remarquables :
Invariance in form, rather than allomorphic variation; invariant relation between form and grammatical function, rather than derivational and inflectional declensional and conjugational variation; largely monomorphemic words, rather than inflected and derived words; reliance on overt word order[2] (Hymes, 1968, p. 73).
Hagège ne dit pas autre chose lorsqu’il affirme, dans un chapitre intitulé fort à propos « Le laboratoire créole », que le développement des créoles délivre à la linguistique générale des enseignements forts relativement aux langues humaines. Concernant toujours la relation de covariance entre langue et société, il a justement été montré que les conditions historiques de l’émergence des pidgins et créoles, ainsi que les fonctions dévolues à cet ensemble de langues, ont donné forme à leur structure interne : ces langues se ressemblent par trois tendances fondamentales : l’économie, l’analycité et la motivation. L’économie se manifeste notamment par l’invariabilité des formes, et son corollaire, la syntaxe de position (Hagège, 1985, p. 9). C’est celle des trois tendances qui concernent le plus la koinè peule du nord Cameroun (Métangmo-Tatou, 2003).
Antoine Meillet et les bases d’une linguistique sociale
« La détermination du caractère social de la langue dans l’œuvre de A. Meillet est toujours corrélative de la détermination des causes des changements linguistiques » (Puech et Radzynski, 1978, p. 47). Mais le paradoxe vient de ce que Meillet essaie de fonder l’autonomie de la linguistique par rapport aux autres sciences, alors même qu’il affirme le caractère exogène de sa caractéristique principale. En somme, pour Meillet, la langue est un fait social, car c’est grâce aux changements sociaux que l’on arrive à expliquer les changements linguistiques. Il nous semble évident aujourd’hui que la causalité du changement linguistique ne peut être ramenée à sa seule dimension externe. En effet, bien des changements, à tous les paliers de la langue, peuvent être expliqués par une référence à des facteurs purement internes.
Il reste que Meillet peut être considéré à la fois comme le continuateur et, en ce qui concerne les principes les plus généraux, le héraut d’une linguistique sociale, comme l’affirment Chiss et Puech – tout en déplorant la rareté des travaux qui s’inspirent de sa problématique. Ces auteurs nous font remarquer qu’en France, à date précoce, des impératifs sociopolitiques – parmi lesquels l’unification linguistique du pays et la question scolaire – ont pu infléchir cette perspective. Bien que l’Afrique n’ait pas produit un Abbé Grégoire de Tours publiant son fameux Rapport sur la nécessité et les moyens d’anéantir les patois et d’universaliser la langue française, elle a hérité du jacobinisme linguistique né au lendemain de la Révolution française de 1789. Le monolithisme absolu (tout en français) qui y a régné surtout dans les territoires francophones en est la résultante directe.
Cela étant, la linguistique du développement se veut l’héritière de cette linguistique sociale qui exigeait probablement, pour s’exprimer véritablement, l’expression d’attentes sociétales éminemment pressantes. Il s’en manifeste en Afrique et dans les pays en développement peut-être plus que dans tout autre espace du monde. Il me plaît, à ce propos, de citer assez largement Chiss et Puech.
Sans cesse, Meillet est confronté à cette double et contradictoire évidence : le principe d’une linguistique sociologique est universellement reconnu, mais il reste la plupart du temps lettre morte et ne suscite que peu de travaux originaux, ni dans le détail des analyses ni dans une réflexion plus générale.
Deux domaines toutefois sont enregistrés et ‘‘réfractés’’ comme étant des ‘‘domaines de progrès’’ de la linguistique sociale :
a) le champ d’étude des ‘‘parlers spéciaux’’, techniques […] ou socio-différentiels […]
b) le domaine de la géographie linguistique […]. Les espoirs investis par Meillet en une linguistique sociale échouent donc sur le double écueil d’une linguistique générale ‘‘en croissance’’ pour laquelle l’affirmation du caractère social des faits de langue est une formule sans effet heuristique, et d’autre part, d’un émiettement de travaux partiels, relativement marginaux, peu conscients de leur importance et desquels il serait prématuré de tirer quelque conclusion à valeur générale (Chiss et Puech, 1987, p. 145-146).
Il semble bien que le relatif échec de la linguistique sociale à l’époque contemporaine de Meillet soit à mettre en relation avec la volonté d’une science encore jeune de se théoriser, de fonder son autonomie et sa généralité, d’autant qu’elle visait, en dernière analyse, à s’intégrer dans une sémiologie générale.
Aujourd’hui, ma linguistique du développement s’intègre précisément dans une sémiologie générale. Tirant ses bases d’une linguistique sociale, et empruntant des outils entre autres à la lexicologie, à la traductique, et à la théorie de la communication, elle professe des problématiques explicitement orientées vers un réaménagement de la société pour un mieux-être social et économique. Une telle linguistique se distingue radicalement de la linguistique générale par ses orientations, car elle est essentiellement guidée vers l’intervention[3] et l’action citoyenne. Par contre, elle ne saurait se passer de la linguistique générale dans l’affûtage des moyens qu’elle met en œuvre pour atteindre ses objectifs. Le projet de cet ouvrage est de théoriser la linguistique du développement en parvenant à en cerner les contours, à en repérer les principaux hérauts et acteurs déterminants, à en théoriser les axiomes de base, les objectifs majeurs et moyens d’action opérationnels. Nous pourrions aboutir ainsi à une formulation prospective des conditions de réussite d’une telle démarche en relation étroite avec un environnement spécifique.
L’homo loquens et la connaissance
Les interactions entre le langage et la connaissance sont de plusieurs ordres. Ces interactions se manifestent au niveau de la perception du monde sensible, préalable à toute connaissance, au niveau de la diffusion de la connaissance, et enfin à celui de la conceptualisation de la connaissance et de la construction du concept.
Langage et culture
Les interactions entre langue et culture sont notables tout d’abord, au niveau de la perception même des faits, d’où procède toute connaissance, mais également la connaissance scientifique, y compris les systèmes culturels, et, partant, les langues qui les expriment. Comme le dit très bien Hall (1971, p. 61-62), « pour comprendre l’homme, il faut avoir une notion de ses systèmes de perception et de la façon dont la culture transforme l’information que ceux-ci fournissent ». Dans le même ordre d’idées, l’exemple désormais classique de la perception particulière de chaque langue des variations chromatiques du spectre solaire illustre de façon magistrale cette transformation proprement culturelle qu’opère chaque langue particulière à partir du monde sensible.
L’analyse que propose Pottier (1992) de l’activité de langage présente l’avantage de théoriser, sur le plan linguistique, cette solidarité forte entre le domaine expérientiel et les faits de langue. Il propose un modèle de l’activité de langage qui comporte quatre paliers ou niveaux :
- le niveau de l’expérience ou niveau référentiel qui renvoie à tout ce à quoi on réfère par le biais des sens, de la mémoire ou de l’imagination;
- le niveau conceptuel qui désigne la représentation mentale que l’on se donne de l’événement au niveau de l’expérience;
- le niveau de la langue qui, s’énonçant en terme de compétence, désigne toutes les stratégies disponibles au niveau d’une langue particulière pour exprimer une idée ou des relations entre idées;
- le niveau du discours performé qui correspond au terme de l’activité de langage, c’est-à-dire au texte produit.
Ainsi, la solidarité est si étroite entre l’expérience et la mise en mots que la culture peut influer sur cette mise en mots et, qu’inversement, l’humain peut opérer des choix langagiers spécifiques dans le but clairement exprimé de modifier l’expérience[4].
C’est vraisemblablement cette philosophie qui présida à la création d’un département de Langues et Cultures camerounaises à l’École Normale Supérieure de Yaoundé. L’ouvrage Langue et culture ewondo d’Essono (2012) illustre parfaitement cette option. D’ailleurs, le lexique proposé à la fin dudit ouvrage intègre aussi bien des items liés à la culture ancestrale ewondo – məndzáŋ, « balafon », ǹláŋ « chantefable » – que des lexies telles que fám « sortie de secours », abɔlí, « pollution », ou même ǹya, « chambre à air», qui témoignent quant à elles d’un travail terminologique de fond effectué en amont. Ce travail rend lui-même compte d’une ouverture de la culture ewondo à la contemporanéité, en même temps qu’il favorise une telle ouverture.
En réalité, la complexité des interactions entre langue et société se lit aussi bien de manière rétrospective – action de la société sur la langue – que de manière prospective – action de la langue sur la société. En effet, la langue porte en elle la marque des interactions sociales. De la même façon, les phénomènes linguistiques – élaboration de dictionnaires, institution d’un standard linguistique, alphabétisation – peuvent infléchir les pratiques sociales.
Langage et circulation de la connaissance
En deuxième lieu, il faut citer l’importance capitale du langage dans la circulation de l’information, la connaissance scientifique n’étant qu’un type particulier d’information. Maints exemples tirés tant de l’histoire ancienne que de l’époque contemporaine illustrent le travail permanent d’adaptation du message pour une optimisation de sa diffusion. Le latin fut longtemps dans l’Europe christianisée l’idiome privilégié – voire exclusif – de la science ainsi que de la religion. Cette langue traverse une crise importante vers le VIIe siècle après Jésus-Christ. Les habitants de la Gaule sous domination romaine doivent adopter le latin, la langue du colonisateur. Mais les populations parlent une variété de latin très « simplifié » qui tend en fait à se pidginiser, s’écartant notablement du latin classique; bientôt, la variation linguistique est telle que le clergé se voit contraint d’élaborer une version simplifiée de la Bible en latin, pour une meilleure lisibilité par les masses : c’est la Vulgate. Mais ils doivent bientôt se rendre à l’évidence : cette version extrêmement simplifiée de la Bible n’est déjà plus comprise par le peuple. Une nouvelle action s’impose : c’est l’élaboration des Gloses dites de Richenau au siècle suivant. Tout un travail d’adaptation, de création d’un lexique spécialisé va s’effectuer pendant le passage au latin, travail rendu nécessaire du fait de la nouveauté et de la spécificité proprement culturelle de la parole messianique. Le latin classique distinguait hostia, « offrande aux dieux d’un corps en compensation d’une faute » et victima, « l’offrande d’un corps en remerciement » (Benveniste, 1966, p. 321-322). Il est intéressant d’examiner le parcours néologique qui a permis au latin ecclésiastique de récupérer le vocable hostia (hostie en français) et de l’investir, par reconceptualisation et métaphorisation[5], dans son sens chrétien actuel. Aujourd’hui en Afrique, au Cameroun notamment, le texte biblique existe désormais dans de nombreuses langues identitaires. L’idéal de congruence entre le véhicule de la connaissance et le contexte de diffusion dudit message a donné lieu à un certain nombre d’adaptations linguistiques (et culturelles) : création néologique, traductions, etc. afin que le texte soit le plus largement accessible aux destinataires ciblés. En réalité, bien avant les informations relatives à la sécurité alimentaire ou à la santé, le message messianique a atteint sa cible dans une langue accessible à la plupart. Mais il est de la responsabilité des chercheurs et chercheuses – et des politiques – de mettre à la disposition du plus grand nombre, c’est-à-dire de vulgariser, les résultats fondamentaux de la recherche actuelle, dans la mesure où ceux-ci peuvent avoir un impact bénéfique sur le quotidien.
On m’a quelquefois fait remarquer, non sans malice, que nous, Africains, avons souvent parcouru le chemin à l’inverse, en abandonnant la langue du plus grand nombre (la langue vulgaire, dans son sens étymologique). Au Moyen Âge, l’homme instruit lisait, s’exprimait, écrivait en latin, langue largement ignorée par le peuple qui croupissait dans l’obscurantisme le plus total. Il s’isolait ainsi du peuple. Il a été dit, non sans raison, que l’avènement de la Renaissance – avec l’adoption de la langue vulgaire, le français – n’est pas étranger au bouillonnement intellectuel qui donna au monde les grands esprits de ce temps. Tout se passe aujourd’hui comme si les politiques linguistiques d’Afrique noire francophone, en abandonnant la langue du plus grand nombre, s’efforçaient de réduire le plus drastiquement possible l’avènement de grands esprits. Malheureusement, ces politiques linguistiques extraverties ont eu des effets si désastreux sur la transmission intergénérationnelle des langues africaines que, dans certains contextes, les langues africaines sont complètement ignorées. Des sondages effectués au sein de la population estudiantine me l’ont confirmé. Dans ces conditions, la promotion des langues nationales n’aura probablement plus, auprès de ces publics, ni l’audience ni l’efficacité escomptées. Dès lors, est-il exagéré de dire que pour ces locuteurs en principe « natifs », il faudra sérieusement envisager pour l’enseignement des ces langues, le recours à la didactologie des langues et cultures étrangères? Le réalisme voudrait que l’on prenne acte de cet état de choses, sans passion. Et que l’on en tire les conséquences qui s’imposent.
Rôle de la langue dans la conceptualisation scientifique
On sait l’importance de l’affûtage terminologique en science d’une manière générale. Si la mise en place du métalangage est déterminante pour tout développement scientifique, elle l’est davantage pendant la phase de détermination d’une nouvelle discipline ou dans l’essai de théorisation et de problématisation d’un axe émergent. Bachelard nous enseigne que la « pensée scientifique commence par une épochè, c’est-à-dire une mise entre parenthèses de la réalité » (1966, p. 33), des sensations brutes. Les données de l’expérience, les idées reçues, doivent faire l’objet d’une critique incessante et éclairée tant par l’intuition que par la raison. C’est par le biais d’une démarche dialectique entre l’intuition et la raison que nous posons les trois actes essentiels de la recherche scientifique. Le fait scientifique, en effet, nous dit le philosophe, est conquis, construit et constaté. Il est conquis sur les apparences immédiates du sensible par l’intuition rationnelle. Sa construction se fonde alors sur un ensemble de procédures admises par la communauté scientifique. L’étape du constat démontre la cohérence et la validité de l’architecture proposée pour lire le monde sensible.
Le langage, et plus spécifiquement la conceptualisation scientifique, occupe une place centrale dans l’élaboration de la science. Alors que je préparais un cours d’épistémologie pour nos étudiants de la faculté des sciences, il y a plusieurs années, je leur avais fait découvrir un document qui m’avait vivement enthousiasmée et définitivement séduite. Dans le Discours préliminaire au Traité élémentaire de Chimie, Lavoisier s’exprimait en ces termes :
Tandis que je croyais ne m’occuper que de nomenclature, tandis que je n’avais pour objet que de perfectionner le langage de la chimie, mon ouvrage s’est transformé insensiblement entre mes mains sans qu’il m’ait été possible de m’en défendre, en un traité de chimie. L’impossibilité d’isoler la nomenclature de la science et la science de la nomenclature tient à ce que toute science physique est en principe formée de trois choses : la série des faits qui constituent la science; les idées qui les rappellent; les mots qui les expriment […] et comme ce sont les mots qui conservent les idées et les transmettent, il en résulte qu’on ne peut les perfectionner sans perfectionner la science, ni la science sans le langage, et que, quelque certains que fussent les faits, quelque justes que fussent les idées qu’ils auraient fait naître, ils ne transmettraient encore que des impressions fausses, si nous n’avions pas des expressions exactes pour les rendre (Lavoisier, 1770, p. 10).
Il me plaît de citer ici l’un des grands chimistes des temps modernes, lui qui eut l’intuition rationnelle que la combustion n’entraînait pas une perte, mais plutôt un gain de matière, révolutionnant ainsi le paradigme admis à cette époque.
Incontestablement, la construction du concept, mais également de l’objet est indissociable de la science. Qu’est-ce que l’entreprise de Saussure sinon un processus de construction de l’objet de la linguistique, réflexion systématique sur l’observable – oral ou écrit – que représente la langue et qui dit le monde, les êtres et événements de ce monde? Concomitamment, la construction de l’objet de la linguistique reste, chez lui, indissociable de l’élaboration des outils conceptuels qui lui donnent forme. Est-ce un fait fortuit, ou une tendance archétypale de l’humain à polariser sa démarche réflexive ou encore un choix stratégique de binarités scolaires en vue d’une plus grande efficacité didactique? Toujours est-il que Saussure et les post-saussuriens sont profondément marqués par la dualité. Au commencement, dualité – bifacialité – du signe linguistique, constitué d’un signifiant et d’un signifié, d’un concept et d’une image acoustique. Puis, la récurrence frappante des oppositions binaires désormais classiques : langue vs parole; social vs individuel; synchronie vs diachronie; arbitraire vs motivation; valeur vs signification; essentiel vs accessoire, etc. Chez Chomsky, tout un cadre théorique s’organise autour de l’opposition compétence vs performance, concepts centraux qui ne représentent pourtant pas, contrairement aux apparences, la réplique générativiste de l’ancien couple langue/parole. Dans cette perspective, la compétence n’est pas un système de signes stockés dans la mémoire d’une communauté linguistique, mais un système de règles permettant à un locuteur de générer et d’interpréter un nombre infini de phrases dans la langue envisagée. Là encore, je note la création d’un concept, le générativisme, en rapport direct avec le paradigme proposé.
La construction du concept
De la théorisation proposée par Pottier (1992) pour rendre compte du parcours de sémiotisation, je peux tirer des éléments pertinents pour tenter une reconstruction du concept dans le cadre du discours scientifique qui n’est, au fond, qu’une des modalités spécifiques du discours. Aussi je considère que la conceptualisation, à l’instar de la sémiotisation, s’élabore en un processus que l’on peut décomposer en quatre étapes :
- en premier lieu, le chercheur ou la chercheuse fait l’expérience d’éléments nouveaux qui interpellent ses sens, son intelligence ou son imagination;
- puis, il ou elle se donne une représentation mentale des différentes facettes de l’événement perçu empiriquement;
- ensuite, il ou elle sollicite sa compétence linguistique et toutes les stratégies disponibles de la langue particulière usitée afin de conférer une forme matérielle à cette représentation mentale, compte tenu des différents paramètres retenus comme significatifs – et désormais définitoires;
- la dernière étape consiste en l’intégration du concept nouvellement élaboré au niveau du discours performé d’abord par le chercheur lui-même ou la chercheuse elle-même; puis ce concept pourra s’imposer plus ou moins fortement dans le métalangage de la communauté scientifique concernée[6].
La mise en place d’un métalangage, ou même la construction d’un seul concept représente un travail de sémiotisation laborieux dont on trouve quelquefois les traces dans le travail de formulation du discours scientifique. Au niveau des marques graphiques, on note le rôle important des guillemets dans la construction du discours scientifique : en comparant la reproduction de certains textes, on remarque, par endroits, la disparition des guillemets, indice de l’évolution interne que peut connaître un discours. Comme le note très justement Mohamadou Ousmanou (2008), les signes graphiques sont d’autant plus significatifs qu’ils consolident les acquis de la théorie, les autres marques d’évolution étant à trouver du côté de l’énonciation[7].
Il est intéressant de mener une analyse de quelques occurrences du guillemetage dans le discours de Morel. Dans le passage suivant, les guillemets qui encadrent le groupe « petits mots » apportent une information capitale à la définition : « Ce chapitre a pour objet de présenter le rôle spécifique d’un certain nombre de ‘petits mots’ qui balisent l’oral, dont certains (prépositions et conjonction de coordination) sont, on le verra, depuis longtemps répertoriés dans l’analyse de l’écrit » (Morel, 1998, p. 94).
J’adhère totalement à l’analyse selon laquelle, au-delà de la petitesse des mots, la typographie trahit une certaine insatisfaction de la théoricienne quant à cette désignation. La difficulté réside dans l’absence d’un terme qui puisse convenir afin de nommer le nouveau concept, le ligateur, puisque c’est de lui qu’il s’agit. L’indéfini « certains », suivi de la parenthèse qui énumère une classe limitée de mots, appuie par ailleurs toute la difficulté à mettre en mots le concept. Ce dernier est d’abord perçu au niveau des opérations mentales préverbales qui précèdent la sémiotisation. Loin de varier au gré des humeurs du scripteur, la présence et l’effacement d’un signe graphique sont porteurs de sens. Notamment, le guillemetage des notions et son contraire, le déguillemetage, balisent le discours « vers une certification de la connaissance ».
L’émergence d’un concept nouveau se justifie par le contexte sociohistorique et scientifique. Bien souvent le chercheur ou la chercheuse ressent la nécessité de contextualiser le néologisme proposé. C’est le cas du concept de bilinguisme identitaire proposé dans un contexte national où le terme « bilinguisme » renvoie presque automatiquement à la connaissance tant individuelle que sociale des deux langues officielles que sont le français et l’anglais. Tadadjeu a explicité le sens du concept ainsi que son contexte d’émergence : « le bilinguisme identitaire comprend [donc] la langue maternelle (L1) que l’enfant parle déjà en arrivant à l’école, et la langue officielle première qu’il découvre progressivement à l’école » (Tadadjeu, 2003, p. 6). Concernant le contexte historique de ce néologisme, il explique que dans les années 80, il avait réussi à faire admettre le concept de bilinguisme officiel pour désigner exclusivement cette connaissance individuelle du français et de l’anglais. Puis dans le cadre de ses travaux visant l’intégration de la langue maternelle à l’école, la configuration en deux langues officielles associées à la langue maternelle a conduit à l’adoption du concept de trilinguisme extensif appliqué à l’enseignement des langues dans l’enseignement secondaire. Cependant, le modèle pédagogique préconisé pour l’intégration des langues maternelles à l’école prévoyait un premier palier caractérisé par l’utilisation conjointe de la langue maternelle de l’enfant (L1) ainsi que de la langue officielle principale de la région concernée (LO1); c’est alors qu’il proposa un nouveau concept doté d’une réelle efficacité opérationnelle, celui de langue officielle première. Il s’agit donc du français pour les francophones et l’anglais pour les anglophones. Précisons tout de même que « francophone » et « anglophone » correspondent chacun bien souvent à une caractérisation maximale d’une pratique minimale puisque qu’il suffit d’être originaire de l’une des huit provinces de l’ancien Cameroun sous protectorat français pour assumer, d’emblée, la caractérisation de francophone, quelle que soit par ailleurs sa compétence effective en français.
La théorie de la grammaire de l’intonation (GI), initiée par Morel et Danon-Boileau à l’Université Paris 3, offre aussi un exemple du lien entre théorisation et construction du concept. Là encore, les concepts de base de la GI – ligateur, indice posturo-mimo-gestuel, locuteur vicariant, repli égocentré, etc. – ont été élaborés progressivement, au fur et à mesure des besoins de la description et de l’interprétation scientifique des faits. Il est vrai que devant un concept donné, l’évidence de son opérationnalité et son figement subséquent peuvent laisser l’illusion tenace que le concept n’est que le reflet du réel, une traduction du monde sensible. Pourtant, le concept reste une pure construction de l’esprit, une interprétation du réel. Le lecteur ou la lectrice de la GI ne peut que se sentir fortement impressionné-e par la prodigieuse force de la conceptualisation et de la reconceptualisation, toujours en quête d’une formulation, plus précise et plus élégante, tant il est vrai que l’élaboration d’un concept doit, autant que possible, procéder d’un souci non seulement d’exactitude, mais encore d’intégration harmonieuse dans l’ensemble de la théorie. Chaque chercheur ou chercheuse engagé-e dans une démarche d’affûtage conceptuel fait l’expérience, à un moment ou à un autre de sa carrière, de cette exigence d’ordre scientifique, mais aussi esthétique qui, lorsqu’elle semble comblée, le gratifie d’un sentiment jubilatoire très comparable à celui que procure l’approche de l’absolu.
J’évoquerai, pour terminer, une expérience personnelle. J’avais eu l’intuition, à l’occasion de la préparation d’un colloque à l’Université de Ngaoundéré en 1999 par Hamadou Adama sur le thème « l’Université et son environnement », que la langue pouvait, à des titres divers, être associée aux efforts de développement dans son environnement historique. Au fil des années, de mes travaux de terrain et de mes lectures, un agrégat de traits saillants, récurrents, mais étrangement dispersés s’est imposé à ma conscience, presque à mon insu. C’est ainsi que, progressivement, j’ai conçu l’idée qu’il serait logique de rassembler, dans l’espace d’un même champ disciplinaire, des recherches animées par une même philosophie, une même problématique, mais jusque-là abritées chacune sous des labels divers. Linguistique, sociolinguistique, terminologie, linguistique appliquée, etc., autant de champs divers qui ne permettaient guère de percevoir l’unité fondamentale des préoccupations de tout un faisceau de recherches orientées vers une même finalité : la réduction de la précarité communicationnelle en vue d’une maîtrise de l’environnement dans son sens le plus large. La nécessité s’imposait de repérer les jalons épistémologiques du discours sur le développement qui s’écrivait à plusieurs voix dans les sciences du langage.
- J'exploite, dans ce paragraphe, les analyses de Chiss et Puech (1987) sans adhérer toujours à leurs conclusions et je reprends certaines des considérations que j'ai développées ailleurs (Métangmo-Tatou, 1999b). ↵
- Traduction libre : « Invariabilité des formes, plutôt que variation allomorphique; forme du mot non- dépendante de la fonction grammaticale plutôt que variation dérivationnelle, désinentielle ou encore variation morphologique du verbe; mots largement monomorphémiques, plutôt que mots fléchis et dérivés; pertinence syntaxique de l'ordre des mots ». ↵
- On parle aujourd’hui de linguistique d’intervention. ↵
- On attribue généralement dans la Ménoua (région de l’Ouest Cameroun) à un célèbre magistrat municipal la modification de la teneur de l’échange rituel de salutations : la question traditionnelle « comment allez-vous? » appelait en principe la réponse « c’est le statu quo », littéralement « c’est toujours pareil ». Ce maire proposa, avec succès, de substituer à la réponse ancienne une autre dynamique : « cela est en train d’évoluer », « ça progresse ». ↵
- Hostie : rondelle de pain azyme (sans levain) consacré pendant la messe pour figurer le corps sacrifié du Christ. Benveniste a fait remonter ce vocable hostie au verbe latin hostire « égaliser, compenser ». ↵
- Car dans un contexte caractérisé par la généralisation des TIC et la connaissance partagée, une des particularités de la science moderne est la diffusion de ses résultats et son pendant, l’exposition à la critique de ses avancées. ↵
- L’auteur examine notamment le rôle des adverbes modaux dans la construction d’une pertinence scientifique relativement à l’instance réceptrice qui est la communauté scientifique. ↵