26 L’impossible mise à l’échelle nationale du financement basé sur les résultats combiné au transfert monétaire conditionnel au Sénégal
Oriane Bodson et Aloys Zongo
Introduction
Le Sénégal est un pays de longue tradition d’appui au développement, notamment en raison de sa stabilité politique. Le contexte sénégalais est particulièrement privilégié par les bailleurs de fonds, et notamment par la Banque mondiale qui y a vu une opportunité de tester une nouvelle combinaison de ce qui est, depuis plusieurs années déjà, l’une de ses interventions phares dans la région : le financement basé sur les résultats (FBR).
Conscient de l’impact d’un faible recours aux soins maternels sur l’état nutritionnel des enfants, le Sénégal a lancé, en 2015, le projet de financement de la santé et de la nutrition (PFSN) pour une durée de réalisation de quatre ans. Ce projet combinait notamment un volet de renforcement de l’offre de soins de santé par une intervention de FBR et un volet de renforcement de la demande de soins de santé avec une intervention de transfert monétaire conditionnel (conditional cash-transfer ou CCT), parfois dénommée « FBR-demande » en réponse au FBR appuyant l’offre de soins. Par la combinaison innovante en Afrique subsaharienne de ces deux volets, le PFSN entendait augmenter la quantité et améliorer la qualité des soins prodigués. D’une part, l’instauration d’un FBR visait à répondre, comme ailleurs, à la faible motivation des agentes et agents de santé et, par conséquent, à l’une des raisons expliquant la faible performance des ressources humaines de santé dont l’effet sur la qualité des services de santé offerts est indéniable. Et ce, même si le débat sur les effets du FBR reste vif, notamment en raison de l’hétérogénéité des résultats observés (Binyaruka et al., 2020; IOD PARC, 2018; James et al., 2020; Kovacs et al., 2020). D’autre part, il s’agissait de répondre avec le CCT à l’obstacle financier de l’accès aux soins de santé maternelle et infantile, puisqu’au Sénégal les dépenses de santé restent dans la plupart des cas supportées par les ménages – et plus difficilement encore par les ménages les plus vulnérables. En associant un appui à l’offre et à la demande de soins de santé, ce nouveau projet constituait une réponse a priori crédible, même si partielle, à certaines critiques émises à l’encontre du FBR. En effet, on lui reproche souvent de ne viser que le renforcement de l’offre de soins[1], occultant ainsi les importantes difficultés d’accès, notamment financières, des populations en quête de soins.
La Banque mondiale aurait pu faire de cet ambitieux projet, une fois abouti, une référence dans la sous-région, un nouveau « best model » un brin plus local que l’exemple rwandais[2] – son exemple africain de prédilection, à faire voyager (Falisse, 2019) et à démultiplier. La promotion du modèle hybride sénégalais aurait notamment permis, d’une part, de relancer les projets de FBR en perte de vitesse dans les pays alentours[3] et, d’autre part, de poursuivre toujours plus de nouveaux projets FBR en Afrique de l’Ouest. Toutefois, et malgré son potentiel de success story, le projet de financement de la santé et de la nutrition n’a jamais véritablement décollé. Il est lui aussi, comme au Mali ou au Burkina Faso, resté enlisé au stade pilote, ce qui a très logiquement réduit en cendres les attentes transformatrices qu’on lui avait assignées. Le volet FBR a été tout simplement arrêté fin 2018. Dans la lignée de l’étude menée par Seppey, Ridde et Somé[4] et au regard de la faible attention traditionnellement donnée à la question du déploiement des programmes FBR (Shroff et al., 2017), nous cherchons dans ce chapitre à examiner les potentielles raisons du passage à l’échelle manqué de l’expérience de combinaison des volets FBR et CCT dans le cadre du PFSN au Sénégal, à l’aide de la théorie des courants de Kingdon (1995), afin d’en appréhender l’enlisement.
De l’enjeu de l’étude du passage à l’échelle du FBR
La question du passage à l’échelle des interventions de santé fait partie intégrante de la recherche en matière de mise en œuvre (RMO). Son objectif est « d’élargir la couverture des services fondés sur des données de la recherche expérimentale, afin d’améliorer les résultats sanitaires chez la population cible » (MEASURE Evaluation, 2016 : 17). Le passage à l’échelle ne constitue toutefois ni une étape incontournable et envisageable pour toutes les interventions de santé, certaines ne s’y prêtant pas, ni un gage d’immortalité pour celles passées à l’échelle, et qui pourraient se révéler moins pertinentes à mesure que le contexte et les besoins évoluent. Face au besoin permanent de données probantes et, dans le contexte spécifique du FBR, au besoin de démonstration de résultats et d’exemples réussis de passage à l’échelle, l’étape de passage à l’échelle du FBR sénégalais combiné à une intervention de CCT constitue un enjeu notable, tant pour le monde scientifique que pour les faiseuses et faiseurs de politique.
Méthode
Cadre conceptuel
Sans tomber dans une forme d’« étapisme » – pour reprendre la formule de Touré et Ridde[5], nous avons opté pour la théorie des courants développée par Kingdon (1995) qui observait l’intérêt variable des décideurs et décideuses et la variabilité de leurs réponses face à des enjeux distincts. Cette théorie s’est révélée féconde pour appréhender le cas du Tchad (Kiendrébéogo et al., 2017), enlisé lui aussi dans la phase pilote de son FBR, et le cas du Mali (Coulibaly et al., 2019). Selon Kingdon (1995), l’émergence (« mise à l’agenda ») d’une intervention repose sur la rencontre de trois éléments distincts appelés « courants » : 1) le courant des problèmes, 2) le courant des solutions et 3) le courant des orientations. Cette rencontre peut par ailleurs être facilitée par la présence de fenêtres d’opportunité et l’implication d’entrepreneurs et d’entrepreneuses politiques.
Collecte des données
Ce chapitre est le fruit de la collaboration de son autrice et de son auteur qui se sont simultanément intéressé-e à un même sujet de recherche, engagé-e sur un même terrain, avec toutefois des finalités différentes.
OB a mené dans le cadre de sa thèse de doctorat des recherches sur le FBR et le CCT au Sénégal. Les données qualitatives collectées proviennent d’une recherche documentaire et de deux terrains de collecte, l’un en 2016, l’autre en 2017. Au cours de ses terrains, OB a conduit de nombreux entretiens non-directifs et semi-directifs avec des acteurs et actrices institutionnel-le-s, des représentant-e-s des bailleurs de fonds, des acteurs et actrices opérationnel-le-s et des bénéficiaires des deux interventions. Les travaux de recherche ont été menés à Dakar, mais également dans les régions médicales de Fatick et de Kaffrine.
AZ a réalisé l’évaluation externe du volet FBR du PFSN en 2017 et s’est appuyé sur une démarche qualitative, et plus précisément sur une revue de la documentation disponible sur le FBR sénégalais et sur des entretiens réalisés auprès des différentes parties prenantes et principaux acteurs centraux et principales actrices centrales. AZ a également pu effectuer deux sorties de terrain, dans les régions médicales de Kaffrine et Tambacounda au cours desquelles de nouveaux entretiens ont été conduits auprès d’acteurs et d’actrices opérationnel-le-s.
Pour mener à bien leur travail respectif, OB et AZ ont développé plusieurs guides d’entretien semi-structurés en fonction des différents niveaux de collecte des données et du profil des acteurs et actrices rencontré-e-s, ainsi que de leur responsabilité dans la conception et la mise en œuvre des interventions. Les entretiens ont été principalement réalisés en langue française, à l’exception de ceux menés par OB auprès des bénéficiaires du CCT qui ont été réalisé en langue locale avec l’appui d’un interprète.
Décryptage des interventions FBR et CCT au Sénégal
Le récent engagement sénégalais pour le FBR et le CCT
S’intéresser aux interventions de FBR et de CCT au Sénégal passe avant tout par une bonne compréhension de leurs prémisses. Les débuts du PFSN sont marqués par l’association de la Banque mondiale à une intervention FBR déjà lancée par l’USAID, et sa collaboration étroite avec la Cellule de Lutte contre la Malnutrition (CLM) en charge du volet CCT.
Les débuts du FBR
Le financement basé sur les résultats a été lancé en 2012 au Sénégal. Son processus de mise à l’agenda a duré au total trois ans. Il a débuté par la participation de cadres du ministère de la Santé et de l’Action Sociale (MSAS) à un voyage d’études au Rwanda (encore![6]) en 2009, et dont la restitution a séduit l’équipe d’initiative et de politiques de santé (Zongo, 2017), un organe de concertation impliqué dans les discussions stratégiques nationales de santé. Avant cela, il semblerait qu’aucune expérience de FBR n’ait véritablement été mise en œuvre sur le territoire sénégalais. Il s’agissait donc d’un terrain vierge pour cet instrument dont on note, comme ailleurs, le rôle de « best model » (Gautier & Ridde, 2018) du cas FBR rwandais dans le processus de diffusion et de sélection du FBR par le gouvernement sénégalais.
À son lancement en 2012, le FBR consistait en un projet pilote de deux ans construit en deux temps. Dans un premier temps (en 2012), le FBR a été introduit dans les districts sanitaires de Kolda et Kaffrine. Ce n’est que dans un second temps (en 2013) qu’il a été étendu à l’ensemble des deux régions sanitaires de Kolda et Kaffrine (République du Sénégal, Ministère de la Santé et de l’Action Sociale, 2017). Entre 2012 et 2014, le gouvernement sénégalais a bénéficié de l’appui de l’USAID – et notamment de Abt Associates en charge de l’assistance technique – pour lancer et tester le dispositif incitatif sur son territoire.
À la suite des résultats considérés satisfaisants des revues nationales de la santé de 2012 et 2013 (République du Sénégal, Ministère de la Santé et de l’Action Sociale, 2017), et à défaut d’une authentique évaluation d’impact de cette phase pour des raisons discutables qui soulève une nouvelle fois la question du rapport ambigu aux données probantes[7], le Sénégal a pris la décision en 2015 d’étendre le programme à quatre nouvelles régions sanitaires (phase d’extension). Cette extension, réalisée dans le cadre du lancement du projet de financement de la santé et de la nutrition, a bénéficié de l’appui d’un nouveau bailleur de fonds, la Banque mondiale, non sans fragilisation de l’intervention (Caffin, 2018) comme nous le décrivons ultérieurement en présentant les grandes lignes de sa formulation. Les quatre régions médicales d’extension du FBR, choisies par le gouvernement sénégalais pour leurs faibles indicateurs de santé, le niveau de pauvreté de leur population et leur relatif faible appui des bailleurs, sont : Sédhiou, Ziguinchor, Kédougou, Tambacounda (République du Sénégal, Ministère de la Santé et de l’Action Sociale, 2017).
L’implication nouvelle de la Banque mondiale dans le FBR a nécessité une redéfinition du rôle des bailleurs. Au plan de l’organisation, il a été convenu que l’USAID resterait en charge de l’assistance technique au travers d’Abt Associates alors que la Banque appuierait, quant à elle, les aspects stratégiques et financiers du développement du FBR. L’appui financier de l’USAID était alors versée dans un pot commun avec la Banque (Zongo, 2017).
La Banque mondiale n’a pas été la seule à voir le potentiel du contexte sénégalais. Parallèlement, deux autres PTF ont également nourri de l’intérêt pour le FBR au Sénégal. Il y a tout d’abord eu la coopération luxembourgeoise (LuxDev) qui lança en 2016 le mécanisme d’achat à la performance (MAP) dans les quatre régions sanitaires du Nord du pays. Toutefois, le programme n’a pu réellement être implanté à cause des procédures de décaissement complexes. La coopération japonaise (JICA) s’intéressa également de plus près au FBR dans le cadre de son « Projet d’appui au renforcement de la santé au Sénégal (PARSS) » initié en 2016. Séduite par le mécanisme, elle prévoyait même le lancement d’un programme de FBR dans la région médicale de Kaolack en avril 2018. Mais l’arrivée de la coopération japonaise a coïncidé avec le constat en demi-teinte établi par la revue à mi-parcours du PFSN et par l’évaluation externe de la mise en œuvre du FBR dont nous présentons ultérieurement les grands enseignements. Les insuffisances relevées ont ralenti les négociations entre la JICA et le Programme national FBR (PNFBR) qui n’ont finalement pas abouti. Malgré les difficultés rencontrées, il a été décidé d’offrir un second souffle au programme FBR. Le volet FBR du PFSN, qui devait se clôturer en juin 2018, a bénéficié d’une extension de six mois, jusqu’en décembre 2018, avant de s’arrêter définitivement, non sans embarras.
Les débuts du CCT
Au Sénégal, l’intérêt pour les transferts monétaires conditionnels a été plutôt timide. Le pays a traditionnellement préféré s’attaquer à la réduction des vulnérabilités et l’atténuation des risques encourus par certains groupes de population par le déploiement de programmes de gratuité et de filets sociaux non conditionnels. Par exemple, le Programme de Nutrition ciblée sur l’enfant et transferts sociaux (NETS) fournissait une allocation financière aux femmes vulnérables en vue d’atténuer les chocs alimentaires subis qui affectent négativement la situation nutritionnelle des enfants de moins de cinq ans.
L’une des premières esquisses de transfert monétaire conditionnel au Sénégal au cours des quinze dernières années a été le « contrat pour l’éducation » développé en 2006, visant à augmenter le taux de scolarisation et de fréquentation scolaire, alléger le travail des enfants issus de ménages vulnérables, améliorer leur santé, leur nutrition et leur vaccination et réduire l’extrême pauvreté des mères vulnérables. L’idée avorta toutefois avant de pouvoir se matérialiser, ne dépassant pas l’état de note conceptuelle (UNICEF, 2009).
Il faut attendre 2008 pour voir arriver l’une des toutes premières expériences institutionnalisées de CCT au Sénégal. Elle a été lancée par le Conseil National de Lutte contre le Sida (CNLS) avec le soutien de la Banque mondiale et prenait la forme d’une bourse de soutien à la scolarisation ou à la formation professionnelle de 5000 orphelin-e-s et enfants vulnérables âgé-e-s de deux à 18 ans au cours de l’année scolaire 2008/2009 (Conseil National de Lutte contre le Sida, 2009; Garcia & Moore, 2012; UNICEF, 2009). Son obtention était conditionnée à l’inscription de l’enfant, à l’acquittement des frais d’inscription, à sa présence régulière à l’école ou en apprentissage et au suivi de l’observance de ses soins médicaux. Le projet n’a toutefois pas été reconduit.
La seconde véritable expérience de CCT institutionnalisé au Sénégal est assurément la plus notoire. Il s’agit du projet de bourses de sécurité familiale (BSF) pour les familles défavorisées, mesure clef du programme présidentiel de Macky Sall de 2012 : Yoonu Yokkute. Mis en œuvre depuis 2013, le programme de BSF entend combattre les injustices sociales en mettant à la disposition d’environ 250 000 familles vulnérables des bourses de 100.000 FCFA/an durant 3 ans, conditionnées à des critères d’inscription et d’assiduité à l’école des enfants.
En 2015, l’État sénégalais a donc lancé avec l’appui de la Banque mondiale le PFSN, dont le volet « demande » consiste en un transfert monétaire conditionnel. Elle a confié la coordination globale des activités à la Cellule de Lutte contre la Malnutrition, un organe de très bonne réputation. À la différence des premières expériences sénégalaises de CCT dont la conditionnalité était principalement liée à l’éducation des enfants, la nouvelle intervention de CCT voit sa conditionnalité exclusivement liée au recours aux soins de santé des femmes enceintes vulnérables.
À son lancement en 2015 (pré-pilote), le volet CCT ne concernait exclusivement que les districts sanitaires de Gossas (Région médicale de Fatick) et de Koungheul (Région médicale de Kaffrine) – ce dernier était par ailleurs déjà concerné par le FBR depuis 2013. Après plusieurs mois de tâtonnements, dont nous décrivons les raisons plus loin, la phase pilote du programme a été lancée en 2017, dans deux (et non quatre, comme initialement prévu) régions médicales déjà concernées par la phase d’extension du FBR deux ans plus tôt, à savoir Sédhiou et Ziguinchor (phase d’extension).
La présence de couvertures géographiques similaires entre les deux interventions s’explique par le fait que la Banque mondiale avait dans un premier temps mis en place un exercice de sélection aléatoire dans le cadre de la phase d’extension du programme FBR au Sénégal, avant de l’abandonner face aux importantes difficultés de mise en œuvre des instruments FBR et CCT. Cet exercice s’est traduit par la répartition aléatoire d’une sélection de structures de santé de ces régions et districts sanitaires dans quatre bras de l’essai, en d’autres termes sous quatre modalités offrant chacune une combinaison unique des interventions FBR et CCT.
Ces retours sur les contextes de mise à l’agenda des interventions FBR et CCT permet d’ores et déjà d’identifier l’absence de profonde tradition historique des logiques de financement basé sur les résultats et de programmes sociaux conditionnels au Sénégal, et de souligner le rôle joué par les bailleurs de fonds dans la sélection de ces deux instruments.
Les interventions FBR et CCT dans les grandes lignes
Présentation du FBR
Si le FBR sénégalais s’inscrit dans la logique incitative « classique » du financement basé sur les résultats et repose sur une contractualisation de performance de différents maillons du système de santé qui se verront allouer des ressources financières en fonction d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs, il est toutefois atypique au regard de l’implication de plusieurs acteurs et actrices et du certain degré d’appropriation de l’instrument par le gouvernement (Caffin, 2018).
Comme ailleurs (Gergen et al., 2017), les indicateurs cibles du programme FBR sont majoritairement liés à la santé maternelle, infantile et néonatale, mais renvoient également à la lutte contre la maladie, et, pour les niveaux hospitalier et cadre uniquement, à la gouvernance sanitaire. Toutefois, à la différence de ce qui se fait dans d’autres pays, il n’y a pas au Sénégal de prix d’achat unitaire par indicateur. En effet, l’une des spécificités majeures du modèle sénégalais – et qui a été au centre d’un houleux débat – est de recourir à des cibles de performance. La performance de chaque structure est évaluée en fonction de l’amélioration de certaines cibles par rapport à une situation de référence selon des règles prédéfinies pouvant varier d’un indicateur à l’autre, et non en fonction de nombre d’activités réalisées (Caffin, 2018). Les cibles de performance reprises dans les contrats de performance sont annuelles. Elles doivent donc être traduites, en pratique, en cibles trimestrielles. Il est établi que les cibles du premier trimestre correspondent à 25% des cibles annuelles, que les cibles du deuxième trimestre correspondent à 50% des cibles annuelles et celles du troisième trimestre à 75%.
Parmi les autres spécificités du FBR sénégalais, on notera le nombre réduit d’indicateurs de qualité comparativement à d’autres pays (Gergen et al., 2017) et limités au niveau primaire, la procédure de calcul de l’enveloppe FBR avantageant les grandes structures de soins présentant un nombre important de personnel qualifié, la répartition de l’enveloppe FBR favorisant – plus largement qu’ailleurs (ibid.) – le personnel au détriment du fonctionnement des structures, et enfin les critères flous de répartition interne des primes incitatives au personnel.
En effet, du recours aux cibles de performance découle un calcul complexe de l’enveloppe FBR distribuée aux formations sanitaires et ultérieurement répartie entre le personnel (à hauteur de 75%) et le fonctionnement de la structure (à hauteur de 25%). Pour chaque équipe ou formation sanitaire, une enveloppe FBR annuelle maximale est calculée en fonction du nombre d’agentes et d’agents par catégorie que la structure compte. Grâce à la catégorie de l’agent ou l’agente, il est possible de déduire son salaire moyen selon les normes étatiques. Le salaire annuel moyen est ensuite multiplié par le nombre d’agentes et d’agents dans chaque catégorie afin d’obtenir une estimation de la masse salariale totale de la structure.
Le montant de l’enveloppe annuelle maximale peut donc varier d’une formation sanitaire à l’autre en fonction du nombre d’agentes et d’agents de santé qui y sont affecté-e-s et de leur catégorie. Plus la structure compte de personnel et plus son personnel est gradé, plus élevée pourrait être son enveloppe FBR. Une fois l’enveloppe potentielle maximale calculée, elle est ajustée sur base des cibles atteintes, en tout ou en partie, par chaque indicateur. Cet ajustement effectué, l’enveloppe FBR est déflatée – pour les postes (PS) et centres de santé (CS) uniquement – par l’indice de performance qualitative calculé sur la base d’une liste de contrôle de qualité déclarée et vérifiée par une agence de vérification indépendante. Elle peut ensuite enfin être transférée sur le compte bancaire de l’équipe cadre ou de la formation sanitaire prévu à cet effet. C’est donc le décompte des prestations réalisées au regard de ces indicateurs, compte tenu de leur pondération et de l’atteinte de leur cible, et de l’indice de performance qualitative qui déterminent le montant des financements FBR alloués.
Présentation du CCT
L’intervention de transfert monétaire conditionnel inclue dans le PFSN adopte une forme plus classique, moins alambiquée que le volet FBR. L’intervention vise exclusivement les femmes enceintes vivant au sein de ménages vulnérables, avec pour objectif le respect des quatre consultations prénatales (CPN) dans les délais requis et l’accouchement assisté dans une structure de santé. Les ménages bénéficiaires sont sélectionnés au sein des zones d’action du PFSN par un processus de ciblage communautaire engageant les acteurs et actrices de la communauté supposé-e-s être les plus à même de reconnaitre les plus nécessiteux et nécessiteuses incapables d’assurer plus d’un repas par jour. Le nombre de bénéficiaires du programme est plafonné par zone en fonction de la taille de la population et de la prévalence de la pauvreté dans la zone.
En théorie, les transferts monétaires s’organisent comme suit. Au cours de leurs visites régulières, les agent-e-s communautaires relèvent dans les carnets de santé des bénéficiaires les soins reçus. Ensuite, un agent ou une agente communautaire vérifie si les soins ont bien été fournis auprès des différents postes de santé au travers des registres de consultations prénatales et d’accouchements. Lorsque la liste des actes rémunérés est validée, les fonds sont mis à la disposition des agent-e-s communautaires qui se rendent alors sur le terrain et remettent l’argent aux bénéficiaires, et à elles uniquement. Les bénéficiaires reçoivent en liquide 5000 FCFA pour chaque CPN réalisée et 10 000 FCFA lorsqu’elles accouchent en structure et avec l’assistance d’un-e personnel-le qualifié-e.
Voilà du moins pour la théorie. Car en pratique, les interventions ont rencontré d’importantes difficultés d’ordre opérationnel autant que structurel que nous avons cherché à étudier et décrivons dans la prochaine section.
La difficile mise en œuvre des instruments FBR et CCT
Le cas du FBR
Si l’intervention FBR a bel et bien connu la couverture annoncée, soit 6 des 14 régions médicales que compte le pays, elle a également rencontré de grandes difficultés de mise en œuvre comme le décrit l’évaluation externe du programme réalisée en 2017 (Zongo, 2017). Au niveau opérationnel, les problèmes rencontrés étaient de plusieurs natures. Ils se sont situés essentiellement au niveau des contrats de performance, de la vérification de cette performance et du calcul et paiement des enveloppes FBR.
Au niveau des contrats de performance, le programme a accusé un énorme retard dans la signature des contrats avec l’agence de vérification indépendante (AVI) en charge de la vérification des cibles de performance ainsi qu’avec les formations sanitaires. La contractualisation de l’AVI, qui aurait dû avoir lieu en 2013, n’a été effectuée qu’en janvier 2016 (Lagarde et al., 2018). De leur côté, les formations sanitaires nouvellement incluses dans le FBR par la phase d’extension du programme ont signé leur contrat de performance avec plus d’un an de retard, en mi-2015. Ces retards importants dans la contractualisation des acteurs et actrices opérationnel-le-s du FBR, expliqués par des difficultés de recrutement de l’AVI et par un manque d’appropriation nationale du programme 2016 (Lagarde et al., 2018), ont conduit à une incompréhension, souvent source de frustration, des agentes et agents de santé de terrain engagé-e-s dans le FBR depuis ces débuts (phase pilote) et source d’une méconnaissance profonde du FBR par les personnels concernés par la phase d’extension, qui ont eu le sentiment d’un effet d’annonce de leurs responsables sans concrétisation réelle.
Loin d’avoir été rapidement résorbés, les retards accumulés se sont répercutés sur la signature des contrats de l’année suivante avec pour résultat la poursuite des retards. Les contrats des formations sanitaires de 2016 n’ont été signés qu’en novembre 2016 tandis que ceux de 2017 n’ont été signés qu’en 2018, et son nouveau lot d’incompréhensions et de frustrations de la part des agentes et agents de santé de terrain. Or, les contrats établis avec les formations sanitaires spécifient les règles d’obtention – et notamment les cibles de performance à atteindre – et de distribution des enveloppes FBR. À ce propos, il existait des désaccords sur les dénominateurs utilisés pour la détermination des cibles de performance dus à des problèmes d’exactitude des données utilisées. Il semblerait que, dans certains cas, la population cible ait été surestimée ce qui a conduit à la détermination de cibles difficiles sinon inatteignables : « Ce qui contribue à démotiver les agents qui malgré leurs efforts n’arrivent pas à atteindre les cibles fixées » (Zongo, 2017 : 49). À l’inverse, certaines formations sanitaires ont vu leur population sous-estimée et ont été évaluées sur la base de cibles « faciles ».
Dû au retard pris dans le recrutement de l’agence de vérification indépendante, la vérification de la performance des formations sanitaires sous FBR a été retardée. Le retard était estimé entre trois et six mois, ce qui a conduit dans certains cas à coupler ensemble plusieurs missions de vérification de la performance auprès des formations sanitaires. Par exemple, les vérifications de T1 et T2 2015 ont été couplées, tout comme celles de T3 et T4 2015. Ces couplages ont participé à brouiller davantage le peu de visibilité qu’avaient les acteurs et actrices de terrain de l’intervention. Les vérifications communautaires ont elles aussi été confrontées à près de huit mois de retard.
À noter que la vérification de la performance conduite par l’AVI semblait finalement relativement sommaire et portait seulement sur trois des 17 indicateurs au niveau des hôpitaux. Du côté des centres et postes de santé, seuls trois indicateurs des 13 listés ont été tirés au sort et ont finalement été évalués. Certaines malfaçons ont également été relevées, notamment lors de la passation des listes de contrôle de qualité où il est arrivé qu’une note de qualité globale soit donnée sans passer en revue chacun des critères de qualité. L’évaluation externe a souligné que les rapports de vérification n’ont le plus souvent pas été co-signés par les formations sanitaires, ce qui a posé la question de l’existence effective d’une restitution de leurs résultats aux structures. Aucune sanction n’a par ailleurs été appliquée en cas de divergences lors de la vérification quantitative et qualitative.
Au niveau du calcul des enveloppes FBR, les résultats de la vérification communautaire n’ont pas été, en pratique, pris en compte dans le calcul des scores qualités des structures. Le paiement de ces enveloppes s’est par ailleurs heurté à d’importants retards, plus d’une année. Le paiement de T1 2015 des formations sanitaires alors nouvellement lancées dans le FBR n’a été effectué qu’en octobre 2016. Lors de l’évaluation externe du programme – soit à la date du 24 mars 2017 – le paiement de T4 2015 était toujours en cours et aucun paiement n’avait été effectué pour l’année 2016. Conjugué à la rareté et au retard des activités de vérification de la performance, ces retards dans le paiement des enveloppements FBR, et donc dans le paiement des primes au personnel – assurément l’une des activités les plus visibles pour ce dernier – a conduit la majorité des agentes et agents de santé rencontré-e-s à considérer l’intervention « enterrée », étant même étonné-e-s que nos questions portent dessus.
Deux raisons sont évoquées pour expliquer ces retards de paiement. Il y a tout d’abord un retard dans la signature des contrats de performance des formations sanitaires. Une seconde raison soulignée est la lente disponibilité des données après leur vérification – les données de T1 et T2 2016 étaient par exemple déjà vérifiées mais pas encore disponibles en mars 2017 – conjuguée à des difficultés de rédaction et de transmission des requêtes de paiement au niveau central qui cristallisent certaines tensions de trésorerie du programme (Zongo, 2017).
Une fois payées, la part (25%) des enveloppes dédiée au fonctionnement des formations sanitaires n’a que faiblement été consommée au niveau des centres de santé et des postes de santé. Le taux de décaissement était estimé à 30% en 2017 (Zongo, 2017). Cette faible utilisation des ressources a fait qu’il était finalement difficile, d’une part, d’engager « une réelle transformation souhaitée de la formation sanitaire » (Zongo, 2017 : 53), et, d’autre part, d’améliorer la visibilité de l’intervention pour les acteurs et actrices de terrain. Les difficultés des formations sanitaires ont par ailleurs été accentuées par les retards de paiement des subventions des programmes de « gratuité », quant à eux estimés entre sept et dix mois. Par ailleurs, il n’existait pas au niveau des CS et PS de plan de travail annuel ni de plan trimestriel qui reprendrait les ressources FBR dédiées aux structures comme cela était convenu initialement dans la conception de l’intervention. L’absence de vision qu’offrent ces plans a pu être un élément de réponse expliquant le faible taux de décaissement.
Du côté des enveloppes FBR dédiées à la motivation financière des agentes et agents de santé (75%), l’évaluation externe (Zongo, 2017) a souligné que les primes allouées au personnel de santé étaient régulièrement en deçà de la somme maximale pouvant être distribuée équivalant à 20% de la somme totale des salaires nets moyens, ce qui a une nouvelle fois été source de frustrations.
Enfin, il semblerait qu’un accompagnement de l’État ait été envisagé avant la mise en œuvre du FBR en vue de mettre à niveau les formations sanitaires en les dotant des intrants (RH, matériels, etc.). Cette initiative ne s’est toutefois pas concrétisée. L’évaluation externe du programme FBR a soulevé la présence d’infrastructures vétustes, de manquements importants en matériels et consommables ainsi qu’une insuffisance notoire en ressources humaines malgré le recrutement (de sages-femmes surtout) appuyé par l’agence de coopération japonaise. « Du reste beaucoup d’agents sont recrutés par les structures entrainant une charge en personnel élevé » (Zongo, 2017 : 55) pour les formations sanitaires qui rencontraient déjà des difficultés financières dues aux retards de paiement du FBR, de la CMU et compte tenu du faible décaissement des enveloppes FBR.
Le cas du CCT
L’intervention CCT a elle aussi rencontré plusieurs problèmes de mise en œuvre, entre autres dus à un retard du PFSN dans la mise à disposition des fonds nécessaires au lancement du projet. La situation a notamment obligé la CLM à préfinancer sur fonds propres les premières activités de la phase pré-pilote, à hauteur de 600 millions FCFA. Sans paiement rapide du PFSN qui n’a remboursé les sommes engagées dans le cadre de la phase pré-pilote que 19 mois après la fin de cette phase, la Cellule s’est vite trouvée dans l’incapacité financière de poursuivre les activités. Le pré-pilote ne fut dans un premier temps pas reconduit après la première année de lancement (avril 2015 – mars 2016). Dès lors, il est arrivé que certaines bénéficiaires ne reçoivent de transferts monétaires que pour une partie seulement de leur suivi prénatal, ou que leurs 4 consultations prénatales soient couvertes par le mécanisme incitatif mais pas leur accouchement dans le cas où celui-ci arrivait après mars 2016. Si les bénéficiaires de l’intervention CCT semblent s’être accommodées de ces quelques mois de battement – « On donne, je prends. Si ça ne vient pas, je ne prends pas » – aucune véritable communication n’a été faite pour prévenir et expliquer les raisons de son arrêt temporaire.
Quoiqu’il en soit, quatre mois après la fin de la phase pré-pilote et après discussions, et malgré sa responsabilité évidente dans la mise en pause de l’intervention CCT, la Banque mondiale a autorisé sa poursuite, dans un premier temps exclusivement dans les zones initialement ciblées, soit les districts sanitaires de Gossas et Koungheul. Le redémarrage de l’intervention CCT en juillet 2016 ne s’est toutefois pas fait sans difficulté, ni sans perte d’adhésion de la part des différentes parties prenantes. Les activités de reprise du projet et les très longs délais de refinancement ont notamment rendu impossible le paiement des transferts monétaires du pilote pour l’année 2016, qui restaient en septembre 2017, non effectués et suscitaient l’incompréhensions des bénéficiaires. Quant aux paiements des transferts monétaires pour l’année 2017, ils étaient irréguliers et parfois regroupés une fois les fonds disponibles. Aussi, il n’était pas rare qu’une bénéficiaire du CCT reçoive tous les transferts monétaires dus, une fois toutes les visites prénatales effectuées, voire après son accouchement, ce qui brouillait inexorablement l’effet de ces transferts monétaires sur l’obstacle financier à la consommation de soins des bénéficiaires. En parlant de l’obstacle financier au recours aux soins de santé, les bénéficiaires rencontrées, ciblées pour rappel de leur vulnérabilité, ont expliqué continuer de recourir aux caisses de solidarité ou solliciter leur mari pour payer leurs factures de santé car les transferts financiers post-actes reçus ne supprimaient pas le nécessaire paiement à l’acte. Loin d’être conservé pour les prochaines dépenses de santé, l’argent reçu était quant à lui majoritairement utilisé pour leurs propres dépenses, ou pour couvrir les dépenses des enfants y compris alimentaires – ce qui nous rapproche de l’objectif principal du PFSN. La question du ciblage des bénéficiaires a été un élément particulièrement intéressant lors de nos entretiens. Au fil des échanges, nous avons compris que la stratégie adoptée par les personnes en charge du ciblage n’était pas tant d’identifier les plus nécessiteux et nécessiteuses, mais bien de répartir les différentes opportunités d’appui au sein de la communauté afin que chaque foyer bénéficie au moins d’un programme ou soit au moins soutenu par une intervention.
Enfin, ce n’est qu’en 2017 que deux nouvelles régions d’extension (sur les quatre initialement prévues) ont été progressivement intégrées, les régions médicales de Ziguinchor et de Sédhiou. L’extension du « FBR-demande » aux régions médicales de Kédougou et Tambacounda n’a jamais été opérationnelle.
Analyse de l’émergence
Le courant des problèmes
Pour Kingdon (1995), un problème n’est reconnu comme tel qu’à partir du moment où il apparait nécessaire pour les décideurs et décideuses d’y remédier. L’auteur souligne le rôle crucial des indicateurs dans cette prise de conscience. C’est d’ailleurs à une série d’indicateurs que nous faisons appel pour dresser une liste des problèmes principaux auxquels entend répondre le PFSN, et donc les instruments de FBR et CCT.
Une situation sanitaire qui reste préoccupante
Malgré une amélioration significative de la plupart des indicateurs de santé du pays ces vingt dernières années, les taux de morbidité et mortalité restent élevés au Sénégal. La mortalité adulte – soit la probabilité de décéder entre 15 et 50 ans – est estimée à 59‰ chez les femmes contre 74‰ pour les hommes. Une femme sénégalaise sur 80 (0,012%) décèdera des suites de causes maternelles liées à la grossesse ou à l’accouchement. Pourtant, l’enquête démographique et de santé de 2017 fait état d’un taux de consultation des mères appréciable : la quasi-totalité (97%) des femmes enceintes enquêtées ont consulté du personnel médical formé pendant leur grossesse. C’est sans compter une faible complétude du suivi prénatal et une variation des examens réalisés. Seules 57% des mères interrogées ont effectué au moins les quatre visites prénatales recommandées. Par ailleurs, un peu plus de trois naissances sur quatre (78%) se sont déroulées dans un établissement de santé, et n’ont été que moyennement assistées par une agente ou un agent de santé qualifié-e (68%). Le quotient de mortalité néonatale est également important : 28‰ (pour 1 000 naissances vivantes). Quant au taux de mortalité infantile, il est estimé à 42‰ (pour 1 000 naissances vivantes) (République du Sénégal, Ministère de l’Économie, des Finances et du Plan, Agence nationale de la statistique et de la démographie, 2018). Enfin, près d’un enfant de moins de 5 ans sur dix (8,1%) souffre de malnutrition dans le pays (World Bank, 2020).
Le difficile accès financier aux soins
Au Sénégal, le paiement direct de santé reste la norme (55,9% des dépenses en santé), faisant supporter aux ménages les dépenses de santé – et plus difficilement encore par les ménages les plus vulnérables pour lesquels le recours aux services de santé continue de constituer un risque d’appauvrissement important. À titre d’illustration, 37,4% de la population sénégalaise est à risque de dépenses catastrophiques en cas d’un recours nécessaire à la chirurgie (World Bank, 2020).
La faible performance des agentes et agents de santé induite par leur faible motivation
Le Sénégal est marqué par une pénurie aiguë de ressources humaines en santé – avec un ratio de 0,068 médecins et 0,309 infirmiers, infirmières et sages-femmes pour 1000 habitant-e-s (World Bank, 2020) – et une distribution déséquilibrée des effectifs en santé. À cette pénurie quantitative s’ajoute une faible performance des agentes et agents de santé en poste qui s’explique par plusieurs facteurs, notamment le maintien d’un écart entre leurs connaissances et leurs pratiques (« know-do gap »). Au Sénégal, seules 60% des actions recommandées lors d’une consultation prénatale étaient effectivement effectuées par le personnel médical. Le constat est encore plus alarmant lorsqu’il s’agit de consultations pédiatriques pour lesquelles plus de la moitié (57%) des actes recommandés ne sont pas réalisés (Kruk et al., 2017). Selon Lagarde et ses collègues, cet écart entre connaissances scientifiques et pratiques « confirme l’idée que la faible performance [des agentes et agents de santé] est souvent le résultat d’une faible motivation » (2018 : 5). Il s’agit toutefois, selon nous, d’une affirmation qui doit encore se vérifier.
Le courant des solutions
Derrière le concept de solution se cache les mesures auxquelles les décideurs et décideuses peuvent recourir pour remédier au problème identifié (Kingdon, 1995). Dans le cas du PFSN, les solutions mobilisées sont le FBR et le CCT. Pourtant, ces deux instruments sont tous deux confrontés à un manque de données probantes relatives à leurs effets dans les pays à revenus faibles et intermédiaires (PRFI), et en particulier au Sénégal qui fait l’objet de peu d’études. D’autant que, comme nous l’avons vu lors de leur décryptage, les possibilités d’évaluation des deux instruments n’ont pratiquement jamais été saisies au niveau des interventions. La Banque mondiale n’a pas conduit l’évaluation d’impact planifiée, ce qui ne manque pas de susciter certaines interrogations dans un contexte d’élaboration de politiques basées sur les données probantes. Obtenir des données probantes est d’autant plus nécessaire que les difficultés de mise en œuvre observées au niveau des deux interventions posent avec plus de fermeté la question de l’appréhension des instruments FBR et CCT comme solutions au Sénégal.
Le FBR, une solution incertaine
Le FBR est régulièrement introduit comme « un accélérateur de la mise en œuvre de l’agenda international de développement » (Abomo Kele, 2018 : 179), bien que cela ne soit pas étayé par la littérature et malgré l’absence de justification théorique solide (Paul et al., 2021). Le FBR a, en effet, été le sujet de nombreuses évaluations qui ont fait état de résultats mitigés (Borghi et al., 2018), impossibles à généraliser, ce qui attise le débat sur ses potentiels effets. En ce qui concerne tout particulièrement la question des agentes et agents de santé, la conception largement supposée que le FBR peut améliorer leur motivation et plus largement leur performance reste également peu appuyée par la littérature. L’une des rares études publiées sur le FBR au Sénégal est celle de Lagarde et ses collègues qui porte sur la qualité des soins de santé primaire prodigués. Elle démontre des résultats « peu encourageants », et « [remet] en cause la thèse selon laquelle le FBR peut améliorer la qualité des soins » (2018 : 6). Les observations cliniques conduites et les exercices réalisés à l’aide de patient-e-s mystères n’ont en effet pas permis d’établir de preuve de l’impact du FBR sur la qualité des soins prodigués. Plus récemment, Gage et Bauhoff (2021) ont conclu à l’absence d’amélioration statistique significative du FBR sénégalais sur la santé maternelle et néonatale.
Le CCT, une solution incertaine
En dépit de la diffusion progressive du CCT en Afrique sub-saharienne, le débat sur la possible reproduction des réussites notables des programmes sud-américains Oportunidades et Bolsa Familia, dans des contextes à faibles revenus, et notamment africains, subsiste compte tenu des nombreux défis encourus dans ces contextes (Akinola, 2016; Barrientos & Santibañez, 2009; Lagarde et al., 2009). Pour Molyneux (2007), le succès des programmes de CCT dans les pays à moyens revenus tels le Mexique et le Brésil s’explique, entre autres, par une capacité institutionnelle et administrative suffisante, condition difficilement remplie dans certains pays à revenus faibles. Dans sa revue sur les effets des CCT dans les pays à faibles et moyens revenus, Huntington (2010) relève plusieurs faiblesses de l’offre de soins en Afrique sub-saharienne qui influencent négativement les CCT : faible système d’information, gouvernance complexe, indisponibilité du service de santé conditionné et faible qualité de ce dernier. Plus nuancés, Schubert et Slater (2006) perçoivent néanmoins dans le succès de programmes de CCT dans cinq pays à faibles revenus d’Amérique centrale et latine (Nicaragua, Honduras, El Salvador, Paraguay et Bolivie) la démonstration qu’il est possible d’appuyer la demande dans des contextes marqués par une précarité de l’offre.
Il en reste que, malgré une démonstration de quelques effets positifs des CCT, sur la santé notamment (Huntington, 2010; Lagarde et al., 2009; Owusu-Addo & Cross, 2014; Stachowski, 2011), la littérature ne permet pas de répondre à la question de la reproductibilité de ces effets compte tenu de preuves probantes limitées (Bassani et al., 2013; Khan et al., 2016). Les évaluations des programmes africains de CCT restent peu nombreuses, voire inexistantes en ce qui concerne le Sénégal. Il s’agit de toute évidence d’une observation qui tend à perdurer. En 2009 déjà, Lagarde et ses collègues attiraient l’attention sur le besoin d’évaluations rigoureuses des CCT dans les pays à faibles revenus pour répondre à cette interrogation.
Le courant des orientations
Le courant des orientations renvoie à ce que Kingdon (1995) appelle la « réceptivité politique », c’est-à-dire la capacité des décideurs et décideuses à être réceptifs et réceptives au problème identifié ou à la solution apportée. Cette « réceptivité » peut également être comprise comme la capacité du problème ou de la solution apportée à faire écho aux orientations des décideurs et décideuses politiques. Cet écho peut s’entendre tant au niveau international que national.
Au plan international, le PFSN, donc des interventions de FBR et de CCT, survient dans le contexte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), et tout particulièrement, comme l’introduction de l’ouvrage l’a rappelé, dans un contexte marqué par l’avènement de la couverture sanitaire universelle (CSU), associé à l’impératif international croissant de démonstration de résultats.
Cet avènement de la CSU est également présent au plan national. En effet, l’objectif de la couverture santé universelle constitue l’une des priorités politiques du gouvernement sénégalais. Elle est principalement déclinée à travers, d’une part, la politique d’extension de l’offre de services de santé et d’amélioration de la qualité des soins, et, d’autre part, la politique de la couverture maladie universelle (CMU) pour ce qui concerne le volet d’accessibilité de la demande. Le Plan stratégique de développement de la couverture maladie universelle 2013-2017, qui opérationnalise la politique gouvernementale de CMU, défend « la vision d’un Sénégal où tous les individus, tous les ménages et toutes les collectivités bénéficient d’un accès universel à des services de santé promotionnels, préventifs, curatifs et ré-adaptatifs de qualité sans aucune forme d’exclusion à l’horizon 2022 » (République du Sénégal, Ministère de la Santé et de l’Action Sociale, 2013 : 9). Du côté de la demande de soins, il est toutefois intéressant de souligner que les mutuelles de santé représentent, depuis longtemps déjà, le cheval de bataille du gouvernement sénégalais, et de nombreuses formules mutualistes ont été jusqu’à aujourd’hui expérimentées dans le pays. Par ailleurs, et comme explicitée ci-haut, l’orientation nationale adoptée n’incluait traditionnellement pas de mécanismes de transferts monétaires conditionnels, leur préférant les programmes de gratuité et de filets sociaux non conditionnels.
Éléments de facilitation : les fenêtres d’opportunité et les entrepreneurs et entrepreneuses politiques
Les fenêtres d’opportunité sont des occasions saisies pour attirer l’attention sur un problème ou une solution spécifique. Les entrepreneurs et entrepreneuses politiques sont des acteurs et actrices engagé-e-s dans l’identification d’un problème, la promotion d’une solution ou les deux à la fois (Kingdon, 1995).
Le contexte de course aux OMD évoqué précédemment fut rapidement caractérisé par un essoufflement des réformes engagées, qui peinaient à produire les résultats escomptés. Une « fenêtre d’opportunité » dont ont tiré profit les entrepreneurs et entrepreneuses politiques du Health Results Innovation Trust Fund pour légitimer et promouvoir le financement basé sur la performance, et dont le rôle à jouer substantiel dans l’expansion du FBR a déjà été souligné dans des chapitres de cet ouvrage (Gautier et al., 2019; Turcotte-Tremblay et al., 2018), et pour le Cameroun, le Tchad et la Tanzanie, par Sieleunou (2017), Yonli (2015), Chimhutu (2015) et leurs collègues. Ce travail de légitimation et de promotion du FBR a été notamment effectué par la participation des cadres du MSAS à un voyage d’études préparée par l’USAID sur financement de la Fondation Bill et Melinda Gates (Caffin, 2018).
Les instruments de FBR et de CCT ont par ailleurs pu bénéficier d’une autre fenêtre d’opportunité, à savoir la mise à disposition du financement de la Banque mondiale dans le cadre du PFSN. Selon ce responsable de la composante du programme FBR au sein de l’USAID :
[…] l’USAID, c’est une source de financement, mais une source de financement peut toujours essayer d’utiliser ses ressources comme des leviers, pour soulever des ressources plus importantes, ce que la BM lui a offert. […] l’USAID ne peut pas avoir un opportunité comme cela, […] et ne pas l’exploiter pour le Sénégal. (Caffin, 2018 : 354)
Cette fenêtre d’opportunité financière pour le volet FBR a été facilitée par l’influence d’entrepreneurs et d’entrepreneuses politiques issu-e-s de l’USAID qui constitue, ni plus ni moins, le premier partenaire technique du ministère de la Santé et de l’Action Sociale (Caffin, 2018), et qui était en charge des premières années du pilote du FBR.
Enfin, le volet CCT a également pu bénéficier de l’opportunité offerte par l’ancrage historique et la reconnaissance nationale dont jouit la CLM sur les questions de nutrition.
Nous avons noté qu’une fois le PFSN lancé, l’attention des entrepreneurs et entrepreneuses politiques s’est plutôt orientée sur la poursuite de sa diffusion au travers d’un nouveau bailleur, la JICA, et moins sur le passage à l’échelle du PFSN comme en témoigne l’annulation de l’évaluation d’impact du projet.
Discussion
Par le biais de notre analyse, nous avons pu constater que le PFSN, via ses volets de FBR et de CCT, répondait à une situation sanitaire préoccupante et faisait écho aux grandes orientations internationales et nationales adoptées par le Sénégal, notamment l’atteinte de la couverture sanitaire universelle. Dans son rapport « Le financement des systèmes de santé – Le chemin vers une couverture universelle » (2010), l’Organisation mondiale de la Santé décrit en effet les difficultés d’atteinte de la CSU comme résultant d’un dysfonctionnement d’une ou de plusieurs composantes généralement admises du système de financement de la santé que sont i) la mobilisation des ressources, ii) leur mise en commun en vue de réduire les risques individuels, et iii) l’achat des prestations essentielles en vue de réduire les inégalités et d’améliorer la performance globale des systèmes de santé (Kutzin, 2013). Le PFSN semble donc sur papier être une réponse plausible aux défis rencontrés.
Nous avons cherché à décrypter les volets de FBR et de CCT, et avons mis au jour les importantes difficultés de mise en œuvre qu’ils ont rencontré et qui posent plus fondamentalement la question des moyens donnés pour concrétiser les intentions une fois les effets d’annonce passés. D’autant que ces difficultés de mise en œuvre limitent en pratique l’appréhension de ces deux instruments comme solutions crédibles aux difficultés rencontrées dans le pays, et que les opportunités d’évaluation n’ont été de surcroit que rarement saisies à l’échelle du Sénégal. Pourtant, les enjeux de démonstration de résultats restent bien présents compte tenu de l’absence de données probantes relatives aux deux instruments (Bassani et al., 2013; Khan et al., 2016), qu’ils soient organisés séparément ou combinés. Comme le soulignent Anthony et ses collègues (2017 : 2),
Not only implementation processes are known to influence the outcomes of policies and interventions, but the contextual features of the implementation are key to understand such processes and their outcomes, and deserve to be analyzed in depth.
Les fenêtres d’opportunité identifiées et exploitées par les entrepreneurs et entrepreneuses politiques, qui sont majoritairement étrangers et étrangères à l’instar du cas du Mali (Coulibaly et al., 2019), semblent avoir eu un effet notable sur les débuts du PFSN, notamment sur la décision de tester les instruments de FBR et CCT. Ces derniers ne s’inscrivaient pourtant pas dans la culture du pays, dont nous avons rappelé l’intérêt pour les mutuelles de santé par exemple. Cet effet ne semble toutefois pas avoir perduré ensuite, largement contrebalancé par la faible mise en œuvre des mécanismes.
Par ailleurs, l’implication d’entrepreneurs et d’entrepreneuses politiques de l’étranger dans les choix effectués dans le cadre du PFSN est telle qu’elle se fait ressentir jusque dans la formulation atypique de l’intervention de FBR. Pourtant, l’enjeu de l’appropriation par les parties prenantes des mécanismes FBR et CCT est réel (Gautier & Ridde, 2017). Au Tchad, Kiendrébéogo et ses collègues (2017) ont établi le lien entre ce manque d’appropriation et l’absence d’émergence du FBR à l’agenda national. À ce sujet, Beaussier (2017) pose plus fondamentalement la question du recours à la théorie de Kingdon dans un contexte sub-saharien, postulant que les contextes occidentaux et africains sont les théâtres de dynamiques de mise à l’agenda aux logiques différentes. Parmi les spécificités décrites, selon l’auteur, celle de la place occupée par les institutions internationales dans l’élaboration des interventions en Afrique « échappent partiellement, mais non totalement, […] aux gouvernements nationaux » (Beaussier, 2017 : 3). Aussi semble se poser, peut-être plus fortement qu’ailleurs peut-être, la question du lien qu’entretiennent agenda international et agenda national, sans toutefois la substituer à une analyse plus locale des logiques des acteurs et actrices comme l’a par exemple fait Ridde (2011). C’est véritablement une analyse multiniveaux qui doit être conduite au sein des « arènes » politiques internationale, nationale et locale. Concernant tout particulièrement l’arène nationale, nous avons noté qu’en cours de mise en œuvre du projet, l’implication des entrepreneurs et entrepreneuses politiques était davantage orientée vers la diffusion du mécanisme FBR auprès d’un autre bailleur, la JICA, que vers le passage à l’échelle du programme qui a été délaissé, au point de constituer aujourd’hui une occasion manquée.
Conclusion
Le projet de financement de la santé et de la nutrition lancé en 2015 au Sénégal était un projet innovant par son architecture interne. Ce projet combinait deux volets, un volet d’appui à l’offre avec une intervention de FBR et un volet d’appui à la demande de soins au travers d’une intervention de transfert monétaire conditionnel. Cela laissait prétendre à une conception plus holistique des défis liés à la production et à la consommation de soins de santé. Mis en œuvre à un moment où l’enthousiasme pour le FBR semblait quelque peu s’évanouir dans la sous-région, le projet possédait les ingrédients pour devenir un projet de référence pour la Banque mondiale – dont on connait la propension à faire voyager et à reproduire ses modèles exemplaires[8]. Le projet n’a toutefois pas été passé à l’échelle nationale. Il répondait pourtant à une situation sanitaire préoccupante et faisait écho aux grandes orientations internationales et nationales. Les deux volets du projet ont cependant rencontré d’importantes difficultés de mise en œuvre, limitant l’appréhension de ces deux instruments comme solutions crédibles aux difficultés rencontrées dans le pays (d’autant qu’ils continuent de souffrir d’un manque de données probantes). Les quelques fenêtres d’opportunité identifiées et exploitées par les entrepreneurs et entrepreneuses politiques – majoritairement de l’international – semblent avoir eu un effet notable sur les débuts du PFSN, mais celui-ci s’est ensuite estompé. À défaut d’être aujourd’hui considéré comme le nouveau « best-model » de la Banque, l’exemple des volets FBR et CCT du PFSN au Sénégal constitue une illustration des nombreux défis rencontrés pouvant réfréner le passage à l’échelle d’une intervention de santé[9]. Il semble essentiel de poursuivre les recherches pour comprendre les processus de mise à l’échelle des interventions de FBR et CCT, qui se jouent tant sur la scène internationale que nationale.
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