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18 Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées 2017 : la piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater

Léonie Gagnon

Introduction

La population de la région de Montréal générait en 2003 environ huit millions de déplacements quotidiennement, dont près de deux millions en période de pointe du matin (Plan de Transport, 2007). Selon le ministère des Transports du Québec, pour la même période, près du trois quarts de ces déplacements étaient faits à bord d’un véhicule motorisé (ADEC, 2009). Ces très nombreux déplacements motorisés mènent évidemment à une surcharge des infrastructures routières dans la métropole, mais contribuent aussi à créer des problèmes d’autre nature : la dégradation de la qualité de l’air, de la qualité de vie, de la santé, etc.  Face à ces conditions précaires, et pourtant présentes depuis plusieurs années déjà, Montréal a appelé en 2002 à la tenue du Sommet de Montréal. Cette rencontre avait, entre autres, pour objectif de s’attaquer aux problématiques reliées à la place de l’automobile dans l’espace montréalais.

Au cours du Sommet de Montréal, « un fort consensus s’est dégagé afin de privilégier le transport en commun (…), favorisant également des modes alternatifs de déplacement, tels le vélo » et la marche (Chevalier, 2002). Un des volets du Sommet vise également le développement des services de proximité, notamment par la revitalisation des rues et le développement de moyens de transport autres que l’automobile (Chevalier, 2002). Ce sommet marque ainsi un tournant majeur dans les orientations que prendront les politiques futures de la ville en matière de transport et d’aménagement de l’espace public : des politiques qui mèneront, en 2015, à la mise en place du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées.

La présente étude de cas portera ainsi sur un projet en particulier de l’édition 2017 du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées : la piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater, aux abords du Marché Atwater. Afin de bien comprendre la dynamique qui entoure le dialogue entre les instances publiques et civiles dans ce cas spécifique, il importe de mettre en évidence le contexte de ces interactions.

Contexte : réflexions et projets préalables

À la suite de la tenue du Sommet de Montréal, plusieurs projets orientés par les mêmes principes voient le jour : le Plan d’urbanisme (2004), le Premier plan stratégique de développement durable de la collectivité montréalaise (2005), le Guide d’aménagement pour un environnement urbain sécuritaire (2003), la Charte des milieux de vie montréalais (contenue dans le Plan d’urbanisme, 2004). Un des projets les plus intimement liés au Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées demeure toutefois la Charte du Piéton.

La Charte du Piéton

Le maire de l’époque, monsieur Gérald Tremblay, en vue de la présentation en 2007 du Plan de transport, travaille en 2006 sur la Charte des piétons. Cette initiative aura pour buts directs de placer le piéton au cœur des priorités. Elle visera à promouvoir la marche, à créer des endroits plus sécuritaires pour les piétons, mais aussi à faire des rues des lieux de rencontre et de socialisation.

La charte fera l’objet de consultations publiques préalables à la présentation du Plan de transport. C’est lors d’une de ces consultations que le Forum jeunesse de l’île de Montréal propose l’aménagement de rues piétonnes sur une base permanente, saisonnière ou occasionnelle. Cette proposition retient l’attention des comités décisionnels de la ville, qui proposeront par la suite différents projets de piétonnisation à la population. Cette charte jettera ainsi les bases sur lesquelles le Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées sera développé par la Ville de Montréal.

Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées 2017

Le Programmation d’implantation de rues piétonnes et partagées est le plus récent programme mis sur pied par la Ville de Montréal. Il s’inscrit parfaitement dans la lignée des réflexions apportées par le Sommet de Montréal, la Charte du Piéton et le Plan de Transport. Avec ce nouveau programme, toutefois, la ville offre la prise en charge des projets à un autre acteur du secteur public : les arrondissements. Le programme permet à ces derniers de proposer leurs propres initiatives de piétonnisation qui seront ensuite sélectionnées ou non selon différents critères. Afin que ces initiatives reflètent la volonté des acteurs civils, les arrondissements sont contraints de consulter les citoyens visés au préalable. Le programme propose plusieurs périodes d’évaluation faites par la ville afin de réajuster l’aménagement graduellement sur une période de trois ans.

Grâce à cette formule, les éditions 2015 et 2016 avaient généré, une fois réalisées, un très haut taux de satisfaction. Selon le maire Denis Coderre dans une conférence de presse datant du 21 janvier 2017, « les résultats sont plus qu’excellents » et dépassent même les prévisions. Le taux de satisfaction varie entre 88 et 96 % selon les arrondissements (Coderre, 2017). L’édition 2017 du Programme d’implantation de rues piétonnes et partagées fonctionnera donc sur le même modèle que les précédentes. Au terme du processus de sélection, l’édition 2017 du programme sélectionne trois projets : celui de l’arrondissement de Sud-Ouest concernant les rues Saint-Ambroise et Atwater, celui de Verdun au sujet de la rue Wellington et finalement, celui du Plateau Mont-Royal concernant la rue Roy.

Dans le cadre de référence produit par la Ville de Montréal, il est spécifié que tous les arrondissements participants doivent procéder à « la mise en place d’un processus de consultation impliquant les citoyens et les différentes parties prenantes, dont les riverains et les commerçants (…) » (Ville de Montréal, 2017). Comme les trois projets présentés ont fait l’objet de consultations publiques, la présente étude se concentre précisément sur les échanges qui ont eu lieu en amont d’un de ces projets, celui de l’arrondissement Sud-Ouest articulé autour des rues Saint-Ambroise et Atwater.

Description du projet

Plan préliminaire

Le projet sélectionné dans le cadre du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées vise au départ deux rues (Saint-Ambroise et Atwater) du quartier Saint-Henri, qui forment l’intersection sud du Marché Atwater. Les deux rues mentionnées seront partiellement piétonnisées, en ce sens où elles deviendront des voies à sens unique, et le seront sur une base saisonnière pour la période estivale. Selon Benoit Dorais lors du dévoilement des programmes sélectionnés, pour la rue Saint-Ambroise, la piétonnisation s’étendra de la rue Bérard jusqu’à Atwater (65 m), alors que pour l’avenue Atwater la piétonnisation se fera sur 45 mètres, de Rufus Rockhead à Saint-Ambroise (Coderre, 2017). Le projet implique par ailleurs l’installation d’un espace de détente collectif.

Le marché maraîcher Atwater, occupé par plusieurs commerçants (fromagerie, poissonnerie, fruiterie) est un lieu identitaire important pour les gens de l’arrondissement Sud-Ouest et du quartier Saint-Henri, d’où le choix de cet emplacement pour implanter les rues piétonnes. Il est déjà le théâtre d’un très fort achalandage piétonnier et motorisé à l’année (Marchés publics de Montréal, s.d.). La piétonnisation partielle des rues adjacentes aura pour effet de sécuriser l’intersection, créant ainsi un environnement plus accueillant pour les piétons et cyclistes.

Le projet s’échelonne sur trois ans. La première année, la piétonnisation sera temporaire pour la période estivale; la seconde, des ajustements seront apportés aux installations; et la troisième, un processus sera mis en place pour rendre la piétonnisation et l’aménagement permanent pour l’année 2019.

Réalisation

Pour réaliser ce projet, l’organisme La Pépinière, spécialisé en installation d’espaces collectifs, a été mandaté par le conseil de l’arrondissement Sud-Ouest, en collaboration évidemment avec la Ville de Montréal. Une fois complété, le projet présente toutefois des différences avec le plan sélectionné au départ. Il n’a pas permis la piétonnisation partielle des deux rues prévues, mais a plutôt touché un tronçon seulement de la rue Saint-Ambroise Sud, raccourcie entre les rues Green et Atwater :

« La placette occupera moins de place que prévu lors de la consultation publique qui s’est tenue en mars. Dans les plans originaux, les rues Saint-Ambroise et Atwater étaient à sens unique afin qu’elles soient partiellement piétonnisées. Cette idée a fini par être écartée » (De Rosa, 2017).

Par ailleurs, le tronçon de la rue Saint-Ambroise où sera aménagée la Place du Marché n’implique plus une voie à sens unique, mais plutôt l’utilisation de la voie de stationnement (Dorais, 2017).

Le programme a par ailleurs permis l’installation d’un piano public, de placettes assises (placottoirs), d’une section familiale incluant aires de jeux et bibliothèque en plein air, ainsi qu’une section dédiée aux jardins collectifs, le tout géré par l’écoquartier Sud-Ouest. L’aire ainsi touchée par les travaux a été nommée la Place du Marché. Elle a été inaugurée le 23 juin 2017, et les lieux ont retrouvé leur aménagement régulier le 4 septembre 2017.

Enjeux

Environnement

Un des enjeux majeurs dans le cadre de la piétonnisation des rues environnant la Place du Marché est la protection de l’environnement. Plus précisément, la démarche s’intéresse à diminuer l’achalandage motorisé et donc à améliorer la qualité de l’air dans l’arrondissement.

Dans la grande région urbaine de Montréal, l’utilisation massive de l’automobile peut poser problème. En 2013 à Montréal, 916 655 véhicules motorisés sont recensés dans la métropole (Nardi, 2015), ce qui a un impact sur la qualité de l’air. Bien que les causes de pollution de l’air ne se limitent pas aux émissions causées par les automobiles, ces dernières contribuent à aggraver la situation.

En effet, il est démontré depuis longtemps qu’une concentration très élevée d’automobiles sur les routes augmente la quantité de gaz à effet de serre présent dans l’atmosphère. Ces gaz à effet de serre ont des effets nocifs : ils emprisonnent la chaleur dans l’atmosphère terrestre. Au lieu d’être réfléchie vers l’espace, la chaleur s’accumule à la surface de la terre, ce qui accélère l’apparition de grandes variations climatiques à l’échelle planétaire (Intergovernmental panel on climate, 1992).

À plus petite échelle, cette dégradation de la qualité de l’air vient affecter directement les citoyen-ne-s. En 2007 à Montréal, par exemple, plus de 40 journées où l’air était de mauvaise qualité ont été recensées, avec une concentration plus forte durant la période estivale (Réseau de surveillance de la qualité de l’air, 2007). Ces mauvaises conditions empêchent ainsi parfois les citoyens de jouir d’un environnement non pollué. Cela devient encore plus problématique durant l’été pour les Montréalais, alors que beaucoup optent pour le transport actif et les activités extérieures (Communauté métropolitaine de Montréal, 2017).

Ainsi, en augmentant la zone réservée uniquement aux piétons aux alentours du Marché Atwater, l’arrondissement limite l’utilisation de l’automobile et, par le fait même, limite la dégradation de la qualité de l’air.

Santé

Dans le cadre des échanges visant la piétonnisation de l’intersection Saint-Ambroise−Atwater, la santé est également un enjeu majeur quant à la prévention, par le transport actif, et la sécurité.

Le transport actif

Le Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées survient à la suite d’une longue réflexion préalable portant sur le transport actif où la marche est évidemment incluse. En mettant l’accent sur les modes de déplacements alternatifs à la voiture, Montréal espère « apporter une contribution à un problème de plus en plus préoccupant en matière de santé publique, la sédentarité et l’obésité » (Plan de Transport, 2007), un problème qui touche l’ensemble des citoyens.

Selon Stefan Reyburn, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré en 2007 que la population mondiale faisait face à une épidémie d’obésité. L’OMS a également ajouté en cette occasion que la pathologie touche surtout les sociétés occidentales et qu’elle est vraisemblablement causée par deux comportements : une mauvaise alimentation et un manque d’activité physique (Reyburn, 2010). Il est facile ici de constater que l’utilisation constante de la voiture pour les déplacements diminue le temps potentiel alloué à une activité physique.

Toujours selon Reyburn, trois éléments de la morphologie urbaine favorisent l’implantation d’habitudes de vie plus saines pour les résident-e-s. D’abord, les sources d’approvisionnement, comme les épiceries, marchés et dépanneurs; ensuite, les installations de loisirs, comme les parcs, les centres sportifs et récréatifs; et finalement, les systèmes servant au transport, « notamment les technologies et mobiliers pour faciliter les déplacements non motorisés et non mécanisés (…) » (Reyburn, 2010).

En créant davantage d’espaces collectifs piétonniers, la Ville de Montréal contribue à façonner un environnement propice à l’activité physique, ce qui a pour effet de diminuer la sédentarité. Cette prise de position vise à prévenir et à contrer les problèmes de santé pouvant survenir chez la population, notamment l’obésité. Puisque le Marché Atwater constitue déjà un centre urbain très fréquenté par les piétons, piétonniser les rues avoisinantes viendrait amplifier encore davantage ce phénomène, ce qui, vraisemblablement, aura des répercussions positives pour l’état de santé des gens de l’arrondissement.

La sécurité

Toujours en lien avec la santé, le Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées concerne la sécurité des piétons qui sont les utilisateurs de la route les plus vulnérables.

Entre 2011 et 2014, la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) et le Service de police de Montréal (SPVM) ont recensé 4 825 piétons blessés (Provost, 2016). La moyenne de piétons blessés par jour à Montréal pour cette période est de 4,4 : pour les piétons, le danger est réel, surtout aux endroits où ils croisent les automobilistes. De fait, en 2015, la SAAQ mentionnait, pour l’ensemble de la province, que plus de la moitié des accidents impliquant au moins un piéton blessé (55 %) se produisait aux intersections ou à moins de cinq mètres de celles-ci (SAAQ, 2016c).

Lors d’une consultation publique tenue par Solidarité Saint-Henri en 2012, les résidents ont pu se prononcer sur le fort achalandage de l’avenue Atwater : « Les intersections et les traverses piétonnes sur la rue Atwater sont dangereuses » (Solidarité Saint-Henri, 2016). Le projet de piétonnisation d’origine, touchant l’intersection de la rue Atwater, s’inscrivait donc à merveille dans une démarche préventive face aux accidents, en plus de constituer une réponse directe aux préoccupations des citoyen-ne-s.

Ainsi, en limitant les zones où les piétons et les automobilistes sont en contact, le nombre d’accidents impliquant au moins un piéton blessé devrait normalement diminuer autour de l’intersection Saint-Ambroise−Atwater. Cela corrobore également les faits énoncés par Stefan Reyburn dans son article consacré à l’urbanisme et l’environnement bâti, voulant qu’un développement de l’espace public favorable à la santé doive « protéger les gens des agressions physiques et violentes et des dangers de la circulation routière » (Reyburn, 2010).

Vie urbaine agréable

Un autre enjeu central dans le cas du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées est sans nul doute la qualité de vie. Deux aspects ont ici été développés : le stress encouru lors des déplacements et la consolidation du lien communautaire.

Stress

Que ce soit entre cyclistes et automobilistes (Kaplan, 2016), cyclistes et piétons ou encore automobilistes et piétons, partager la route n’est pas chose facile. L’achalandage, les risques encourus et l’abondance des stimuli constituent des sources de stress pour les citoyen-ne-s lors de leurs déplacements. Quoique le stress ait également des répercussions sur la santé, il a été classé ici sous les facteurs nuisibles à la qualité de vie, considérant sa forte fréquence. En effet, le stress engendré par les déplacements est un stress quotidien, vécu en moyenne deux fois par jour (heures de pointe du matin et du soir), ce qui affecte l’état d’esprit quotidien des personnes touchées.

Il apparaît que les utilisateurs réguliers de modes de transport actif, comme les piétons ou les cyclistes, ressentent en général moins fortement les effets du stress lié aux déplacements. Comme le mentionnent Legrain, Eluru et El-Geneidy dans leur publication de 2015 sur le commuting stress (stress lors des déplacements) : « Active commuters were the least likely to report being stressed during their commute. Drivers, on the other hand, were the most likely to report stress». Ainsi, pour les automobilistes, traverser des zones où sont présents de nombreux piétons augmente le niveau de stress (Kolowsky et al., 2013), de même que la peur d’être en retard (Legrain, Eluru et El-Geneidy, 2015).

Les piétons ne sont toutefois pas exempts de stress : la même étude soutient que «not feeling safe from traffic is positively related, which indicates that perhaps the most stressful possibility of the pedestrian experience is dealing with automobiles» (Legrain, Eluru et El-Geneidy, 2015).

Considérant que le Marché Atwater constitue déjà une zone de fort achalandage piéton, il est clair que de limiter les contacts entre les deux groupes atténuerait également le stress vécu, augmentant de ce fait le bien-être quotidien ressenti pour les marcheurs et les automobilistes.

Consolidation du lien communautaire

La consolidation du lien communautaire est un autre facteur qui affecte grandement la qualité de vie des citoyen-ne-s. Comme mentionné pour la première fois par la Charte du piéton en 2006, une des meilleures façons d’apprécier l’environnement urbain est de l’explorer par la marche. C’est dans cette optique que la Ville de Montréal, depuis 2006, œuvre non seulement à rendre les rues plus accueillantes, esthétiquement et sécuritairement parlant, mais aussi à « veiller à ce que la rue redevienne un lieu de rencontres et d’échanges » (Ville de Montréal, 2006).

L’évolution des infrastructures routières et l’omniprésence de l’automobile sur les réseaux routiers ont énormément contribué à enlever à la rue sa fonction d’espace social. Comme le mentionnait Véronique Bordes dans son article paru en 2006, « la rue peut être estimée comme espace public, un lieu privilégié pour les interactions (…). La rue possède une fonction de socialisation (…) » (Bordes, 2006). C’est donc d’abord pour redonner à la rue sa fonction socialisante que la Ville de Montréal offre aux arrondissements de réaménager certains secteurs en fonction de la marche : d’une part, en limitant l’accès aux véhicules motorisés et, d’autre part, en aménageant des espaces collectifs (placettes, tables de pique-nique, aires de jeux, etc.) ouverts à tous.

Ainsi, en étendant l’espace réservé aux marcheurs autour du Marché Atwater, l’arrondissement Sud-Ouest aider à mettre en place un milieu favorable à la socialisation et au renforcement du lien communautaire. Comme le marché joue un rôle identitaire important pour les résidents du quartier Saint-Henri, cela permet d’augmenter le sentiment d’appartenance et de bien-être.

Partage de l’espace public : accessibilité et achalandage

Le dernier enjeu relatif à la piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater, mais non le moindre, est celui qui concerne le partage de l’espace public et ses effets sur l’accessibilité et l’achalandage marchand. L’implantation de rues piétonnes soulève la question délicate du partage physique de l’espace alloué à chacun sur la route. Le projet questionne en effet la délimitation traditionnelle qui existe entre l’espace réservé aux piéton-ne-s et celui réservé aux automobilistes. Proposer un tel projet, c’est remettre en question les limites à l’intérieur desquelles chacun peut évoluer librement, c’est, finalement, remettre en question les droits de chacun.

Par exemple, si une rue traditionnellement partagée et très achalandée devient soudainement réservée uniquement aux piéton-ne-s, les automobilistes devront modifier leurs habitudes de vie : ils devront utiliser un nouvel itinéraire pour se rendre au travail, ils devront dénicher de nouveaux emplacements pour se stationner, ils devront dorénavant marcher pour se rendre à un commerce ou un restaurant précis, etc. Un réaménagement de l’espace réservé aux véhicules motorisés contribue donc à limiter l’accessibilité à certains services pour les automobilistes.

Dans le cas de la rue Saint-Ambroise, cette dernière est très achalandée; elle est prise d’assaut par les véhicules, cyclistes et piétons à longueur d’année. Pour sa part, l’avenue Atwater semble encore plus encombrée par la circulation que Saint-Ambroise. Le mémoire déposé par Solidarité Saint-Henri dans le cadre de la consultation du PDUES Turcot comporte d’ailleurs des preuves claires à cet effet : plusieurs intersections de la rue Atwater étant sujettes à des plaintes pour achalandage abusif et dangerosité (Solidarité Saint-Henri, 2016).

En acceptant les voies à sens unique sur ces deux rues, l’arrondissement diminuerait la place auparavant réservée à la voiture pour circuler, jugée abusive par les piéton-ne-s, ce qui aurait potentiellement pour effet de diminuer en partie l’accessibilité des automobilistes aux lieux situés à proximité. Pour les commerçant-e-s, cela pourrait avoir un impact négatif sur l’achalandage et leur chiffre d’affaires. D’un autre côté, toutefois, un tel réaménagement de la route permettrait d’en faciliter l’accès pour les résident-e-s, les piéton-ne-s et les cyclistes.

Acteurs publics

Ville de Montréal

La Ville de Montréal est évidemment une actrice centrale : elle est l’instance publique qui amorce le programme même. Représentée par le maire Denis Coderre, elle agit principalement en tant que levier financier pour le projet. Le cadre de référence mentionne en effet que la ville s’engage à fournir « une aide financière équivalente à 50 % des coûts du projet jusqu’à concurrence de 100 000 $ » (Ville de Montréal, 2017). Dans les faits, la Ville de Montréal a déboursé 100 000 $, tandis que l’arrondissement Sud-Ouest n’aura déboursé que 64 000 $, attribuant davantage à l’arrondissement que ce qui était prévu dans le cadre de référence (De Rosa, 2017a).

À l’intérieur du comité exécutif de la ville, la Direction des transports, composée notamment de monsieur Aref Salem, sera davantage impliquée dans les démarches du projet. Elle collaborera avec l’arrondissement Sud-Ouest pour apporter des modifications au projet préliminaire, mais aussi en tant qu’évaluateur du projet une fois celui-ci réalisé. L’évaluation de la réussite du projet sera faite selon des critères prédéfinis par la Direction des transports, mais concerne surtout le nombre de piétons ou l’achalandage des lieux.

Avantages

Pour la ville de Montréal, les avantages sont nombreux. D’abord, comme le programme a déjà été testé les années précédentes avec un haut taux de satisfaction, reproduire ce programme n’apporte que très peu de risques pour la ville qui réutilise une formule gagnante.

Ensuite, en impliquant davantage les conseils des arrondissements, la Ville limite son investissement dans les projets en termes de temps et d’efforts (Ville de Montréal, 2017).

Par ailleurs, la poursuite d’un tel programme a pour objectif l’amélioration des conditions environnementales, routières et de santé publique, ce qui s’avère bénéfique pour le bien-être global des habitant-e-s.

Finalement, en obligeant les arrondissements à sonder la population, la ville limite les remous et débats dans l’espace public venant des citoyen-ne-s : « Ayant suivi de près toutes les étapes du processus, (les citoyen-ne-s) comprennent et soutiennent davantage le projet d’aménagement final » (Direction des transports de Montréal, 2017).

Arrondissement Le Sud-Ouest

Pourvus eux aussi de maires-se-s, les arrondissements constituent un palier intermédiaire de la fonction publique, situé entre les conseils de quartier et les comités exécutifs de la Ville de Montréal. Dans la présente analyse, l’arrondissement impliqué est l’arrondissement du Sud-Ouest. Il est composé de cinq quartiers : Petite-Bourgogne−Griffintown, Saint-Henri, Pointe-Saint-Charles, Côte-Saint-Paul et Émard (Arrondissement Le Sud-Ouest, s.d.). Le projet de piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater concerne le quartier Saint-Henri. L’arrondissement regroupe plusieurs personnalités publiques, dont le maire, monsieur Benoit Dorais.

Les rôles de l’arrondissement Sud-Ouest sont nombreux et très bien définis dans le cadre du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées. Viennent en premier lieu les rôles procéduraux tels que la mise en place d’une équipe de projet, la participation active aux rencontres de démarrage et, évidemment, la réalisation des aménagements. En second lieu, l’arrondissement doit aussi remplir des rôles au niveau de la communication : il est responsable de mettre en place les consultations publiques auprès des acteurs et actrices, de présenter le projet à la Direction des transports pour commentaires et d’informer les responsables du programme des développements.

Avantages et désavantages

L’arrondissement est (presque) entièrement responsable du bon déroulement du projet. Cela peut s’avérer avantageux pour lui si le projet est effectivement bien accueilli par la population, mais à l’inverse, si le projet déplaît, il sera le premier à être pointé du doigt par la population. D’un autre côté, considérant le succès évident des années précédentes, il n’a que très peu de risques à prendre avec le Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées.

Institut du Nouveau Monde : acteur externe

Créé en 2003, l’institut du Nouveau Monde (INM) est un organisme non partisan qui vise principalement à augmenter l’intérêt et la participation des citoyen-ne-s aux activités démocratiques (Institut Nouveau Monde, 2014). L’INM renseigne entre autres les citoyen-ne-s sur les moyens mis à leur disposition pour se faire entendre et prendre part aux prises de décisions; il s’assure de plus de la qualité et l’accessibilité des espaces de délibération. Depuis son lancement officiel en 2004, il a aidé à faire valoir la contribution des citoyen-ne-s sur des questions plutôt délicates, notamment les accommodements raisonnables (Institut Nouveau Monde, 2014). La réputation de l’organisme dans le milieu politique n’est plus à faire.

L’arrondissement Sud-Ouest a fait appel aux services de l’Institut du Nouveau Monde pour mener à bien ses consultations citoyennes. Son rôle était de superviser l’ensemble des consultations prévues afin de fournir des espaces délibératifs représentatifs, transparents et inclusifs pour la population montréalaise. Le contrat donné à l’INM représentait 25 000 $ (ICI Radio-Canada, 2016).

Avantages et risques

Le cas de l’INM est particulier : l’organisme se voulant une entité non partisane, il n’a théoriquement aucun avantage à s’impliquer dans une telle cause, si ce n’est celle de faire valoir sa neutralité et son professionnalisme.

Acteurs civils

Les résidents du quartier Saint-Henri

Le quartier Saint-Henri est délimité par l’autoroute 720, le canal Lachine et l’avenue Atwater. Les résident-e-s du quartier sont les acteurs et actrices les plus directement touché-e-s par le projet qui affectera leurs déplacements, leur sécurité et leur qualité de vie. Une certaine homogénéité prédomine parmi les résident-e-s du quartier en ce qui concerne les questions de l’aménagement urbain, comme les épisodes de mobilisation citoyenne concernant l’échangeur Turcot ont pu en témoigner. De 40 à 64 % des ménages du quartier ne possèdent pas d’automobiles, comme le démontre une carte du Mémoire de 2016 produit par Solidarité Saint-Henri (Solidarité Saint-Henri, 2016). Une majorité des résidents se déplace donc à pied ou en transport en commun.

Avantages et désavantages

Le projet de piétonnisation partielle de l’intersection Saint-Ambroise−Atwater s’avère avantageux pour les résidents : il favoriserait la socialisation, augmenterait la sécurité des lieux et des déplacements et consoliderait le sentiment d’appartenance au quartier. Selon le maire de l’arrondissement Sud-Ouest, le projet permettrait également de rendre l’espace aux piétons et aux cyclistes, tout en désengorgeant Saint-Ambroise et Atwater (Coderre, 2017).

Les commerçant-e-s et restaurateurs et restauratrices

Le Marché Atwater foisonne d’activités commerciales : poissonniers, bouchers, producteurs maraîchers, fleuristes et bien d’autres se partagent l’espace du marché. Ces acteurs et actrices sont la raison d’être du Marché.

Avantages et désavantages

Selon le maire Denis Coderre, le Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées, parce qu’il dynamise l’achalandage piétonnier, viendrait aussi dynamiser le commerce de proximité (Coderre, 2017). À l’inverse toutefois, pour les commerçants, une diminution des véhicules dans le secteur pourrait signifier une baisse de leur chiffre d’affaires. Dans un bref article paru dans la Voix Pop du Sud-Ouest, le maire Benoit Dorais y est cité : « Quand on est allés voir les commerçants après la consultation, ils étaient inquiets » (De Rosa, 2017a). Cette diminution potentielle de l’achalandage pourrait en partie expliquer cette inquiétude des commerçant-e-s. Il est en effet difficile de prévoir avec exactitude quels seront les effets d’une diminution de l’espace réservé aux voitures.

Les piéton-ne-s

Les piétons sont définis ici comme étant les usagers des aménagements de la nouvelle Place du Marché. Ils peuvent être des usagers réguliers ou ponctuels des installations. Les piétons jouent un rôle important dans le processus d’évaluation du projet par la Direction des transports, car leur concentration plus ou moins forte sera déterminante pour juger de la réussite du projet (de l’achalandage).

Avantages

La piétonnisation, qu’elle soit totale, permanente ou partielle importe peu; elle met le piéton au cœur de ses priorités. Que ce soit au niveau de la sécurité, du stress lors des déplacements, du partage de l’espace public, de la santé ou encore au niveau de la socialisation qui s’opère, le piéton usager de la voie publique sort gagnant d’une telle démarche.

Les automobilistes

Dans le cas de la piétonnisation de l’intersection Saint-Ambroise−Atwater, les automobilistes représentent principalement des personnes non résidentes du quartier, en transit vers le travail ou autre. En effet, parmi les résidents du quartier Saint-Henri, « 60 % (…) se rendent au travail à pied, à vélo ou en transport commun » (Solidarité Saint-Henri, 2016). Les automobilistes sont ainsi majoritairement composés de gens qui n’habitent pas le secteur. Leur omniprésence sur les grandes artères du quartier constitue une source d’inconfort grandissante pour les résident-e-s.

Avantages et désavantages

Il a été vu plus haut que de limiter les espaces de contact entre piétons et automobilistes contribuait à diminuer le stress, notamment pour les conducteurs (Kolowsky et al., 2013). Par ailleurs, un désavantage évident du projet est celui de la perte d’espace accordé aux déplacements motorisés sur Atwater et Saint-Ambroise (Ville de Montréal, 2017).

Espaces délibératifs : les moyens

Le maire Benoit Dorais lance en 2016 une grande campagne de consultation citoyenne, « Imaginons ensemble l’avenir du Pôle Lionel-Groulx » (ICI Radio-Canada, 2016). La consultation publique d’envergure visera différents axes de développement sensibles pour l’arrondissement quant à l’aménagement urbain, le transport, les infrastructures routières et la qualité de vie des résident-e-s. Elle impliquera donc, sans s’y limiter toutefois, le projet de piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater. Les membres de l’arrondissement responsables de la démarche de consultation publique sont Marie-Hélène Breault, conseillère en aménagement, Sylvain Villeneuve, directeur de l’Aménagement urbain et du patrimoine, et Denise Paré, chargée de communication (Institut du Nouveau Monde, 2017). Cette campagne regroupe plusieurs moyens visant à recueillir la vision des citoyens, qui seront exposés dans les sections ci-dessous.

Faire appel à une entité neutre : l’Institut du Nouveau Monde

La grande campagne de consultation citoyenne qui prendra place en 2016 ne sera pas prise en charge par les responsables de l’arrondissement ni par les citoyens eux-mêmes. La campagne sera supervisée par l’Institut du Nouveau Monde. Les membres impliqués dans la démarche sont les suivants : Liane Morin, chargée de projet, Malorie Flon, conseillère stratégique, Anouk Lavoie-Isebaert, agente de projet, Sophie Séguin, directrice des communications, et Pamela Daoust, chargée de communication (Institut du Nouveau Monde, 2017). Le mandat de l’INM requiert de l’organisme, en plus de faire preuve de neutralité envers les partis concernés, qu’il procède à une collecte objective des réponses citoyennes. Tel que mentionné dans le Rapport de consultation Lionel-Groulx-Atwater 2017 : « (…) le mandat confié à l’INM n’incluait pas de vérifier si les commentaires des citoyens s’appuyaient sur des données scientifiques indépendantes ni d’en faire une évaluation factuelle. De même, il n’appartenait pas à l’INM de porter un jugement sur la pertinence des commentaires faits par les citoyens, mais d’en faire la synthèse tout en faisant ressortir les tendances et les convergences » (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Ateliers de discussions

Deux ateliers de discussions sont tenus durant le mois de juin 2016, soit respectivement les 21 juin en soirée et le 22 juin en après-midi. Au cours de ces ateliers, des citoyen-ne-s et des organisations devaient se prononcer sur trois thèmes concernant l’avenir du pôle Lionel-Groulx-Atwater : le patrimoine et l’utilisation des espaces, les déplacements et la mobilité, ainsi que la vitalité urbaine, économique et sociale. Une cinquantaine de participant-e-s se sont présenté-e-s pour participer aux ateliers. Vingt-et-un participant-e-s représentaient des organisations, alors que les 29 autres sont venus en tant qu’acteurs et actrices civil-e-s (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Consultations de rue

Quatre consultations de rue ont également eu lieu au cours de l’été 2016. La première, tenue le samedi 16 juillet 2016, de 14 h à 16 h au Parc du Premier-Chemin-de-Fer; la seconde a pris place le jeudi 4 août 2016, de 16 h à 18 h, et était située dans l’espace vert jouxtant le métro Lionel-Groulx; la troisième consultation s’est produite le samedi 6 août 2016, de 10 h à 12 h au parc Vinet; finalement, la quatrième consultation s’est tenue près du canal de Lachine, le samedi 6 août 2016, de 14 h à 16 h au Marché Atwater (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Les consultations, menées par deux animateurs, proposaient trois jeux participatifs : l’élection nomade (voter pour un candidat fictif de son choix), le jeu des priorités (prioriser des options pour le réaménagement de l’axe Atwater) et le photomaton (photos avec forces et faiblesses du pôle Lionel-Groulx–Atwater). Au total, ces consultations auront touché 137 personnes (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Espace virtuel

Plus de 215 « J’aime » pour la page Facebook ont été recensés depuis son activation, le 7 juin 2016. Ouverte aux interventions du public pendant un peu plus d’un mois, chaque semaine la page proposait aux participant-e-s de délibérer sur une question spécifique. L’initiative virtuelle a impliqué une trentaine de participant-e-s qui ont alimenté les discussions grâce à près d’une quarantaine de commentaires (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Événement festif participatif

Sept animateurs se sont assuré du bon déroulement d’un événement festif participatif le 13 septembre 2016. Situé dans le parc des Marchands-de-Bois, aux abords du canal de Lachine, l’événement proposait aux participant-e-s de répondre à un questionnaire. Lors de l’événement, il était aussi possible pour les personnes présentes d’identifier à l’aide de cartes les endroits jugés problématiques pour la sécurité et de partager leurs idées sur les améliorations à apporter. Au total, 116 personnes ont pris part à l’événement et ont manifesté leurs opinions (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Échéancier de la démarche

  • Le 7 juin 2016, les démarches de consultations publiques sont enclenchées par l’Institut du Nouveau Monde, via l’activation de la page Facebook.
  • Les 21 et 22 juin 2016 sont tenus les deux ateliers de discussions.
  • Les 16 juillet, 4 août et 6 août 2016, quatre consultations de rues ont pris place (dont deux le 6 août). Les lieux ciblés pour les consultations étaient significativement liés aux questionnements de la démarche.
  • En janvier 2017, le maire Denis Coderre et les maires des arrondissements concernés dévoilent les projets sélectionnés dans le cadre du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées. Le tronçon à piétonniser sur Saint-Ambroise est de 65 m (rue Bérard jusqu’à l’intersection Atwater); celui sur Atwater sera de 45 m (rue Rufus Rockhead jusqu’à l’intersection Saint-Ambroise).
  • En mars 2017, La Pépinière tient trois séances publiques sur la nature des aménagements, ainsi que l’animation des lieux (La Pépinière).
  • En mai et juin 2017, les travaux sont mis en branle aux abords du Marché Atwater.
  • En juin 2017, un article paru dans la Voix Pop du Sud-Ouest mentionne que la piétonnisation partielle (voie à sens unique) de Saint-Ambroise et Atwater a été écartée. Pas d’autres mentions sur le sujet.
  • Le 23 juin 2017, la Place du Marché est inaugurée. Le tronçon de Saint-Ambroise n’est pas à sens unique, mais est plutôt piétonnisé sur la voie de stationnement allant de la rue Green à l’intersection Atwater.
  • Les 2 et 3 septembre 2017 ont lieu les fêtes de clôture de la Place du Marché.
  • Le 4 septembre 2017 est la date officielle de la fin du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées. Les lieux sont en voie de trouver leur état normal.
  • Le 6 octobre 2017, un sondage sur l’appréciation est lancé par La Pépinière.

Effets et retombées

Résultats et recommandations citoyennes

Au total, selon l’Institut du Nouveau Monde :

« Trois cent trente-trois personnes, citoyens ou représentants d’une organisation, provenant principalement de l’arrondissement et, dans une moindre mesure, des arrondissements situés en périphérie (voir graphiques de provenance à la page précédente), ont participé à l’une ou l’autre des activités » (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Après compilation des réponses citoyennes, l’Institut du Nouveau Monde fait la synthèse des idées reçues et produit son Rapport de consultation. Dans ce rapport, quatre axes majeurs sont définis comme étant prioritaires pour l’ensemble des habitant-e-s du secteur Sud-Ouest en lien avec l’avenir du pôle Lionel-Groulx Atwater : la sécurité, la convivialité, l’identité communautaire et les besoins de la population. Dans le cas du projet de piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater, seuls les trois premiers axes sont significatifs, le quatrième relevant davantage de la question des logements habitables (Institut du Nouveau Monde, 2017). Les trois axes qui concernent le projet prendront la forme de recommandations diverses dans le rapport de l’INM.

La sécurité

Le point de vue des citoyens est clair à cet effet. Les intersections de la rue Atwater en particulier demandent des mesures correctives en raison de la circulation importante de véhicules et d’un aménagement lacunaire pour les piétons (temps pour traverser trop courts ou traverses manquantes).

Par ailleurs, concernant spécifiquement le secteur du Marché Atwater, les réponses des citoyen-ne-s mettent en lumière le désir commun de « revoir l’équilibre du partage de la chaussée sur l’avenue Atwater et près du marché en faveur des transports actifs, sans nécessairement compromettre les places de stationnement disponibles » (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Cela implique donc un point de vue quelque peu contradictoire de la part des citoyen-ne-s concernant le projet Place du Marché; d’un côté, ils et elles sont en faveur d’une piétonnisation partielle ou autre des voies, mais de l’autre, ils et elles désirent également conserver un accès aux espaces de stationnement.

La convivialité

Le second axe dont les recommandations sont applicables au projet de piétonnisation est celui de la convivialité; ici, les citoyen-ne-s ont déclaré préférer que l’emphase soit mise sur l’aménagement de structures favorables aux piétons telles que du mobilier (bancs, espaces alloués à la végétation). Ils aimeraient également que les espaces qui seront alloués aux piétons soient le théâtre de plusieurs activités d’animation destinées à des publics de tout acabit.

L’identité communautaire

Les participants ont été unanimes quant à l’importance du Marché Atwater sur le plan identitaire. Pour le deux tiers des participant-e-s, l’unicité du secteur résidait dans l’attrait du canal Lachine et du Marché Atwater. Les suggestions des citoyen-ne-s à l’égard du Marché sont donc d’en renforcer l’attrait par un meilleur entretien et des aménagements plus accueillants (Institut du Nouveau Monde, 2017).

Recommandations retenues

En regard du projet préliminaire, présenté le 17 janvier 2017, les recommandations émises par les citoyen-ne-s qui ont été prises en compte sont les suivantes :

  1. Sécurisation d’une intersection sur l’avenue Atwater (Atwater−Saint-Ambroise)
  2. Partage revu des rues près du Marché Atwater (sens uniques Saint-Ambroise−Atwater)
  3. Conservation des emplacements de stationnement
  4. Création d’un espace favorable aux piétons (mobilier et végétation)
  5. Création d’un espace public animé
  6. Emphase mise sur le Marché Atwater (entretien et point d’intérêt)

En regard du projet effectif, inauguré le 23 juin 2017, les recommandations émises par les citoyen-ne-s qui ont été prises en compte sont les suivantes :

2. Partage revu des rues près du Marché Atwater (voie de stationnement sur Saint-Ambroise)

4. Création d’un espace favorable aux piétons (mobilier et végétation)

5. Création d’un espace public animé

6. Emphase mise sur le Marché Atwater (entretien et point d’intérêt)

Il est possible de constater que les points 1 et 3 n’ont pas pu être appliqués. La sécurisation de l’intersection n’est plus possible sans la piétonnisation du tronçon Atwater, alors que la nouvelle configuration de la Place du Marché dans la voie de stationnement sur Saint-Ambroise empiète sur la recommandation 3 (conservation des emplacements de stationnement), diminuant de ce fait les emplacements de stationnement.

Divergences : hypothèses

Il y a trois divergences majeures entre les plans préliminaires annoncés en janvier 2017 et la réalisation. La première est la piétonnisation du tronçon Atwater, qui sera écartée complètement dans le projet final. La seconde est celle de la longueur du tronçon de la rue Saint-Ambroise, qui sera raccourci. La troisième, toujours concernant la rue Saint-Ambroise, concerne la piétonnisation partielle prévue : au lieu d’être à sens unique sur ce tronçon, la piétonnisation vise plutôt l’« occupation estivale de la voie de stationnement côté Sud de Saint-Ambroise » (Benoit Dorais, 2017).

Une fois terminée, la piétonnisation ne touche donc que Saint-Ambroise, alors qu’à priori il incluait aussi un tronçon d’Atwater. Au final, le tronçon de la rue Saint-Ambroise s’étendra de l’intersection Atwater jusqu’à Green au lieu de la rue Bérard, tel qu’annoncé lors du dévoilement des projets de rues piétonnes et partagées, le 17 janvier 2017.

« La placette occupera moins de place que prévu lors de la consultation publique qui s’est tenue en mars. Dans les plans originaux, les rues Saint-Ambroise et Atwater étaient à sens unique afin qu’elles soient partiellement piétonnisées. Cette idée a fini par être écartée » (De Rosa, 2017a).

Opposition potentielle des commerçants

Il semble que les commerçants-tes aient pu jouer un rôle dans cette diminution importante des tronçons à piétonniser, quoiqu’il n’y ait pas d’informations précises à ce sujet. Le maire Benoit Dorais mentionne dans un article paru dans La Voix Pop du Sud-Ouest : « Quand on est allés voir les commerçants après la consultation, ils étaient inquiets, fait savoir le maire de l’arrondissement, Benoit Dorais. C’est dommage, on ne livrera pas ce qu’on avait en tête, mais on est très fiers de présenter un projet qui est tout de même ambitieux et emballant » (De Rosa, 2017a).

Les marchand-e-s ont ainsi communiqué leur inquiétude, mais la nature de cette inquiétude demeure obscure. S’agit-il d’une inquiétude reliée à la restriction de circulation sur Atwater et Saint-Ambroise? S’agit-il d’une inquiétude quant au changement que le projet risquait d’apporter à l’achalandage du marché? Il est difficile de le déduire d’après l’article de la Voix Pop du Sud-Ouest, mais cette hypothèse est à considérer.

Contradiction : prise de décision cachée?

Dans la conférence de presse qui a eu lieu le 17 janvier 2017, le maire Benoit Dorais annonce les tronçons de Saint-Ambroise et Atwater qui seront piétonnisés (Coderre, 2017). En réponse à un journaliste, il mentionne off mic qu’un tronçon s’étendant d’Atwater à la rue Bérard, pour un total de 65 mètres pour la rue Saint-Ambroise; ainsi qu’un tronçon de Rufus Rockhead à Saint-Ambroise sur Atwater, pour un total de 45 mètres, sera aménagé.

Pourtant, dans le communiqué rédigé trois jours plus tard, soit le 20 janvier 2017, et paru sur la page de l’arrondissement Sud-Ouest, les propos du maire sont cités comme suit : « La Ville a retenu notre projet sur Saint-Ambroise, de Green à Atwater et d’Atwater à Rufus-Rockhead (…) » (Arrondissement Le Sud-Ouest, 2017a). Le tronçon Saint-Ambroise présenté précédemment était plus long que celui présenté dans le communiqué du 20 janvier 2017. Ces dernières mesures pour le tronçon Saint-Ambroise seront celles qui prévaudront lors de la réalisation du projet. Il est difficile de savoir avec exactitude si cette contradiction est le fruit du hasard ou d’un mécanisme décisionnel autre, caché du public.

Friction politique

En décembre 2016, Benoit quitte les rangs de Coalition Montréal. Plusieurs partis lui tendent alors la main, dont celui du maire Denis Coderre. Monsieur Dorais optera pour Projet Montréal en mai 2017 (ICI Radio-Canada, 2017), « une décision qui a semblé froisser le maire de Montréal, à quelques mois des élections municipales » (Marceau, 2017). Selon le maire Denis Coderre, monsieur Dorais aurait d’abord accepté de se joindre à l’équipe Coderre, puis aurait par la suite changé de camp. L’article de Julie Marceau paru le 2 juin 2017 décrit l’attitude plutôt froide des deux politiciens l’un envers l’autre (Marceau, 2017).

À ce moment, le projet de piétonnisation est en voie d’être entamé aux abords du Marché Atwater. Le mécontentement évident de Denis Coderre à la suite du refus de Benoit Dorais de se joindre à son équipe aurait pu affecter son attitude face au projet. Denis Coderre aurait pu, par exemple, altérer la version originale du projet de piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater afin de susciter le mécontentement des résidents-tes du Sud-Ouest, notamment en écartant complètement le tronçon Atwater qui représente une plus grande valeur ajoutée pour les citoyen-ne-s à cause de sa dangerosité. Cela aurait eu comme impact hypothétique de nuire au capital-sympathie de Benoit Dorais pour les élections municipales de novembre 2017.

Évaluations : achalandage et taux de satisfaction

Le rapport de la Direction des transports de Montréal n’est pas encore disponible, étant donné que le projet Place du Marché est très récent (clôture le 4 septembre 2017). De son côté, l’organisme la Pépinière, en charge de la page Facebook Place du Marché, vient tout juste de lancer un appel à l’évaluation du projet, le 6 octobre dernier (La Pépinière, 2017a).

Il est donc difficile actuellement de voir avec précision quel est le taux de satisfaction des utilisateurs et utilisatrices de la plateforme, et les effets sur l’achalandage et le commerce de proximité, car ces éléments sont en train d’être mesurés.

Toutefois, il est possible d’estimer en partie la popularité de la Place du Marché en examinant la portée de la page Facebook, puis de faire état de l’appréciation par les gens de l’arrondissement en analysant les résultats des élections municipales de novembre dernier.

Page Facebook

Avec 661 mentions « J’aime » et 698 personnes qui suivent les actualités de la page, la Place du Marché connaît un succès relativement intéressant considérant sa création en mars 2017. Depuis, 23 événements ont été publiés, notamment trois consultations publiques concernant spécifiquement les aménagements et l’implication des organismes dans l’animation de la place.

Toujours selon la page Facebook, lors de la soirée d’inauguration, 157 personnes ont participé; un achalandage plutôt faible est enregistré pour les événements hebdomadaires, tandis que les événements ponctuels comme le Marché Vintage et d’Artisans de Saint-Henri (351 invités-e-s), ainsi que l’événement Atwater à la Plage (157 invités-e-s), attirent beaucoup plus de participant-e-s. Ces données ne permettent pas d’avoir une idée exacte du nombre de personnes présentes sur les lieux, mais suggèrent que la Place a su, à certains moments, accueillir un nombre important d’utilisateurs et utilisatrices (La Pépinière, 2017b).

Élections 2017

Les résultats obtenus aux dernières élections, sans démontrer de liens de cause à effet directs avec le projet, permettent toutefois de mesurer s’il y a une variation dans l’appréciation citoyenne globale à l’endroit du maire Benoit Dorais.

Ayant été élu maire de l’arrondissement Sud-Ouest en 2009 sous la bannière de Vision Montréal, puis réélu en 2013 sous Coalition Montréal (ICI Radio-Canada, 2017a), il est possible de dégager une tendance chez l’électorat de l’arrondissement Sud-Ouest : les électeurs-trices de l’arrondissement votent pour Benoit Dorais, et non en fonction du parti auquel il appartient. Au sein de l’arrondissement, une appréciation marquée pour le maire semble donc préexister.

En décembre 2016, monsieur Dorais annonce qu’il deviendra conseiller indépendant et renonce à son association avec Coalition Montréal (Leduc, 2016). Après s’être fait offrir une place dans l’équipe Coderre, qu’il refuse, en mai 2017, il se joint au Projet Montréal (ICI Radio-Canada, 2017a). Lors des résultats de l’élection du 5 novembre dernier, la tendance se maintient et il est élu pour un troisième mandat, sous une troisième bannière.

Il est possible de déduire que l’entrée en force de Projet Montréal dans l’arrondissement Sud-Ouest en novembre 2017 reflète une appréciation inchangée face au maire. Ainsi, bien qu’il ne soit pas possible de mesurer exactement si le projet de piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater a fait augmenter le taux de satisfaction des citoyen-ne-s à l’égard du maire, il est toutefois juste d’affirmer que cet événement a occasionné une appréciation positive et plutôt unanime à l’endroit du maire Dorais.

Cette appréciation des résidents-tes pour le maire Dorais pourrait également expliquer le très grand pourcentage de voix en faveur de Valérie Plante (LaPresse, 2017), considérant que cette dernière a affirmé le 1er novembre 2017 que Benoit Dorais sera nommé « président de son comité exécutif » (ICI Radio-Canada, 2017) si elle est élue. Ainsi, en votant en masse pour la candidate de Projet Montréal, les citoyen-ne-s choisissent encore par la bande leur représentant Benoit Dorais pour les servir au-delà de l’arrondissement.

Retour critique sur la démarche de consultation

Les points faibles

Manque d’orientation de la démarche de consultation

Les consultations ont été tenues dans le cadre d’un projet très vaste, tout l’axe Lionel-Groulx-Atwater. Cela impliquait entre autres des questions portant sur la circulation globale du secteur, la signalisation, le transport en commun (métro et autobus), les logements, les centres alimentaires, etc. Toutes ces questions ne visent pas directement le projet de piétonnisation. Ce dernier y est compris, mais ne constitue pas le cœur de la démarche. Dans le cadre d’une consultation aussi large, il est difficile d’orienter avec précision l’attention des participants-es sur un élément particulier. Cela peut contribuer à faire perdre le projet de vue au milieu des propositions mises sur la table, ou encore à moins bien en saisir et retenir les limites.

Ce trop grand nombre de préoccupations mises au programme pourrait expliquer par exemple l’absence de rétroactions citoyennes face aux changements apportés au plan préliminaire. La diminution des places de stationnement causée par l’aménagement de la Place du Marché n’a en effet soulevé ni commentaires ni plaintes de la part de la population, bien que cela ait été à l’encontre des recommandations émises lors de la période de consultation. En incluant le projet dans un vaste ensemble de considérations, ce dernier devient moins central dans l’esprit des participants-es, ce qui peut affecter l’intérêt qui lui est porté et la rétention d’information à son sujet.

Changements non annoncés

Les modifications qui ont été portées au projet n’ont pas fait l’objet d’une annonce officielle à la population (type communiqué ou autre). Un seul article est paru sur le sujet, « La Place du Marché prend forme », écrit par Nicholas De Rosa et publié en ligne en juin 2017. Pour continuer le processus de façon transparente, il aurait fallu présenter à la population les modifications du plan préliminaire. Cela aurait démontré un désir de poursuivre le dialogue entre l’arrondissement et la population.

Les points forts

Échéanciers

Les consultations ont été menées près d’un an en amont, ce qui favorise la création d’un espace de dialogue libre de contraintes temporelles. Les citoyen-ne-s ne sont pas bombardé-e-s ou pressé-e-s par les instances publiques dans leur processus d’expression, ils peuvent prendre conscience du débat dans un contexte calme et posé, voire même de détente et de festivités, comme dans le cas de l’événement festif participatif (Institut du Nouveau Monde, 2017).

De plus, en menant les consultations à l’avance, l’arrondissement se donne une marge de manœuvre suffisante pour rectifier les aménagements proposés si besoin est. Cela permettra notamment à l’organisme La Pépinière de mettre d’autres démarches consultatives en branle en mars 2017, cette fois-ci concernant les aménagements de la Place du Marché et son animation (La Pépinière, 2017a). De plus, le fait d’ouvrir l’espace de dialogue entre l’arrondissement et la population permet de rassurer cette dernière face aux changements qui seront apportés à son environnement.

En somme, donner aux citoyen-ne-s un espace de délibération situé suffisamment en amont d’un projet dans le temps permet une participation plus naturelle, tout en laissant aux instances publiques et à leurs collaborateurs une flexibilité plus grande quant aux modifications à apporter en cours de route. Cela permet en outre de rassurer la population quant au projet en cours. En ce sens, il est clair que la temporalité a joué ici un rôle clé dans les démarches de consultations publiques.

Consultations plurimodales

Selon Liane Morin de l’INM, un des points forts de la démarche était l’utilisation de plusieurs modes consultatifs. L’INM a de cette façon pu recueillir le point de vue d’un grand nombre de personnes. Les commentaires recueillis démontrent également une grande diversité, considérant qu’ils provenaient de lieux variés, physiques ou virtuels.

La nature des consultations a également permis de cibler différents intérêts chez les participants-es. Elle mentionne entre autres que les ateliers de discussion ont su attirer ceux qui s’intéressaient davantage à la planification urbaine. Par ailleurs, les consultations de rue ont permis de tâter le pouls de plusieurs passants, et même d’en informer certains qui n’étaient pas au courant de la démarche.

L’utilisation de plusieurs modes consultatifs a donc eu un effet positif sur la participation citoyenne en augmentant les points de contact entre la population et l’organisme, et en proposant des contenus d’intérêts variés. Cela a aussi permis de jouer un rôle communicationnel important en informant la population sur la rue.

Entité non partisane

Les acteurs et actrices impliqué-e-s, que ce soit au niveau public ou civil, ont tous des préoccupations qui les poussent à préférer certaines options à d’autres. Afin de mener à bien ces consultations dans une plus grande neutralité, le maire Benoit Dorais a fait appel à l’INM, un acteur externe non partisan. Cela rend les démarches de participation citoyenne plus transparentes. Par là, le maire de l’arrondissement Sud-Ouest démontre que son intention est d’abord et avant tout d’entendre la voix de ses citoyen-ne-s et d’éviter un biais.

Conclusion

La présente étude de cas, portant sur la piétonnisation des rues Saint-Ambroise et Atwater dans le cadre du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées, s’inscrit dans un contexte social particulier. Plusieurs initiatives précédentes de la Ville, notamment le Sommet de Montréal en 2002 et la Charte du Piéton en 2006, ont su orienter les discussions publiques en faveur du transport actif et de ses enjeux, ce qui facilite la réception initiale du projet auprès des acteurs et actrices.

Les acteurs publics, ici la Ville de Montréal (dont fait partie la Direction des transports) et l’arrondissement Sud-Ouest, jouent respectivement les rôles de leviers financiers et de responsables directs du projet. L’arrondissement Sud-Ouest est également l’instance qui mettra en branle la démarche de consultation publique à l’endroit des acteurs et actrices civil-e-s, soit les résident-e-s, les commerçant-e-s, les piéton-ne-s et les automobilistes.

La démarche consultative est menée par un organisme externe, l’Institut du Nouveau Monde, qui propose quatre modes de consultations : virtuel (Facebook), des ateliers de discussion, des consultations de rue et un événement festif participatif. En regard des nombreuses recommandations des citoyen-ne-s, l’arrondissement en appliquera six au plan préliminaire du projet dévoilé en janvier 2017 : la sécurisation d’une intersection (Atwater-Saint-Ambroise), la révision du partage des rues, la conservation des emplacements de stationnement, la création d’un espace favorable aux piétons, la création d’un espace public animé et la mise en valeur du Marché Atwater. Dans les faits, deux de ces recommandations ne seront pas appliquées, soit la sécurisation d’une intersection et la conservation des emplacements de stationnement, sans causer toutefois de mécontements observables.

Les procédés d’évaluation officielle du projet au niveau de l’achalandage et de l’appréciation, menés par la Direction des transports et l’organisme La Pépinière, sont actuellement en cours. Toutefois, l’observation de la page Facebook et du résultat des dernières élections permet d’estimer un achalandage appréciable à certains moments, et une appréciation globale positive.

En somme, dans le cas ci-présent, la démarche consultative a été bien menée. La démarche comporte en effet deux points faibles contre trois points forts. Ces derniers relèvent de l’échéancier de la démarche, situé très en amont dans le temps, de la plurimodalité des consultations et de l’utilisation d’une entité externe non partisane. Ces éléments ont permis de mettre en lumière les préoccupations des citoyen-ne-s, autour desquels l’arrondissement a su bâtir un projet représentatif et innovant. Par-dessus tout, la démarche de l’arrondissement a laissé transparaître un désir de sonder l’opinion des citoyen-ne-s avec transparence et objectivité.

Pour compléter la présente étude de cas, il faudra éventuellement documenter de quelles façons les résultats des évaluations officielles influenceront les phases subséquentes du Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées, prévues pour l’année 2018 et 2019. De même, il restera à voir si les aménagements futurs situés aux abords du Marché Atwater continueront d’être modelés par les échanges constructifs issus des espaces de consultation publique.

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Négocier l'acceptabilité sociale, un enjeu de citoyenneté Droit d'auteur © 2018 par Marc Jeannotte est sous licence Licence Creative Commons Attribution 4.0 International, sauf indication contraire.