Les auteures et auteurs

37 Pauline Marois, politicienne (1949 – )

Audrey-Anne Sauvé Bouchard

En 1985, Madame Pauline Marois fut la première femme au Canada à se lancer dans une course d’investiture d’un parti officiel. En 2007, elle fut la première femme à devenir chef d’un parti politique au Québec. En 2012, elle devint la première femme à diriger le Québec, 72 ans après l’obtention du droit de vote des femmes (en 1940). Pauline Marois constitue une figure politique québécoise qui a aidé la cause féministe et souverainiste. Voici le portrait d’une femme qui suit ses instincts et ses valeurs.

Vie personnelle

Native de la ville de Québec, Pauline Marois, née le 29 mars 1949, fut la première enfant de Marie-Paule Gingras, institutrice, et Grégoire Marois, mécanicien. Pour ces derniers, il était primordial que leurs enfants aient accès à l’instruction. Les parents de Pauline Marois ont fait de nombreux sacrifices pour qu’elle accède à un niveau d’éducation supérieur. Cette valeur fondamentale d’accès à la connaissance la suivra tout au long de sa vie. C’est lors de ses études, à 16 ans, que Pauline Marois rencontra et tomba amoureuse de Claude Blanchet. Ils se marièrent en septembre 1969. Ils ont quatre enfants : Catherine (1979), Félix (1981), François-Christophe (1983) et Jean-Sébastien (1985).

Claude Blanchet occupa de nombreux postes à caractère économique tels que celui de directeur de la Société de développement coopératif (SDC), de président-directeur général du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ), de président du conseil et de président-directeur général de la Société générale de financement du Québec (SGF). Les réalisations de Claude Blanchet sur le plan économique et les réalisations de Pauline Marois sur le plan politique forgent une équipe épanouie. Le couple se définissait auparavant comme antinomique, « lui dans le capitalisme immobilier et elle dans l’engagement social » (Marois, 2008). Pour Pauline, il était impératif que leurs valeurs se rejoignent, se complètent. C’est la Crise d’octobre en 1970 qui provoque « une prise de conscience profonde déterminante pour les orientations politiques » (Marois, 2008) du couple. Ainsi, ils se sont rapprochés et se définissaient, et se définissent encore aujourd’hui, comme québécois et non comme canadiens-français, avec des valeurs fondamentalement sociales-démocrates.

Éducation

Issus d’un milieu modeste, les parents de Pauline lui inculquèrent dès un jeune âge l’importance de « l’apprentissage et de l’acquisition de connaissance » (Marois, 2008). Elle débuta sa formation classique au collège privé Jésus-Marie de Sillery, à Québec. Ensuite, poussée par son désir d’égalité et de justice sociale, elle complèta un baccalauréat en service social à l’Université Laval (1971). Après, Pauline Marois se rendit en Outaouais où elle devint une des premières femmes à diriger un CLSC. En 1973, « grâce à son engagement social et à son enracinement dans la collectivité, elle est élue directrice générale du tout nouveau CLSC de l’Île-de-Hull, Pointe-Gatineau-Touraine » (Marois, 2008). Ensuite, elle fit son entrée à l’École des hautes études commerciales de l’Université de Montréal (1976) pour compléter un MBA.

Vie professionnelle

Un journaliste m’a déjà traitée de femme ambitieuse. Dans sa bouche, il s’agissait d’un défaut, voire d’une insulte.

En 1978, lors de son entrée en politique active, Pauline Marois croisa le chemin de Jacques Parizeau en acceptant d’être son attachée politique. Ce fut le début d’une longue histoire avec le Parti Québécois. Pour Pauline Marois, son passage au cabinet de Lise Payette lui fit prendre conscience de « toute la mesure du pouvoir politique, de sa capacité de changer les choses, de son influence énorme sur la vie des gens, mais aussi de l’abnégation nécessaire pour l’exercer avec un véritable sens du service public » (Marois, 2008).

Liste de postes politiques occupés par Pauline Marois dans les 30 dernières années :

Attachée politique de Jacques Parizeau (1978-1979)

Directrice de cabinet d’État à la condition féminine (1979)

Députée de La Peltrie (1981-1985)

Ministre d’État à la Condition féminine (1981-1983)

Vice-présidente du Conseil du trésor (1982-1985)

Ministre de la Main d’Œuvre et de la Sécurité du revenu (1983-1985)

Députée de Taillon (1989-2006)

Ministre déléguée à l’Administration et à la fonction publique (1989-1994)

Présidente du Conseil du trésor (1994-1995)

Ministre des Finances et ministre du Revenu (1995-1996)

Ministre de l’Éducation (1996-1998)

Ministre de la Famille et de l’Enfance (1997-1998)

Ministre d’État à la Santé et aux Services sociaux, ministre de la Famille et de l’Enfance (1998-2001)

Vice-première ministre (2001-2003)

Ministre d’État à l’Économie et aux Finances (2001-2002)

Ministre des Finances et ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie (2001-2002)

Ministre de l’Industrie et du Commerce (2002)

Ministre des Finances, de l’Économie et de la Recherche (2002-2003)

Chef du Parti Québécois (2007-2014)

Députée de Charlevoix (2007-2014)

Chef du deuxième groupe d’opposition (2007-2008)

Chef d’opposition officielle (2008-2012)

Première ministre du Québec (2012-2014)

Un héritage important

Le premier grand dossier de Pauline Marois lorsqu’elle devint ministre de l’Éducation en 1996 fut la réforme des commissions scolaires confessionnelles. Dans la perspective d’une meilleure intégration des nouveaux arrivants, Lucien Bouchard, chef du Parti Québécois, voulait déconfessionnaliser les commissions scolaires. Celles-ci étaient en place depuis 1867. C’est l’année d’après, en 1997, que Pauline Marois présenta les modifications à la Loi sur l’instruction publique à l’Assemblée nationale. Le projet a été adopté à l’unanimité. De ce fait, cette imposante réforme fut un succès, car selon Pauline Marois, « nous avions pris soin de consulter patiemment tous les groupes concernés, de les écouter et d’aplanir au fur et à mesure où elles se présentaient les principales aspérités » (Marois, 2008). Ainsi, Pauline Marois acquit un respect et une notoriété dans le milieu de l’éducation, mais aussi dans le milieu syndical grâce à son écoute, son respect et sa capacité de négociation.

En 1997, « le gouvernement du Québec a mis sur pied un programme de places à contribution réduite offrant des services de garde éducatifs pour les enfants âgés de moins de 5 ans à coûts minimes pour les parents » (Ministère de la Famille, 2015). Les CPE, instaurés par Pauline Marois, sont une grande fierté pour elle. Les données économiques le prouvent : « En 2008, la disponibilité de services de garde à contribution réduite au Québec a incité près de 70 000 mères de plus à détenir un emploi qu’en l’absence d’un tel programme. Sur cette base [il est possible de calculer] que le revenu intérieur (PIB) du Québec a été majoré de 5 G$ » (Fortin, Godbout et St-Cerny, 2012).

De temps en temps, des femmes m’accostent pour me dire que, si elles sont aujourd’hui à la fois des mères et des professionnelles accomplies, c’est à cause de tout ça. C’est ma paye. (Proulx, 2015).

L’héritage de Pauline Marois est riche et diversifié. Néanmoins, depuis son départ de la vie politique en 2014, Pauline Marois voyage, passe du temps avec sa famille, mais se consacre surtout aux causes qui lui tiennent à cœur comme la politique, la souveraineté et le féminisme.

Pauline Marois : féministe et fière

Pauline Marois se dit féministe « depuis un long moment. Il y a toutes sortes de façons d’être une féministe. Pour moi, l’important, c’est qu’on fasse la bataille pour faire avancer le droit des femmes » (Ici Radio-Canada Première, 2016). Elle voit l’égalité primordiale au féminisme : « L’égalité économique et sociale sera réelle quand le revenu des femmes sera égal à celui des hommes. L’égalité sera atteinte quand autant de femmes que d’hommes occuperont des postes en direction. L’égalité sera concrète quand une jeune femme se sentira aussi en sécurité qu’un jeune homme en marchant seule le soir dans la rue » (Ruel-Manseau, 2016).

Après 30 ans en politique, Pauline s’est fait reprocher d’être « trop élégante », « trop figée », trop ci, trop ça… Elle pense que « les partis politiques sont durs avec les femmes, mais tous les partis, pas seulement le PQ. La politique est un sport extrême, elle est macho, et les partis le sont! Une femme ambitieuse, ce n’est pas beau, ce n’est pas bon. L’ambition, c’est malsain… Mais, christie, ça en prend pour diriger le Québec, ça en prend pour faire un pays! » (Bazzo, 2012). Pour se rendre là où elle s’est rendu et briser tous les plafonds de verre, il est sans conteste que Pauline Marois a bel et bien de l’ambition, qu’elle rêve d’un pays souverain et qu’elle est remplit d’amour pour servir la population.

Femme de distinction

Je ne connais aucun autre parlementaire qui a occupé à la fois les fonctions de ministre des Finances, vice-première ministre, ministre de l’Éducation, ministre de la Santé et vice-présidente du Conseil du Trésor… un jour sait-on jamais, peut-être un homme fera la même chose. (Jean Charest, chef du Parti libéral en 2006)

Prix

Pauline Marois a « reçu le prix MBA en 2001 décerné par l’Association des MBA du Québec, le grade de commandeur de l’Ordre de la Pléiade le 17 mars 2004, le prix Louis-Joseph-Papineau le 28 mars 2011, une Appreciation plaque de l’Asian Citizen’s Center for Environment and Health School of Public Health le 21 décembre 2012 et le grade de Grand Croix de l’Ordre de la Pléiade le 18 mars 2015 » (Assemblée Nationale, 2015).

Témoignages

L’ancien premier ministre québécois, Lucien Bouchard, a déjà fait un éloge de taille à Pauline Marois : « Tu es un modèle de conscience professionnelle, jamais prise en défaut dans la préparation de tes dossiers, impeccablement intègre et d’une loyauté sans faille… C’est ainsi que je t’ai connue et c’est le souvenir que je garde de toi » (Marois, 2008).

Le journaliste Vincent Marissal à La Presse a déclaré : « Pauline Marois est le genre de personne qui écoute vraiment les autres, s’y intéresse. Ce qui n’est pas donné à tout le monde dans le merveilleux monde politique. (…) Je dois à Pauline Marois l’instauration des CPE et la déconfessionnalisation des commissions scolaires, les pièces majeures de son héritage politique » (Marissal, 2014).

La coordonnatrice du Centre des femmes de Charlevoix, Chantal Dufour, souligne le travail de Pauline Marois : « On ne peut pas avoir un plus bel exemple d’une femme qui fonce. Elle, c’est au niveau du Québec, au niveau provincial, mais les femmes peuvent s’identifier à ça et ça peut être au niveau de leur maison, au niveau de leur famille, au niveau de leur travail » (Larouche, 2016).

Le journaliste Michel David a écrit en 1995 : « On dit souvent que les femmes qui veulent réussir en politique doivent se comporter comme des hommes. On donne toujours l’exemple de Margaret Thatcher ou de Lise Bazon. Pauline Marois démontre que ce n’est pas obligatoire . (…) Il ne faut pas s’y tromper. Mme Marois est aussi une politicienne aguerrie, qui a su naviguer habilement dans les eaux agitées du PQ. Je ne sais pas si la paix dans les secteurs public et parapublic va pouvoir résister aux prochaines négociations, mais il faut reconnaître que le climat s’est considérablement amélioré depuis l’arrivée de madame Marois » (Marois, 2008).

On peut sortir une femme de la politique, mais peut-on sortir la politique d’une femme?

 Je suis venue en politique pour changer le monde, et je crois que j’ai réussi à le faire un petit peu!

J’ai vécu directement les politiques en éducation de Pauline Marois, j’ai vécu les « réformes ». À Québec, Pauline Marois s’adressa à nous et dit « c’est ici que les choses changent, c’est ici que le citoyen a un pouvoir et c’est ici que votre avenir prend forme ». J’étais encore trop jeune pour saisir l’importance et l’influence de ce moment dans ma vie.

Références

Assemblée Nationale. (2015). Pauline Marois. Repéré à http://www.assnat.qc.ca/fr/deputes/marois-pauline-79/biographie.html

Bazzo, Marie-France. (2012, 16 avril). Pauline l’increvable. Châtelaine. Repéré à http://fr.chatelaine.com/societe/entrevues/pauline-lincrevable/

Clermont-Dion, Léa et Marie-Hélène Poitras. (2016). Les superbes, une enquête sur le succès et les femmes. Montréal: VLB Éditeur. 253p.

Fortin, Pierre, Luc Godbout et Suzie St-Cerny. (2012). L’impact des services de garde à contribution réduite du Québec sur le taux d’activité féminin, le revenu intérieur et les budgets gouvernementaux. [PDF]. Repéré à http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http%3A%2F%2Fwww.usherbrooke.ca%2Fchaire- fiscalite%2Ffileadmin%2Fsites%2Fchaire-fiscalite%2Fdocuments%2FCahiers-de- recherche%2FEtude_femmes_travail.pdf

Ici Radio-Canada Première. (2016, 7 mars). Entrevue avec Pauline Marois au 15-18. Repéré à http://ici.radio-canada.ca/emissions/le_15_18/2015-2016/chronique.asp?idChronique=400031

Larouche, Andréeanne. (2016, 8 mars). Retour de Pauline Marois dans Charlevoix. TVA Nouvelles. Repéré à http://www.tvanouvelles.ca/2016/04/08/retour-de-pauline-marois-dans-charlevoix

Lebel, Dominique. (2015). Dans l’intimité du pouvoir. Montréal: Boréal. 432p.

Marissal, Vincent. (2014). Nos amis les politiciens. Montréal: Les éditions La Presse. 250p.

Marois, Pauline. (2008). Québécoise! Québec: Fides. 261p.

Marois, Pauline. (2016, 21 septembre). Les enfants au coeur de nos choix. Le Devoir. Repéré à http://www.ledevoir.com/societe/education/480450/les-enfants-au-coeur-de-nos-choix

Ministère de la Famille. (2015) Portrait des services de garde. Repéré à https://www.mfa.gouv.qc.ca/fr/services-de-garde/portrait/Pages/index.aspx

Parti Québécois. (2015). Pauline Marois. Repéré à http://pq.org/depute/pauline-marois/

Proulx, Marie-Hélène. (2015, 19 octobre). Pauline Marois et la peur d’avoir déçue les femmes. Châtelaine. Repéré à http://fr.chatelaine.com/societe/pauline-marois-et-la-peur-davoir-decu-les-femmes/

Ruel-Manseau, Audrey. (2016, 8 mars). Pauline Marois reçoit des honneurs et se dit «totalement féministe». La Presse. Repéré à http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-quebecoise/201603/08/01-4958373-pauline-marois-recoit-des-honneurs-et-se-dit-totalement-feministe.php

Télé-Québec. (2014). Rencontre avec Pauline Marois – Une femme, un destin. [Vidéo]. Repéré à http://zonevideo.telequebec.tv/media/16141/rencontre-avec-pauline-marois-une-femme-un-destin/rencontre-avec-pauline-marois-une-femme-un-destin

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