I. Aperçu de la situation des mathématiques en Afrique et interpellation

Constats généraux sur les pratiques d’enseignement-apprentissage et expérimentation des mathématiques

Taux d’échec et de décrochage élevés dans les filières mathématiques

Le bulletin de santé des mathématiques en Afrique et la situation de leur développement, dressés par Greenwald & Thomley (2012), révèlent globalement une difficulté majeure d’étudier les mathématiques africaines et les mathématiques en Afrique. Les autrices montrent l’existence d’une pratique ancienne des mathématiques, notamment à travers l’art et les jeux traditionnels. Toutefois, elles font remarquer que les systèmes éducatifs africains n’ont pas réussi à incorporer ces savoirs traditionnels pour en tirer le plus de bénéfice. C’est ainsi que nombre d’histoires anciennes sur les mathématiques africaines sont restées spéculatives, basées essentiellement sur une compréhension générale de la manière dont cette discipline évolue dans les autres sociétés. Cette rupture entre la vie et l’histoire d’une part, et l’éducation d’autre part entraîne des conséquences sur les performances scolaires. Aussi, dans son document de réflexion et d’orientation de l’année 2009, la Conférence des ministres de l’Éducation des pays ayant le français en partage (CONFEMEN) relevait-elle un certain nombre de « carences » qui affectent tant les infrastructures que les institutions en charge de l’éducation dans les pays africains francophones. De même, s’agissant de certains indicateurs scolaires peu reluisants en Afrique subsaharienne, Greenwald & Thomley (2012 : 13-15), se fondant sur le rapport de Mathematics in Africa de 2009, constatent qu’en Afrique centrale particulièrement, on enregistre de faibles pourcentages de fréquentation des écoles, un ratio apprenants/enseignant très élevé[1], un usage marqué des manuels scolaires mathématiques « recyclées » et peu d’enseignant·e·s formé·e·s dans la plupart de ces pays[2].

Le rapport 2009 sur les mathématiques en Afrique fait état de faibles pourcentages de la population scolarisée, de ratios élèves/enseignants élevés, d’une forte utilisation de manuels de mathématiques européens recyclés et de peu d’enseignants préparés dans la plupart des pays d’Afrique centrale, à l’exception du Cameroun. Tous ces faits rendent difficile la personnalisation de l’enseignement des mathématiques pour les élèves africains. Le Cameroun dispose d’un système éducatif plus développé, mais au niveau universitaire, il a du mal à pourvoir les postes de professeurs de mathématiques qui ont été approuvés, et la plupart des cours de mathématiques y sont dispensés dans de grandes classes par du personnel de faible niveau. (Greenwald & Thomley, 2012 : 13-15)[3]

Des faits qui rendent difficile l’appropriation de l’éducation mathématique par les élèves et les étudiant·e·s africain·e·s. Cependant, le Kamerun[4] aurait développé un peu plus son système éducatif dans son ensemble, même si au niveau secondaire, il lutte encore pour répondre aux besoins en termes de places à pourvoir dans les filières mathématiques des facultés des sciences qui existent; sans oublier que la plupart des enseignements de mathématiques sont dispensés dans des salles à effectifs souvent pléthoriques, par des enseignant·e·s dont certain·e·s font quelquefois preuve d’une conscience professionnelle reprochable. Néanmoins, avec plus de la moitié de titulaires de doctorat en mathématiques de la sous-région Afrique centrale, ce pays pourrait y devenir leader dans l’éducation mathématique. Mais nous pensons que ce leadership camerounais annoncé et tant espéré risquerait d’être illusoire si ses « intellectuels » n’arrêtent pas de sacrifier l’école à des appétences politiciennes (Elanga Ateme, 2016), si des actions synergiques d’éducation, de formation, de contrôle et de suivi-évaluation de la jeunesse ne sont pas mises en place maintenant par tous les acteurs et toutes les actrices républicain·e·s compétent·e·s.

Greenwald & Thomley (2012 : 17) affirment qu’en Afrique de l’Est, le Kenya a des programmes de mathématiques de très haute facture au niveau du secondaire et qu’il a produit presque la moitié des docteur·e·s de mathématiques de cette sous-région. Malheureusement, la plupart des étudiant·e·s de mathématiques sont attiré·e·s par des professions autres que l’éducation, l’enseignement et la recherche à cause de la modicité des salaires dans ces secteurs socioprofessionnels. Dans cette sous-région d’Afrique, beaucoup d’efforts devraient donc être fournis au niveau du renforcement des structures pédagogiques pour améliorer l’éducation mathématique par le questionnement et pour la rendre aussi compétitive, c’est-à-dire capable d’innovations et d’inventions. Combien de ces thèses de recherche doctorale en mathématiques fondamentales ou appliquées corrélativement à celles d’autres disciplines sont soutenues en terre africaine[5] sans que les résultats ne profitent aux populations? Une réflexion sur cette question pourrait permettre de mieux apprécier le degré de maturité de l’Afrique, de celui de ses institutions scolaires et universitaires dans ce champ disciplinaire.

Les performances mensuelles, séquentielles ou trimestrielles des élèves sont des indicateurs clés de leurs niveaux d’acquisition des savoirs et de préparation aux examens de passage ou certificatifs. Celles de fin de la 4e séquence ou du deuxième trimestre sont d’autant plus importantes qu’elles sont calculées lorsque les taux de couverture des enseignements sont estimés à plus de 80 %. Au cours de l’année scolaire 2011/2012 par exemple, l’exploitation des données collectées auprès de quelques établissements de la région de l’Adamaoua a conduit aux statistiques suivantes : en classe de 3e, seulement 7,21 % d’établissements ont produit leur propre épreuve de la 4e séquence; 3,56 % ont pris pour épreuve de la 4e séquence l’épreuve zéro officielle du BEPC 2012 et le reste n’a pas du tout évalué. Les taux de réussite enregistrés en mathématiques pour cette 4e séquence ont été les suivants : classes de 4eA de l’Enseignement secondaire technique (EST) : 11,73 %; classes de 1re de l’Enseignement secondaire général (ESG) : 22,61 %; classes de 1re/EST : 18,54 %; classes Tle/ESG : 7 % et classes Tle/EST : 21 %.

Ces chiffres sont inquiétants et certaines raisons de ces mauvaises performances qui ont un rapport avec les enseignant·e·s et leurs enseignements seraient entre autres :

  • la mauvaise qualité des sujets (non-respect de la structure, mauvaise formulation des questions, objectifs mal définis, barème peu adéquat, mauvaise lisibilité du texte, etc.);

  • la mauvaise préparation des élèves aux évaluations (complaisance pendant les séances de travaux dirigés et rigueur absolue lors des devoirs, évaluations surprises, etc.);
  • les enseignements de qualité douteuse (objectifs mal définis et non atteints, mauvais choix concernant les activités de découverte et de consolidation proposées, absence de préparation de leçons, etc.);
  • l’absence de stimulation suffisante de la pensée et de l’estime de soi chez les apprenante·s;
  • la complaisance dans l’attribution des notes (notes fantaisistes ou imaginées sans évaluation préalable…) avec comme corollaire le niveau très insuffisant des apprenante·s;
  • les méthodes d’enseignement peu interactives, mal adaptées aux intérêts et aux capacités des apprenante·s (l’élève n’étant ni au centre ni au-devant de son apprentissage);
  • la mauvaise connaissance des réformes et des nouvelles définitions des épreuves d’examens par les enseignante·s. L’absence de correction des sujets des épreuves d’entraînement ou « épreuves zéros » par les enseignant·e·s sur le terrain, avec pour corollaire la légèreté dans les préparations matérielle et psychologique des élèves;
  • l’absence de stratégie didactique ou de manifestation d’une passion susceptible d’émulation chez les jeunes apprenante·s.

Il faut aussi ajouter que les enseignant·e·s travaillent parfois dans un environnement peu confortable, peu agréable et caractérisé par des effectifs pléthoriques, une insuffisance ou mieux un manque de matériels didactiques, des bibliothèques qui, quand il en existe, sont pauvres en livres ou manuels adaptés aux programmes, des rapports de collaboration équivoques avec l’administration, etc. Mais le fait que les résultats des évaluations ne répondent pas aux attentes suscitera toujours des interrogations de la part de la communauté éducative. Et la responsabilité de l’enseignant·e sera toujours questionnée. Face à de telles difficultés, les acteurs et les actrices du secteur ont mis en place des cadres de réflexions et de solutions qui fonctionnent. Parmi ces actions, l’initiative de l’African Institute for Mathematical Sciences (AIMS) participe de cette action réparatrice. Interrogé sur le bienfondé de cette entreprise, Villani répond :

J’y adhère pleinement. Ce projet a été bâti en effet à partir d’un constat. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes Africains viennent poursuivre leurs études scientifiques en France. Or une fois formés, très souvent ils y restent ou s’installent dans d’autres pays, les mauvaises conditions matérielles, mais aussi parfois un environnement politique difficile, ne les incitant pas à retourner dans le leur. Ainsi le très fort potentiel, notamment en mathématiques, que j’ai évoqué, ne profite quasiment pas aux pays d’Afrique. Avec l’Initiative Next Einstein, l’AIMS a décidé de prendre ce scénario à rebrousse-poil en choisissant d’installer en Afrique chaque centre de formation qui sera développé dans le cadre de ce réseau. Ce seront alors les professeurs étrangers qui se déplaceront sur le sol africain pour dispenser leurs cours. Ce long travail permettra ainsi de former une première génération de professeurs qui, eux-mêmes, formeront une seconde génération apte à former les étudiants et ainsi de suite. (Villani, 2010 : 8)

Au Kamerun comme dans la plupart des pays en espoir d’émergence, et même dans certains pays dits développés, la vision que l’opinion a des mathématiques influe sur l’orientation scolaire et universitaire des jeunes. En effet, pour une moyenne de 100 élèves qui frappent aux portes du secondaire général ou technique, environ 25 % seulement s’orientent quelques années après vers une classe de seconde scientifique ou technique industrielle. Et plus tard, moins de 10 % seulement arrivent en classe de terminale SM[6] ou technique industrielle. Ces proportions restent gardées même au niveau des résultats aux examens certificatifs.

Au Gabon, les résultats d’une étude sur les filles et les sciences dans ce pays, menée pendant l’année universitaire 2015-2016 par Maroundou à travers une enquête sur une période de quatre années de 2009-2010 à 2012-2013, auprès de 55 étudiantes des niveaux licence et master, ont révélé (Demba et al., 2020) que le choix des filières scientifiques, le « surtravail » et leurs compétences en sciences ont été des facteurs déterminants pour se maintenir dans ces filières. En effet, dès l’école primaire, 23,6 % de filles enquêtées envisagent faire des études scientifiques; 38,2 % renouvellent leur projet en classe de troisième et seulement 3,6 % confirment leur choix en classe de seconde scientifique (palier d’orientation) (Demba et al., 2020 : 58).

Il convient de signaler, non pour s’en réjouir, mais pour révéler le niveau de complexité transcontinental du phénomène, qu’en Europe également, la situation n’est guère reluisante.

En France par exemple, pour la période allant de 1851 à 2005, les proportions de jeunes qui optent pour les filières scientifiques et sollicitant un baccalauréat technologique sont restées très faibles, en dessous de 30 %.

Tableau 1 : Statistiques des inscriptions en filières scientifiques en France (1851–2005) – Source : Encarta, 2009.

En effet, l’observance d’une croissance générale des données du tableau 1 ci-dessus laisse croire que la situation change en s’améliorant au fil du temps. Dans le cas présent, il s’agit d’une illusion statistique, car ces données représentent les fréquences brutes qui ne tiennent pas compte des poids totaux des inscriptions. S’agissant des données relatives aux baccalauréats technologique et professionnel, il faut se rendre compte qu’en réalité, le calcul des fréquences relatives sur ces données révèle que le taux le plus bas, soit 16,91 % = (3,4/20,1)*100, est enregistré en 1970 et le pic 29,66 % est atteint en 2000, pour descendre à 28,68 % cinq années après. Pour la même période, le taux des inscriptions au baccalauréat professionnel est resté en dessous de 18 % : soit 6,43 % en 1990, 17,5 % en 2000 et 16,14 % en 2005.

La situation camerounaise examinée sous l’angle des mathématiques reste aussi mitigée bien que ce pays annonce connaître l’émergence à l’horizon 2035. À titre d’illustration, en 2000, un centre d’écrit de l’examen probatoire de l’enseignement secondaire général avait enregistré un total de 983 candidat·e·s inscrit·e·s dont 589 (soit 59,92 %) pour les séries littéraires, 313 (soit 31,84 %) pour les sciences expérimentales (série D) et 81 seulement (soit 8,24 %) pour les sciences mathématiques. Cette situation reste d’actualité en ce début du 3e millénaire, même dans les pays dits développés. Ainsi, pendant les années 2012 et 2013, soit plus d’une dizaine d’années plus tard, ces proportions n’ont pas vraiment changé de façon significative comme l’attestent les données suivantes enregistrées au ministère camerounais en charge de l’éducation du niveau secondaire.

Tableau 2 : Statistiques 2012-2013 des inscriptions aux examens gérés par la Direction des examens et concours (DECC)[footnote]Organisme chargée de la gestion de près de huit (8) examens et concours officiels au Ministère des enseignements secondaires, Yaoundé-Kamerun.[/footnote] – Source : www.minesec.gov.cm.

Ce tableau montre qu’en 2012, sur 202 189 enfants qui ayant frappé aux portes du secondaire, 159 873 soit 79,07 % se portaient candidat·e·s (avec certainement l’aval de leurs encadreurs·se·s et parents) pour l’enseignement général et seulement 42 316 soit 20,93 % pour l’enseignement technique et professionnel. Des proportions assez similaires ont été enregistrées en 2013 avec 78,87 % et 21,13 % respectivement. Pendant la même période et en fonction des besoins somme toute disproportionnés, l’État attribuait 91,78 % de places aux jeunes dans les Écoles nationales des instituteur·e·s de l’enseignement général (ENIEG) en 2012 contre 8,22 % seulement dans les Écoles nationales des instituteur·e·s de l’enseignement technique (ENIET). En 2013, l’attribution était de l’ordre de 92,76 % dans les ENIEG contre 7,24 % dans les ENIET. Pourtant, les responsables de l’éducation et les politicien·ne·s martèlent au quotidien que l’émergence économique passe par le développement technologique et industriel qui a fortement besoin des mathématiques pour s’implémenter.

Au sortir du cycle secondaire, ces disproportions semblent se maintenir, et même s’étriquer.

Tableau 3 : Statistiques 2012-2013 des inscriptions aux examens gérés par l’Office du baccalauréat du Cameroun (OBC).

Du tableau ci-dessus, il ressort qu’en 2012, sur 188 796 candidats au probatoire, 76,92 % appartenaient à l’enseignement général contre 23,08 % pour l’enseignement technique et professionnel. En 2013, les chiffres étaient de 197 424 avec 79,7 % pour l’enseignement général et 20,3 % pour l’enseignement technique.

Au Kamerun, le sous-système anglophone n’est pas du tout épargné par ce phénomène.

Tableau 4 : Statistiques 2012-2013 des inscriptions aux examens gérés par le General Certificate of Education (GCE) Board[footnote]Structure camerounaise chargée de gérer 08 examens officiels du second cycle du sous-système anglophone.[/footnote].

De ce tableau, il ressort qu’en 2012 dans le sous-système anglophone, 86,6 % de jeunes étaient candidat·e·s aux examens de l’enseignement général contre 13,4 % pour l’enseignement technique, et en 2013, on enregistrait 86,38 % contre 13,62 % respectivement. Entre 2011 et 2014, les informations collectées pour la région de l’Adamaoua révèlent, par rapport aux inscriptions enregistrées aux examens Probatoire et Baccalauréat, les chiffres suivants :

Tableau 5 : Statistiques 2011–2014 des inscriptions en maths aux examens OBC/Adamaoua – Source : Archives DRES/AD.

En général, les résultats obtenus en mathématiques pour tous les examens officiels ne sont pas du tout reluisants, et ils ne sont pas de nature à développer de la sympathie à l’égard de cette discipline. Les performances dans les classes intermédiaires sont également mitigées. En effet, en octobre 2010 à l’occasion d’un séminaire de renforcement des capacités des animateurs pédagogiques des sciences de la région de l’Adamaoua, un inspecteur pédagogique de mathématiques, Monsieur Adjaba Biwoli, dans son propos introductif aux travaux en atelier, déclara :

Les mathématiques restent un grand facteur d’échec scolaire. Cette année par exemple, 4,9 % des élèves de notre région ont eu la moyenne en mathématiques au BEPC et 16 % seulement au Probatoire D. Pourtant, le sujet du BEPC concerné était essentiellement constitué d’exercices isomorphes […] à ceux régulièrement traités en classe! Au probatoire D aussi, nos candidats se sont montrés en majorité, incapables de traiter les exercices similaires à ceux abordés en classe et pire, pantois devant ceux de type nouveau. Les raisons évoquées par les enseignants ne manquent pas de pertinence. Seulement, leurs pratiques de classe favorisent-elles toujours le réinvestissement des connaissances dans des exercices classiques ou innovants? (Adjaba Biwoli, propos recueillis par l’auteur, 2010)

Au cours de ce séminaire qui avait pour thème central « Comment amener les élèves à pouvoir réinvestir leurs connaissances en mathématiques? », il s’était agi de mettre sur pied des stratégies opérationnelles plus efficientes devant contribuer au renforcement de l’autonomie dans le travail des apprenant·e·s.

Au regard de cette observation, nous nous étions engagé·e·s, dès le lendemain, à suivre les résultats en mathématiques aux examens des sessions à venir. Aussi, pour l’examen certificatif du BEPC en particulier, il ressort cet extrait des statistiques régionales.

Tableau 6 : Taux de réussite 2011 – 2014 en mathématiques au BEPC/Adamaoua – Source : Archives DRES/IPR/SC/AD.

Ces données qui donnent l’impression que la situation est relativement stable dans l’Adamaoua corroborent à souhait la thèse selon laquelle peu de jeunes réussissent dans les séries mathématiques. La hausse relative du taux de réussite en mathématiques en 2014 peut davantage se justifier par la taille réduite de l’échantillon considéré que par l’amélioration des performances des candidat·e·s. D’autres chiffres disponibles, relatifs aux performances des candidat·e·s aux trois examens (BEPC, Probatoire et Baccalauréat) des sessions 2011 et 2012 dans les régions de l’Adamaoua, de l’Est et du Sud se présentent comme suit[7].

Tableau 7 : Quelques chiffres des examens 2011 et 2012 dans trois régions du Kamerun – Source : Observatoire des examens 2012/SS-MATHS/MINESEC.

Pour ce qui est du BEPC particulièrement, les chiffres enregistrés sont aussi parlants. En 2015, sur un échantillon de 813 candidat·e·s d’un centre de corrections, seulement 36 ont eu une moyenne au-dessus de 10/20 en mathématiques, soit un taux de réussite très bas de l’ordre de 4,42 %. Cinq années après, c’est-à-dire en 2020, la situation ne s’est guère améliorée. La synthèse des chiffres tirés des rapports des chef·fe·s de secrétariat de trois grands sous-centres[8] de corrections du même examen dévoile un niveau de performance très préoccupant : pour un échantillon représentatif de 3 988 copies de mathématiques corrigées, seules 158 copies ont porté une note totale définitive au-dessus de 40/80. Soit un taux de réussite d’environ 3,96 %. Les arguments susceptibles d’apporter des justificatifs recevables à ce statu quo dans la dynamique des performances des candidat·e·s sont essentiels pour réorienter et renforcer la lutte contre les phénomènes d’échec et de décrochage. Dans le cas présent, à quel degré la baisse constatée est-elle imputable à la situation de la Covid-19?[9] Et même si c’était le cas, cette pandémie ne constituerait qu’un élément aggravant qui vient s’ajouter à un problème déjà existant. Compte tenu du fait que les enseignements en présentiel connaissent déjà un certain nombre de problèmes encore sans solutions (la répartition des élèves par classe, par exemple), comment imaginer les images géométriques à la radio ou la télévision? Cette approche d’enseignement/formation à distance ne crée-t-elle pas davantage de problèmes au rang desquels les inégalités d’accès aux différentes formes de savoirs entre les apprenant·e·s?

Par ailleurs, la programmation des horaires de passage de certaines épreuves scientifiques à cet examen, ainsi qu’au Probatoire et au Baccalauréat scientifiques de l’enseignement général ne joue pas toujours en faveur du relèvement du niveau des performances des candidat·e·s. En effet, l’épreuve de français qui passe en priorité aux premières heures de la matinée dans le programme du déroulement des épreuves écrites regroupe à elle seule trois épreuves pour 3 heures 45 minutes : Orthographe (45 minutes), Étude de texte (1 heure) et Composition française (2 heures). Cependant, les mathématiques qui sont également une discipline transversale enseignée depuis le cycle maternel sont réduites à une seule et très longue[10] épreuve qui ne dure que deux heures. De plus, il faut constater pour le déplorer que dans les séries C, D et TI (Technologie de l’information), le passage des épreuves des matières phares comme la Physique-chimie, les Sciences de la vie et de la terre et l’Informatique, c’est-à-dire les matières du premier groupe dans les programmes d’enseignement, soit programmé pendant les deux dernières journées sur les quatre que couvrent les examens. Les élèves affrontent ainsi leurs matières principales dans un état psychosomatique de fatigue agissante.

L’Enseignement technique et professionnel n’est pas sans connaître aussi de telles performances; car ici également, les filières industrielles technologiques (secteur du tertiaire avec les parcours comme la fiscalité, la monnaie et les finances) qui exigent de bonnes bases en mathématiques sont peu fréquentées par les jeunes, au profit de certaines spécialités dites commerciales[11] qui en demandent moins. L’enseignement supérieur a également fort à faire pour sortir de cette situation (Banque Mondiale, 2003 : 90).

De nombreux jeunes éprouvent des difficultés en mathématiques. Plusieurs abandonnent cette discipline ou choisissent des formations qui leur permettraient d’éviter tout contact avec elle. Cette situation conduit à la circulation et à la diffusion d’un certain nombre des préjugés rétrogrades et même des mythes relatifs à cette discipline (Flato, 1990; Kindschi, 2005). Dans les institutions scolaires et mêmes universitaires, certains jeunes entrent en salle de cours avec la certitude que la leçon sera ennuyeuse. D’autres croient que la réussite dans cette matière dépend de la possession d’un talent ou d’un don spécial (supérieur), la fameuse « bosse des maths », oubliant parfois que l’enseignant également ne sait absolument pas tout. Les mathématiques ne sont pas réservées à une catégorie de personnes, scolarisées ou non scolarisées. Elles sont la façon de penser opérationnelle et opératoire de chacun. Les mathématiques élémentaires exemptées de leurs symboles et autres figures géométriques sont une activité populaire qui n’exige aucune condition fondamentale préalable pour les exercer, les pratiquer à une dimension élémentaire. C’est là le tremplin pour toute phase d’apprentissage. Des enfants aux adultes, aucun n’échappe aux mathématiques; tous et toutes les pratiquent de manière consciente ou inconsciente.

Persistance des préjugés néfastes sur les mathématiques et nos motivations

Nous avons aujourd’hui la certitude que les craintes causées par les mathématiques en milieux scolaire (Inanan Kouéiwon, 2018) et universitaire (Pilon, 2006) sont importantes et elles influent sur les comportements psychosociaux de nombreux individus notamment en Afrique malgré les innovations pédagogiques, didactiques et technologiques de plus en plus modernes. Il s’agit bien entendu de ce comportement réfractaire couplé à une antipathie à l’égard des sciences mathématiques, résultat des jugements préconçus, défavorables et erronés qui dénaturent l’esprit de cette matière et provoquent de multiples démissions non seulement dans cette discipline, mais aussi dans les filières apparentées. Ce mouvement prend d’ailleurs, et depuis un certain temps, une autre forme. On donne l’impression de s’intéresser aux mathématiques en admirant simplement ceux et celles qui s’y exercent sans pour autant s’engager véritablement à les faire soi-même. Ce phénomène est très observable chez les jeunes, notamment chez de nombreux·se·s enseignant·e·s de matières dites littéraires, quand il faut finaliser différents rapports d’activités en dressant des statistiques mensuelles, séquentielles, trimestrielles ou annuelles. Ces personnes choisissent assez souvent de procéder par la « sous-traitance », c’est-à-dire faire faire par une tierce personne cette activité quand elles sont contraintes de les produire dans leur rapport d’activités.

De 1999 à 2015, nous avons régulièrement interrogé des élèves, des étudiants, des apprenant·e·s des centres de formation, ainsi que des personnes rencontrées dans des associations socioculturelles sur la discipline qui leur a causé plus de problèmes de compréhension et d’assimilation pendant leur cursus scolaire. Cette enquête psychosociologique réalisée auprès de plus de huit mille (8 000) personnes lettrées de différentes générations et étalée sur seize années visait à mesurer la proportion et le degré d’appréhension des mathématiques chez ces personnes. Les résultats ont révélé qu’un nombre très élevé a eu maille à partir avec le calcul, les problèmes, l’arithmétique et aujourd’hui les mathématiques. En effet, chacun y allait de ses propres raisons, pour dire et expliquer en quoi les mathématiques furent un véritable obstacle pendant leur scolarité. C’est ainsi que, sans distinction du niveau d’étude des personnes interrogées, nous avons pu noter quelques raisons pertinentes :

  • les mauvaises notes enregistrées aux évaluations;

  • la pauvreté et l’insuffisance d’encadrement des parent·e·s (avec comme corollaires le manque de manuels scolaires et les abandons scolaires);

  • trop d’exercices difficiles à faire, sans rapports visibles avec le contexte environnemental des élèves;

  • le vocabulaire et les formules difficiles à comprendre (faits de symboles et de représentations bizarres);

  • l’absence de stimulation suffisante (par les enseignant·e·s) de la pensée et de l’estime de soi chez l’élève;

  • les concepts et notions abstraits sans applications directes dans l’environnement (par exemple les espaces métriques, les notions de limite, de continuité, de convergence, de dérivation, etc.);

  • des enseignant·e·s trop pressé·e·s de finir les programmes et peu soucieux des difficultés des apprenant·e·s (avec une rigueur presque martiale pour certain·e·s et un laxiste presque déconcertant pour d’autres);

  • les méthodes d’enseignement qui ne permettent pas facilement de s’exercer quand l’on se retrouve seul·e;

  • trop de matières indépendantes sans rapports visibles entre elles.

C’est ainsi qu’environ quatre mille neuf cent deux (4 902) personnes, soit une proportion de 61,28 % d’individus a rencontré des difficultés en mathématiques à un moment donné de leurs cursus scolaire et universitaire[12]. Dans le même ordre d’idées, en 2016-2017, Inanan Kouéiwon (2018) a interrogé 150 élèves de 15 classes du lycée moderne de Yopougon-Andokoi en Côte d’Ivoire, qui devaient classer les matières dites « bêtes noires » de leur programme : « Ces matières ”bêtes noires” sont les suivantes : philosophie (25 %), mathématiques (23 %), langue (21 %), sciences physiques (14 %) » (Inanan Kouéiwon, 2018 : 107). Les résultats des deux travaux, tout en paraissant éloignés l’un de l’autre, se complètent. Non seulement les univers de travail diffèrent quantitativement et qualitativement, mais les objectifs également. Le tout pour une même finalité à savoir, montrer que les mathématiques sont parmi les « disciplines-obstacles » à franchir pour réussir à l’école.

Pour les adultes que nous avons questionnés, les réponses[13] comme celle-ci étaient légion :

Les mathématiques, avec ces techniques de raisonnement, ces expressions, ces symboles et ces formules bizarres qui n’ont rien à voir avec le concret. Je ne sais vraiment pas à quoi elles servent dans la vie, sinon à faire perdre du temps aux gens. Par ailleurs, ceux qui réussissent dans cette matière deviennent presque toujours enseignants et finissent leurs jours dans la misère et la pauvreté. En tout cas, il faut être doué pour voir clair en cette matière-là!

De ces propos, on peut dégager deux idées phares. D’une part, certain·e·s trouvent que les mathématiques sont quelque chose d’étrange et en déphasage avec la vie réelle. Elles utilisent une langue abstraite et d’un abord abscons, et le ou la mathématicien·ne lui ou elle-même ne semble pas payer de mine. D’autre part, on reconnaît une qualité positive essentielle au ou à la mathématicien·ne : il ou elle est un·e être doué·e. C’est cette situation que nous appelons le paradoxe du ou de la mathématicien·ne qui rappellerait l’image de « l’Albatros » de Baudelaire par exemple.

En réalité, ce n’est pas entièrement la faute de ces personnes qui perçoivent les choses de cette manière, car en Afrique comme ailleurs, cette discipline a souvent été dégradée et son enseignement faussé par certains individus non professionnels; ces personnes se revendiquant des courants épistémologiques mal compris, notamment les logiciens, les formalistes, les axiomatiques, les déterministes, etc., au point que les apprenant·e·s gardent le souvenir d’une discipline qui les rebute. D’ailleurs, dans le discours des jeunes scolarisé·e·s ou post-scolarisé·e·s, les mathématiques restent toujours la bête noire dans les programmes d’enseignement (Inanan Kouéiwon, 2018). Cette perception des mathématiques, qui n’a contribué qu’à présenter une image de complexité absolue et à entretenir des idées préconçues défavorables à cette discipline, semble n’avoir pas beaucoup changé dans les esprits. Les raisons de ce discrédit sont multiples et l’appétence pour les mathématiques reste d’autant moins partagée qu’il y a quelques décennies. Cette situation n’est pas une exclusivité africaine. En effet, d’après Le Cam et al. (2016), deux études menées par Trends in International Mathematics and Science Study (TIMSS Advanced) et portant sur les niveaux de motivation des élèves de terminale S (de 10 pays des continents américain, asiatique et européen) en mathématiques ont permis de faire des comparaisons entre l’entame et la fin de la période de 1995 à 2015. Le pourcentage d’élèves qui déclarent s’ennuyer lors des cours de mathématiques est passé de 17,9 % en 1995 à 34,4 % en 2015 dans ces pays. La conséquence immédiate est qu’on observe que la variation du niveau de motivation affecte de façon significative la psychologie et le profil de formation de ces élèves, créant ainsi une entrave émotionnelle sérieuse qui vient s’ajouter aux préjugés défavorables, déjà nombreux.

En mathématiques, les émotions sont une autre source fréquente de difficultés. Cette discipline effraie beaucoup de gens, au point qu’on parle « d’anxiété mathématique » (Ashcraft, 2002). On sait que cela peut bouleverser les stratégies cognitives et la mémoire de travail (Ashcraft & Kirk, 2001). L’anxiété mathématique est un problème important pour l’enseignement des mathématiques, et il serait bon que les scientifiques cherchent à identifier des méthodes permettant d’y remédier (OCDE, 2007 : 111).

Certain·e·s jeunes scolarisé·e·s trouvent que les mathématiques sont une discipline hermétique, difficile à cerner et loin de la réalité. Le premier contact avec les mathématiques est parfois très déconcertant pour nombre de jeunes. Ces derniers sont surpris par les premiers cours de mathématiques auxquels ils assistent, car ils s’étonnent qu’une démonstration soit encore nécessaire pour établir une proposition mathématique qui d’emblée semble évidente. C’est ainsi qu’ils éprouvent des difficultés à comprendre et développent une désaffection à l’égard de cette discipline. On débouche alors à la conclusion rapide qu’elle n’a aucune importance dans la vie courante de l’humain. Par ailleurs, d’autres, qui disent avoir abandonné l’école à cause des échecs cumulés en mathématiques, sont aujourd’hui de riches commerçant·e·s ou agriculteur·rice·s. Ces personnes dans leur épanouissement au quotidien n’envient ni l’enseignant·e d’université, ni même le/la haut fonctionnaire de l’État.

La dynamique de ces manquements, dans le contexte africain, laisse parfois entrevoir trois explications possibles :

  • soit les mathématiques, pourtant nées en Afrique il y a des siècles (Fokam Kammogne, 2000; Huylebrouck, 2005; Adjamagbo, 2009), sont devenues très hermétiques pour les Africaine·s et on ne peut rien faire contre cela;
  • soit ce sont les itinéraires techniques de la discipline, c’est-à-dire ses protocoles expérimentaux et ses méthodes d’enseignement et d’apprentissage qui, au fil du temps, sont marqués par des maladresses ou sont dévoyés à la base;
  • soit elles sont simplement devenues une sorte de « pilule éducative » amère, rejetée par les esprits des nouvelles générations : on est incommodé par l’enseignement des mathématiques, mais on est contraint de le suivre parce qu’il est dans les programmes.

L’hypothèse d’un hermétisme qui rendrait incompréhensibles les mathématiques aujourd’hui par les jeunes Africain·e·s ne peut être qu’une réponse partielle au problème du désintérêt vis-à-vis de cette discipline. Nous pensons qu’il n’y a pas de raisons valables qui puissent justifier d’une quelconque incapacité intellectuelle des jeunes Africain·e·s à s’approprier les mathématiques qui sont considérées comme faisant partie du patrimoine du continent. Loin de nous l’idée de laisser entendre que les Africain·e·s seraient des êtres sans faiblesse. Il s’agit juste pour nous de défendre l’idée humaniste selon laquelle tous les êtres humains quelle que soit leur région sont dotés d’une intelligence potentielle qu’ils peuvent développer en fonction de leurs besoins. On ne saurait en fin de compte justifier l’échec par le caractère hermétique d’un discours scientifique dont le fonctionnement lui-même repose sur un formalisme qui ne demande qu’à être explicité.

Pour ce qui est de l’inconfort d’un certain nombre d’apprenant·e·s, il s’agit sans doute plus d’une conséquence que d’une véritable cause. Le sentiment d’ennui lors des cours de mathématiques est-il toujours lié à l’aspect hautement abstrait de la discipline? Quelle relation ce ressenti a-t-il avec le guide qui est l’enseignant·e·en face de l’apprenant·e? En répondant à ces questions, on se rend compte du rôle important de l’enseignant·e en tant que facilitateur et facilitatrice dans le processus d’apprentissage, car il lui revient de rendre simple ce qui semble complexe, concret ce qui semble abstrait. Quelles sont les notions, quels sont les concepts et outils mathématiques les plus pertinents pour favoriser chez les apprenant·e·s un meilleur apprentissage, une meilleure compréhension et une transformation du réel?

En fin de compte, l’hypothèse qui semble expliquer le mieux la situation est celle des itinéraires techniques. Le choix des stratégies, des méthodes, des démarches procédurales et de leur application semble fondamental; ils sont d’autant plus fondamentaux pour une discipline dont le haut niveau d’abstraction est reconnu de tous. Mais au-delà de ces explications sur cette représentation négative des mathématiques, il faut relever qu’à l’origine se trouvait un certain nombre de malentendus d’ordre épistémologique.

L’absence ou le peu de place accordée à l’histoire et à l’épistémologie des mathématiques. Pour Langevin, le recours à l’histoire permet d’atténuer cette impression d’une discipline figée et doctrinaire.

Ce que nous nous proposerons ici sera de mettre en évidence tout ce que l’enseignement scientifique perd à être uniquement dogmatique, à négliger le point de vue historique. En premier lieu il perd de l’intérêt. L’enseignement dogmatique est froid, statique, et aboutit à cette impression absolument fausse que la Science est une chose morte et définitive. […] Or pour contribuer à la culture générale et tirer de l’enseignement des sciences tout ce qu’il peut donner pour la formation de l’esprit, rien ne saurait remplacer l’histoire des efforts passés, rendue vivante par le contact avec la vie des grands savants et la lente évolution des idées. (Langevin, cité par Moyon, 2012 : 641)

En effet, à l’enthousiasme des bâtisseur·se·s des théories mathématiques d’autrefois, ont succédé une certaine répulsion évidente qui a tout l’air d’une démission manifeste[14] des jeunes générations face à tout ce qui représente les mathématiques. De nombreux jeunes, peu ou pas du tout préparé·e·s au raisonnement mathématique, arrivent à déconsidérer cette discipline. Des pratiques autrefois répandues laissaient entrevoir un tel abîme entre les mathématiques et le monde réel : « les mathématiques peuvent être définies comme le domaine dans lequel on ne sait jamais de quoi l’on parle, ni si ce que l’on dit est vrai. » (Russel, cité par Giudice, 2013 : 194). En fait, le formalisme très poussé des mathématiques a conduit à une coupure avec l’idée d’une vérité en tant qu’adéquation avec le monde. Les mathématicien·ne·s tiennent pour vraies des propositions ayant une validité formelle du point de vue d’un raisonnement logique. Si tout le monde s’accorde sur le degré de la rigueur du raisonnement mathématique, ces philosophes interrogent l’importance de la corrélation entre le réel et le formalisme. Mais cette conception semble réductrice dans la mesure où les mathématiques sont simplement ramenées à la logique qu’on peut considérer à juste titre comme une partie des disciplines mathématiques (Knecht, 1981).

Selon Russell (2007), comme la logique formelle, les mathématiques ne nous apportent aucune connaissance nouvelle; elles sont fondamentalement conventionnelles et une démonstration mathématique est essentiellement tautologique et fondée sur des principes admis comme indémontrables (axiomes). À travers ces observations, il pose les problématiques de démonstrations mathématiques inutilement longues qui font parfois perdre l’harmonie dans le raisonnement; de reproduction des raisonnements avec des modèles à imiter; le tout, avec pour corollaire l’encombrement systématique des bibliothèques.  Des exemples illustratifs simples sont les suivants : 7 + 2 = 5 + 4 = 9 ou 3 x 4 = 2 x 6 = 12.

Pour arriver à une abstraction généralisable, on recourt à des notations du type :

    \[ a\times a=a^2;(\frac{a}{b}=\frac{c}{d})\text{ équivaut à }(a\times d = b\times c);(-1): 1=1:(-1)=-1; \]

    \[ \text{ pour tout réel }c\text{ non nul, }(\frac{a\times c}{b\times c}=\frac{a}{b}). \]

Lorsqu’on observe ces différentes combinaisons d’opérations, on se rend à l’évidence que le raisonnement mathématique a consisté simplement, dans ce cas précis, à formuler et à développer quelque chose d’établi que l’on peut désigner comme étant des vérités établies, puis des vérités nouvelles.

Poincaré (1920) affirme, quant à lui, que « les mathématiques sont l’art de donner le même nom à des choses différentes ».  Il précise cependant, qu’« [il] convient que ces choses, différentes par la matière, soient semblables par la forme, qu’elles puissent pour ainsi dire se couler dans le même moule. » Pour lui, « C’est à l’économie de pensée que l’on doit viser, ce n’est donc pas assez de donner des modèles à imiter ».

Autrement dit, même sans avoir désigné des objets concrets du monde (arbres, individus, instruments…), nous avons conscience que ces symboles, leurs combinaisons et les résultats de ces combinaisons sont exacts. C’est en cela que ces formes constituent des vérités. Le côté abstrait des mathématiques, ses méthodes souvent en rupture avec celles des autres sciences dites expérimentales et objets souvent désincarnés ont amené de nombreux philosophes des sciences à porter un jugement de valeur et d’utilité sur ce champ disciplinaire (Aristote, 2005 [s.d.]; Russell, 2007). La prépondérance de l’abstraction dans les mathématiques est à mettre en relation avec l’émergence, à partir du XVIIe siècle et tout au long du XXe siècle, d’un courant de pensée : le formalisme (Balibar & Macherey, 2019).

Pour les formalistes, la méthode axiomatique désigne « un mode d’exposition des sciences exactes fondées sur des propositions admises sans démonstration et nettement formulées et des raisonnements rigoureux » (Glaeser, 2019, en ligne). En d’autres termes, il s’agit de la construction d’une théorie mathématique totalement formalisée, élaborée à partir d’un ensemble cohérent de prémisses indépendantes. Ainsi, le savoir mathématique est construit conformément aux règles de la logique. Les normes qui gouvernent les mathématiques sont abstraites, cohérentes et rigoureuses. Dès lors, les rapports entre cette discipline et le réel restent questionnables.

Dans la conception axiomatique, la mathématique apparait en somme comme un réservoir de formes abstraites, les structures mathématiques; et il se trouve (sans qu’on ne sache bien pourquoi) que certains aspects de la réalité expérimentale viennent se mouler en certaines de ces formes, comme par une sorte de préadaptation. (Bourbaki, cité par Tomas, 2003 : 213)

L’axiomatique, parce qu’elle repose sur la cohérence interne des propositions mathématiques, se trouve désincarnée et exclut le recours à l’expérience. Ce qui, de ce fait, rend difficile la perception par l’humain de son utilité pratique dans la gestion de ses activités au quotidien.

Certain·e·s enseignant·e·s de philosophie et de mathématiques affirment péremptoirement, et à juste titre, que dans les pensées de ces philosophes d’autrefois, il ne s’agissait pas en première intention de bouter les mathématiques loin des préoccupations de l’homme, mais simplement d’un débat d’idées, un débat purement intellectuel à l’effet de nourrir l’esprit de sagesse et de critique positive. Dans le même ordre d’idées, Platon en son temps se moquait des « calculateurs professionnels » qui, pour lui, utilisaient la « science des nombres » non pas pour connaitre, mais pour « trafiquer ». Il dit son admiration pour les mathématiques qui permettent de

donner à l’âme un vigoureux élan vers la région supérieure [l’abstraction], et de l’obliger à raisonner sur les nombres en eux-mêmes, sans jamais souffrir qu’on introduise dans ses raisonnements des nombres visibles et palpables. (Platon, 1822-1840, v 525)

Répondant à une invitation de la régionale d’Alsace de l’APMEP, Perrin, dans sa présentation de circonstance avec pour titre : pourquoi faut-il enseigner les mathématiques aujourd’hui? explique cette perception ancienne d’une mathématique abstraite par les pratiques à la mode à cette époque.

Vous savez que les Grecs anciens (Platon, Euclide, etc.) étudiaient (et enseignaient) les mathématiques (Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre, disait Platon) et à cette époque bénie elles étaient étudiées pour des raisons philosophiques, pour la beauté qu’elles recelaient, l’harmonie qui les sous-tendait, la connaissance qu’elles permettaient d’approcher. En revanche, même si elles avaient des applications, ce n’est pas dans cet objectif qu’elles étaient étudiées (Platon se moque des “calculateurs”). (Perrin, 2004 : 11)

Lorsqu’elles sont enseignées à un public d’adolescent·e·s, sans la délicatesse nécessaire, ces postures philosophiques, du reste négativistes pour le profane, sont inéluctablement vouées à démotiver davantage ces apprenant·e·s; leur faisant croire que les mathématiques sont une matière de trop dans un ensemble de disciplines déjà trop contraignantes pour eux[15].

Les différentes interrogations issues de notre problématique, prises dans leur ensemble, débouchent, d’une part, sur le problème de l’avenir des mathématiques en Afrique et secondairement celui de la portée de l’école. D’autre part, nous interrogeons la véritable importance de cette discipline dans les activités quotidiennes de l’Africain·e qui se trouve face aux défis du savoir et de sa survie. Cette préoccupation est réelle, pertinente, mais surtout objectivement discernable aujourd’hui par toute personne avertie qui se donne la peine de regarder honnêtement les choses en face. C’est-à-dire reconnaître l’importance des mathématiques dans une société qui vise une émergence effective et durable. Nous indiquerons comment certaines sociétés, notamment les sociétés européenne, américaine et asiatique l’ont comprise et s’y attèlent au quotidien (Le Cam & Salles, 2016). Nous remarquons par exemple que de nombreux ouvrages de vulgarisation des mathématiques sont produits et ciblent prioritairement certaines catégories de lecteur·e·s. C’est le cas notamment de Dieudonné (1987) qui en commettant Pour l’honneur de l’esprit humain : les mathématiques aujourd’hui visent un public de non spécialistes.

Il précise dans son introduction :

Cet ouvrage est exclusivement destiné aux lecteurs intéressés à divers titres par la science, mais qui ne sont pas mathématiciens professionnels. L’expérience montre que presque invariablement, alors qu’ils lisent ou entendent avec plaisir des exposés sur les sciences de la nature, et ont l’impression d’en retirer des informations qui enrichissent leur vue du monde, un article sur les mathématiques actuelles leur semble écrit dans un jargon incompréhensible et traiter de notions trop abstraites pour avoir le moindre intérêt. L’objet de ce livre est de tenter d’expliquer les raisons de cette incompréhension et peut-être de la dissiper. (Dieudonné, 1987 : XX)

Dans sa thèse de doctorat, Godot (2005) propose des « situations recherche et jeux mathématiques pour la formation et la vulgarisation » de cette discipline auprès des élèves et du grand public. Dans son approche, elle met en avant l’aspect expérimental des mathématiques dans la sensibilisation à la recherche.

Greenwald & Thomley (2012), quant à elles, agissent en direction des élèves, des étudiant·e·s et des enseignant·e·s en mettant à leur disposition une encyclopédie des mathématiques et leurs interactions avec les activités sociales.

L’ Encyclopédie des mathématiques et de la société est conçue pour fournir aux élèves du secondaire et du premier cycle universitaire une source pratique d’informations sur les sciences fondamentales et les mathématiques qui sous-tendent notre vie quotidienne, expliquant aux élèves comment et pourquoi les mathématiques fonctionnent et permettant aux lecteurs de mieux comprendre comment des disciplines telles que l’algèbre, la géométrie, le calcul et d’autres affectent ce que nous faisons tous les jours. Cet ouvrage de référence académique et multi-auteurs sert de ressource générale et non technique aux étudiants et aux enseignants pour comprendre l’importance des mathématiques, apprécier l’influence des mathématiques sur les sociétés du monde entier, apprendre l’histoire des mathématiques appliquées et engager une discussion éducative suscitée par les articles sociaux et les articles sur l’actualité spécifiques présentés dans l’ouvrage.[16](Greenwald & Thomley, 2012 : vi)

Au-delà de nos expériences personnelles en situation de classe dans les structures scolaires qui ont nourri notre volonté d’écrire sur cette problématique, notre participation à des séminaires[17] a contribué au mûrissement de notre projet. L’accumulation d’informations depuis nos premières années d’étude en sciences mathématiques (1988-1993), puis pendant nos premières années d’enseignement (1994-1999) ainsi que les agissements souvent peu collaboratifs de certain·e·s collègues, de certain·e·s parent·e·s d’élève, observés çà et là, nous ont conduit à commencer la rédaction de cet ouvrage en juillet 1999. Diverses circonstances au rang desquelles nos interventions dans l’enseignement supérieur comme enseignant vacataire et notre bref séjour professionnel à l’Inspection de pédagogie en charge de l’enseignement des sciences mathématiques (2009-2012) nous ont permis de rencontrer de nombreux·e·s enseignant·e·s et élèves en situation de classe ou de recherche. Quant à notre nomination au service régional des examens, des concours et de la certification en 2013, elle nous a permis d’observer les performances sans cesse catastrophiques de nombreux·e·s candidat·e·s en mathématiques à certains examens et concours. Par ailleurs, des émissions télévisées sur des chaines comme Africa 24, TV5 Monde, Vox Africa, qui abordent les questions d’administration et de développement dans le secteur de l’éducation des pays d’Afrique subsaharienne nous ont inspiré de manière significative, de même qu’elles nous ont décidé à concrétiser notre projet. Il est évident que nous aurions pu peaufiner encore et toujours notre argumentaire, décrire davantage les faits en ajoutant des idées nouvelles si nous l’avions publié deux ou trois années plus tard. En effet, nous aurions fait face à la même situation ou presque parce que le sujet fédérateur qui nous préoccupe ici est très actuel, complexe et délicat à la fois. Il mérite par conséquent d’être examiné avec dextérité.

Un autre élément de motivation est bien évidemment le développement et la disponibilité aujourd’hui d’outils de plus en plus modernes grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. C’est ainsi que plusieurs cours sur une même théorie, sur des sujets isomorphes d’une discipline, provenant d’enseignant·e·s différent·e·s et appartenant à des établissements tout aussi différents, sont désormais disponibles en ligne et accessibles à tous; gratuitement pour certain·e·s, soumis à une obligation d’abonnement internet pour d’autres. De nombreuses sociétés de téléphonie mobile offrent d’ailleurs divers services dans ce sens sur le marché. Un·e apprenant·e qui rencontre des difficultés sur un sujet peut désormais à travers un simple téléphone portable accéder à un document (livre, article…), suivre un cours par vidéo, échanger sur des questions de cours avec des camarades ou des enseignant·e·s. En effet, toute recherche scientifique a un coût. Mais en mathématiques, fort heureusement, ce coût est un peu moindre et l’activité ouvre à d’opportunités diverses et variées. Cet avis est également partagé par des auteurs et des autrices comme Flato (1990), Makrides (2012), ainsi que Greenwald & Thomley (2012).

Étant nous-mêmes le produit d’un système éducatif africain, il serait inapproprié de ne pas compter, au rang des motifs incitatifs, le fait qu’en Afrique particulièrement, les domaines prometteurs de la recherche en mathématiques et dans les disciplines apparentées sont pluriels. Les sujets de recherche sont autant riches et diversifiés que d’actualité. Cependant, pour des raisons multiples relatives aux modèles sociétaux propres à l’Afrique, les besoins en termes d’acteurs et d’actrices restent toujours très grands aussi bien dans l’enseignement supérieur (IMU, 2009) que dans l’enseignement secondaire[18].

Pour atténuer l’ampleur de ce problème d’insuffisance du personnel enseignant au secondaire, plusieurs pays d’Afrique membres de la CONFEMEN ont établi de nouvelles politiques de recrutement du personnel enseignant, soit l’embauche de non-fonctionnaires, tels que des volontaires et des vacataires. Par exemple, au Tchad, les enseignants communautaires sans qualification représentent 50 % du personnel enseignant. Quant au Bénin, 83,3 % des enseignants du secondaire sont non permanents. (CONFEMEN, 2008 : 34)

Les universitaires africain·e·s de premier rang parmi lesquels les enseignant·e·s, les ingénieur·e·s et autres chercheur·e·s du terroir comme de la diaspora doivent avoir en conscience ce défi d’une veille mathématique sur le continent.  Ils et elles doivent amener la jeunesse africaine à un niveau de travail qui cadre avec les exigences de cette discipline et les encourager à rattraper leurs semblables qui sont suffisamment avancés en la matière dans d’autres parties du monde (Traoré & Barry, 2007; Sokhna & Sarr, 2009).

C’est pourquoi les pouvoirs publics et les gestionnaires des systèmes éducatifs des pays africains doivent œuvrer, avec le concours des membres de la communauté éducative (les parent·e·s, les enseignant·e· s, les responsables administratifs et les autres partenaires techniques et financiers du monde éducatif, notamment les acteurs opérant dans le secteur privé et les ONG), pour ramener les jeunes à la raison afin de leur expliquer de manière efficiente la véritable portée de cette science; ceci non seulement pour la réussite scolaire, mais aussi et surtout pour une réussite sociale à travers une insertion définitive dans le monde socioprofessionnel. Il va sans dire que cette opération de conscientisation ne devra en aucun cas négliger le rôle des autres disciplines enseignées. Il est vrai qu’on rencontre une quantité importante de jeunes qui sont admiratifs devant leurs camarades qui ont réussi dans les spécialités ayant une forte proportion de mathématiques. Mais ces enfants semblent toujours « impuissant·e·s » devant les difficultés à apprendre du fait, pour une partie, d’un encadrement insatisfaisant. Nous ne pouvons pas immédiatement dire que tous et toutes ignorent que les mathématiques sont utiles et permettent de faire de « grandes choses ».

Toutefois, nous pensons que l’ignorance ou le refus à dessein de reconnaitre les valeurs et les pouvoirs de cette discipline, à la fois sur les plans vertical et transversal[19], par un pan important des élites d’une société humaine participe des phénomènes d’échec et de décrochage enregistrés dans les filières mathématiques et apparentées, au sein de cette société. Dans le même ordre d’idées, les conséquences engendrées par l’ignorance ou la déliquescence, par une volonté humaine, des connaissances d’une manière générale, et observables sur le terrain en termes d’incivisme généralisé des jeunes, de disparition des modèles sociétaux ou de la paupérisation des valeurs sociétales, sont suffisamment importantes et nécessitent d’être examinées.


  1. Selon l’UNESCO, ce ratio aura du mal à se réduire puisque le nombre d’enseignant·e·s formé·e·s n’arrive toujours pas à suivre le rythme d’accroissement démographique.
  2. Un rapport de l’UNESCO (2006) sur les enseignant·e·s et la qualité de l’éducation en Afrique subsaharienne révèle qu’environ 50 % des enseignant·e·s du primaire sont des contractuel·le·s dont le salaire est de moitié moindre? ou inférieur? à celui des enseignant·e·s fonctionnaires. Ces contractuel·le·s sont bien souvent le recours à la pénurie d’enseignant·e·s. C’est le cas, par exemple, pour l’enseignement des mathématiques ou des langues vivantes.
  3. "The 2009 Mathematics in Africa report describes low percentages of the population attending schools, high student-to-teacher ratios, heavy use of recycled European mathematics textbooks, and few prepared teachers in most of central Africa outside of Cameroon. All of these facts make it difficult to customize mathematics education for African students. Cameroon has a more developed education system, but at the college level it is struggling with filling the mathematics faculty positions that have been approved, and most mathematics teaching there is done in large classes by low-level staff."
  4. Écriture phonétique du toponyme « Cameroun ». Dans cet ouvrage, j’adopte cette écriture pour faire l’unanimité dans la désignation linguistique de ce pays d’Afrique centrale, jadis protectorat allemand, puis placé en 1919 sous mandat de la Société des Nations qui à son tour conféra la tutelle de la partie orientale à la France, et la partie occidentale à la Grande-Bretagne. Depuis lors, il porte les noms de Cameroun (pour les francophones) et Cameroon (pour les anglophones). Cependant, j’emploierai les graphies françaises pour les adjectifs et les gentilés "Camerounais" et "Camerounaises" par respect des règles orthographiques du français.
  5. C’est-à-dire dans les structures universitaires et grandes écoles africaines.
  6. Sciences Mathématiques : il s’agit des séries « S », « SM » ou « C » dans lesquelles les sciences mathématiques et les sciences physiques sont des matières dites principales ou du 1er groupe.
  7. Il s’agit d’un rapport bilan des résultats d’examens certificatifs produit par les inspecteurs de mathématiques aux niveaux régional et national à la fin d’une session. On y trouve une analyse critique et chiffrée des performances des candidat·e·s aux différents examens officiels camerounais. Les performances des apprenant·e·s y sont présentées par tranches de notes et un examen de la qualité des sujets (structure, taux de couverture des programmes, notions ayant posé le plus de problèmes aux candidats, etc.) est fait. Mais la production de ce document hautement important pour le suivi de l’enseignement sur le long et moyen terme, a été suspendue depuis 2018.
  8. Il s’agit des sous-centres du Lycée Bilingue de Ngaoundéré (1 309 copies), celui du Lycée de Sabongari (1 382 copies) et celui du Lycée de Bamyanga (1 297 copies).
  9. Pour répondre à cette question, il faudrait mener une étude de terrain plus détaillée.
  10. Il s’agit généralement d’une épreuve en trois parties dont une partie algébrique, une partie géométrique et un problème. Les parties comprenant des exercices indépendants. L’exercice appelé « problème » contient parfois une suite de questions sur un sujet ou encore des parties relativement dépendantes. Le tout devant couvrir au moins 80 % du programme officiel de la classe de troisième. Et compte tenu de la densité de ce programme, l’épreuve remplit généralement les deux pages d’un papier de format A4.
  11. Encore appelées filières STT.
  12. Cela peut donner l’impression qu’il y a des gens qui en veulent aux mathématiques. Que non! Les mathématiques sont une science désincarnée. Ce sont des hommes et des femmes qui pratiquent cette discipline qui font qu’elle existe. Les mathématiques comme toutes les activités scientifiques n’ont d’existence qu’à travers la pratique des hommes et des femmes.
  13. Propos recueillis et condensés par l'auteur.
  14. Dans l’enseignement secondaire comme au supérieur, le nombre de jeunes, qui redoutent les mathématiques en général et singulièrement sa branche fondamentale, reste important. Une infime partie d’entre eux et elles se lancent dans la filière des sciences appliquées.
  15. Aussi faut-il épargner les enfants de seconde et première de ce type de pensées et les étudier uniquement à partir des classes de terminales. Nous y reviendrons plus loin.
  16. "The Encyclopedia of Mathematics and Society is designed to provide students at the high school and undergraduate levels with a convenient source of information on the fundamental science and the mathematics behind our daily lives, explaining to students how and why mathematics works, and allowing readers to better understand how disciplines such as algebra, geometry, calculus, and others affect what we do every day. This academic, multiauthor reference work serves as a general and nontechnical resource for students and teachers to understand the importance of mathematics; to appreciate the influence of mathematics on societies around the world; to learn the history of applied mathematics; and to initiate educational discussion brought forth by the specific social and topical articles presented in the work."
  17. Un atelier dénommé « MathComp4ALL » a été organisé le 18 mars 2015 sur le thème « Les interactions entre divers domaines de recherche avec les Mathématiques et l’Informatique », par le club des étudiant·e·s de Mathématiques et d’Informatique de la Faculté des Sciences à l’Université de Ngaoundéré en collaboration avec la Society for Industrial and Applied Mathematics - SIAM Student Chapter. Voir http://www.siam.org/students/chapters/current/UNIVNG.php.
  18. Un état des ratios du nombre de docteurs Ph. D. par zone en Afrique pour l’année 2007 est présenté en annexe.
  19. La connaissance des mathématiques permet d’établir une relation verticale dans la mesure où la connaissance d’une théorie mathématique donne accès à de nouvelles autres théories mathématiques. Par ailleurs, cette connaissance permet d’établir une relation transversale à partir du moment où elle s’ouvre à d’autres disciplines.