David Pelletier, enseignant de biologie

Au niveau professionnel, je veux être un enseignant humain, intéressé par l’individu qui est devant moi. Je pense que cela vient beaucoup d’un lien avec une professeure que j’ai eu au secondaire, Colette Dupont. C’était une prof de l’ancien cours de Formation personnelle et sociale (FPS). Je pense qu’elle donnait des cours de morale aussi, et peut-être de religion, mais moi j’avais des cours de morale. Dans les cours de FPS, il y avait des cours de relations avec les autres, de sexualité, et des aspects éthiques étaient abordés. Il y avait des débats, comme sur la peine de mort, et ça touchait la morale. Il y avait des éléments de culture générale, des faits de société comme l’intimidation. Ce cours est devenu plus tard le cours Éthique et culture religieuse, où ont été réunies la morale et l’éthique. Bref, c’est la prof de ce cours qui m’a beaucoup marqué parce qu’elle nous apprenait à faire un arrêt sur nous-mêmes pendant les apprentissages. Elle était vraiment une prof très appréciée.

Souvent, elle nous faisait faire de la visualisation, c’était un peu comme de la méditation. On apprenait des « trucs » et après ça, il fallait se mettre la tête sur le bureau, et elle nous faisait voyager, c’était quasiment de l’hypnose. On l’écoutait, elle nous racontait une histoire qui durait une dizaine de minutes. Souvent, elle nous disait d’imaginer une forêt et nous invitait à nous sentir bien, à entendre le chant des oiseaux. On rencontrait des personnages qui avaient des liens avec les contenus qui nous étaient enseignés. C’était toujours en lien avec nos apprentissages, en lien avec la morale. C’était peut-être une matière propice à ça, mais moi, ça m’a permis de me connecter sur moi-même, très tôt quand même, puisque j’étais seulement en secondaire trois. Les jeunes de ce niveau auraient pu être à l’âge de ne pas embarquer dans des « trucs » comme ça parce que c’était très différent de ce que les autres profs proposaient. Mais de mémoire, tout le monde embarquait. Quand un·e élève bâillait, elle disait : « Il y a des marches juste à côté du local, va courir, monte jusqu’au troisième étage, fais ça deux ou trois fois, puis reviens. » L’élève le faisait, il ou elle revenait et était en forme. Ce n’était pas des commandements, c’était tout le temps dans la bienveillance. Elle respectait les élèves, les personnes. Elle ne parlait pas sous un mode autoritaire.

Je jouais au basketball dans ce temps-là et je me rappelle avoir visualisé des matchs avant d’y participer. La visualisation aide beaucoup pour la concentration des athlètes. Je ne me rappelle pas si c’était moi qui avais fait le lien, qui avait transféré ce que j’avais appris avec Colette dans un autre domaine ou si c’était le coach qui nous enseignait ça, mais je pense que c’était une démarche personnelle. Je faisais ça en préparation des tournois.

C’est une personne importante, Colette. C’était une prof vraiment appréciée. Elle devait avoir une quarantaine d’années à ce moment-là parce qu’elle a pris sa retraite il y a cinq ou six ans. À la fin de sa carrière, elle n’était plus dans le secteur général, elle était à l’école Grand Défi, elle travaillait auprès de jeunes ayant de grandes difficultés. J’ai rencontré des personnes qui l’ont eue comme enseignante, et ça a été marquant pour elles.

J’ai l’impression que cette façon de faire m’a aidé à cheminer. Le fait d’apprendre à m’arrêter, ça a fait en sorte que plus tard, je me suis intéressé à la méditation, au bouddhisme. Ça m’a aidé à voir qui j’étais, à me mettre en mouvement pour en savoir plus sur soi-même. En se connaissant soi-même, en apprenant à se connaître soi-même, on est aussi porté à vouloir découvrir les autres. J’ai un intérêt pour l’autre, pour l’être humain.

Comme professeur, j’ai appris beaucoup de Colette. Je me considère comme un guide dans l’apprentissage des élèves, c’est pourquoi je veux développer des projets comme des activités d’initiation à la recherche. J’accompagne avec mon expérience, mais je pense que je peux retirer des choses des étudiant·e·s comme ils et elles vont en retirer de ce que je peux leur apprendre. Je préfère le travail collaboratif plutôt que le travail hiérarchique. Ce n’est pas juste pour mon travail d’enseignant. Je vais respecter la personne pour ce qu’est elle, mais je ne respecterai pas la personne parce qu’elle a un titre particulier. Probablement que Colette est une personne qui m’a marqué pour ça. Le respect est une de mes valeurs importantes.

Dans mon rôle de père aussi, je veux être à l’écoute de mes enfants. Je veux être aussi un accompagnateur. Dans certaines circonstances, je vais jouer mon rôle d’autorité, mais à chaque fois, j’avoue que j’ai de la misère à gérer ça. Admettons que quand je me fâche, je me sens mal après, souvent. Mais une relation parent-enfant, ce n’est pas la même chose qu’une relation prof-élève. Il peut y avoir des choses qui reviennent fréquemment quand on éduque un·e enfant, et on essaie de désamorcer ces choses-là. Je pense que Colette m’a aussi guidé dans ma vie parentale.

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La relation qui transforme Copyright © 2024 by Annie-Claude Prud’homme et Jean Noé Alcéus is licensed under a License Creative Commons Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, except where otherwise noted.

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