2 Reproductibilité et transfrontalité des conflits dans le bassin du lac Tchad : histoire, mémoire et enjeux pour une paix durable

Henri Mbarkoutou Mahamat

Résumé

Longtemps, les réponses aux conflits entre communautés dans le bassin du lac Tchad semblent avoir toujours ignoré les antécédents historiques qui les nourrissent et les amplifient. La présente réflexion montre que les crises sécuritaires, à l’instar de l’insurrection Boko Haram, renouvellent les conflictualités sur la base d’un ensemble d’ingrédients qui manipulent l’histoire, la mémoire et les intrants qui problématisent les défis et les enjeux communautaires (pouvoir, ressources, identités), de sorte à rendre improbables toutes tentatives de résolution. Des monts Mandara au lac Tchad, l’analyse questionne les échelles des conflictualités en nourrissant le débat sur la re-conceptualisation de la transfrontalité identitaire. Il importe donc d’en tenir compte dans l’analyse des conflits et dans la planification des réponses de sorte à envisager les voies possibles d’un exutoire mémoriel fondé sur la capacité des États, des organisations humanitaires et de développement et des communautés elles-mêmes à réhabiliter ou mettre en place des mécanismes endogènes d’expiation, en particulier dans le bassin du lac Tchad. Les données orales et documentaires ont servi de matériaux méthodologiques à l’analyse de la question dans une triple perspective historique, anthropologique et sociopolitique.

Mots-clés : reproductibilité, transfrontalité, conflit, histoire, mémoire, lac Tchad

Abstract

For a long time, responses to inter-community conflicts in the Lake Chad Basin seem to have always ignored the historical antecedents that feed and amplify them. This paper shows that security crises, like the Boko Haram insurgency, renew conflictualities on the basis of a set of ingredients that manipulate history, memory and inputs that problematise community challenges and issues (power, resources, identities), so as to make any attempts at resolution unlikely. From the Mandara Mountains to Lake Chad, the analysis questions the scales of conflictualities by feeding the debate on the re-conceptualisation of identity-based trans-borderality. It is therefore important to take this into account in the analysis of conflicts and in the planning of responses so as to consider possible ways of providing a memorial outlet based on the capacity of states, humanitarian and development organisations and the communities themselves to rehabilitate or set up endogenous mechanisms of expiation, particularly in the Lake Chad basin. Oral and documentary data served as methodological materials for the analysis of the issue from a triple historical, anthropological and socio-political perspective.

Keywords: Reproducibility, Conflict Cross border, History, Memory, Lake Chad Basin

Introduction

Plusieurs crises sécuritaires connues dans le bassin du lac Tchad ont systématiquement débouché sur un renouvellement des tensions et conflits anciens. L’insurrection Boko Haram donne un aperçu de ce que la cohésion entre communautés reste fragile parce qu’elle est sujette à toutes sortes d’instrumentalisation, à la fois par les communautés et les protagonistes de l’insécurité. Dès lors, l’évolution des crises sécuritaires, en particulier des conflits, se traduit par la manipulation des souvenirs des communautés pour prolonger des épisodes conflictuels de leur passé. Ce faisant, les conflits et crises sécuritaires constituent des facteurs de rémanence et de reproduction de la violence dans un processus d’exacerbation des tensions par le jeu des intrants tels le contrôle des ressources et du pouvoir, l’affirmation ethnique ou clanique ou l’accès aux opportunités.

La présente contribution a pour objectif de comprendre les processus de renouvellement des conflits dans les zones frontalières du bassin du lac Tchad. Elle analyse les mécanismes de passage d’une crise sécuritaire plus générale à une violence instrumentale et organisée qu’on observe dans la résurgence des conflits intercommunautaires. En dressant un panorama historique des sociétés du bassin du lac Tchad, particulièrement marquées par des guerres de conquête et des guerres tribales, l’étude analyse, dans le contexte particulier de l’insurrection Boko Haram et des conflits interethniques, les modalités qui renouvellent et attisent les tensions communautaires, à partir des conflictualités anciennes, en questionnant les logiques de transfrontalité qu’ils empruntent. L’étude s’appuie sur un dispositif méthodologique rigoureux. D’abord, elle repose sur l’analyse des contenus documentaires constitués d’ouvrages, d’articles scientifiques et de rapports d’étude portant, entre autres, sur l’histoire des peuples des monts Mandara et du lac Tchad, une collecte des données dans différents contextes de recherche de terrain, notamment auprès des communautés vivant dans les monts Mandara, la plaine du Logone, du Chari et dans le lac Tchad. Sur la base d’une démarche empirico-déductive et interprétative, la réflexion se propose de montrer que la reproductibilité (réactivation d’un conflit passé) et la transfrontalité (franchissement des frontières étatiques) des crises sécuritaires sont tributaires des procédés de sédimentation historique, d’interprétation mémorielle et des incitateurs contextuels contemporains. La compréhension de la mécanique de reproduction, renouvellement et transfrontalité constitue un impératif de production d’actions pour une paix durable dans le bassin du lac Tchad.

Une toile de fond historique, particulièrement violente, des hégémonies successives des royaumes du Soudan central

C’est une considération majeure que de prendre en compte, a priori, l’histoire mouvementée et violente du bassin du lac Tchad comme une lame de fond dans l’analyse de toute conflictualité. Durant des siècles, des atouts naturels et des ambitions politiques et militaires se sont conjugués pour faire du bassin tchadien à la fois un réceptacle de peuples divers, un important foyer d’échanges et un creuset de civilisations sur lesquelles vont prendre corps de puissants royaumes et empires.

Deux niveaux d’analyse sont nécessaires pour cerner les niveaux d’impact de l’usage de la violence dans le passé des communautés contemporaines vivant dans le bassin du lac Tchad. Le premier est structurant parce qu’il renvoie à la trame des évènements successifs qui ont profondément marqué la formation des institutions politiques, déterminé les traditions d’accumulation et forcé les consciences religieuses et identitaires. Le second, plus spécifique, retrace les itinéraires les plus marquants des processus de reconfiguration ayant eu cours dans le lac Tchad et dans les monts Mandara dont les stigmates continuent d’influencer les rapports interhumains au niveau communautaire.

Au premier niveau, il faut dire que la violence a caractérisé les rapports humains dans cet espace du Soudan central où, entre les XIVe et XIXe siècles, régnèrent des empires et royaumes puissants. Successivement, ces entités politiques ont fait usage de la prédation et des persécutions pour constituer leurs espaces de prospérité socioéconomique et assurer leur hégémonie politique, moyennant des expéditions guerrières aux confins du Bilal al Sudan, du Fezzan ainsi que du Fombina. Autour du lac Tchad, de façon concentrique, différents pouvoirs politiques organisèrent de grandes expéditions esclavagistes et pratiquèrent la traite humaine, de laquelle dépendait la survie des familles régnantes et des royaumes. Tout porte à croire que le tableau panoramique des affrontements au Kanem repose principalement sur l’opposition entre Sefuwa et Bulala au cours des XVe et XVIe siècles, la rude campagne de conquête militaire du Bornou menée ardemment par le Maï Idris Alaoma (Urvoy, 1941) et l’émergence au XVIIe siècle du royaume du Waday reconnu pour sa politique répressive aussi bien à l’endroit de ses propres sujets (les Tunjurs condamné-e-s à se réfugier au Bahr al Ghazal), que des populations voisines. En plus, le retour définitif des Bulala au Fitri, leur pays d’origine, abandonnant ainsi le Kanem qui devient le théâtre privilégié d’affrontements entre Tubu et Arabes d’une part, Bornou et Waday d’autre part (Maïkorema, 2018), indique par ailleurs le rôle de la violence dans la structuration de la conflictualité contemporaine dans cette partie de l’Afrique.

On peut d’abord considérer les empires esclavagistes dont les trajectoires politiques ont reposé sur leurs capacités à répondre aux besoins en esclaves des marchés du Maghreb et du Moyen-Orient. Les empires du Kanem et du Baguirmi, qui ont successivement régné autour du lac Tchad, ont fait de la prédation esclavagiste un instrument de survie économique, de domination politique et d’équilibre géostratégique dans un environnement régional du Soudan central marqué par l’abondance des ressources du lac Tchad et la forte mobilité démographique y afférente. Au XIIIe siècle, le Kanem constituait l’un des États musulmans les plus entendus dont le pouvoir des Mai (rois) sefuwa s’étendait sur le vaste territoire qui, du sud au nord, va des rives orientales du lac Tchad aux oasis du Fezzān.

La course à l’hégémonie de ces pouvoirs politiques et militaires ainsi que de leurs nombreux vassaux s’est traduite par des agressions systématiques sur les territoires autour du lac Tchad. D’ailleurs, la logique d’enrichissement a grandement contribué à la formation du royaume du Baguirmi dès le XIVe siècle par une sous-traitance des conquêtes esclavagistes, au profit du Bornou dont il constitue plus tard un vassal (MacEachem, 2001). Si l’emprise territoriale du Kanem semble se fixer sur les territoires septentrionaux au lac Tchad, on constate un élargissement de son pouvoir vers le Sud, sur les abords et îles du lac, ouvrant ainsi la voie à une colonisation séculaire de cet espace lacustre. Les mobilités démographiques dues aux conquêtes et les relations qui s’en suivent, plus ou moins pacifiques, entre les îles du lac et les territoires autour ont accru les disparités socio-ethniques et prédisposé à la formation des systèmes politiques et économiques fondés sur le contrôle des ressources naturelles. Elles ont également prédéfini les identités comme des exutoires face aux stratégies de prédation collective dont on sait qu’elles s’appuient principalement sur les identités dominantes (Koultchoumi, 2016).

Au second niveau, il y a l’évolution des empires musulmans à l’instar du Bornou et du Sokoto qui firent usage de l’islam comme outil d’expansion et de domination. Qu’elle eût été observée sous le règne significatif du monarque Idriss Alaoma[1] ou par un jihad institutionnalisé à partir de l’empire Sokoto (Last, 1967), la profonde transformation subie par le Soudan central autour du lac Tchad s’est assimilée à une colonisation politique, économique et culturelle. Comme l’a souligné Lovejoy, « le djihad de Sokoto d’Usman Dan Fodio eut de profondes répercussions à travers l’Afrique, de la Sénégambie à l’ouest jusqu’au Nil et la mer Rouge à l’est » (Lovejoy, 2015, paragr. 15); au point où Murray Last compare son impact en Afrique à celui de la Révolution française dans la reconfiguration de l’histoire européenne et du monde atlantique de la fin du XVIIIe siècle et au-delà (Last, 1987). Les ambitions hégémoniques du Bornou et le succès régional que le djihad d’Usman Dan Fodio a obtenu sont les derniers épisodes historiques qui fixent définitivement les grands équilibres démographiques et identitaires dans et autour du lac que les fragilités écologiques et les conflits vont continuer de restructurer. L’islam diffusé par le Califat de Sokoto vient élargir la fracture déjà abyssale entre différents groupes répartis en noyaux conquérants (Kanuri, Arabes, Baguirmi, Mandara…) et en tribus vaincues constituées d’une constellation de groupes ethniques.

L’effondrement du Kanem à la fin du XIVe siècle, qui ouvre la voie à la constitution du Califat de Bornou par le mai Ali Gaji, constitue une étape décisive dans la révision de la carte géopolitique du bassin tchadien. L’évolution hégémonique du Bornou est illustrative des bouleversements géo-démographiques qui se sont opérés autour du lac Tchad et structurent encore la perception et la définition des rapports interhumains. Entre les XVe et XVIe siècles, des facteurs propices à l’expansion du califat de Bornou permettent de constituer, jusqu’au début du XXe siècle, une économie régionale forte et renforcer un système politique centralisé. Cette dynamique qui marque l’essor des Kanuri s’est principalement nourrie des conquêtes de la constellation de jeunes et de petits royaumes établis le long de la frontière méridionale du Borno (Mandara, États de Kotoko, Bolewa du Nord de Daniski, Yamta et Marghi notamment). À l’Est, les Budumas et les Kanembus pêchaient de façon quasi industrielle sur les bords du lac Tchad, tandis que les riches pâturages attiraient un grand nombre d’éleveurs nomades kanembu, arabes et fulbé. Les Kanembus et les Budumas sédentaires produisaient également du kilbu (natron) et du manda (sel). L’accroissement démographique et le développement économique permirent l’essor rapide d’importants centres urbains dans la région, dont Munguno, Kauwa, Burwa et Ngurno (Barkindo, 1999). Les royaumes qui gravitent autour du Borno et du Lac Tchad ont connu des reconfigurations spatiales et ont chacun usé de la prédation des ressources et de la manipulation des identités pour consolider les ressorts de leur pouvoir et élargir, au fil du temps et au gré des intérêts, leurs limites territoriales.

Deux transformations majeures apparaissent dès lors : d’abord, la persistance des structurations nées des guerres de conquêtes qui se traduisent par des ancrages ethno-identitaires encore prégnantes. Ces différentes entités qui gravitent autour du Bornou doivent leur survie à l’économie esclavagiste, aux effets incubateurs de l’islam et d’une tradition économique itinérante que différentes administrations coloniales ont, selon les contextes et des intérêts, capitalisés, amplifiés ou obstrués. Ensuite, il y a la colonisation occidentale dans le bassin du lac Tchad qui vient, non seulement entériner, dès la fin du XIXe siècle, les fractures structurelles ethno-confessionnelles héritées des colonisations hégémoniques du Soudan Central, mais les exacerbe à des fins de conquête, d’administration et d’exploitation coloniales. Successivement, l’histoire des peuples des abords sud du lac est un long processus de transformation mentale où la violence constitue le principal prisme de référencement identitaire, de repères inter/intracommunautaires, de frontière et de mécanisme de représentation et de projection. Scott MacEachern explique la persistance des violences contemporaines du bassin tchadien par la profondeur historique qu’il donne à l’étiologie des conflits :

In parallel with the expansion of states, new landscapes of refuge and resistance were created in places where state military activity was difficult: The Mandara Mountains, the shorelines and islands of Lake Chad, the marshes along the Chari and Logone Rivers. […] Mandara Mountains have been transformed into a densely settled human landscape, one of the most diverse and complex such landscapes in West or Central Africa. In that process, the mountains became a true « internal frontier », with all of the hazards and possibilities that term implies (MacEachern, 2018, p. 195).

Dès lors, les sociétés contemporaines du bassin tchadien émergent d’une histoire particulièrement violente, laquelle s’impose comme une lame de fond, structurelle et influente, des dynamiques de représentation et de relation entre communautés. Les souvenirs d’un passé violent continuent à structurer les discours, les usages et les pratiques. Ce passé paraît rédhibitoire, car il entretient des fractures structurantes autour de la religion dans le Margui-Wandala (Mayo-Tsanaga, Mayo-Sava), du contrôle des ressources naturelles ou du pouvoir (Logone, Chari, lac Tchad), des gains politiques sur fond d’instrumentalisation à outrance des identités tribales.

Mémoire, enjeux et reproduction des violences

Le bassin du lac Tchad se présente aujourd’hui comme un vaste terreau humain où l’usage séculaire de la violence a déterminé les identités, conditionné les pratiques et les discours, façonné une pensée qui rend fragiles les efforts de coexistence pacifique et produit des référents auxquels les peuples continuent à s’identifier. Par strates superposées durant des siècles, les épisodes de prédation esclavagiste, de violence communautaire, de colonisation sous fond d’hégémonie politique et religieuse, de domination coloniale occidentale semblent avoir tricoté les schèmes d’une représentation duale de l’autre (ethnie, religion, race) que ni la mémoire ni l’histoire ne semblent capables d’en faciliter l’exploitation positive. La tribalité qui structure l’identité des populations et des espaces qu’elles occupent devient un prisme de protection ou de rejet, d’opportunités et d’influence. Ce qui fait dire à François-Xavier Fauvelle (2000) que les espaces, les personnages ou les évènements sont perçus comme emblématiques, « investis » d’une charge émotionnelle qui subit les variations historiques ou sociales, objets d’appropriations ou de perceptions contradictoires. monts Mandara, lac Tchad et Kirdi sont des référents géo-identitaires dont les éléments constitutifs sont produits par l’intelligence de chaque communauté, autant ils sont instrumentalisés par des contextes spécifiques qui en font des outils d’opportunité.

Parce que l’histoire est sélective des évènements qu’elle entend pérenniser, en ce sens qu’elle envisage la confrontation de toutes les sources et parce que la mémoire reste abstraite, fragmentaire, figeant une représentation d’un évènement par un groupe, on assiste à la persistance d’une approche mémorielle des faits passés. Ces faits sont agencés et partagés de génération en génération. Ils rappellent certes les gloires des ascendant-e-s, mais vomissent surtout les succès des autres par un mécanisme communautaire de haine, de rejet et de négation. Il est important de souligner que l’histoire reste une connaissance contrainte par le passé lui-même à travers les médiations des traces qu’il a laissées. Elle postule la vérité, même si Philippe Corcuff (1995) y voit un « horizon régulateur » en tant que volonté d’une neutralité axiologique.

Le triomphe de la mémoire sur l’histoire se traduit dans ce contexte par la déchéance des outils traditionnels de transmission historique par l’oralité dont on sait que les principaux animateurs sont les griot-e-s, dans le contexte du bassin tchadien. Les sociétés africaines ont une histoire qui a laissé très peu prospérer les lieux de mémoire. Ceux qui existent tels que la bataille de Bunxoy dans l’est du Sénégal en 1796, la cité de Kumasi, ancienne capitale de la Confédération Ashanti des XVIIIe et XIXe siècles, plusieurs fois détruite par les acteurs et actrices de la colonisation, rebâtie selon des plans qui ne laissaient rien subsister de l’agencement antérieur ou encore les bosquets sacrés, anciens enclos de résidences royales, de nécropoles ou autres sanctuaires au Burundi (Chrétien et Triaud, 1999), ne sont pas pensés et entretenus pour expurger le potentiel de nuisance que la mémoire peut entretenir pour faire place aux faits historiques que chaque communauté sélectionne et partage à sa descendance. De ce jeu subtil entre une connaissance organisée des faits passés et une rémanence brutale des évènements que propose la mémoire, lesquels sont dans le prolongement de la constitution de la réalité, c’est la question centrale de la paix qui est mise en jeu.

Dès lors, on comprend bien que l’histoire du bassin du lac Tchad produit une dynamique identitaire à double niveau, reposant sur la fusion et la différence, en fonction de l’influence que l’histoire et la mémoire ont pu avoir sur les représentations que chaque communauté se fait d’elle et de ses rapports aux autres. Une lecture plus approfondie de la conflictualité actuelle dans le bassin tchadien permet de questionner la reproductibilité de la violence par le double processus de sédimentation des crises et de réinterprétation des seuils de basculement vers la violence.

Le processus de sédimentation renvoie aux crises successives non résolues dans le temps, produisant un effet miroir d’une société en butte à ses propres contradictions. Pourtant, les tensions et conflits entre communautés s’inscrivent dans la durée. Les enjeux dépassant le jeu, ces conflits ont connu une fin provisoire, reléguant à l’infini sa résolution. Les épisodes qui se succèdent suggèrent un long processus de maturation d’une disposition cognitive à la violence et à la revanche, parce que les mécanismes d’expiation et de résolution semblent escamotés par les enjeux de l’heure. Ainsi, à chaque conflit, correspond une échelle de radicalisation qui finit par se polariser sur les référents discursifs (Kirdi, montagnards), géoculturels (monts Mandara, lac Tchad, plaine) ou sur des personnages comme Hamman Yadji, Abubakar Shekau (Walter van Beek et Chetima, 2020, p. 37-56). La charge symbolique de ces allégories est soutenue par une radicalisation d’échelle entretenue par différents acteurs en fonction des enjeux en cours. Ces insécurités mésosociales (Chauvin et al., 2020) sont plus fréquentes dans les communautés qu’elles suggèrent une démarche préhensive particulière. Toutefois, ce processus de construction mentale n’est pas homogène pour être réduit à un « ensemble indifférencié que suggère le terme unique qui sert communément à les désigner : ‘‘Kirdi’’ » (Martin, 1970, p. 9), ni à l’échelle d’une aire géographique comme les monts Mandara tel que développé par Melchisedek Chetima (2015). Certes, on pourrait y voir un processus de refoulement, de manipulation et d’instrumentalisation sur fond de transmission de la mémoire servile, mais il faut se méfier de toute généralisation qui fige dans le temps et l’espace, les nombreuses trajectoires spécifiques des monts Mandara qui sont accoucheuses des dynamiques communautaires souvent contradictoires. Si les vagues de migrations forcées ainsi que les phases tumultueuses d’établissement semblent avoir produit une mémoire commune de résistance et de résilience, elles ont aussi donné lieu à une mémoire éclatée, bref à des mémoires dont les itinéraires d’impact sur la réalité contemporaine montrent des antagonismes entre les communautés ou terroirs. Le système lignager et clanique fortement prégnant dans les monts Mandara suggère des processus migratoires marqués par des faits de guerre, de querelles de famille, d’échec dans la lutte pour la chefferie, de parricide, d’adultère, de rapts, de morts nombreuses, de mauvais sorts et de famine. De ces causalités conflictuelles souvent composites, la violence a aussi été utilisée comme instrument d’arbitrage, car, pour le cas des Matakam, la collecte des traditions montre qu’il n’y a pas une histoire de l’ethnie Matakam, mais des histoires villageoises ou plus encore des micro-histoires de clans (Martin, 1970). De nombreux récits des migrations des monts Mandara attestent de ce que les causes multiformes de départ ont établi des rapports d’apparentement ou de différenciation (Seignobos, 2009) qui restent encore perceptibles. Une diversité de réalités monographiques s’observe sur les pratiques paysannes (Hallaire, 1991). Elle implique une analyse à l’échelle du terroir des trajectoires mémorielles et historiques. Pendant les phases de migrations et d’installations, les peuples conquérants et dominés ont connu l’expérience de la domination/assimilation : c’est le cas entre les Kanuri et les Gamergu (Abba Isa Tijani, 2010). Autant ils ont gardé de profonds clivages que la mémoire, à défaut d’un travail historisant, libère au gré des intérêts à l’instar des relations parfois difficiles entre Matakam et Glafda dans les monts Mandara ou des tensions interclaniques internes aux Matakam.

La réinterprétation des seuils de basculement vers la violence se veut une démarche subjective qui appelle la rencontre entre les faits historiques remémorés et le contexte présent opportunisé. La production de la violence n’est pas automatique. Il y a une sorte de mécanisme sous-jacent qui entretient et encense les belligérances passées de sorte à en faire usage chaque fois que les enjeux du moment l’emportent. Dès lors, il devient évident que les conflits sont construits, bâtis et recyclés, le plus souvent à des fins de résistance face à une oppression réelle ou supposée, mais surtout comme une disposition mentale à l’échelle communautaire et à l’ampleur transfrontalière, alimentée par des ingrédients culturels pour en faire une ressource de contrôle et de domination des populations. C’est un alignement à une sorte d’idéologie, si tant est vrai qu’elle admet l’aveuglement, qui lui-même admet un inconscient capable d’envahir la conscience à son insu (Boudon, 1986).

Le double processus de sédimentation et d’interprétation des antagonismes enfouis qu’on rencontre dans toutes les contrées du bassin tchadien met en opposition un modèle traditionnel référencé sur le critère du vrai et du faux et une idéologie moderne fondée sur la notion de sens (Colliot-Thélène, 2011). De la sorte, l’objectif de telles manœuvres est de rentabiliser chaque contexte par une subtilité instrumentale du passé des communautés. Du fait que la croyance est parfois aveugle, Boudon explique que les croyances en des mythes ou à des idées, même les plus absurdes, tiennent à plusieurs facteurs, dont les effets de position, les effets de disposition et les effets de communication (Boudon, 1986, p. 147). Cette dérision du passé s’opère de deux manières.

D’abord par une offensive soft, subtile qui s’entend comme une opération de choix des souvenirs, de certains moments et événements de l’histoire d’une communauté. La mémoire de la communauté est sujette à manipulation des sentiments, des ressentis et des idées constitués au cours des expériences vécues à travers des pratiques discursives formulées autour des enjeux personnels ou communautaires. Le processus de manipulation consiste à transférer aux malaises et enjeux individuels une charge collective nourrie par le choix des souvenirs tristes afin d’atteindre une fin à l’échelle de la communauté. Cette manipulation n’est pas seulement contextuelle, c’est-à-dire attachée à une période précise, comme le note Chetima (2015, p. 320) qui la situe, dans les monts Mandara, à partir des années de démocratisation. Elle est structurelle, adossée à la durée, consubstantielle à l’histoire du terroir au cours de laquelle la mémoire collective reste sous l’éteignoir, s’exprimant de façon latente et sporadique dont il n’est pas prudent de séquencer.

Ensuite, la manipulation du passé peut s’avérer opportuniste, appelant une démarche hard, usant de la violence en guise de représailles ou de vengeance. Les intrants de cette reproduction de la violence sont liés aux enjeux de contrôle des ressources, de contrôle de pouvoir traditionnel ou politique, d’une affirmation identitaire qui exploite un contexte spécifique de crise comme l’a fait l’insurrection Boko Haram. Parce que les conflits antérieurs n’avaient jamais été résolus, ils trouvent un nouveau souffle lorsque l’opportunité d’en faire une ressource se présente. La mémoire est convoquée pour justifier les relents de crispation identitaire. Parfois, la vérité historique est tronquée pour orienter et influencer la conscience d’une communauté vers un but inavoué. Les entrepreneurs et entrepreneuses de toutes sortes usent des souvenirs identitaires pour se construire un capital politique ou social qui dessert en priorité la cohésion sociale et intercommunautaire. Il en est ainsi des tensions et conflits réguliers entre Arabes-Kotoko, Musgum-Kotoko dans les plaines du Logone, des tensions entre Buduma-Arabes-Kanembu dans le Lac Tchad ou des oppositions parfois violentes entre Peul-e-s dont les points d’achoppement se concentrent sur l’accès et le contrôle des ressources. L’accès aux ressources (zones de pêche, terres agricoles, pâturages…) est précédé par la convocation des intrants mémoriels ou historiques de sorte à justifier la légitimité des actes posés par les membres d’une communauté clanique, ethnique ou communautaire. Dans le cadre des attaques de Boko Haram, il est vraisemblable que différents clans Matakam, des villages Matakam et Glavda ou encore les assauts répétitifs sur les localités de Zelevet et Ldaoudsaf témoignent d’une instrumentalisation de la terreur de Boko Haram pour solder des guerres tribales d’antan[2].

De la transfrontalité : (re)conception et nouvelle fonctionnalité

La pesanteur structurante de l’histoire et de la mémoire, qui tente d’expliquer le cycle des crises sécuritaires et des conflits, se fonde sur la représentation que les communautés se font de la frontière et de son dépassement. Repenser la transfrontalité, c’est décrypter les codes de perception et d’usage des espaces frontaliers et transfrontaliers. Pendant longtemps, l’idée conventionnelle de la frontière reste attachée à l’entité de l’État dont les limites contemporaines en Afrique sont récentes. Elles sont géographiques, tangibles donc matérielles pour faire valoir les points de démarcation. L’abondante littérature consacrée aux espaces transfrontaliers en Afrique livre plusieurs niveaux d’appréhension d’un phénomène polymorphe et instrumentale. De cette trajectoire qu’on sait polysémique, on retient que la transfrontalité est perçue comme une « périphérie nationale » (Igué, 1995), pas moins qu’une « région informelle » selon Raison (1996). L’intelligence des communautés à apprivoiser les zones frontalières fait dire qu’elles sont des « espaces d’échanges réels » (Grégoire et Labazée, 1993) alors qu’en les contextualisant dans le bassin du lac Tchad, Roitman (2003) y voit des « garnisons entrepôts ». Bennafla (1999) les considère, quant à lui, comme de « frange frontalière » ou « région frontalière ».

Ces différentes perspectives permettent de saisir les prismes par lesquels les espaces de franchissement entre États sont perçus. On y comprend que les frontières n’ont jamais représenté des barrières étanches de séparation spatiale ou de démarcation territoriale pour les populations. Elles ont plutôt toujours constitué des espaces de vie, de circulations, d’interactions et d’échanges qui débordent les délimitations nationales (Dimé, 2016). Ce qui valide l’évidence de l’artificialité des frontières en Afrique que Bouquet (2003) semble avoir assimilé à une ignorance des frontières par les populations frontalières. Pourtant, s’il est vraisemblable que les processus d’apprivoisement des espaces frontaliers par les faits de mobilité transfrontalière socio-économique laissent transparaître un déni des barrières frontalières étatiques, il faut bien se garder de toute lecture trop convenue des dynamiques transfrontalières qui traduisent une autre perception de l’espace frontalier. Parce qu’elles sont antérieures aux frontières étatiques qui les confinent et les emprisonnent, les populations invitent à re-conceptualiser la transfrontalité à partir d’une perspective endogène. Il est impératif de substituer les artifices matériels hérités des États modernes par une théorie traditionnelle de la frontière.

La frontière telle que pensée et matérialisée par les États postcoloniaux africains trouve-t-elle un sens dans la conception cosmogonique de l’espace chez les peuples du bassin tchadien? L’idée de la transfrontalité mérite d’être repensée pour, non seulement en cerner les ressorts ethno-philosophiques, mais surtout pour décoder les pratiques usagères des territoires-limites. Comment les Kanuri, les Arabes ou les Buduma se représentent l’espace Lac Tchad? Quelle est la signification de la frontière ou de son franchissement pour les Kotoko de Goulfey et Kobro au Cameroun, Mani, Ambedane et Mahada au Tchad « séparés » par le fleuve Chari? Que vaut la frontière pour le peuple tupuri du Cameroun qui s’identifie à une divinité suprême et commune, le wan doré, située au Tchad? On constate bien que les peuples du bassin du lac Tchad se représentent le terroir comme un espace géoculturel sur lequel se manifeste une identité morcelée par l’avènement postérieur des États contemporains. Il y a une sorte de convergence et de dépassement des divisions arbitraires coloniales par des formes de résistance et manifestation. On assiste à un déclassement de la frontière conventionnelle matérielle au profit d’une perspective identitaire immatérielle et universelle. La persistance des logiques traditionnelles transfrontalières n’est pas à sous-estimer, d’autant plus qu’elle oblige les États à les tolérer ou en tenir compte dans les politiques sous-régionales. Dès lors, le franchissement ou, plus clairement, la transgression des frontières participe de la manifestation d’une appartenance à une aire ethnique revendiquée qui implique la prise en compte des ressorts historiques et mémoriels. Les frontières matérielles contemporaines semblent ainsi marginalisées par une conscience identitaire dominante qui mobilise des formes d’alliances clanique, ethnique ou tribale, lesquelles sont instrumentalisées dans diverses situations d’adversité.

Cette disposition mentale cesse de faire de la frontière conventionnelle un risque conflictuel systématique. Les conflits transfrontaliers comme on aime à les nommer paraissent moins évidents quand ils sont perçus sous le prisme communautaire. L’idée même de la transfrontalité se relativise devant les faits de conflits qui mettent en scène, non pas des communautés de part et d’autre des frontières étatiques, mais des groupes voisins qui se mobilisent, au-delà des frontières conventionnelles. Il y a donc un substrat plus puissant, intrinsèque aux individus et aux groupes, qui induit des mobilisations fusionnelles. Deux niveaux de transfrontalité peuvent ainsi être identifiés dans le bassin du lac Tchad. La transfrontalité des univers civilisationnels qu’Achille Mbembe (2005) appelle « une superposition de localités et de divisions internes, les unes historiques, les autres institutionnelles, voire culturelles et territoriales » (p. 71). On s’aperçoit bien que sur chaque terroir pèsent diverses juridictions : la juridiction étatique, la juridiction traditionnelle, la juridiction religieuse. Cet enchevêtrement de « pays » et de « communautés » sur un même terroir constitue autant de frontières internes que perçoivent les individus et les communautés. Ici, la transfrontalité réside dans les règles et les principes propres à chaque modèle civilisationnel, qu’il soit étatique, communautaire, traditionnel, clanique.

Il y a ensuite la transfrontalité ethnique ou identitaire dont les ressorts reposent sur le principe du devoir de solidarité envers les membres du groupe ethnique auquel chaque individu s’identifie. La frontière est déplacée pour se fixer sur les références cognitives dictées par l’histoire parfois tumultueuse du groupe, la langue parlée, les lieux de mémoire, les alliances intertribales ou claniques. Ces formes de solidarité, qui appellent à une lecture endosémique des frontières, transgressent celles dites conventionnelles ou étatiques. Il en est ainsi des conflits Arabes Choa-Kotoko (Ibrahim, 2019), Buduma-Arabes, Hausa-Musgum ou récemment Arabes-Musgum qui mobilisent des solidarités ethniques transfrontalières du Cameroun, du Tchad, du Nigeria ou du Niger alors qu’ils sont internes à chaque État. La cohabitation de plusieurs chefs traditionnels (Blamas) sur les îles du Lac, notamment à Kofia (Cameroun), Kinasserom ou Guité (Tchad), représentant différents groupes ethniques, se manifeste par une compétition âpre dont l’issue est abrégée par le recours à la ressource identitaire (mythes, légendes, récits historiques, lieux de mémoire), laquelle suffit à justifier la mobilisation des « leurs » au-delà des frontières. Inversement, les logiques d’exclusion passent également par l’attribution de nationalités aux ressources naturelles afin d’en réduire l’exploitation aux compatriotes nationaux. On constate, à ce titre, une double instrumentalisation identitaire qui convoque d’abord l’appartenance ethnique/communautaire pour s’approprier les ressources sur un terroir et, ensuite, un référencement à la nationalité ou à l’État pour garantir l’exclusivité de l’accès aux ressources aux personnes de même nationalité. Entre transfrontalité cognitive et matérielle, il y a une autre voie à explorer.

La transfrontalité des conflits ne se trouve donc pas dans le franchissement des artifices frontaliers, mais dans une double transgression des univers civilisationnel et identitaire perçue de chaque membre de la communauté. La limite à ne pas franchir n’est pas matérielle, elle est mentale parce que portée par une charge historique exposée toutefois à la manipulation et à des éruptions mémorielles opportunistes. Ce soubassement enfoui est le plus souvent utilisé comme réponse aux défis intercommunautaires de contrôle du pouvoir traditionnel, d’accès aux ressources ou de compétition politique dans le rapport à l’État. L’identité devient une ressource convoquée lorsque les enjeux de survie du groupe sont en question. Tous les conflits qui se produisent et se reproduisent dans le Lac Tchad ont pour vecteurs mobilisateurs et amplificateurs ni la nationalité ni la religion, encore moins la géographie des belligérants, mais une conscience suprême d’appartenance à une histoire, à une micro-nation, à une fratrie mue par un lien indéfectible. La citoyenneté tribale étant plus significative et opportuniste (Mbarkoutou, 2019) que la citoyenneté étatique, il importe d’en tenir rigueur dans l’effort de compréhension des dynamiques transfrontalières dans le bassin du lac Tchad.

Conclusion

En passant en revue l’histoire tumultueuse du bassin du lac Tchad comme lame de fond des dynamiques contemporaines, cette analyse a tenté de montrer que les conflits ainsi que les crises sécuritaires se nourrissent du passé parfois confus des communautés. La reproductibilité des crises sécuritaires qui en résulte se traduit par un renouvellement opportuniste de la perception de la transfrontalité dont il s’est avéré impératif d’en faire un concept capable d’éclairer les logiques à la fois transfrontalières et internes aux communautés vivant dans le lac Tchad et dans les monts Mandara. Elles constituent in fine des ressources que différents défis imposent aux communautés de mobiliser pour exister, vivre ou s’adapter. Du coup, l’analyse de la conflictualité dans le bassin du lac Tchad nécessite une démarche prudente de prise en compte de ces contraintes historiques et mémorielles. Ni les conflits intercommunautaires récurrents ni la progression de l’extrémisme violent au lac Tchad ni encore Boko Haram en général ne devraient donner lieu à des productions décontextualisées, ignorant ces préalables qui rendent spécifique tout discours sur le bassin du lac Tchad. Les outils d’analyse et de réponse aux crises sécuritaires doivent intégrer ces facteurs structurants. Des voies expiatoires des passés conflictuels sont nécessaires à l’instar des lieux de mémoire, les récits thérapeutiques des griot-e-s rappelant l’épopée glorieuse ou tumultueuse des communautés, la valorisation des contes, légendes, récits historiques. Les exutoires d’un passé violent se construisent dans les sillons des itinéraires historiques vécus par les peuples contemporains.

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  1. Couronné à l’âge de 25/26 ans, Idriss Alaoma fut le 54e roi de la dynastie Sefawa qui régna sur l’Empire de Bornou entre les XVIe et XVIIe siècles. Il se distingua par ses remarquables compétences militaires, administratives et sa dévotion à l’islam. Il conquit de vastes territoires autour du lac Tchad. Après un règne réformateur de 1580 à 1617, il mourut au cours d’une bataille dans le Baguirmi après avoir hissé l’empire du Kanem-Bornou à l’apogée. Lire à ce sujet Urvoy (1941, p. 21-32).
  2. Entretien avec Viché Yatahad, Maire de Mozogo, Mozogo le 17 avril 2018.

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