Rwanda

40 Claire D’Assise

Valérie Therrien

Gushaka ni ugushobora, kandi kwihangana bitera kunesha

Vouloir c’est pouvoir et la persévérance engendre la victoire (traduction libre)

La devise de Claire illustre sa volonté d’agir : quand nous voulons quelque chose, il est possible de l’obtenir si on persévère. Cette étudiante de 27 ans amorça son parcours scolaire à Kigali, la capitale du Rwanda, plus précisément dans la commune de Kicukiro. Elle termina son baccalauréat en octobre 2012 et obtint quelques mois plus tard un travail temporaire d’assistante de recherche pour un organisme privé. Dans ses temps libres, elle participa à divers actes de charité organisés par un groupe de jeunes universitaires de Kicukiro dont elle faisait partie. Il s’agissait par exemple de visiter les gens malades dans les hôpitaux, les enfants orphelins vivant seuls ainsi que les enfants handicapés habitant en maison d’hébergement en les assistant dans leurs tâches ménagères. Une des passions de Claire est d’aider les gens dans le besoin. Elle est aussi passionnée par la nature. En effet, elle aime parcourir les régions touristiques de son pays, par exemple le parc national des volcans, dernier sanctuaire des gorilles de montagne, le parc national Akagera, le lac Kivu et bien d’autres, avec les membres de sa famille. La plage et les îles de Kivu font d’ailleurs partie de ses endroits préférés. C’est une femme simple qui aime prier, aider et découvrir le monde qui l’entoure.

Pourquoi venir au Québec?

Claire venait de finir son baccalauréat en sociologie et son objectif était de faire sa maîtrise ailleurs. Elle voulait voir ce qui se passait dans d’autres pays : « J’avais tellement envie de découvrir ». C’est grâce à une amie du Canada venue la visiter en 2012 qu’elle fut convaincue de partir. Après plusieurs longues recherches sur différentes universités potentielles, elle fut attirée par un programme d’études offert par l’Université Laval. Puisqu’elle avait fait son baccalauréat en anglais, l’une des langues officielles du Rwanda, Claire hésita d’abord avant de se lancer dans ce qu’elle qualifie d’« aventure » pour elle, soit de reprendre des études en français. En effet, sept ans auparavant, elle avait fait son secondaire dans la langue de Molière, mais elle avait l’impression d’avoir « oublié le français ». Claire tenta néanmoins sa chance et, à sa grande joie, fut acceptée. Le processus fut très rapide et la jeune femme se retrouva bien vite à partager son engouement avec sa famille, qui fut surprise d’apprendre la nouvelle, mais aussi très heureuse pour elle.

Arrivée au Québec

Claire fit son arrivée à Québec en septembre 2015. La personne qui l’accueillit fut la même amie qui la persuada de venir s’établir à Québec. Elle passa la première nuit chez elle, mais dut dès le lendemain se rendre à l’université. Une arrivée légèrement brusquée, selon l’avis de Claire, qui était arrivée à Québec une semaine après le début des classes en raison d’un retard dans l’obtention de son visa d’étudiante. Claire avait déjà beaucoup lu sur l’Université Laval ainsi que sur le Québec en général, pour bien se préparer… Mais entre la théorie et la réalité, la différence fut immense!

Elle estime avoir été bien accueillie par les Québécois. Elle rencontra aussi des Rwandais installés au Québec depuis près de quinze ans et qui lui offrirent de l’aide et du support. Toutefois, Claire remarque que les nombreuses années passées au Canada firent en sorte que ces Rwandais avaient mis de côté leur vécu là-bas pour faire place au mode de vie québécois : « C’est comme s’ils avaient oublié ce qui se faisait là-bas ».

À son arrivée, le passage de l’anglais au français fut assez complexe. Elle entremêlait les deux langues, le plus difficile pour elle étant de comprendre l’accent québécois. Encore aujourd’hui, il y a des expressions qu’elle n’arrive pas à comprendre. Elle raconte par exemple que, en remplissant les informations au bureau du registraire, elle bloqua devant les mots « adresse courriel », car elle n’avait aucune idée de leur signification!

Trouver un emploi fut un grand défi pour Claire. Étudiante étrangère sans bourse d’études, elle se devait de trouver une source de revenus. D’un autre côté, l’ajustement à la charge de travail requise pour ses études lui donnait du fil à retordre. Claire décida de ne pas baisser les bras : elle se concentrerait sur ses études durant l’année scolaire et travaillerait pendant l’été. Elle regarda les sites de placement et s’enregistra sur toutes les listes possibles. On lui offrit enfin un premier emploi qu’elle n’aurait jamais cru occuper un jour : femme de ménage dans un hôtel. Elle l’accepta afin de pouvoir aider ses parents à payer ses études et à subvenir à ses besoins. Elle travaille aujourd’hui dans une boutique de souvenirs du Vieux-Québec où elle a la chance de pouvoir parler anglais en discutant avec les touristes.

Pour ce qui est du climat, le froid québécois lui demanda un ajustement important. Fait cocasse, lorsqu’elle arriva à Québec durant l’automne, elle vit le soleil à l’extérieur et se demanda pourquoi les gens disaient qu’il faisait froid dehors, le soleil étant pour elle synonyme de chaleur. C’est en se pointant le bout du nez à l’extérieur qu’elle réalisa que la température du Québec était totalement différente du climat de son pays d’origine. Malgré l’instabilité de la température là-bas, souvent un seul parapluie suffisait à braver les intempéries, comparativement aux nombreuses couches vestimentaires requises pour survivre à l’hiver québécois.

Étant catholique, la fréquentation de l’église le dimanche fut pour Claire un moyen de bien s’intégrer à sa communauté et de se sentir chez elle. L’église est, pour elle, un endroit universel qu’on retrouve dans chaque pays : « C’est là que je me retrouve dans mon univers ». Elle explique qu’au Rwanda, tout est fermé le dimanche et la seule activité possible est d’aller à l’église, là où les habitants se réunissent. Une différence majeure avec le Québec, où les églises sont loin d’être pleines.

Un ange, cette Claire!

Comme mentionné, Claire s’impliquait déjà de manière incroyable au Rwanda ; elle fit de même en arrivant au Québec. Aujourd’hui encore, elle passe souvent son temps libre à faire du bénévolat dans des soupes populaires. Au départ, elle cherchait à nouer des liens avec les Québécois, tout en œuvrant pour la bonne cause. C’est là que lui vint l’idée de participer à une soupe populaire. Résidant dans le Vieux-Québec, elle en choisit une à proximité afin de pouvoir s’y rendre facilement la fin de semaine. Fait amusant, dans l’équipe du samedi, Claire est la seule Africaine, les autres bénévoles étant tous des Québécois d’origine. Très souvent, les gens lui demandent : « Toi tu viens d’où? Tu es haïtienne? ». Claire précise que les autres jours de la semaine, quelques Africaines viennent également donner de leur temps à la soupe populaire.

Des recommandations aux immigrants et aux Québécois

Forte de son expérience, voici ce que Claire aimerait transmettre aux potentiels immigrants qui aimeraient venir s’installer au Québec :

Quand nous venons ici, nous avons tendance à être réservés, mais il ne faut pas avoir peur, il faut se lancer et surtout ne pas se réserver. Ne baissez pas les bras et gardez toujours vos valeurs et vos objectifs de vie.

Quant aux Québécois, Claire souhaiterait leur dire de ne pas avoir peur d’aller à la rencontre de la communauté africaine :

Malgré les différents stéréotypes accordés aux immigrants africains, ce sont de bonnes personnes, réservées mais remplies de différentes expériences de vie. Osez les approcher!

Claire d’Assise ne regrette en rien son expérience et elle espère que d’autres auront le courage de la vivre.

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Claire d’Assise
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Claire au bord du lac Kivu

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