Défis : Traumas et patrimoine / Defi: Twoma ak patrimwàn
2 Dynamiques mémorielles et logiques patrimoniales des traces du souvenir de l’esclavage en Haïti
Jerry Michel
Note biographique
Jerry Michel, enseignant-chercheur à l’Université d’État d’Haïti, est doctorant allocataire en sociologie en cotutelle à l’Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis et à l’Université d’État d’Haïti. Il est rattaché au Centre de Recherche sur l’Habitat du Laboratoire Architecture Ville Urbanisme Environnement UMR 7218 CNRS et au LADIREP de l’Université d’État d’Haïti. La thèse de doctorat qu’il réalise sous la direction de Claire Lévy-Vroelant (Professeure de sociologie à l’Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, CRH-LAVUE UMR 7218) et de Laënnec Hurbon (Professeur de sociologie à l’Université d’État d’Haïti et l’Université Quisqueya et Directeur de recherche au CNRS) porte sur la patrimonialisation et la construction de la mémoire dans les habitations coloniales haïtiennes. Il détient une licence en sociologie (Université d’État d’Haïti, 2009) et un master recherche en sociologie (Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, 2012).
- Introduction
- Mémoire, patrimonialisation et régimes d’historicité : hybridations, dialectiques, ambivalences
- Les notions-clés et leurs représentations
- Dynamique évolutive des habitations coloniales
- Mise en scène et quête mémorielle
- Des artefacts en gestation
- Prégnance de l’historiographie dans le dispositif muséal
- Conclusion
- Références
Introduction
Plusieurs recherches conviennent aujourd’hui que les habitations coloniales devenues ultérieurement des lieux de mémoire (Nora, 1984) potentiels marquent un tournant dans le vaste processus de patrimonialisation et de remémoration de la mémoire collective en Haïti (De Cauna, 2003; Doucet, 2001; Hurbon, 2006; Lerebours, 2006). Ces laboratoires, où la mémoire collective et les discours historiques cherchent à rendre compte des traces contribuent non seulement à redéfinir la muséographie historique, mais aussi montrent comment celle-ci peut prendre en charge des artefacts et des objets hérités du passé par la mise en place d’un récit/parcours qui leur confère un statut particulier dans un dispositif culturel orientant la réception. Ces lieux de mémoire potentiels, au sens où ils sont théorisés par Pierre Nora (1984), relèvent en effet d’une approche centrée sur l’historiographie et la culture qui propose de présenter aux publics de plus en plus diversifiés des artefacts, des contenus et des interprétations de nature historique, artistique et culturelle, ancrés dans des cadres significatifs qui les donnent à voir sous un angle déterminé.
Penser aujourd’hui quelle est la contribution de ces lieux de mémoire potentiels dans les usages publics et politiques du passé demanderait de longues recherches : je me contenterai ici d’esquisser deux pistes de réflexion. En premier lieu, il s’agira d’établir le lien épistémologique entre la mémoire, le patrimoine et les régimes d’historicité. Ensuite, je présenterai une première esquisse historique de l’évolution des habitations coloniales ainsi qu’une description faisant office de point de repère de ces espaces patrimoniaux qui ont servi de cadres d’enquête au cours de mes investigations. Je montrerai comment ces lieux de mémoire potentiels proposent une approche novatrice dans la mise en mémoire du passé en Haïti. Plus largement encore, pour bien saisir la particularité de la mise en mémoire adoptée par ces espaces patrimoniaux, il faudrait pouvoir situer ce processus dans ce vaste mouvement qui se réalise pour commémorer la mémoire de l’esclavage et de la traite transatlantique (Araujo, 2007; Chivallon, 2013; Ciarcia, 2016; Cottias, 2007; Leservoisier et Trabelsi, 2014; Vergès, 2006) et en projeter une certaine image.
En second lieu, j’examinerai ces espaces en analysant les logiques patrimoniales et les dynamiques mémorielles, leurs partis-pris d’histoire, leurs références conceptuelles ainsi que leurs choix d’inclusion et d’exclusion thématiques. Dans le même temps, j’étudierai le processus de construction de la mémoire postcoloniale en Haïti notamment la dialectique entre un discours énonçant l’héroïsme historique et un recours au statut victimaire développé en même temps dans la justification des acteurs sociaux. Ce travail reste à faire : ce que je présente ici ne permet que d’en évoquer quelques jalons. Les quelques points dont je traite relèvent à la fois des observations d’un participant à des processus de mise en mémoire et des réflexions de quelqu’un qui a l’habitude de visiter et d’analyser des pratiques culturelles (Fleury, 2006). Ce pan de la recherche se focalise sur des données discursives écrites (archives, ouvrages, articles de revues et de journaux, prospectus, affiches), des histoires orales (entrevues, conversations informelles, émissions radiophoniques ou télévisuelles), des photographies et des observations de la vie quotidienne. Les données écrites sont recueillies avant, pendant et après les rencontres sur le terrain et il s’agit d’une littérature scientifique relevant de domaines variés, essentiellement de la sociologie, de l’anthropologie, mais aussi de l’histoire, de la philosophie et de la littérature. Des itinéraires de vie sont également recensés et analysés dans le but de dresser le choix et le poids du passé dans la construction de la mémoire collective en Haïti. Tous ces aspects permettent de cerner plus en profondeur la position confortable que tiennent l’historiographie ou la mémoire officielle au sein de ces potentiels lieux de mémoire. En résulte ainsi un corpus également riche de savoirs et de savoir-faire destinés à l’étude du passé. Ce sont là des indices tangibles de la mise en route encore in statu nascendi d’une sociologie de la mémoire collective en Haïti pour les études postcoloniales.
Mémoire, patrimonialisation et régimes d’historicité : hybridations, dialectiques, ambivalences
Les notions clés et leurs représentations
L’histoire conceptuelle de la mémoire, ou plutôt de la mémoire des groupes sociaux, se dévoile dans les livres de Maurice Halbwachs (1925; 1950) qui retracent l’analyse de la réappropriation du passé accordée aux aspirations du présent. Depuis ces travaux, on sait que la mémoire, et son corollaire l’oubli en tant qu’acte délibéré qui ne peut se faire qu’à condition qu’on ait accepté de se souvenir, dont le collectif est le fondement, est un outil de gestion du présent. Elle est, dans un rapport dialectique avec l’oubli qui demeure impossible tant qu’on n’a pas posé le souvenir, cet instrument qui bricole les souvenirs pour les rendre adéquats aux cadres sociaux dans lesquels les individus sont amenés à s’insérer. On ne se replonge pas dans le passé, on le reconstruit en fonction des exigences de la situation présente. De cette conception passionnante semble se dégager une constante : le rapprochement, parfois la superposition de la mémoire avec la notion de patrimoine – deux concepts dont les sens s’entremêlent en permanence, parfois se confondant, parfois s’inversant. La mémoire collective, en effet, relève du patrimoine vivant d’une société. Car il y a, c’est certain, un lien étroit entre mémoire et patrimoine. Avec la même racine que memoria (mémoire), patrimonium (patrimoine), le patrimoine fait penser à l’acte de recevoir un ensemble de biens en héritage, au travail de conservation, de valorisation et diffusion, enfin, à l’opération de transmission. Il n’est pas étonnant que sa signification initiale soit celle de la relation d’une personne, d’une institution ou d’une société avec les biens qu’elles possèdent. Néanmoins, par rapport à ce sens originel, la notion de patrimoine évolue, depuis longtemps. Devenant nuance, il dépasse de nos jours le sens d’héritage pour glisser vers le conceptuel à travers l’idée de la gestion patrimoniale. À partir de ce glissement, le patrimoine ne se réfère plus uniquement à la matière, mais aussi au langage parlé et écrit et à celui visuel, faisant, de manière générale, appel aux sens et à la pensée[1]. La question que pose la patrimonialisation est celle du processus d’identification, de sauvegarde, de requalification, de reconnaissance, de valorisation et de diffusion des traces (Veschambre, 2008) de la mémoire postcoloniale dans les habitations coloniales. D’après Laënnec Hurbon, « les habitations coloniales, théâtres des grands débats des XVIIIe et XIXe siècles, parlent de l’organisation du système esclavagiste, des formes de surexploitation des esclaves, de l’univers quasi concentrationnaire avec pour objectif immédiat et aveugle la rentabilité maximale » (Hurbon in Lerebours, 2006, p. 8). Les chiffres fournis par Moreau de Saint-Méry montrent bien leur importance dans la colonie française de Saint-Domingue :
La colonie de Saint-Domingue contient 793 manufactures à sucre ou sucreries, 1 150 indigoteries,; 789 cotonneries, 3 117 caféteries ou caféières,; 182 guildiveries ou distilleries de tafia ou eau-de-vie de sucre,; 36 briqueries et tuileries, 6 tanneries, 370 fours à chaux ou chaufourneries,; 29 poteries et 50 cacaoyères,; indépendamment d’une foule d’autres établissements connus sous le nom de place-à-vivres (Saint-Méry, 1796, p.111 cité par Lerebours, 2006, p.21).
Au XVIIIe siècle, ces habitations constituaient le poumon économique de la société coloniale-esclavagiste (De Cauna, 2013). Aujourd’hui, elles des cadres privilégiés pour des recherches archéologiques et anthropologiques sur la vie des esclaves et des colons ainsi que sur la société rurale au XIXe siècle en Haïti. De restructurations en menaces de destruction, ces espaces coloniaux se voient reconsidérés actuellement grâce à l’apparition d’une certaine forme de prise de conscience patrimoniale. Ils bénéficient dès lors d’une inscription ou d’un classement au titre de monuments et sites d’Haïti à haute valeur culturelle, historique ou architecturale (ISPAN, 2014).
Le croisement entre les notions de mémoire et de patrimoine sous-tend plusieurs ambiguïtés et tensions qui conditionnent et soulignent à leur tour le caractère complexe, déroutant et ambigu de ces concepts : entre le caché et le dévoilé (l’explicite et le tacite), entre mouvance et fixation, entre sensibilité (ce qui est saisi par les sens) et intelligibilité (ce qui est compris par la raison), entre imitation et invention, entre déjà là et expression d’un désir d’existence (de ce qui n’existe pas, ou pas encore). À travers ces ambivalences multiples émergent la nature hybride et la capacité transversale de la mémoire et du patrimoine à lier des éléments de nature différente : matériels, visuels et conceptuels, dits ou non dits, etc. Cela m’amène à dégager l’idée qui est à la base de mon hypothèse, à savoir que tous les rapports dialectiques que la mémoire collective et le patrimoine sous-tendent permettent de se promener librement entre espaces, paroles, traces, images et pensées. À partir de ce constat, chercher à comprendre les ressemblances et les différences de la mise en mémoire et de la patrimonialisation en tant que fait social impliquant de nouveaux rapports au temps et aux lieux dans les sociétés post-esclavagistes prend tout son sens et m’a permis de retenir le concept de « régimes d’historicité » (Hartog, 2003). Ce dernier, utilisé non seulement pour assurer le lien entre la mémoire et le patrimoine, mais aussi pour penser la façon dont les groupes sociaux produisent et (se) racontent leur histoire et leur inscription dans le temps et dans l’espace — à travers les différentes formes d’expressions symboliques qu’ils inventent et à partir desquelles ils s’inventent — est emprunté à François Hartog :
Le contenu de cette formule pour étudier le présentisme et les expériences du temps, porte sur le croisement des trois modes que sont la mémoire (présent du passé), l’attention (présent du présent) et l’attente (présent du futur) donnant naissance à de nouvelles catégories formelles, sans racine ou origine unique, instituant des expériences du temps ou des constructions comparatistes où l’ordre du temps qui en découlera ne sera pas le même (Hartog, 2003, p.13-14).
Les précisions théoriques que j’ai essayé de dégager pour une approche sociologique des usages et enjeux de la mise en mémoire et de la patrimonialisation des habitations coloniales en Haïti impliquent forcément un certain nombre de descriptions et de faits historiques qu’il faut maintenant préciser.
Dynamique évolution des habitations coloniales
La société haïtienne constitue un terrain privilégié pour étudier les usages et enjeux de la mise en mémoire et de la patrimonialisation des habitations coloniales. Une première raison à cela réside dans le fait que les vestiges et ruines des espaces coloniaux y sont particulièrement prégnants. De l’avis de Jacques de Cauna :
Haïti est aujourd’hui encore un véritable conservatoire du patrimoine historique de l’économie esclavagiste du XVIIIe siècle dont la grande plantation, connue sous le nom d’habitation aux Isles d’Amérique, était l’unité de base. À la fin du XVIIIe siècle, en effet, la partie française de Saint-Domingue était, et de très loin, la plus grande (27 000 km2), la plus peuplée (au moins 600 000 habitants, dont 30 000 Blancs) et la plus riche (sept fois plus que la Martinique ou la Guadeloupe) des îles à sucre antillaises de la Caraïbe conservées à La France par le traité de Paris au détriment des « quelques arpents de neige du Canada. La Reine des Antilles, orgueil de la France dans le Nouveau-Monde, selon son historiographe Moreau de Saint-Méry, fournissait à elle seule près des 2/3 du commerce extérieur de la France, les 3/4 du sucre et les 2/3 du café mondial : elle faisait vivre plus d’un Français sur six, produisant plus que toutes les îles anglaises et espagnoles réunies (De Cauna, 2013, p.2-3).
Selon Michel Philippe Lerebours, « jusqu’en 1986, les vestiges des habitations coloniales étaient encore assez nombreux dans la plaine du Cul-de-sac, malgré les rapines bienveillantes et atmosphériques qui provoquent la disparition de quelques-unes des plus importantes » (Lerebours, 2006, p.14). En rapport à aujourd’hui, Haïti comporte la plus forte concentration d’habitations coloniales délaissées de la Caraïbe. Toute étude des habitations coloniales en Haïti ne peut ignorer le changement historique assez particulier qu’a connu cette société postcoloniale. Effectivement, si chaque colonie possède une expérience spécifique de l’esclavage et de l’affranchissement, le cas d’Haïti est particulièrement significatif dans la mesure où ce sont les esclaves eux-mêmes qui ont arraché leur liberté à la suite d’une révolte et d’une guerre victorieuse (Barthélemy, 2000) ayant abouti à l’indépendance le 1er janvier 1804. En proclamant l’indépendance, les différents membres de l’armée indigène mettent fin à trois siècles d’un type particulier d’organisation de l’espace morcelé de la spatialité du pacte colonial (Anglade, 1974), que le colonisateur avait mis en place pour exploiter la colonie française de Saint-Domingue. Comme après beaucoup de révolutions, la société haïtienne indépendante est à construire au milieu des ruines : la destruction systématique des moyens de production, de toutes les richesses accumulées par trois siècles de colonisation et la mort de milliers de personnes étaient le coût de l’indépendance nationale. Dans un tel contexte historique fragilisé, les vestiges et ruines des habitations coloniales sont généralement victimes des luttes politiques qui ont façonné l’histoire d’Haïti. « De l’urbanisation incontrôlée, en passant par le vandalisme des uns, jusqu’à l’incurie et l’ignorance des autres, les habitations coloniales, encore nombreuses, résistent et attendent d’être reconnues comme des lieux de mémoire potentiels dont la disparition totale pourrait affecter les bases de l’identité collective haïtienne » (Lerebours, 2006, p.14). À en croire de Cauna, « les ruines des quelque 8500 habitations coloniales — le plus important réseau d’exploitation des Antilles — constituent actuellement un patrimoine d’une exceptionnelle richesse qui nécessite protection, car il est très menacé et fragilisé par les destructions climatiques et humaines » (de Cauna, 2013, p.2). C’est en ce sens que l’étude des habitations coloniales comme enjeu politique primordial est spécifique. Pour Laënnec Hurbon :
Comment pourrions-nous transmettre aux générations futures ce patrimoine, si nous continuons au sens strict à fouler aux pieds sans même nous en douter ces traces et ces lieux de mémoire et à les banaliser au point de les laisser emporter pierre par pierre par un vandalisme dont nous, chercheurs, serions les premiers responsables si nous nous enfermions dans le silence sur notre patrimoine? (Hurbon, 2006, p.8).
Conçue en tant que regroupement d’hommes et de femmes, de bétails et d’abris, intégrés à un espace topographique spécifique, « une habitation coloniale doit être considérée comme un petit gouvernement dont le propriétaire est le maître et qu’il régit sous la loi du souverain » (Pluchon, in De Wimpffen, 1993, p.74). Au préalable, l’habitation coloniale était rattachée aux structures sucrières, puis elle finit par s’étendre à l’ensemble des exploitations, à l’exclusion des places-à-vivres (Pluchon, 1991; Saint-Louis, 2005). Toutefois, l’habitation en tant que lieu de travail et de fortune des colons ne se résume pas simplement à la maison du maître ou à un édifice spécifique, mais comprend l’ensemble des bâtiments, domestiques et industriels, ainsi que les terres, les cultures, les individus réduits en esclavage, le bétail et tous les ustensiles nécessaires à la vie sur l’exploitation agricole et industrielle (Charlery, 2004).
Aujourd’hui, les habitations coloniales sont des espèces de lieux à l’état de friches autant que des formes investies par les cadres sociaux de la mémoire (Halbwachs, 1925). Lieux de vie au même titre que des sites délaissés, d’ailleurs, ils ne sont pas nécessairement habités; disons que leur problématique ne peut être ramenée à celle de l’habiter où, ce qui importe, c’est la présence-absence existentielle.
Les habitations coloniales occupent une position curieuse, à la périphérie et surtout à la marge d’autres patrimoines (fortifications, palais, châteaux, musées, églises, maisons en pain d’épice, etc.) en partie restaurés. Elles sont, en ce sens, des morceaux d’histoire particulièrement dégradés. Formant un corpus hétérogène difficilement saisissable tant par la diversité de leurs formes que par celle de leur période de réalisation et de leurs modes de fonctionnement, elles sont également des lieux historiques pluriels, morphologiquement très contrastées. Ces ruines appartiennent de plein droit à une esthétique classique, elles contribuent en même temps au culte moderne des monuments anciens (Riegl, 2013) et à la sauvegarde d’une architecture ancienne et contemporaine. Pour un cadre de l’Institut de Sauvegarde du Patrimoine National (ISPAN) :
Si ces habitations coloniales ont pu être découvertes, c’est aussi parce que la recherche des identités culturelles, ces retrouvailles avec le patrimoine culturel injustement délaissé sont une redécouverte de la mémoire collective qui peut assurer une solidarité entre les générations. Et c’est aussi bien sûr l’un des aspects essentiels de notre travail à l’ISPAN (entretien réalisé avec un employé de l’ISPAN en mai 2015).
Parmi ces espaces désertés, souvent abandonnés, en friche, vides de sens, il est une catégorie bien particulière qui connaît actuellement un grand succès. Leur triomphe est dû pour une bonne part à leur authenticité sur laquelle le public ne s’est pas trompé. Leur importance s’affiche comme une évidence aveuglante dès lors qu’elles disparaissent des préoccupations politiques en matière de patrimoine en Haïti. Ces espaces muséographiques construits et légitimés par des familles de la société civile sont des initiatives citoyennes qui se veulent de véritables lieux de mémoire et de connaissance de l’histoire d’Haïti. Ces vestiges ont changé de fonction, de statut et de réception : de structures plantationnaires, elles sont devenues patrimoines communs, objets publics et propriétés privées de conservation, d’histoire, de mémoire, de culture et de tourisme. Ces sites mémoriels évoquent plus largement l’essor puis le déclin des structures plantationnaires au sein de l’histoire d’Haïti. Parfois, c’est un fragment d’histoire, un souvenir qui refait surface, comme dans le récit de cette touriste américaine d’origine haïtienne rencontrée lors d’une visite guidée dans une habitation coloniale : « ces espaces nous touchent parce que nous comprenons que, dans leur simplicité, ils sont des représentants fidèles des plantations où nos ancêtres ont vécu, et que par conséquent c’est toute l’histoire de notre société qu’ils retracent » (entretien du 25 juillet 2015). Abandonnées ou patrimonialisables, ces habitations coloniales sont des objets potentiels pour un vaste processus de patrimonialisation dans lequel plusieurs registres peuvent être mis en œuvre. La patrimonialisation et la mise en mémoire à plusieurs niveaux de ces habitations coloniales se situent en ce sens dans les vagues mémorielles qui cherchent à présenter un pays, à dire les composantes d’une identité, les réalités d’un lieu et l’histoire de la population. Il semble tout de même évident que la question de la souffrance (Dorismond, 2013) est au cœur d’une partie des revendications mémorielles sur l’histoire et la mémoire. On ne peut l’évacuer. Ces lieux de mémoire potentiels tentent aussi d’offrir une vision des identités collectives d’Haïti qui puisse répondre aux préoccupations du jour. Donner une représentation de l’histoire et des identités culturelles d’Haïti et l’exprimer dans une mise en scène (Flon, 2012) à l’intention du grand public constituent bien un processus qui veut offrir une image de soi et de ses réalisations qui correspondent à la représentation, aux perceptions, aux enjeux et aux aspirations du moment.
Mise en scène et quête mémorielle
Des artefacts en gestation
Ces espaces coloniaux réunissent des collections et présentent des mises en scène qui permettent de représenter concrètement les étapes successives de l’histoire collective d’Haïti : au Musée Ogier-Fombrun et au Parc Historique de la Canne à Sucre, par exemple, et dans d’autres espaces muséographiques comme le Bureau national d’Ethnologie et le Musée du Panthéon national, des mises en mots, en images et en récits (Barrère et Lévy-Vroelant, 2012) montrent des scènes d’histoire et des artefacts des périodes amérindienne, coloniale et nationale. Les artefacts qui étaient souvent des objets abandonnés ou négligés dans ces lieux ou ailleurs sont montrés et insérés dans des trames narratives et placés dans des scénographies qui orientent leur réception (Montpetit, 2009). Il y a effectivement dans ces espaces un grand nombre d’objets authentiques et d’artefacts qui se regroupent dans deux catégories principales.
Une partie provient des collections archéologiques, historiques et anthropologiques : il s’agit très majoritairement d’objets précieux, typiques de la vie des Amérindiens, des structures plantationnaires d’exploitation de la colonisation et d’autres circonstances de la période nationale d’Haïti (1804 à nos jours). Ces objets appartiennent au cercle restreint des artefacts célèbres que les visiteurs veulent voir. De tels objets peuvent faire appel à leur souffrance et à leur nostalgie ou, au contraire, évoquer des temps douloureux plus anciens qui sont heureusement révolus. La seconde catégorie se compose d’objets plus contemporains, achetés, reçus ou empruntés pour les besoins de la mise en scène et placés dans des thèmes liés à la production, au mode de fonctionnement des habitations coloniales, aux héros de l’indépendance d’Haïti et à des phénomènes de culture et d’art. Les espaces contiennent également des objets-souvenirs et des œuvres d’art qui évoquent la vie familiale des propriétaires et la création artistique et culturelle. Cela étant, les rapports sociaux racialisés de domination et d’exploitation ne sont pas mis de l’avant dans la présentation de ces artéfacts, au sens où ils ne sont pas présentés comme centraux et essentiels au propos. Dans ces espaces, la mémoire de la production sucrière domine en partie et d’ailleurs, par moments, on a tendance à croire que la mémoire des rapports sociaux esclavagistes passe au second plan. Cette négligence tient de la forte empreinte laissée sur cette société le vieux mépris colonial et des crispations identitaires suscitées par une légitime révolte chez nombre de « peaux noires, masques blancs » (Fanon, 1971) de la Caraïbe.
Prégnance de l’historiographie dans le dispositif muséal
Les espaces sont avant tout historiques. Au premier coup d’œil, la mise en scène de ces espaces transmet un message historique et montre, dans leur facture même, des images très actuelles de la société haïtienne, transformée par plusieurs initiatives politiques. Des questionnements contemporains capables de toucher les visiteurs viennent éclairer les événements du passé. Il n’en reste pas moins que ces espaces présentent dans leur déroulement un sujet collectif et déploient, dans une longue durée fragmentée en de multiples mémoires l’histoire d’une société assimilable à la majorité constituée des Haïtien.ne.s. Cependant de tels espaces devraient faire parler l’histoire, cette histoire d’Haïti qui est le récit de la manière dont des femmes et des hommes opprimés, non seulement des héros, ont résisté à l’esclavage et ont abouti à la victoire et à l’indépendance d’Haïti. La tendance générale en Haïti consiste à adopter des mises en scène qui relèvent proprement de l’histoire héroïque ou héroïsée (Célius, 2004) et d’un développement par événements et par périodes charnières. Le nationalisme héroïque est ainsi une caractéristique du modèle social haïtien qui suppose la construction d’un espace mémoriel (mémoire officielle) où la figure du héros occupe une place centrale (Célius, 2004). Cet héroïsme, insistant sur la grandeur des héros, est dialectiquement lié à la victimisation (Apostolidès, 2011), deux éléments qui, dans le cas d’Haïti, sont contaminés l’un par l’autre dans les mécanismes psychologiques de la collectivité. Selon Apostolidès (ibid., p.11), « à la fois complémentaires et conflictuels, ils créent à l’intérieur de la culture une tension permanente dont l’impossible résolution constitue la source de l’instabilité, c’est-à-dire non seulement du perpétuel changement de mœurs, mais également du besoin exacerbé de mémoire qui l’accompagne ».
Le discours iconographique des espaces muséographiques s’articule autour de trois pôles : histoire, éducation, culture. Les visiteurs sont invités à suivre avec une rigueur historiographique cette métasubjectivité sur le chemin de leur identité, parmi des fragments plus ou moins conciliables de traces mémorisées. Je dis bien fragments plus ou moins conciliables, car un des aspects essentiels de ces espaces réside, à mon avis, dans ce caractère fragmentaire assumé qui ne se résout aucunement dans l’unité d’un récit exprimant une prise de position commune, par exemple un récit national qui fait sens et consensus. Peut-être que nous devons nous fier à Édouard Glissant (1990) lorsqu’il écrit que les sociétés caribéennes ne s’établissent sur aucun fondement unique ni aucune origine. Les visiteurs explorent les zones d’ombre, voient des objets ordinaires et précieux et lisent des récits historiques et symboliques, tout en restant libres d’attribuer un sens à ce qui est rassemblé là. Il ne s’agit pas de tout centrer sur les objets ou d’offrir simplement des artefacts à la contemplation. Les responsables, propriétaires et curateurs ne mettent pas vraiment en place des dispositifs scénographiques de médiation et ce faisant, ils-elles installent des tensions mémorielles entre, d’une part, les artefacts présentés et, d’autre part, le concept d’ensemble qui saurait régir leur distribution dans un espace donné où des récits mémoriels spécifiques les prendraient en charge. La présence de plusieurs mémoires contradictoires contribue à rendre possible le catastrophisme éclairé qui consiste à faire comme si nous étions les victimes d’un destin tout en gardant à l’esprit que nous sommes la cause unique de notre malheur. La mise en scène de ces espaces, n’exprimant pas en profondeur ce que Paul Ricœur (2003) appelle l’identité narrative d’une communauté, se rapproche d’un type de présentation qu’on désigne aujourd’hui en anglais comme multiple voices et qui traite toujours d’un thème en donnant plusieurs points de vue sur le sujet. Que peut-on dire du message majeur de ces espaces muséographiques au sujet des identités collectives nationales?
Conclusion
La mémoire est omniprésente dans la société haïtienne contemporaine. Elle est présente dans les lieux de mémoire potentiels du souvenir de l’esclavage colonial. Ces sites historiques sont le bien commun de tous-tes les citoyen-ne-s du pays, y compris des plus récents. Leur mise en valeur pose un problème crucial à la société parce que leur patrimonialisation n’est que très partiellement prise en charge pour l’avenir. Cette analyse est comparable à celle de Chivallon (2013), dans son texte sur la mémoire du souvenir de la traite transatlantique et de l’esclavage colonial en Martinique. Dans le même temps, on constate que les autorités étatiques en Haïti n’arrivent pas à suivre le développement des usages, des enjeux et des régimes d’historicité de la mémoire collective postcoloniale dans la société. Il y a une responsabilité régalienne de l’État à réaffirmer une politique de la mémoire et à se donner les moyens de la réaliser. Au terme de cette analyse sur la construction de la mémoire collective en Haïti, comment garantir à la société sa mémoire? A-t-on seulement idée de ce que représente la mémoire collective dans les régimes d’historicité de la nation? L’historicité des paysages coloniaux en Haïti, propriétés privées pour la plupart ou biens publics pour quelques-uns, a ainsi permis d’identifier que ce sont « des vestiges à demi négligés dans le sable ou en train d’être désagrégés » (Augé, 2003, p.20).
On a là un problème. Et l’on peut en première approche le croire issu d’une sous-patrimonialisation selon les points de vue : on ne sauvegarde pas assez ces sites coloniaux, ce qui conduirait fortement à leur disparition dans les recherches. Il est bien entendu difficile de dire de quoi leur avenir sera fait : les habitations coloniales abandonnées connaîtront-elles les fruits de la patrimonialisation qu’on est en droit d’attendre, ou seront-elles condamnées à dépérir? Nul ne peut le dire pour le moment. Une seule chose me semble sûre en tous cas : l’intérêt qui se manifeste actuellement pour le patrimoine culturel, même s’il est parfois récupéré à d’autres fins, a des racines profondes. Il témoigne du besoin de posséder ou de retrouver les identités culturelles de la société haïtienne, dont l’acquisition passe par une reconnaissance du patrimoine culturel dans son ensemble et une volonté de le faire vivre et fructifier, au lieu de le garder sous vitrine. Je crois que je peux dire aujourd’hui — sans doute parce que les sociétés caribéennes, notamment Haïti, ont connu les expériences historiques de captivité, d’inégalité et de domination, de traite et de mise en esclavage des êtres humains et, qu’on le veuille ou non, la référence à la traite, à l’esclavage et au statut servile ressurgit comme facteur explicatif des luttes politiques, économiques, sociales et culturelles — que cette opération de choix vaut pour tous les individus ou groupes sociaux. La question qui pointe, bien entendu, est celle de la manière avec laquelle on tiendra l’axe du passé, du présent et du futur, au regard de la mémoire et de l’oubli comme consigne officielle. Il revient à la mémoire d’être ce trait d’union entre le passé et l’avenir. « Ce processus de construction sociale n’est pas sans tension et requiert l’identification des types de discours patrimoniaux et des enjeux complexes et dynamiques par lesquels se définit la légitimité des énoncés mémoriels » (Dodebei et Tardy, 2015, p.10).
Le moment n’est-il pas venu pour l’État haïtien de réaliser la révolution de la mémoire, de refonder une politique globale de la mémoire? Il est utile que l’État rappelle à quoi sert la mémoire, ce qu’elle est en réalité, qu’il analyse les dérives actuelles, qu’il propose une vision nouvelle. À ce moment, la mémoire collective haïtienne ne symboliserait donc pas seulement les valeurs fondamentales de liberté et de bien-être de notre République, mais elle préfigurerait aussi largement leur avenir commun comme un passé qui ne passe pas (Rousso, 1994). Or, porté.e.s par l’universalisme de leur histoire ainsi que par ces valeurs, une bonne partie des Haïtien.ne.s sont souvent confronté.e.s dans leur vie quotidienne à un décalage entre les principes affichés et les pratiques subies. Contradiction qui ne peut se résoudre que dans l’obligation d’assurer concrètement l’égalité de tous.tes et le respect de la particularité de chacun.e. Sans être ambigu et équivoque en taisant les inquiétudes soulevées par certaines des actions de Jean Jacques Dessalines (père de la nation haïtienne), je pense que l’idéal dessalinien a très bien incarné ce nœud gordien. Et quand les moyens de cette valorisation seront finalement conquis – et s’ils le sont dans la conviction que l’avancement de chacun.e est solidaire de celui de tous-tes les autres Haïtien.ne.s qui se battent pour la transformation sociale -, je suis convaincu que l’ensemble de la société haïtienne y gagnera. La question de la construction de la mémoire collective en Haïti prendra alors tout son sens, car elle sera combinée avec la question de la lutte contre les inégalités et les injustices sociales. Sinon, peut-être qu’on ne verra dans ces attristantes gesticulations mémorielles que l’écume des jours actuels de notre pays qui reste plongé dans les profondeurs d’une mer de discriminations continues.
Références
Anglade, G. (1974). L’espace haïtien. Montréal : PUQ.
Apostolidès, J-M. (2011). Héroïsme et victimisation. Une histoire de la sensibilité. Paris : Les Éditions du Cerf.
Araujo, A, L. (2007). Mémoires de l’esclavage et de la traite des esclaves dans l’Atlantique Sud : enjeux de la patrimonialisation au Brésil et au Bénin. Thèse de doctorat présentée à l’Université Laval.
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- Voir à ce sujet la convention de 2003 de l’UNESCO sur le patrimoine culturel immatériel. ↵