CONCLUSION

Jean Noé Alcéus et Annie-Claude Prud'homme

Dans la culture haïtienne, on dit : « De mòn pa kwaze, men de moun kapap[1] ». En réunissant ces récits d’expérience d’apprentissage, ces échanges et ces dialogues, nous avons voulu témoigner de rencontres suscitées par un projet pédagogique unissant le Cégep de Rimouski et le Collège La Sainte-Famille des Gonaïves de 2018 à 2021, et surtout, des relations et des apprentissages qui en ont découlé, pour nous-mêmes et pour certaines des personnes impliquées.

Le dialogue que nous avons poursuivi de 2018 à aujourd’hui nous a permis de développer une relation interculturelle porteuse de nombreuses découvertes. En nous penchant sur les récits d’expériences des enseignant·e·s de Haïti et du Québec, nous avons été frappés par la place fondamentale que la relation y occupe. Il nous est apparu clair qu’au cœur de l’apprentissage, il y a bien souvent une relation, qu’elle soit pédagogique, interculturelle ou simplement humaine. Nous avons voulu rendre hommage à ceux et celles qui choisissent de travailler dans le milieu de l’éducation et qui, à leur tour, relèvent chaque jour le défi d’entrer en relation avec les autres pour les accompagner, pour enrichir leur regard sur le réel. Ces personnes ont été elles-mêmes apprenantes, et elles acceptent de l’être encore et encore pour s’adapter à un monde en mouvement. Leurs récits racontent des découvertes qui les ont transformées ainsi que des expériences personnelles et professionnelles qui continuent de les modeler. Sans aucun doute, les occasions d’apprentissage ne manquent pas, tout au long de la vie, pour qui saisit l’occasion de réfléchir à son vécu et à ses pratiques. Les défis peuvent devenir des tremplins, et les erreurs, des leviers pour grandir. Quand de nouvelles perspectives sur le monde s’ouvrent, la curiosité a tendance à prendre le dessus sur les certitudes, le savoir, à devenir plus contextualisé, et la réalité, à apparaitre dans toute sa pluralité.

Rien de tout cela n’est possible sans l’autre, sans une rencontre. Certes, toutes les relations ne sont pas équivalentes, mais elles ont toutes le potentiel de se transformer et de transformer, s’il y a aveu partagé de sa fragilité, si chacun et chacune porte consciemment sa « mémoire d’écolier » (Batraville 2015, 28-29) et pose un regard lucide sur les « chemins défoncés de [son] histoire » (Miron 1998, 102). Ainsi se crée un réel dialogue entre le soi et l’autre. Au-delà des ressemblances et des différences, au-delà des ombres et des lumières peut alors apparaitre une précieuse sollicitude amicale qui transcende les inégalités et qui ouvre la porte au vivre-ensemble, peut-être le plus grand et le plus important des apprentissages.


  1. Traduction en français : « Deux montagnes ne peuvent se rencontrer, mais deux personnes le peuvent ».

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La relation qui transforme Droit d'auteur © 2024 par Annie-Claude Prud’homme et Jean Noé Alcéus est sous licence License Creative Commons Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, sauf indication contraire.

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