Brève chronologie et références

Frédéric Caille

Brève chronologie

  • 1930 : naissance à Bangalore, en Inde.
  • 1955 : inscription en thèse à l’Imperial College de Londres.
  • 1966 : professeur-assistant au département de chimie inorganique et physique de l’Institut Indien des Sciences.
  • 1969 : parution de Modern Electrochemistery, manuel de référence et best-seller international de 1400 pages en deux volumes commencé en 1964 et co-écrit avec le directeur du laboratoire de Philadelphie J.O’M. Bockris.
  • 1974 : abandon de l’électrochimie et création du groupe de recherche ASTRA (Application for Science and Technology to Rural Areas) au sein de l’Institut Indien des Sciences.
  • 1975-76 : séjour à Nairobi au siège du PNUE (Programme des Nations Unies Pour l’Environnement). Il y travaille le cadre conceptuel des « technologies écologiquement rationnelles et appropriées» sur la base duquel sera rédigée la brochure Technology, development and environment: a reappraisal, qu’il qualifie lui-même de « séminale », mais qui restera non traduite et peu diffusée : (UNEP, 1979, 60 pages, https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/28972). On la trouvera pour la première fois traduite en français dans le présent ouvrage.
  • 1977-1981 : implantation d’une extension du centre de recherche ASTRA dans le village d’Ungra, à 120 kilomètres de Bangalore, pour réaliser l’un des tous premiers modèles de consommation énergétique dans un village rural d’un pays des Suds. Ce travail en immersion avec les habitants sera à la base de la conception et de la construction des premiers « centres énergétiques ruraux ». A. K. N. Reddy y séjourne deux jours par semaine durant de nombreux mois avec son épouse Vimala et considérera y avoir passé certains des plus heureux moments de leur existence.
  • 1979-1996 : implantation du premier « centre énergétique rural à méthanisation (biogaz) » dans le village de Pura, à 2 kilomètres d’Ungra. Après un premier échec de fourniture de gaz pour cuisiner, le projet est relancé à la demande des habitants sur une plus grande échelle et conduit à la génération d’électricité pour le pompage de l’eau puis l’éclairage du village. A. K. N. Reddy considérera son interaction avec les habitants du village de Pura comme l’une des expériences les plus enrichissantes de sa vie professionnelle.
  • 1984-1985 : séjour au Centre de Recherche sur l’Énergie et l’Environnement de l’Université de Princeton.
  • 1988 : parution de l’ouvrage co-écrit avec Jose Goldemberg (professeur de physique à l’Université de Sao Paulo au Brésil), Thomas B. Johansson (professeur à l’Université de Lund en Suède) et Robert H. Williams (chercheur au Centre de Recherche sur l’Énergie et l’Environnement de l’Université de Princeton aux États-Unis), « la bande des quatre » : Energy For a Sustainable World, Wilhey Eastern Limited, 517 pages. L’ouvrage servira au fameux « Rapport Brundtland » de 1989 de la Commission des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement, Notre avenir à tous, rapport qui définira la notion de « développement soutenable/durable ». Reddy dira l’importance durant vingt ans de la collaboration équilibrée entre ces quatre scientifiques de continents et d’origines culturelles très diversifiés, chacun des auteurs ayant commencé sa carrière comme physicien avant de se tourner vers l’étude des énergies. Comme indiqué en préface : « L’ouvrage explore une approche normative de la planification énergétique visant à incorporer dès l’origine les grands objectifs sociétaux visant à la réalisation, non pas seulement d’un système énergétique soutenable, mais, ce qui est plus crucial, d’un monde durable. (…) Cet ouvrage suggère que, contrairement à des croyances largement répandues, le futur de l’énergie est beaucoup plus une question de choix que de destin. Des futurs énergétiques compatibles avec la réalisation d’un monde durable sont à portée de main ».
  • 1985-1991 : direction du département d’Études de Gestion de l’Institut Indien des Sciences. A. K. N. Reddy travaille sur la consommation énergétique dans la métropole de Bangalore, la diffusion de l’innovation, et surtout sur le scénario de développement de la fourniture d’électricité pour l’État indien du Karnataka qu’il nommera DEFENDUS (DEvelopment-Focused, END-Use-oriented and Service-directed), que l’on pourrait traduire par SEMEURS (Scénario EMErgence-Utilisation finale et Services). Les coûts et conséquences de quinze technologies d’économie ou de production à la fois décentralisée et conventionnelle d’électricité sont comparés. Il s’agit sans doute de la première proposition de planification d’un « mix énergétique » issu d’un pays des Suds. Le protocole retiendra l’attention internationale, mais sera victime en Inde, d’après Reddy lui-même, des concurrences d’agences et d’expertises au niveau national.
  • 31 juillet 1991 : départ à la retraite d’A. K. N. Reddy à l’âge réglementaire de 60 ans de l’Institut Indien des Sciences.
  • Fin 1991 : création de l’International Energy Initiative (IEI), une ONG de promotion de modes de production et d’utilisation efficaces et durables de l’énergie dans les pays émergents. Jose Goldemberg devait en être président, mais, devenu ministre au Brésil, il laisse la place à A. K. N. Reddy jusqu’en 2000. L’organisation éditera la première revue consacrée aux systèmes énergétiques des pays des Suds, Energy for Sustainable Development, et elle développera des programmes de formations au Brésil, en Inde et en Chine. Une « African Energy Initiative » (AfEI) sera également engagée en avril 1994, suite à une conférence organisée à Harare. La déclaration Énergie pour le développement : objectifs résume les principales orientations qu’avait défendu Reddy depuis une vingtaine d’années :

– Pour donner à l’énergie un visage humain dans toutes les régions d’Afrique en élevant considérablement le niveau de services énergétiques accessibles et appréciés par toutes les couches de la population, en particulier les femmes, les ruraux et les pauvres des villes.

– Pour aller au-delà de l’énergie et en faire un puissant instrument de développement grâce à ses liens avec tous les secteurs de l’économie – l’industrie, l’agriculture, les transports, etc.

– Pour répondre aux besoins énergétiques des personnes humaines et de l’économie avec des mix rationnellement déterminés de sources d’énergie centralisées et décentralisées et de mesures d’économie d’énergie (lesquelles équivalent à une option d’approvisionnement).

– Pour utiliser les sources d’énergies renouvelables du continent, notamment l’énergie hydroélectrique, la biomasse et le solaire, et ainsi s’assurer que la dégradation environnementale locale, régionale et mondiale soit minimisée, sinon évitée, sans sacrifier les objectifs de développement durable.

– Pour renforcer, simultanément, les compétences autochtones et créer des institutions locales, régionales et continentales pour que les problèmes énergétiques africains soient autant que possible diagnostiqués et résolus par les Africains eux-mêmes.

L’initiative échouera par manque de moyens universitaires et institutionnels locaux, et par l’apparition à cette date d’une concurrence au sein des financements internationaux et des engagements des chercheurs africains, entre les programmes consacrés aux énergies, comme ceux proposés par Reddy, et les activités du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’évolution du Climat (GIEC) ou du Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) lancé à Rio en 1992.

  • 1996-1997 : rédaction puis parution de Energy After Rio: Prospects and Challenges, codirigés avec Robert H. Williams et Thomas B. Johansson pour le compte du Programme des Nations Unies Pour le Développement (PNUD).
  • 17 octobre 2000 : réception du Volvo Environment Prize à Göteborg, attribué à la « bande des quatre » pour leurs publications en commun. Le palmarès souligne : « Une idée constructive dans le travail des lauréats est celle de mettre en pratique des technologies au Sud qui n’avaient pas été commercialisées auparavant au Nord. Ce travail montre la voie à des systèmes énergétiques mondiaux qui sont respectueux de l’environnement et sensibles aux besoins humains ».
  • 2001 : après une opération du cœur, A. K. N. Reddy publie ses deux derniers articles qui concernent la réforme du secteur énergétique en Inde.
  • 7 mai 2006 : décès à l’âge de 76 ans, avec au total plus de 290 publications dans les domaines de l’énergie, de la technologie et de l’éthique des sciences. L’essentiel en est accessible (en anglais) sur le site réalisé à l’occasion du colloque organisé pour son 75e anniversaire : http://www.amulya-reddy.org.in/index.htm.

Références

Seuls deux écrits en français à notre connaissance mentionnent avant le présent recueil le travail d’Amulya K. N. Reddy. Le premier est un article (traduit de l’anglais) qui propose une approche limitée à ses recherches sur les biodigesteurs : Dhruv Raina, Hoysala N. Chanakya, « Des microbes à vocation gandhienne dans un digesteur à biogaz. Digestion anaérobie et évolution de la recherche sur la technologie du biogaz », Techniques & Culture 2017/1 (n°67), 154-175. Il est à noter que le propos est étrangement assez distancié, sinon critique, et qu’il propose une approche très technicienne de l’histoire des méthaniseurs, non pas sans contradiction avec la démarche toujours défendue par Reddy lui-même. On y lit notamment ceci : « Dans de nombreuses régions d’Asie du Sud, les deux décennies qui s’étendent des années 1970 aux années 1990 ont été le théâtre d’un nouvel investissement néogandhien dans la science et la technologie, à mesure que de nouveaux mouvements sociaux prenaient de l’essor partout en Inde et que l’optimisme ‘nehruvien’ déclinait. Pendant cet interlude, les mouvements et programmes de technologies alternatives ont assurément tiré leur miel et leur inspiration d’une lecture de Gandhi, que lui-même aurait ou non reconnue. Amulya Kumar Narayana Reddy, éminent électrochimiste devenu analyste des politiques énergétiques, a défini des critères pour aider au choix des technologies; ces critères ont orienté les priorités et les programmes de recherche de la cellule ASTRA ».

Le second écrit en français est celui que nous avons proposé dans une approche plus générale : « Sortir des pensées (et des carburants) fossiles? Éduquer aux énergies et à l’ESS », dans Stoessel-Ritz Josiane, Blanc Maurice (éds.), Comment former à l’économie sociale et solidaire, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2020, 49-62, en ligne sur https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01533281.

La présente introduction générale cite les trois textes autobiographiques d’Amulya K. N. Reddy, dont le premier qui est traduit dans le présent ouvrage. Les textes 1 et 2 sont disponibles sur le site exhaustif (en anglais) consacré à son travail : http://www.amulya-reddy.org.in/index.htm. Le texte 3 reprend et compile les deux autres avec l’ajout d’un choix de questions/réponses issues d’une série de conversations du 10 au 12 septembre 2002, réalisées par Ravi Rajan, professeur d’études environnementales à l’Université de Californie Santa-Cruz et éditeur d’un choix de textes d’Amulya Reddy.

1 – “The Making of a Socially-Concerned Scientist: Personal Reflections of a Maverick”, 16 juil. 1993, 15 pages.

2 – “The Making of an Energy Analyst: Some Personal Reflections”, 13 nov. 2001, 29 pages.

3 – “Amulya Reddy: An Autobiography”, in Ravi Rajan (éd.), Amulya Reddy. Citizen Scientist, Orient Blackswan, 2009, 13-73, téléchargeable et accessible gratuitement en ligne : https://www.academia.edu/37153040/Citizen_Scientist_The_Amulya_Reddy_Reader

En complément, pour voir Amulya K. N. Reddy vers l’âge de 50 ans présenter son travail dans le village de Pura, on conseillera vivement pour les anglophones le documentaire West of Bangalore (44 min.) réalisé en 1981 pour le compte de la BBC par Christopher Sykes et disponible sur sa chaine : https://www.youtube.com/watch?v=wGHT04GLVQA

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